25 Rova 4718, dans la journée - Village de Yin-Se, atelier du forgeron

Lorsque l'occasion se présenta, et puisqu'elle n'avait rien de mieux à faire pour l'instant, Jane retourna jusqu'à l'atelier de Wolfram Yamae, le forgeron du village.
La forge était facilement repérable grâce à la fumée gris pâle crachée par la cheminée. L'atelier lui même était incroyablement net et bien tenu, chaque chose clairement à sa place du au fruit d'une longue pratique. Sur une étagère et dans un ratelier étaient rangés les objets à réparer, tandis qu'un autre couple étagère/ratelier supportait les outils de l'artisan.

Une grande cuve d'eau alimentée par la rivière se trouvait dans un coin, et une enclume tronait au centre de la forge. Au fond de la pièce, la forge elle même rougeoyait, et sa lumière paraissait presque dorée dans l'après midi déclinant. Une statue de fer forgé, représentant une femme à l'expression douce, vêtue d'un kimono, et portant dans une main une gerbe de blé, dans l'autre un marteau, était la seule véritable décoration du lieu, outre une armure dans le style Tian Min sur un râtelier.


Le forgeron lui même était présent, et leva vers Jane un regard encore vif malgré le poids évident des années sur ses épaules.
« Oh...bienvenu dans mon humble forge, jeune fille. Je peux faire quelque chose pour vous, peut-être? »

Le vieux nain sourit tout en tirant du feu un soc de charue rougeoyant. Il le posa sur son enclume, et saisit un marteau, commençant son travail. L'acier chantait sur le fer, envoyant danser des pluies d'étincelles au rythme des coups précis, résonnant clair, comme une mélodie propre à la forge. Sans cesser le travail, il répondit.
« C'est Daikitsu, la Dame des Renards. Je l'ai rencontré il y a très longtemps, à Minkai, alors que je faisais partie d'une caravane de marchands. C'est pour ça que je suis resté, d'ailleurs. Quand je forge, j'ai l'impression qu'elle me parle, et je me suis dit qu'un autel était le moins que je puisse faire pour la remercier de ses bienfaits. »

Il écouta ce qu'elle avait à dire, lui lançant un clin d'oeil tout en inspectant la pièce qu'il réparait.
« Restez, restez, je vous en prie! Je n'ai pas tous les jours de la compagnie, et je dois admettre que je suis curieux. Vous venez d'Avistan, comme moi...d'où êtes vous?

Enfin...concernant Yin-Se, il serait exagéré de dire que j'ai bâti ce village...mais je suis son forgeron depuis qu'il a été fondé, il y a plus d'un siècle et demi. C'était un village prospère à l'époque, un lieu de passage pour les convois de bois et les marchands qui circulaient entre Po Li et Sze. Bien sûr, Shenmen n'était pas une contrée très sûre, mais avec une escorte, les caravanes passaient sans problème, et la route impériale était régulièrement patrouillée. A l'époque, nous espérions que nous pourrions devenir une plus grande cité, grâce aux mines qui sont pas très loin, dans les Soyeuses.

Et ensuite...Lung Wa est tombé. Je savais l'Empire malade, mais dans cette contrée peu peuplée, nous ignorions à quel point. Difficile de dire si c'est la corruption, les catastrophes liées à la mort d'Aroden, ou encore un jugement divin, comme certains le clament...Mais l'Empereur Eternel est tombé, l'empire s'est disloqué, et le trône des Cinq Dragons est inoccupé depuis.
Les autres contrées, comme Lingshen, ont survécu tant bien que mal...mais Shenmen a toujours été dangereuse, et sans l'Empire pour nous protéger et nous soutenir, la province a sombré dans l'anarchie. On a perdu le contact avec Sze, Pek Peh, et les autres villes, et il est devenu trop risqué de voyager. Yin-Se a été plus ou moins épargné, mais sans le commerce et le passage, la ville a commencé à dépérir. Les jeunes préfèrent partir à Lingshen quand ils le peuvent. Bref...j'espère que je ne vivrai pas pour voir la fin de Yin-Se, mais je ne sais pas si mon voeux sera exaucé... »

« Andoran, Andoran...c'est une province du Chéliax oriental, non? Pardonnez moi, je n'ai pas eu de contact avec quelqu'un de votre continent depuis des décennies...J'ignore aussi ce que sont ces canons dont vous parlez, mais je gage que vous êtes armurière alors? »

Il fronça les sourcils.
« Je n'ai jamais aimé ça...Les armes je veux dire. La Dame désapprouve, et moi même je n'apprécie pas la violence. C'est peut être pour ça que j'ai toujours eu du talent pour fabriquer les armures. Mais ce n'est pas à moi de vous dire comment exercer votre art, et si vous voulez utiliser ma forge, vous êtes la bienvenue! J'apprécie toute l'aide que vous pourrez me donner. Peut être que nous pourrions recommencer à réaliser des commandes pour Lingshen? La route est longue, mais la fabrication prend des mois de toutes façons... »

La nouvelle du statut de Sze attira assez l'attention du nain pour qu'il cesse de marteler.
« Sze serait toujours debout? Sacrée nouvelle...Mais je ne sais pas si c'est une bonne nouvelle ou une mauvaise...La ville était déjà instable avant que Lung Wa ne tombe...au bout d'un siècle.... »

EDIT: j'avais oublié un détail

Il se tut quelques instants, avant d'ajouter.
« Oh, j'oubliais presque de vous répondre...il y a de nombreuses mines d'argent à Shenmen, dans les Montagnes Soyeuses. Et celle de Yin-Se est à une journée de marche vers l'Ouest, dans les contreforts des montagnes. Je peux vous l'indiquer sur une carte si vous en avez une...mais elle n'est plus exploitée depuis au moins quarante ans! »

Modifié par un utilisateur lundi 2 juillet 2018 12:14:18(UTC)  | Raison: Non indiquée

Le nain acquiesça en écoutant sa description.
« Ah d'accord! J'ignorais que la technologie des tanegashima s'était aussi frayée un chemin jusqu'en Avistan. Les Tian n'utilisent pas de canons, en revanche, mais ça ne doit pas être très différent d'une catapulte ou d'une balliste, au moins dans ces utilisations. Je n'ai jamais monté de machine de siège...vous devez être talentueuse pour quelqu'un de si jeune! »

Il passa une main dans sa barbe.
« Non, les commandes sont des pièces uniques, faites sur mesure...il faudra que je me rende à Lingshen et que nous trouvions des clients. Encore que...vous savez prendre des mesures, non? Vous pourriez peut être le faire? Je ne suis pas très amateur de voyage ces jours ci... »

Wolfram se lissa la barbe en réfléchissant.
« Hum...non, je ne pense pas. J'ai en tête des commandes sur mesure d'armure, peut être ensorcelée. Je ne vois pas qui d'autre au village pourrait réaliser des pièces uniques qui vaillent la peine d'être transportées...avec un voyage de vingt jours aller retour, il faut que ce soit rentable, ce qui n'est le cas que pour des pièces exceptionnelles. Dans tous les cas, le prochain voyage à Gaotong pour les fournitures du village est prévu pour dans trois semaines. En général, le capitaine s'y rend avec la charette communale. Mais d'ici là, nous avons fort à faire! »

Est ce que tu veux ajouter autre chose? Sinon, si tu veux te lancer sur la période de calme, est ce que tu peux me décrire avec un peu de détails ce que fait Jane de son temps.

25 Rova - 16 Lamashan 4718
Musique - La Forge de Wolfram


Les trois semaines suivantes furent...très intenses pour Jane. Elle aida de son mieux les autres gouverneurs et les habitants de Yin-Se à entreprendre les travaux du bastion, et cela n'était pas une mince affaire...il lui fallu beaucoup de sueur, un peu de sang tant le travail était dur, et beaucoup de fatigue. Mais cette épreuve fut aussi pleine de satisfaction...car au bout de trois semaines, il était en bien meilleur état! Comme neuf aurait été une exagération, mais il était en aussi bon état qu'à sa construction. Les deux dortoirs avaient été nettoyés, de même que les deux chambres. Le toit de la salle commune avait été réparé, de même que les postes de garde, l'infirmerie, la cuisine et le bureau. Les murs de la réserve étaient à nouveau complets.
Les murs extérieurs avaient été reconstruits et les portes renforcées, et l'autel comme la statue du général Yang Chuanyu avaient été rénové. La femme en armure contemplait à présent un fort à nouveau en état d'accuellir une petite garnison.

Le reste de son temps avait été partagé entre l'entrainement de la milice et la forge de Wolfram. Elle s'était révélée une apprentie...maladroite, du moins au départ. Elle n'avait pas forgé de créations simples depuis longtemps, et elle dut se rendre à l'évidence: elle avait perdu la main. Mais grâce aux conseils patients de Wolfram et à ses efforts, elle finit par réussir à se remettre en selle. Et elle devait admettre que l'ambiance de la forge était sereine: le seul bruit était celui du métal chantant, et le regard de Daikitsu était étrangement agréable. Finalement, malgré des débuts difficiles, elle avait réussi à fabriquer quelques outils supplémentaires qui ne manqueraient pas de servir aux réserves du village, en cas de coup dur.

Tout n'était pas rose, cependant...plus d'une fois, elle surpris des regards méfiants et des conversations à voix basse qui s'interrompirent à son arrivée, et les villageois paraissaient pour la plupart sur leurs gardes à son approche. Rien de nouveau pour elle...elle avait toujours été vue avec une curiosité mêlée de crainte depuis son arrivée à Tian Xia.

Enfin, elle aida Shojiro à entraîner la milice...et apporta une contribution plus que conséquente! Au point que la parole des miliciens à elle seule parvint à rétablir sa réputation de fiabilité. A elle seule, elle parvint à enseigner une bonne part des techniques qu'elle avait pu glaner pour se défendre contre les armes de tir: l'usage correct des boucliers, la formation d'un mur de bouclier, l'utilisation du couvert, et aussi les dangers des armes à feu, contre lesquelles les boucliers et les armures ne protégeaient pas autant.

Quoiqu'il en soit, elle avait fait des progrès considérables lorsque le départ du convoi pour Gaotong approcha, et grâce à elle, le village aussi.

Tu gagnes 6 points de Biens durant cette période.

Modifié par un utilisateur samedi 14 juillet 2018 00:32:02(UTC)  | Raison: Non indiquée

29 Lamashan 4718, début de journée - Yin-se, Province de Siyin

Yin-Se - Musique


Jane se dirigea tant bien que mal vers le haut de la colline dominant le village, la démarche encore hésitante. Elle avait fait de son mieux pour être présentable, mais le soleil brillait juste un peu trop fort et les battements de son coeur étaient justes un peu trop audible pour qu'elle soit à l'aise...mais sans doute était-ce les traces de la liqueur de prune: délicieuse, mais sournoise.

Elle fut accueillie par Ju, le fils ainé de la famille Tiang, qui allait la saluer lorsqu'il nota son allure peu assurée, et sourit. Il s'efforça de ne pas parler trop fort.
« Bonjour, gouverneur! Je peux vous aider? »

Tiang acquiesça, s'efforçant visiblement de retenir un éclat de rire, avec un succès plus ou moins marqué. Mais il réussit à rester sérieux suffisamment longtemps pour répondre à sa question. Tout en réalisant une démonstration (à vide) du chargement de la baliste, il expliqua un peu où ils en étaient.
« Nous ne sommes pas encore de bons artilleurs, mais on arrive à la charger et à viser, relativement. Ce qui m'embête c'est que cela prends du temps à ajuster, et viser individuellement quelqu'un n'est pas vraiment facile. Mais malgré tout, on peut couvrir une bonne part des approches du village, mais la cadence de tir n'est pas très rapide...honnêtement, j'ai quand même l'impression que ce sera plus une question d'impact sur le moral qu'autre chose.

A moins que vous n'ayez des conseils? Vous êtes habituée à ce genre de choses, c'est vous qui l'avez conçu après tout. »

Tiang et les deux autres miliciens écoutèrent attentivement les conseils de Jane, tout en poursuivant la discussion et essayant de ne pas trop noter les effets de la gueule de bois chez la fusilière.
« De toutes façons, si nous devons battre en retraite vers le fort, la baliste sera difficile à employer contre les rues du village...je pense que nous pourrons en tirer le maximum que tant que les bandits seront en terrain découvert. Par contre, vous avez dis "elles"? Ce sont toutes des femmes? »

Le jeune homme paraissait à la fois incrédule et curieux.
« C'est surprenant, non? »

Tu pourrais me faire un test d'engins de siège?

Tiang Ju essaya de ne pas trop ramener le sujet sur la table, tout en précisant sa pensée.
« Ce n'est pas tant la difficulté de s'incliner dans cette direction...mais plutôt de viser alors que les maisons du village sont dans notre champ de mire. Mais rien ne nous empêche d'avoir de la chance, cela dit... »

La question de l'arc suscita un échange de regards embarassés, en revanche.
« Non, pas vraiment...bander un vrai arc de guerre, ça ne s'improvise pas. Mais on peut toujours essayer. »