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Offline mdadd  
#1 Envoyé le : mardi 15 août 2017 14:15:06(UTC)
mdadd
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Lorsqu’Oradin était revenu à l’église d’Adabar et qu’il s’était présenté devant le Gardien du commerce Syvisil’elthai, un elfe, le grand-prêtre du temple, il avait bien ressenti un certain malaise que sa seule présence générait au sein de son ordre. On lui trouvait des missions toujours extérieures à la cité, bien souvent afin d’assurer la sécurité des convois marchands à travers des territoires dangereux comme la traversée des Monts de l’Esprit par la toute nouvelle route du Val Sanglant, mais cette fois, la convocation du grand prêtre changeait de l’ordinaire et c’était devant lui que se présentait « l’éructenain postillonneur » aujourd’hui. On lisait une certaine excitation de la part de l’elfe, ses yeux brillaient d’un certain plaisir comme il arrive parfois lorsqu’une personne avait un éclair de génie. Après les présentations solennelles protocolaires, Syvisil’elthai en vint très vite aux faits. Il ne s’agissait pas cette fois d’une affaire d’escorte à travers un territoire toujours de plus en plus dangereux et lointain. Mais d’une enquête qui allait devoir amener Oradin dans un milieu qu’il préférait d’ordinaire éviter : la mer. En effet, depuis quelques temps, il semblerait que les marchands en provenance de Pointe-Sable voire même de Port-Énigme rapportaient ces derniers temps une grande difficulté à emprunter la voie maritime par le Golfe de Varisie. De manière récente et presque systématique, les navires marchands n’arrivent pas à bon port surtout lorsqu’ils essayaient de partir de Port-Énigme ou d’y arriver. Bien-sûr la voie terrestre était toujours possible, mais plus longue et dangereuse, surtout si on voulait traverser les Terres vides que la plupart des marchands préféraient éviter. Prendre la voie maritime pour gagner les terres du Nord ou en provenir était beaucoup plus facile et sécuritaire, mais il semblerait que l’escale à Port-Énigme soit devenue trop dangereuse voire impossible et pourtant elle était indispensable pour les navires.

Ce fut donc à Oradin que le Gardien du commerce confia la mission de résoudre cette énigme, probablement une suractivité des pirates, fort nombreux dans le Golfe de Varisie et qui à priori semblaient prendre de l’ampleur. Il devait peut-être y avoir un nouveau Roi ou Prince des Pirates, un nouveau meneur qui voulait asseoir son autorité et sa suprématie sur le Golfe et toute la piraterie par des actions exemplaires qui nuisait donc immanquablement au commerce. Les navires ne pouvaient se permettre de contourner le Golfe de Varisie, la navigation étant bien trop dangereuses. Le berceau des pirates… De tout temps, Port-Énigme était connu pour avoir été la ville principale des seigneurs-pirates avant que la caste des Mages du Code ne prenne le contrôle de la ville. Les seigneurs pirates furent condamnés à se reconvertir, ce qui avait généré quelques gouverneurs de quartiers, ou à être bannis et leurs biens saisis. La rancœur des seigneurs pirates envers les nouveaux dirigeants de Port-Énigme était donc très forte, surtout pour ceux qui avaient tout perdu et se retrouvaient sur leur navire à camper dans l’une des îles de l’archipel délimitant le Golfe de Varisie. C’était encore trop récent pour que la ville soit complètement purgée d’une part de sa pègre, mais aussi pour que les pirates se soient complètement réorganisés en une force unique sous l’égide d’un grand roi ou seigneur ou prince ou qu’une nouvelle capitale soit établie, même si sur l’île principale de l’archipel, un comptoir adossé à la Montagne Creuse semble prédestiné.

Le nain partis donc après avoir pris un maximum de renseignements concernant cette zone et notamment il fut attiré par des écrits parlant des Monts Calphiaque et d’une cité coincée sur la côte Nord du Golfe de Varisie. Isolée, Gruankus est accessible par une route antique qui traverse les montagnes ou par la voie maritime à travers le Golfe de Varisie. Un ancien accord, appelé traité de Gruankus, protégeait les commerçants Varisiens des attaques pirates venant de Port-Énigme. Qu’en était-il aujourd’hui maintenant que Port-Énigme était sous la domination des Mages du Code ? Cet accord était-il toujours respecté par les pirates ? Par ailleurs on pouvait trouver à Guankus une de ces étrangetés du passé, comme les monuments de Magnimar ou encore les vestiges d’un ancien empire un peu partout sur la côte de Varisie : la roue de Gruankus, couverte de runes et à moitié enterrée dont personne ne connaissait l’utilité ni les propriétés. Oradin savait désormais où aller, il devait commencer par là…

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Offline poulosis  
#2 Envoyé le : dimanche 20 août 2017 17:28:02(UTC)
poulosis
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Oradin
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Foutu margoulin ! Ce gratte-plume l’envoyait en mer. Lui ! Foutue voyage ! Pure carabistouillerie ! Le nain grommelait dans sa barbe. Une attitude de ronchon qui datait de l’Incident. Celui qui avait causé son handicap. Comment en effet appeler autrement cette malédiction qui l’habitait depuis cette malheureuse mission au nom de son église. Enfin, “son” église… Depuis ce fameux événement, elle n’était plus vraiment sa maison. Ce n’était déjà pas facile avant. Impossible en effet pour lui d’obéir à tous les principes édictés par Abadar. L’usage excessif d’alcool était par exemple réprouvé, car source d’affaiblissement de la société. Hors, comment lutter contre son héritage génétique ! Mais ses écarts restaient tolérés, à l'époque. Hélas, plus aujourd'hui. Dorénavant, il était devenu un vrai étranger dans sa propre famille. Ses leçons de diplomatie transmises par son ancien maître, autant que son respect naturel de l’autorité et son cœur noble, étaient mis à rude épreuve, face à l’attitude de plus en plus méprisante de ses frères d’armes.

Oradin avait toujours été une gousse d’ail, comme disait son père, non sans une certaine tendresse mêlée de fierté. Oui, une forte tête, il l’avait toujours été. Son précepteur, bien que généreusement payé par ses parents, avait eu fort à faire pour marteler dans sa caboche les bases du savoir-vivre nécessaires pour évoluer dans les hautes sphères de Magnimar. Il repensa avec nostalgie à cette époque bénie où il se livrait aux quatre cents coups avec ses camarades de jeu, qui respectaient alors son caractère implacable. Déjà, enfant, les gens s’écartaient de lui dans la rue, alors qu’il marchait tête enfoncée entre ses épaules, la mine résolue, au grand rire teinté d’admiration de ses copains. Il compensait sa petite taille par une obstination hors norme, qui forçait le respect. Un état d’esprit qui lui causait régulièrement des torts, de la part d’enfants des bandes adverses. Il suffisait qu’on le dise “pas cap’ de foncer sur la patrouille”, “pas cap’ de traverser sous la charrette en mouvement” ou “pas cap’ de renverser la caisse de marchandises”, pour qu’il prouve aussitôt le contraire. Le souci est qu’il ne courrait pas très vite. La réputation de ses parents, un forgeron respecté pour son talent et une prêtresse honorée pour sa gentillesse et son dévouement, lui avait toujours valu un traitement de faveur.

Cependant, malgré la pogne paternelle, développée par les innombrables coups de marteau sur son enclume, aussi rude qu’un rocher contre sa joue ou sur son joufflu, sans cesse il recommençait. Jusqu'au jour où les jeux d’enfant se transformèrent en défis d’adolescent. “Pas cap’ de boire toutes les chopes d’un coup”, “pas cap’ de partir sans payer”, “pas cap' de taper les fesses de la fille”. Sa mère, d’ordinaire patiente et bienveillante, ne lui pardonna pas ce dernier geste et se fit plus distante. Mais il était encore trop fier. “Pas cap’ de voler le coffre dans cette boutique”. Il se laissa enfermer dedans à la nuit tombée. Mais des gredins toujours à l’affût d’un bon coup, l’interceptèrent à sa sortie et mirent à sac l’échoppe. Ils s’emparèrent aussi du butin dans le coffre. La famille volée avait perdu toutes ses économies et ses marchandises. Une bande rivale, qui rançonnait déjà le marchand, kidnappa la fille des victimes pour se payer via un commerce ignoble. Ruinés et dévastés, ils durent quitter la ville.

Puisse Abadar le pardonner un jour ! Sa fierté mal placée, son besoin de se montrer plus fort que ses grandes personnes qui l’entouraient, avaient causé l’anéantissement de pauvres innocents. Il parcourait une sente menant au déshonneur, à la déchéance, puis aux enfers. Lorsqu’il apprit la nouvelle, il courut dans sa chambre, des sanglots irrépressibles secouant son corps. Cet événement eut le mérite de lui dessiller les yeux. Car si son caractère borné causait des catastrophes autour de lui, son cœur battait à l’unisson de la bonté maternelle. Une nouvelle résolution balaya son cerveau : dorénavant, il mettrait son acharnement au service de ses concitoyens. Plus aucun scélérat ne maltraiterait les bonnes gens de sa ville. C’est ainsi qu’il avait commencé sa formation de paladin au service d’Abadar.

Ses pensées avaient calmé sa fureur naissante. Revenu à l’instant présent, il chercha comment accomplir sa mission. Il leur montrerait à tous qu’il était encore un agent compétent, malgré l’Incident. Quelques jours plus tard, il avait trouvé une destination où débuter son enquête. Ce qui l’obligerait à naviguer, à son grand désespoir, la route terrestre lui paraissant bien trop longue et périlleuse. Il se renseigna à l’université de Magnimar pour se joindre à une éventuelle expédition scientifique en partance pour cette étrange roue de Gruankus, voire un ravitaillement prévu pour une équipe déjà sur place. Auprès de l’armée, il demanda si un convoi vers les montagnes Calphiaques était envisagé, peut-être pour éliminer un clan de barbares trop agressifs ou ramener des bandits qui s’y étaient réfugiés. Il préférait éviter de voyager seul, cette fois. La mer, en dehors du rivage où il nageait parfois, lui était un domaine totalement inconnu. En dernier ressort, il chercha à la capitainerie un navire en partance vers cet endroit, ou pas loin.

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#3 Envoyé le : dimanche 20 août 2017 23:27:19(UTC)
mdadd
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La recherche d'un navire en partance pour le Golfe de Varisie, que ce soit Port-Énigme ou Gruankus, s'avéra à la fois difficile et infructueuse. Cela n'étonna guère le nain. Depuis quelques temps la rumeur avait parcouru tout le port de Magnimar. Les bateaux qui dernièrement avaient tenté leur chance dans ce coin là n'étaient pas revenus et les capitaines ne voulaient pas risquer leur navire ou leur cargaison ou leur équipage pour se rendre dans des eaux où les pirates étaient devenus si nombreux, semble-t-il, qu'on n'avait aucune chance de leur échapper. Ou alors il faudrait payer une fortune avec un capitaine suffisamment fou pour tenter l'aventure, à moins qu'un groupe d'aventuriers de renom soit à bord et aient les moyens de repousser les pirates, quels qu'ils soient, même le Lacédon Sanglant, ce navire pirate fantôme directement armé par Urgathoa elle-même à moins que ce soit avec l'accord de Besmara...

Oradin poursuivit ses recherches. Par voie maritime, il n'avait trouvé qu'un seul capitaine affrété par un marchand, un certain Érig Guervirsen qui, semble-t-il, remontait jusqu'aux lointaines terres du Nord en contournant le Golfe de Varisie. Le capitaine était prêt à s'approcher des îles de l'archipel délimitant les eaux du Golfe pour larguer le nain sur une chaloupe. C'était déjà en soi très risqué puisque les eaux autour des îles foisonnaient de pirates. Par après, Oradin devrait se débrouiller seul pour naviguer à la rame jusqu'à sa destination tout en faisant extrêmement attention à ne pas se faire arraisonner en cours de route, bien-sûr.

La seconde piste que trouva le nain fut un autre marchand, un certain Hakeen Mac Hadam, qui rejoignait une caravane de nomades Varisiens, qui remontait l'ancienne route du Golfe, de Magnimar à Pointe-Sable, puis à Oreille du Loup, Baie de Roderic, Port-Éngime, une traversée des Hautes Terres des Seigneurs Cavaliers et enfin des Terres Vides en passant non loin de Mursalé avant de gagner le passage qui menait aux Terres des Rois de Linorm. Hakeen profitait d'un mouvement des nomades Varisiens pour joindre ses chariots aux leurs et ainsi profiter du nombre pour s'assurer un voyage plus sûr. C'était sans aucun doute plus long que par la voie maritime, mais Oradin avait de bonnes chances de parvenir ainsi au passage qui traversait les Montagnes Calphiaques et atteindre Gruankus. Peut-être même qu'il parviendrait à convaincre le marchand d'y faire une halte pour troquer des marchandises. Pourquoi pas...

Quel que soit le moyen employé, il fallait vite se décider et l'un et l'autre représentaient un temps de trajet différent mais le plus rapide était aussi le plus incertain...

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Offline poulosis  
#4 Envoyé le : lundi 21 août 2017 01:04:37(UTC)
poulosis
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Oradin
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La voie maritime ne l’inspirait déjà pas beaucoup, c’était le moins que l’on puisse dire. Il était cependant prêt à l’emprunter, si elle lui faisait gagner du temps et permettait de rétablir le commerce rapidement. Hélas, la seule solution pour la suivre l’obligerait à ramer en pleine mer, dans une zone infestée de pirates, sur une coquille de noix. Impensable !

L’autre choix qui s'offrait à lui le ferait suivre une caravane de commerçants. Un signe d’Abadar on ne peut plus criant ! Qui plus est, il n’avait plus un rond. Là, il pourrait au moins se rendre utile, en servant de gardien de troupeau, pour ces voyageurs. Avancer lentement mais sûrement, voilà bien une devise naine. Peu importait la vitesse, il serait toujours plus rapide qu’un cul-de-jatte, comme il aimait à le répéter.

Il s’empressa donc de proposer ses services à Hakeen Mac Hadam. Il savait se battre et soigner aussi, ce qui n’était pas négligeable, en pleine cambrousse. Il avait déjà pas mal d’expérience, ayant bourlingué dans toute la province au cours de ses missions, et même durant son “autre” vie. Il pouvait aussi entretenir les armures et les armes, user de diplomatie auprès des villes, et se débrouiller en pleine nature.

Bref, il saurait se rendre bien utile, sans constituer une charge, il en était certain. Ainsi, négocier un détour au plus près de sa destination finale, au cours du trajet, serait plus aisé, au vu de ses qualités.

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#5 Envoyé le : lundi 21 août 2017 19:52:57(UTC)
mdadd
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Oradin n’eut aucun mal à se faire embaucher par le maître marchand. L'homme était grand. Sa carrure rivalisait avec les fameux ulfes, sa peau pâle mouchetée de taches de rousseur, son épaisse chevelure rousse, sa barbe fournie ne laissait aucun doute quant à son appartenance à cette ethnie. Il portait des vêtements épais qui ne dissimulaient guère une belle cotte de maille serrée à la taille par un ceinturon d'arme à large boucle. Il portait l'épée longue, la dague et même une hachette qui pouvait sans doute être lancée. Son manteau de voyage permettait bien-sûr de couvrir le tout, mais sa posture et son allure le désignaient plus comme un guerrier que comme un marchand. Son convoi était composé de 5 chariots assez grands et bâchés, tirés par des chevaux massifs. Il devait y avoir une douzaine de personnes, peut-être deux ou trois familles marchandes, des associés, des cousins ou des membres d’un même clan. Les hommes étaient armés, les femmes aussi ainsi que les enfants ayant atteint l’âge de manier une arme légère, ce qui était autorisé au passage de leurs douze ans, selon leurs coutumes. Ils avaient tous des visages tendus, les mâchoires serrées, comme s'ils étaient sans cesse concentrés et prêts à bondir arme en main.

Les marchands du maître marchand Hakeen Mac Hadam contrastaient avec les nomades varisiens. Ces derniers étaient plus petits, plus élancés, souvent la peau tannée ou cuivrée, les cheveux noirs ou teintés de rouge ou de couleurs très voyantes comme le bleu ou le vert, leurs chariots étaient faits de bois jusqu’au toit, ils ressemblaient à des roulottes parées de multiples couleurs et colifichets qui s’accrochaient et pendaient de partout. Bien souvent la musique et les chants accompagnaient ces éternels voyageurs itinérants et ils s’entouraient de folklore et de mystères. Parmi eux on retrouvait des danseuses si graciles et légères qu’on avait l’impression que leurs pieds ne touchaient pas le sol tandis qu’elles exécutaient des danses envoutantes et endiablées, dans une roulotte solitaire une vieille femme tirait les cartes ou lisait l’avenir dans une boule de Crystal, sans oublier que la plupart du temps elle connaissait de nombreux remèdes ou malédictions qui faisait d’elle ce qu’on appelait une sorcière de village, le tout sous une surveillance excessive des hommes sous la domination d’un chef de caravane qui avait droit de vie ou de mort sur chaque membre de la communauté. Les varisiens répondaient à des codes complexes qu’ils ne partageaient guère et il fallait les observer très longtemps et avec respect afin d’en comprendre les rudiments et encore. Un regard ou un geste inapproprié suffisait à transformer une attitude chaleureuse et accueillante en hostilités ouvertes pouvant aller jusqu’à la condamnation à mort.

Oradin avait déjà longtemps voyagé avec les varisiens à travers des contrées très inhospitalières. Il avait pu observer que leur comportement envers tous les non varisiens était bien différent qu’entre varisiens, même s’ils appartenaient à une autre communauté d’une autre nation. Entre eux c’était des joutes de danses, de chants, de dominations verbales, de traditions ancestrales, d’hérédité, parfois d’égo, alors qu’avec les étrangers, ils faisaient simplement ressentir s’ils étaient les bienvenus jusqu’à ce qu’ils fassent ressentir qu’il était temps de partir et parfois très très vite. Le serviteur d’Adabar se souvenait de ses premiers voyages. Il était extrêmement difficile de décoder le langage corporel des varisiens, ceux-ci communiquaient beaucoup ainsi. Petit à petit il avait pu observer quand est-ce qu’ils étaient amicaux ou tendus et que l’animosité n’allait pas tarder. Des débuts difficiles qu’il lui avait fallu apprivoiser jusqu’au jour où… Lorsque c’était arrivé, les varisiens avaient complètement changé d’attitude à son égard, comme s’il avait prouvé quelque chose à leurs yeux. Depuis il était accepté facilement dans leurs communauté et il n’avait aucune difficulté à voyager même sur une longue durée, à partager les feux de camps, à assister aux danses et chants les plus importants interdits habituellement aux étrangers. Il faisait partie de la communauté varisienne désormais où qu’il aille, même s’il venait à entrer dans un campement entier de varisiens qui ne le connaissait pas. C’était comme s’il portait sa « malédiction » sur le front, marquée au fer rouge dans un signe que tous les varisiens étaient capables de voir. Oradin savait que parmi eux certains étaient comme lui, surtout s’ils avaient des origines depuis l’Ustalav ou tout simplement parmi ceux qui aimaient voyager du côté d’Oreille du Loup en Varisie…

Hormis cela, le voyage promettait d’être joyeux et festif, comme l’étaient toujours les voyages des varisiens sur leurs terres natales. L’association entre le maître marchand ulfe et la communauté varisienne semblait fonctionner, les charriots marchands restant au cœur de la caravane afin de rester sous bonne garde et sous la vigilance des varisiens tandis que les ulfes promettaient de donner de leurs armes si jamais le convoi était attaqué. Oradin n’avait aucun besoin de justifier sa présence, sauf auprès des marchands des Terres de Rois de Linorm. Hakeen Mac Hadam semblait une personne censée, expérimentée aussi bien dans le domaine du commerce que dans le domaine de la compréhension des hommes. Il avait cette empathie et un bon sens de l’observation pour comprendre très vite quelle attitude adopter avec son ou ses interlocuteurs, sans oublier qu’il avait déjà pas mal voyagé dans le monde de Golarion avec ses charriots et en connaissait un rayon sur les nations et les histoires de celles-ci. Il gardait cependant une certaine humilité, respectant les personnes avec qui il conversait afin de ne pas les mettre mal à l’aise. De nature assez joviale, il parlait fort et avec enthousiasme, ce qui avait tendance à être entraînant et motivant. Lorsque le convoi s’élança et sortit des murs de la Cité des Monuments, il ne manqua pas de laisser tomber sa lourde main à poigne de fer sur l’épaule du nain – « Alors mon ami ! Quelle aventure vous amène dans une telle expédition à travers presque toute la Varisie ? En quoi puis-je vous aider ? »

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Offline poulosis  
#6 Envoyé le : mardi 22 août 2017 22:42:42(UTC)
poulosis
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Oradin
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Les varisiens étaient les maîtres des routes. Plus que cela, ils incarnaient le voyage. Et le voyage était le socle sur lequel reposait le commerce, la mamelle nourrissant toute civilisation. Bien qu’ils n’habitent pas dans des villes, ni n’obéissent aux mêmes lois, ils participaient au bien-être des gens plus sédentaires, grâce aux routes que leurs incessantes pérégrinations avaient tracées. Pour cela, ils méritaient son respect.

Il en allait totalement différemment, autrefois. Avant l’Incident, les seuls contacts qu’il entretenait avec eux se limitaient aux Sczarni ou aux Pendus. Des bandes de voyous qui écumaient Magnimar et lui avaient causé bien des désagréments, à l’époque. Ils n’étaient d’ailleurs pas étrangers à sa vocation, aujourd’hui. Peut-être devrait-il aller les remercier ? Un rictus sauvage ourla ses lèvres mangées par sa barbe. Ses deux mains qui reposaient sur son gigantesque marteau serrèrent inconsciemment le manche épais de l’arme impressionnante. Oui, il faudrait qu’il leur adresse ses salutations les plus retentissantes. Un grondement rauque s’échappa du plus profond de sa gorge, tel un grognement menaçant de chien prêt à mordre.

Il ravala aussitôt ce bruit incongru et regarda en tout sens, pour vérifier qu’aucune personne n’en avait été le témoin. Les varisiens connaissaient déjà son état, à coup sûr. C’était du reste en raison de cette même sauvagerie qui l’habitait que ceux-ci le toléraient aussi bien parmi eux, il l'avait bien deviné. Il appréciait ce traitement de faveur à double titre. Déjà parce qu’il était toujours agréable d’être accepté dans une communauté, et aussi car pour une fois, sa malédiction lui apportait un peu de bien-être.

Mais pour les ulfes, ce serait peut-être une autre histoire. D’ailleurs, Hakeen approchait. Il lui sourit. En plus d’être un marchand doublé d’un guerrier, il appréciait ses manières à la fois franches et polies. L’un de ses serments, lorsqu’il devint paladin d’Abadar, commandait d’agir avec honneur et honnêteté. En l’occurrence, il ne voyait pas pourquoi mentir. Son aide pouvait en outre être précieuse. Son peuple savait manifestement se défendre.

« Comme vous le savez, la lutte pour protéger le commerce est un combat permanent, mon cher marchand, per-ma-nent ! Abadar ne me laisse guère de répit ! Enfin, surtout les pirates, en réalité. Plus aucun bateau ne s’engage dans le golfe. La situation devient tendue. Il faut rétablir les échanges, la libre circulation des marchandises. Je pense avoir trouvé où commencer mon enquête. À Gruankus. » Il passa ses pouces dans sa ceinture. « Vous connaissez les montagnes Calphiaques ? »

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#7 Envoyé le : mardi 29 août 2017 22:31:26(UTC)
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Oradin avait le temps de convaincre le maître marchand. Ils partaient de Magnimar pour un long voyage le long de la route oubliée. Première halte de trois jours à Pointe-Sable pour du commerce, après trois jours de voyage. C’était le temps qu’il fallait pour parcourir les 150km environ entre Magnimar et la ville en pleine expansion. Puis la caravane reprendrait sa route jusqu’à la Passe d’Oreille-du-Loup, une bonne semaine à travers une contrée semi-sauvage parsemée de quelques villages et hameaux en bord de mer jusqu’aux Monts Plaies de Brumes ou coincés dans les contreforts de la montagne. Visiblement il n’était pas question de bivouaquer à Oreille-du-Loup. Le passage se ferait de jour au plus tôt dans la matinée et ils n’arrêteraient leurs charriots que très tard dans la nuit afin de mettre le plus de distance possible entre la caravane et le village dit sauvage ou maudit. Ils suivraient ensuite les méandres de la Charbonneuse jusqu’à Landecorbeau où ils pourront utiliser le Bac et traverser la rivière. Il leur faudrait 4 jours pour parcourir cette distance et encore deux jours à Landecorbeau pour du commerce. Ensuite 5 jours seront nécessaires pour contourner Bois Grognon jusqu’à Baie-de-Rodéric. La caravane ne prévoyait pas de s’arrêter dans cette ville, préférant effectuer son bivouac à distance. Baie-de-Rodéric était devenu le lieu e prédilection des pirates depuis que l’Ordre des Mages du Code avait pris le pouvoir à Port-Énigme. Les pirates se servaient de cette ville comme lieu de commerce pour tous les marchands qui avaient des réticences à rentrer dans Port-Énigme.

Hakeen était resté très flou sur l’étape à Baie-de-Rodéric. Mais il n’avait pas fait de mystère sur l’éventualité d’y aller faire un tour sans charriot, afin de retrouver certaines connaissances ou contacts avait-il signifié sans plus de précisions. Mais encore fallait-il avoir survécu d’ici là aux Gobelins et Orcs des Monts Plaies de Brumes, aux bandits de Bois Grognon et aux garous sanguinaires d’Oreille-du-Loup. Pour cela, la caravane semblait tout de même bien armée. Le nombre ferait sans doute hésiter les assaillants. Quant aux pirates de Baie-de-Rodéric, il leur faudrait unir plusieurs équipages sans doute pour constituer une menace sérieuse. Un soir de veillée, maître Hakeen parla à Oradin ainsi qu’aux chefs de famille varisiennes constituant la caravane. Il souhaitait effectuer une halte de deux jours à proximité de Baie-de-Rodéric. Puis se penchant plus sur le serviteur d’Adabar – « Je vous suggère de m’accompagner. Vous devriez être curieux de savoir comment se déroule le commerce dans cette ville. Peut-être qu’il sera possible de glaner aussi quelques informations sur ce qu’il se passe dans le Golfe parmi les pirates. Je connais quelques marchands permanents là-bas. Qu’en pensez-vous maître Oradin ? »

Modifié par un utilisateur dimanche 1 juillet 2018 16:53:35(UTC)  | Raison: Non indiquée

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Offline poulosis  
#8 Envoyé le : jeudi 31 août 2017 00:30:18(UTC)
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Oradin regarda fixement Hakeen en fronçant ses sourcils broussailleux. Ses prunelles bleu acier paraissaient le sonder au plus profond de son âme. « Vous vous moquez de moi, Hakeen ?! Vous voulez envoyer un paladin d’Abadar dans un repaire de pirates ?! HA ! Je me souviens encore de mon deuxième serment, prononcé à l’issue de ma formation. » Il posa sa main droite, boudinée mais puissante, sur la tête de son fidèle marteau, avant de déclamer religieusement, comme s’il revivait l’instant : « Les bandits sont un fléau. Sous ma volonté, ils seront traduits en justice. S’ils ne viennent pas volontairement se défendre devant un tribunal, ils viendront sous le pouvoir de mon marteau. » Il hocha la tête, satisfait, le regard encore trouble, perdu dans les limbes du passé.

Oradin ne connaissait plus la peur. Sa foi protégeait son esprit de toute accès de couardise et raffermissait sa volonté contre ce genre d’émotion, laquelle vous laissait totalement démuni face au danger. Aussi considéra-t-il plus sérieusement la proposition de ce marchand qu’il estimait, par ailleurs. Son idée était intéressante. Où mieux que chez eux sonder l'attitude des pirates, en effet ?

« Ceci dit, obtenir des informations sur mes ennemis auprès de leurs propres frères de la côte… L’idée est savoureuse. Ça me plaît ! Vous connaissez déjà la ville, apparemment. Dites-m’en davantage. Surtout, pensez-vous pouvoir me rendre plus discret ? Si vous parvenez à m’introduire dans la ville sans les regards exorbités, apeurés ou colériques, qui me dévisageraient d’ordinaire si j’entrais ainsi vêtu, » ses bras balayèrent sa silhouette de fer, et son symbole divin, une clé en argent, « je vous promets de protéger votre convoi gratuitement pour la suite du trajet ! Et d'adresser une prière pour la réussite de vos affaires auprès d'Abadar. »

Sa casquette d’oracle de la vie serait sans doute plus adéquate. En tout cas, il lui faudrait mettre de côté un instant ses instincts de paladin. S’inspirer de l’attitude plus neutre des prêtres de son église, vis-à-vis des pratiques commerciales ou autres, tout en songeant aux bénéfices attendus de la manœuvre, serait indubitablement une bonne méthode.

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#9 Envoyé le : samedi 2 septembre 2017 15:55:21(UTC)
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Une fois Hakeen éloigné, Oradin était resté auprès du feu. Il avait besoin de réfléchir seul, loin de la pression que la présence des autres membres de la caravane pouvait engendrer chez lui. Assis au coin du feu, il sortit sa trousse de forgeron et un morceau d’étain. Y sculpter des pièces de monnaie o des médaillons l’aidait à se concentrer, à recentrer ses pensées. Accomplir ces gestes quotidiennement constituait pour lui une sorte de prière à son dieu, un rituel qui le rassérénaient. Ses doigts attrapèrent un tranchet et débutèrent leur danse autour de la pièce. Depuis qu’il s’était joint à la caravane, il dessinait des chariots, des chevaux ou encore les têtes de ses partenaires, en sus des paysages pittoresques qu'il contemplait parfois.

Se rendre à Baie-de-Rodéric nécessiterait quelques ajustements. D’ordre physique, tout d’abord. Il ne s’imaginait pas une seconde pouvoir se rendre dans un repaire de pirates en armures de plaque rutilantes, son marteau en travers des épaules. Sa clé en argent, ballotant sur sa poitrine, claironnerait à tous qu’il fallait rétablir la loi au cœur des échanges commerciaux. Entre ces âmes damnées, c’était le meilleur moyen de se faire chasser, voire pire. Non, il laisserait tout son équipement dans la caravane. Il passerait une sorte de pèlerine élimée, embarquerait dans un sac ses outils de forgeron, une dague et son morceau de métal qui lui servait à s’entraîner chaque jour ou presque. Avec un bon bâton, il aurait l’apparence d’un simple artisan à la recherche d’une opportunité pour travailler.

Tout de même, cela le chagrinait de devoir abandonner son équipement. Il avait sondé l'âme de ses compagnons de route, sans détecter de malfaisance particulière. Il savait cependant que voler n’était pas nécessairement le fait de suppôts du Mal. Il n’était pas trop rassuré. Enfin, il devait apprendre à faire confiance à des étrangers. D’ailleurs, et c’était précisément le deuxième ajustement nécessaire, il devrait aussi modifier son état d’esprit, juguler sa volonté de foutre un bon coup pied dans cette termitière. Ce serait sans doute le plus ardu ! Son serment à l’égard d’Abadar remontait à plusieurs dizaines d’années. Il ne serait pas facile d’oublier les réflexes acquis sur les routes commerciales de la région, au service du maintien de l’ordre. Entendre comment ces traîne-misères trahissaient leurs frères à la moindre opportunité, sans intervenir, serait un vrai supplice.

Il faudra se concentrer sur son objectif : obtenir des informations sur la communauté pirate. Que mijotaient-ils ? Y-avait-il un seigneur qui se dégageait du lot ? Et surtout, où le trouver ? En fin de compte, il se demanda s’il n’avait pas mal jugé le scribouillard qui l’avait affecté à cette mission. Il avait tout de suite cru que l’elfe cherchait à éloigner un élément perturbateur de la congrégation. Un courtard peu raccord avec les autres pistars. Avait-il anticipé qu’il devrait se faufiler dans une ville, se faire discret pour gagner les informations nécessaires pour remplir ses objectifs ? Peut-être voulait-il lui ouvrir une nouvelle voie ? Révéler un nouveau potentiel ? Il grogna. Dubitatif, il lui accordait cependant le bénéfice du doute.

Il leva la pièce qu’il venait d’achever devant ses yeux. Une marmouse varisienne l’avait observé une bonne partie du temps passé à sculpter. D'un coup de pouce, il lui lança son œuvre, sur laquelle sa tête était stylisée. Jovial, il sourit et lui adressa un clin d'œil. « Attrape, ma bavette ! Cadeau ! »

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#10 Envoyé le : samedi 16 septembre 2017 17:34:49(UTC)
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Oradin poursuivit son voyage à travers les routes de la Varisie. La vieille route le long de de la côte entre Magnimar et Pointe-Sable ne fut guère plus qu’une formalité. La caravane s’installa aux abords de la petite ville qui prospérait depuis quelques temps malgré des évènements récents qui avait détruit des maisons, tué de nombreuses personnes, ravagé un entrepôt, mis à mal l’une des familles dirigeantes les plus puissantes, etc. Aujourd’hui Pointe-Sable s’était réorganisée, renforcée, avait construit un haut mur de protection vers la route au Nord, recruté une milice, construit une garnison et sa cathédrale de Desna se dressait fièrement afin d’accueillir les voyageurs et les varisiens. Lieu saint pour les nomades de Varisie, ce fut l’occasion pour les membres de la caravane d’effectuer mariages, baptêmes et autres bénédictions et consécrations pendant que les ulfes faisaient commerce.

Puis ils étaient repartis à travers la lande balayée par les vents. Les vallons, les hautes terres, ils traversèrent les contreforts montagneux des Monts Plaies de Brumes tandis qu’ils s’approchaient de l’Abbaye de Chantevent, une merveille d'architecture et autrefois un haut lieu saint pacifique de discussions entre représentants de tous les clergés sans que cela de dégénère en conflits. Cela avait changé à la mort/disparition du Dernier des Azlants. De nombreux clergés avaient quitté les débats et l’Abbaye qui aujourd’hui se couvrait de mystères. Ses murs et ses souterrains continuaient à charrier les vents venus de la mer, mais sa mélodie était plus sinistre et inquiétante. Beaucoup de voyageurs préféraient ne pas emprunter le chemin de l’Abbaye, autrefois considéré comme une halte sûre et un refuge, pour camper à l’extérieur.

Puis les charriots empruntèrent la route sinueuse et accidentée en direction de Galduria. La ville connue pour son école de magie et vivait du commerce du grain et du bois qu’ils charriaient sur des radeaux à travers le Lac des Braises e direction de Nybor essentiellement. Le matin offrait un spectacle grandiose d’une multitude de voiles s’élançant au milieu de la brume matinale depuis le petit port de la ville. La caravane se prépara alors pour effectuer l’un des passages les plus difficiles de la traversée de la Varisie. Les charriots furent tous inspectés de fond en comble et la moindre fissure, anomalie ou autre fut l’objet d’une grande attention et de réparations. Galduria avait ce qu’il fallait en matériel pour réparer et consolider les charriots. Les montures quant à elles furent elles aussi l’objet de beaucoup de soins et d’attentions. Les caravaniers achetèrent beaucoup de matériel de réparation et doublèrent les montures à chaque charriot afin de leur rende la tâche plus facile. Puis lorsque tout fut prêt, la caravane s’élança pour un galop qui ne devait s’arrêter que de l’autre côté de la passe d’Oreilles-du-Loup.

Deux jours très agités pendant lesquels le convoi ne fit aucune halte, alternant des rythmes de trot, de pas et de galop afin que les montures ne soient pas trop épuisées, le bruit des sabots frappant le sol, les sifflets et cris des conducteurs de charriots, un vacarme incessant mais nécessaire pour lancer un convoi et le rendre le plus difficile possible à arrêter. Avant le passage le plus étroit et proche du village maudit, la caravane croisa la route d’une bande de Gobelins en maraude qui ne comprirent pas ce qu’il leur arriva lorsque les combattants du convoi leur tombèrent dessus. Attirés par le nuage de poussière que soulevait le convoi, ils s’étaient approchés dans l’espoir de tendre une embuscade. Ils tombèrent sur plus fort et plus nombreux qu’eux et le combat fut vite en défaveur des misérables peaux vertes. La nuit approchant, le rythme s’accéléra. Le pas et le trot de la journée céda sa place à un trot et un galop. La nuit tombée, les hurlements de loup annonçaient l’approche d’une ou plusieurs meutes probablement guidées par des garous. La chasse était donnée et s’arrêter était signer son arrêt de mort. Toute la nuit le convoi fut harcelé par les loups et plusieurs fois il fallut combatte pour protéger les charriots, les familles et parfois même sa propre vie. A ce jeu-là, les varisiens semblaient les plus vulnérables, mais leur nombre joua en leur faveur. Les ulfes étaient beaucoup plus aguerris et les marchands se montrèrent de bons combattants. Les mercenaires payés pour a protection du convoi payèrent un lourd tribut afin d’honorer leur contrat. Presque la moitié d’entre eux étaient tombés sous les griffes et les crocs… Quant à Oradin, il eut plusieurs fois à démontrer ses talents de prêtre combattant tout en luttant contre cette maudite attraction et fascination qu’il ressentait pour leurs assaillants. Parfois il croisait le regard d’une de ces bêtes et avait l’impression qu’il y avait une certaine forme d’humanité dans cet animal sauvage cruel et sanguinaire. C’était le cas aussi pour les varisiens du convoi. Certains ressentaient cette même gêne et ils préféraient s’éloigner au plus vite de cet endroit plutôt que de faire front et de combattre.

Après cette nuit de cauchemar, le convoi adopta à l’aube une allure plus modérée, alternant trot et pas. Cela permit de compter ses pertes et de soigner ses blessures, même si ce jour là encore aucune halte ne saurait concédée. Ce ne fut que le soir tandis qu’ils approchaient de Landecorbeau que la caravane s’écarta de la route pour s’approcher de la Charbonneuse et s’installa pour la nuit. Cette nuit-là, les varisiens firent un grand feu de camp, dansèrent et chantèrent pour ceux qui avaient été tué, aussi bien parmi les membres de la caravane que pour les loups… Quelqu’un d’extérieur aurait pu croire que ces chants et danses étaient festifs et endiablés, mais avec un peu de sensibilité ou une connaissance plus approfondie des varisiens, on pouvait ressentir leur douleur et leur tristesse et leurs chants et danses étaient là pour ne pas se laisser envahir par les ténèbres et la mélancolie. Oradin trouva encore une fois la compagnie d’Hakeen, le maître marchand ulfe. Ce dernier lui proposa un manteau en peau animale, dans le même style que ceux que portaient les ulfes – « Vous pourrez passer facilement pour une sorte de garde du corps ou quelque chose de la sorte lorsque nous serons à Baie-de-Roderic, voire même un marchand parmi mes alliés. Demain nous passerons à Landecorbeau afin d’effectuer une halte technique puis en route pour le port des pirates ! » – Hakeen souriait légèrement avec un peu de mesquinerie, sachant que le nain serait assez mal à l’aise une fois là-bas. L’ulfe était marqué par les deux jours récemment passés. Il avait donné de l’épée et de la hache et s’était avéré un très bon combattant qui n’avait rien à envier au chef des mercenaires. C’était à se demander s’il avait vraiment besoin d’un garde du corps…

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Offline poulosis  
#11 Envoyé le : mardi 19 septembre 2017 19:31:19(UTC)
poulosis
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Ce voyage était une nouvelle illustration des bienfaits de la civilisation. Avec chaque cité traversée, les membres du convoi pouvaient en apprécier les avantages. Elle facilitait les unions et accueillait les enfants en toute sécurité dès leur naissance, dispensait un enseignement, en magie ou autres, et favorisait les échanges. Elle protégeait et soignait ses protégés. Sa disparition laissait un vide aussi sinistre que l’Abbaye de Chantevent. Lequel vide se remplissait aussitôt de monstres comme ceux que les alentours d’Oreilles-du-Loup abritaient. Cet épisode de violence le ramena plusieurs années en arrière. Il avait déjà senti l’haleine fétide d’un loup réchauffer son visage.

Alors que deux éléments de la meute bondissaient dans sa direction, le temps parut se figer, l’espace se distordre. Les hurlements et les grognements du combat se fondirent en un seul jappement perçant, répété inlassablement. Une louve aux poils hérissés, le dos arc-bouté, se détendit brusquement pour le mordre, mais une chaîne fixée à son collier bloqua son élan en plein vol. Elle retomba alors au sol, l’arrière-train devant et la tête en arrière. Un vif coup de rein la replaça dans le bon sens, prête à le happer. Son regard fou furieux et ses crocs baveux, largement découverts, lui promettaient une mort certaine s’il passait à portée des babines retroussées. Lui-même avait instinctivement reculé avec précipitation. Son propre dos avait alors percuté les mains tendues en avant de Pluie-de-Sagesse, le chaman qui devait l’aider à apprivoiser son monstre intérieur. Le vieil homme possédait une force physique insoupçonnée à son âge. « Pour parvenir jusqu’au maître, tu dois déjà dompter ses esclaves. Celle-ci est une louve envoyée par un garou qui a soumis son esprit. À la base, ce n’est qu’un animal sauvage. Tu dois lui imposer ta volonté pour lui rappeler sa condition. Si tu réussis, elle fuira ou obéira, selon ta façon de la mater. »

Tout n’était qu’une affaire de volonté. En maîtrisant ses émotions, Oradin pouvait capturer le regard du fauve, contrôler ses gestes pour rassurer et imposer à la fois. Il était devenu un dresseur de loups. Cette activité lui avait coûté de nombreuses cicatrices, mais il n’aurait pu poursuivre sur la voie du paladin sans cette épreuve. Le temps et l’espace reprirent leurs droits. Avec eux, l’odeur de fauve revint, puissante et agressive. Les jappements et grognements le percutèrent de plein fouet. Mais son bras resta ferme. Sa hache fendit le crâne de la première bête tandis que la deuxième venait s’écraser contre son bouclier. Il n’avait plus peur. S’il ne pouvait nier apprécier la ténacité et l’esprit de meute de ces animaux, il demeurait fidèle à son serment et à son dieu. Les loups n’étaient que des être naturels, facilement dominés par les garous, dont la présence maléfique planait derrière leur férocité et leur agressivité. Tant pis pour eux, même s'il le regrettait. Il avait surtout été déçu de ne pas avoir écrabouillé au moins un maître à l'origine de tous ces morts, durant le trajet. Il avait un passif à régler avec les maudits représentants de cette race. Une ardoise qui ne s'effacerait jamais.

La pelisse atterrit à ses pieds. Il avait accepté ce manteau qui complèterait à merveille la panoplie de l’oracle qu’il préférait toujours jouer, sur ce coup-là. « Mon but est d’obtenir des informations, pas de mettre en prison cette racaille. J’ai peur de céder à la tentation, si j’y vais tout harnaché ! Et puis, me montrer sous un jour bienveillant, plutôt que comme un garde du corps revêche, devrait faciliter cet objectif, ne croyez-vous pas, Maître Hakeen ? Soulager quelques gaillards de leurs douleurs pourrait s’avérer plus fructueux que d’en infliger de nouvelles. Mais je suivrai vos conseils en la matière. Vous êtes plus expérimenté que moi, au sujet de cette ville et ses habitants. »

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#12 Envoyé le : dimanche 24 septembre 2017 21:36:12(UTC)
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Le convoi finit par reprendre sa route après ces deux journées mouvementées à travers les territoires des loups. Le terrain était vallonné, traversé de temps à autre par des bosquets d’arbres ou accidenté par des élévations rocheuses qui formaient des surplombs, des vallées ou des petites falaises qui se dressaient sur un côté de la route comme pour la délimiter. La première partie du voyage se déroula sans trop de problèmes, par contre la seconde partie connut une tentative d’attaque de la part d’une horde de brigands qui avaient sans doute aperçu le convoi de loin depuis une élévation rocheuse et préparé une solide embuscade plusieurs heures avant l’arrivée du premier charriot. Un endroit un peu encaissé, Bois-grognons d’un côté, une butte de terre et de roche de l’autre, les brigands avaient provoqué un éboulement de roches sur la route pour bloquer les charriots. Mais les éclaireurs mercenaires à la solde des varisiens avaient pu avertir à temps et les charriots faisaient demi-tour pour contourner l’obstacle, tandis qu’une partie des mercenaires de la caravane protégeait les arrières des brigands qui attaquaient par petits groupes lorsqu’ils virent que leur embuscade avait été déjouée.

Les charriots filèrent donc dans une lande aux herbes hautes et au sol plus meuble, les roues s’enfonçaient, les charriots peinaient à avancer. C’était ce qu’attendait le gros de la horde brigande pour attaquer une fois les charriots embourbés. Immobilisés, impossible de se mettre en position de cercle défensif, le convoi s’étirait sur toute sa longueur et la majeure partie des mercenaires chargés de protéger le convoi était aux prises avec les brigands sur le lieu de l’embuscade devenu un vrai traquenard pour eux. Le combat était inévitable et fut assez rude. Les varisiens et les ulfes devaient défendre sur tous les fronts, les brigands ne faisaient aucune distinction parmi les victimes, tirant dans le tas, détruisant le moindre front de défense par des assauts rapides et précis qui rapidement provoquèrent de nombreuses victimes parmi les varisiens mais aussi les familles marchandes ulfes. Les brigands avaient bien ficelé leur affaire et le convoi semblait être perdu pour les varisiens et les ulfes, un butin assuré pour les malfrats…

Mais alors que le combat semblait perdu, que les morts ne se comptaient plus, qu’Oradin avait épuisé presque toutes ses ressources aussi bien physiques que divines, implorant Adabar de leur venir en aide au nom du commerce qu’il défendait, des hurlements barbares et semi-sauvages jaillirent derrières la ligne des brigands et un groupe de chasse shoantis fondit sur eux. Les barbares étaient dix fois moins nombreux que les brigands mais un seul de ces combattants équivalait sans problèmes plusieurs de ses ennemis. Les varisiens et les ulfes survivants reprirent du poil de la bête, Oradin l’avait déjà le poil tellement il grognait, et grâce aux shoantis, ils mirent en déroute la horde brigande, sauvant par là même le convoi. Il était temps de compter ses morts, d’effectuer les rituels pour honorer les morts et de reprendre la route afin de trouver un abri moins exposé. Les shoantis parcouraient les Collines de Curchain plus au nord, chassant un groupe d’orcs qui avaient massacré un village shoanti, tué de nombreuses femmes et enfants, le tout ayant fini dans un immense brasier. Des femmes avaient été enlevées et les guerriers étaient partis les récupérer avant qu’elles ne deviennent les compagnes forcées de ces immondes peaux vertes. Ils avaient dévié de leur route sur injonction de leur chamane pour venir en aide et sauver les varisiens. Shoantis et varisiens étaient les premières peuplades à occuper la Varisie et depuis des temps immémoriaux, les deux peuples s’entraidaient. Les varisiens apportaient aux shoantis tout ce dont ils avaient besoin étant donné qu’ils vivaient dans des terres arides et inhospitalières, leur nomadisme leur permettait de parcourir la Varisie et de venir rencontrer les clans barbares pour le troc. Les shoantis quant à eux guerroyaient constamment contre les orcs et éventuellement autres menaces qui descendaient des Monts Kodar et menaçaient d’envahir la Varisie.

Le convoi, privé de la majorité de ses mercenaires tués dans l’embuscade, fut escorté par les shoantis et finit par former le campement aux alentours de la cité de Baie-de-Roderic. Ce soir, le feu de camp résonnerait encore de la musique et des chants varisiens, une nouvelle veillée funèbre où trois cultures allaient se mélanger. Maître Hakeen faisait partie des survivants. Très marqué par le combat, il déplorait plusieurs victimes ulfes dont des membres de sa propre famille. Un frère, un neuveu, un cousin, même s’il y en avait peu, c’était toujours de trop, comme pour les varisiens. La moindre victime faisait partie de la famille et à chaque fois une famille était endeuillée. Pour les varisiens, toute la communauté était endeuillée...

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Offline poulosis  
#13 Envoyé le : dimanche 1 octobre 2017 17:34:46(UTC)
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Tant de morts. Conformément à son serment, et à la volonté de son cœur, il avait lutté de toutes ses forces contre les bandits, jusqu’à épuiser ses pouvoirs divins et vider le puits pourtant profond de sa force, en cela seule dépassée par sa foi chez lui. Mais ils étaient tombés sur une adversité d’une organisation et d’une ampleur telles, qu’il n’aurait pas cru possible de rencontrer en ces lieux sauvages. Il partait chasser les pirates, mais il aurait tout aussi bien pu être missionné pour s’occuper de leurs alter egos terrestres. D’où venaient tous ces hors-la-lois ? Lui, un étranger pour la communauté dans laquelle ses parents avaient immigré, en était devenu l’un de ses plus fervents défenseurs. Il ne comprenait pas comment on pouvait s’attaquer à ses semblables, à part avoir de mauvaises mœurs ou être dénué de tout courage. Ces vermines étaient des parasites, incapables de vivre en autonomie hors de la civilisation, comme le pratiquaient les barbares shoantis ou ulfes, ni même apporter aux autres la joie, la sagesse ou les échanges commerciaux des varisiens. Les grognements sauvages et effrayants, la bave poisseuse qui maculait sa barbe, sa hache qui tranchait les chairs comme un papillon rouge sang assoiffé, volant avec avidité de victime en victime, tel était le spectacle offert par Oradin à Abadar pour célébrer la lutte des gens civilisés contre les assauts des mécréants qui voulaient l’abuser, l’éternel combat de la Loi contre le Chaos. Hélas, à quel prix !

Le combat enfin achevé, il était aussitôt parti vérifier comment les enfants s’en étaient sortis. Il retrouva la fillette dont il avait sculpté le visage sur une médaille, qu’il lui avait lancée. Le réconfort de la revoir en vie soulagea immédiatement son corps du poids de toute la fatigue accumulée ces dernières heures intenses. Sa mère, qui dansait encore autour du feu quelques soirs auparavant, avait hélas disparu. Autant pour digérer son désarroi qu’honorer la mémoire de leur famille partie trop tôt, la communauté prenant soin des siens et donc de la pauvre enfant, il partit aider au nettoyage du site. Quelques heures plus tard, il astiquait méthodiquement son équipement. Ce soir, son armure serait immaculée, ses armes lustrées, ses vêtements propres, ses poils impeccablement brossés et nettoyés. Les hommes et les femmes du convoi, barbares ou nomades, shoantis, ulfes ou varisiens, vivaient dans le respect de leurs convictions, tout en affrontant ensemble les ennemis que le destin leur envoyait, qu’ils soient orcs ou brigands. Ils formaient des communautés à part entière, avec leurs lois et leurs coutumes, leurs croyances et leurs valeurs. Ils échangeaient et s’entraidaient. Bref, ils formaient un embryon de civilisation implanté en terrain sauvage, moins sophistiqué qu’en ville mais tout aussi solide. En ardent défenseur des principes d’Abadar, Oradin se devait de rendre hommage aux valeureux combattants. Surtout, son cœur généreux et son âme fidèle partageaient leur douleur.

Depuis le départ du convoi, il avait eu le temps de rencontrer chacun des morts. Il les connaissait. Il avait mangé en leur compagnie, avait discuté de leurs joies et de leurs peines, avait travaillé avec certains et épousé leur vie à tous. Des larmes sincères couleraient, lors de la cérémonie. Il se remémorerait un passé pas si lointain où il avait déjà vécu ainsi, dans une tribu barbare, confronté aux difficultés quotidiennes de la vie en dehors des murs de pierre d’une cité protectrice. Il avait déjà prévu une brève homélie, pour faire ses adieux. “Des héros discrets, fidèles et solidaires, ont emprunté un autre chemin, ici et en ce jour. Puissent leurs dieux accueillir leur âme comme les membres d’une famille pour laquelle ils ont donné leur vie.”

Le nain avait rejoint Hakeen, à un moment où il était seul. Il se sentait coupable de n’avoir pu protéger la famille de celui qu’il considérait comme un ami. Il se tint un instant silencieux à ses côtés. Lorsqu’il parla, sa voix paraissait plus terne qu’à l’ordinaire. « Je suis désolé de n’avoir pu faire davantage pour sauver vos proches, maître Hakeen. Sincèrement navré. Ces maudits cafards étaient sacrément bien organisés, il faut l’avouer, pour les simples traîne-misère qu’ils étaient. N’aurait été la mission que l’on m’a confiée, je serais votre pistard pour les punir. J’aurais accompagné les shoantis pour récupérer leurs femmes et faire calancher ces torche-grognars ! » Il frappa du poing contre sa paume opposée, en colère. Puis il se radoucit. « À propos de cette mission... si vous souhaitez renoncer à notre visite chez les pirates, je comprendrais. »

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#14 Envoyé le : dimanche 1 octobre 2017 22:45:41(UTC)
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Oradin partageait la peine de chaque pèlerin qui voyageait sur les routes du commerce. Ces ulfes étaient des marchands, ces varisiens étaient des nomades qui colportaient les marchandises sous ses formes les plus variées non seulement à travers la Varisie, mais aussi dans bien d’autres nations comme fréquemment celle de l’Ustalaw. Ils étaient tous des serviteurs du commerce et par là même Oradin était leur prêcheur de bonne parole et leur gardien protecteur. Ce soir-là, la veillée fut plus riche en émotions que les précédentes, la peine était palpable et les chants varisiens ainsi que leurs danses semblaient vouloir plonger dans un monde mélancolique que seule Desna pouvait leur proposer. De leur côté, les ulfes gardaient le silence et se perdaient dans le fond de leur corne creusée pour servir de gobelet dans lesquels ils consommaient une sorte de breuvage extrêmement fort et fumant qui allait sans doute leur donner un sacré mal de crâne le lendemain. A la question du prêtre nain, Maître Hakeen garda un moment le silence puis d’une voix lointaine marquée par la douleur et un certain fatalisme, il lui répondit simplement – « Ce sont les dangers que nous rencontrons souvent, lorsqu’on embrasse la voie des marchands nomades. Bois-Grognons est réputé pour abriter une population de monstres et de hors-la-loi. Il n’est pas surprenant de se faire attaquer par des brigands. Ceux-là étaient particulièrement affûtés et puissants. Une horde sans doute. Je vais essayer de trouver quelques renseignements demain à Baie-de-Roderic lorsque nous irons voir mon contact… »

« J’ai déjà connu une horde de brigands qui sévissait du côté des plaines agricoles de Pointe-Sable. Parmi eux il y avait de redoutables guerriers andorans et leur chef imposait une discipline très stricte digne des militaires. C’était une bande très bien organisée et elle a provoqué de sérieux dégâts même dans des petites villes bien organisées et protégées par des hauts murs. C’était un vrai cauchemar pour nous, les marchands. Nous savions qu’en empruntant les routes de la Varisie, ils finiraient par nous tomber dessus. La plupart du temps, ils se contentaient de nous dépouiller et parfois il y avait quelques morts, mais ce n’était pas le massacre que nous avons connu aujourd’hui. Et puis comme toute horde de cet acabit, cela ne dure qu’un temps. Des trahisons internes, un groupe de courageux aventuriers et voilà la horde qui se disloque et part en petits groupes qu’il a été ensuite plus facile de maîtriser. Je ne doute pas qu’il existe encore de nos jours quelques rescapés ou groupuscules de cette bande, mais cela ne représente plus une grande menace pour un convoi aussi important que le nôtre. »

La conversation s’arrêta par l’arrivée de deux shoantis qui se plantèrent devant le nain. Les deux hommes étaient en tenue de guerre, armés, avec les tatouages qui brillaient légèrement comme s’ils étaient pailletés d’argent et de ce fait, scintillaient à la lueur des étoiles et de la lune. L’un d’eux s’avança d’un pas et d’un commun approximatif tenta de se faire comprendre. Il pointa du doigt Oradin – « Chamane voir toi ! Maintenant ! » – Puis il se mit de côté et pointa vers une tente un peu à l’écart où les shoantis avaient dressé leur campement.

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#15 Envoyé le : lundi 2 octobre 2017 19:27:37(UTC)
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Oradin
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Un autre nain que lui aurait pu s'offusquer du ton employé par le shoanti. Mais Oradin n'était pas tout à fait un nain comme les autres. Il avait été élevé dans une cité humaine et savait comment une attitude naturelle chez une race pouvait paraître dérangeante chez une autre. De plus, il avait été sensibilisé à l'art de la diplomatie, lors de sa formation de paladin. Enfin, il connaissait les mœurs rudes des barbares shoantis, et notamment leur méfiance à l'égard des étrangers.

Ceci dit, il fut surpris par la nature de la demande. Il fronça les sourcils. Il regarda le maître marchand d'un air interrogateur. Haussant les épaules, il marqua un temps d'arrêt, avant de se relever. Amicalement, il serra brièvement l'épaule d'Hakeen en signe de soutien. « Je vous retrouve plus tard, mon ami. » Puis il regarda celui qui l'avait interpellé. « Je vous suis. » Il accompagna sa phrase d'un geste signifiant qu'il les suivait.

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#16 Envoyé le : mercredi 4 octobre 2017 22:56:07(UTC)
mdadd
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Oradin suivit les deux guerriers shoantis qui l’escortèrent comme s’il était leur prisonnier, à moins que ce soit leur façon de former une escorte personnelle, qui pouvait savoir quand on n’était pas shoanti et qu’on ne connaissait pas leurs us et coutumes ? En tout cas, ils ne le rudoyaient pas, ne lui enserraient pas les bras avec une poigne forte comme s’ils le trainaient de force, ils n’avaient même pas leurs mains près de leurs armes, une grande hache pour l’un, une épée large pour l’autre, sans oublier des armes plus légères passées à la ceinture ou accrochées au ceinturon d’armes. Le trajet fut assez rapide. Le serviteur d’Adabar fut conduit à une petite tente hémisphérique, comme une espèce de yourte entièrement recouverte de peaux de bête. Un petit feu crépitait devant et un étrange individu s’activait autour à ramasser de la cendre, puis la mélangeait avec une poudre crayeuse avant de cracher dedans et de la malaxer tout en entonnant une sorte litanie aux consonances sinistres à faire froid dans le dos. Puis l’individu allait dans la yourte pendant quelques minutes avant de ressortir les mains vides mais maculée de traces de la pâte obtenue lors du malaxage. Quelques corbeaux s’ébrouèrent à l’arrivée du nain et de son escorte. L’un d’eux croassa même assez bruyamment tandis qu’il agitait ses ailes, regardant les arrivants avec un œil si sombre qu’on aurait dit qu’il formulait un maléfice à l’encontre des intrus.

L’homme en lui-même était des plus étranges. Très maigre, la peau sur les os, il était entièrement chauve et glabre, comme tous les shoantis du reste, la pilosité étant considérée par les guerriers comme une imperfection et une faiblesse, la peau pâle voire cadavérique, il portait des peintures de guerre aux couleurs rouges sang autour du visage, dessinant les contours d’une tête de mort. Sa tenue traditionnelle consistait en un manteau réalisé de plumes noires sans doute de corbeau, qu’il le recouvrait presque entièrement, coiffé par le crâne géant d’un de ces volatiles, entièrement recouvert lui aussi de plumes noire et dont le bec faisait office de visière comme une casquette. A regarder de loin, on aurait dit un humanoïde corbeau géant, de près, on distinguait son visage et son manteau s’ouvrait devant pour voir dessous une simple tunique grise serrée à la taille, soulignant davantage sa maigreur. Autour des poignets et du coup pendaient différents colliers, colifichets et talismans dont un qui représentait une spirale bleutée qui évoquait quelque chose de religieux chez Oradin. Les deux shoantis restèrent debout de part et d’autre du nain sans broncher, jusqu’à ce que l’individu cesse son activité et les regarde. Aussitôt l’un d’eux s’avança en se frappant la poitrine du poing et parla dans leur dialecte avec une voix ferme et forte. Aucune peur, aucun autre signe de quelconque soumission ou respect, chacun avait sa fierté et visiblement leurs statuts étaient sans doute équivalents ou égaux. Le chamane répondit après avoir posé un bref instant les yeux sur Oradin, sa voix était monocorde, lointaine, sans changement d’intonation, sans sentiment, comme si un certain fatalisme inéluctable dictait la vie de tous en ce monde.

Les deux shoantis firent un pas en arrière avant de laisser Oradfin seul en avant et puis firent demi-tour pour retourner près de leurs tentes. Ils ne restaient même pas en retrait au cas où, même pas en sentinelle ou quoi que ce soit. Le chamane devait être suffisamment confiant pour se protéger lui-même ou les shoantis faisaient entièrement confiance au nain qu’ils ne connaissaient à peine que depuis quelques heures pour ne rien craindre de lui. Le chamane fit signe de le suivre et entra dans la yourte pour ouvrir la voie. Oradin suivit avec milles questions dans sa tête, mais que lui voulait entre autre cet énergumène qui ressemblait plus à un mort-vivant qu’autre chose ? Ce fut l’odeur puis la fumée qui l’assaillirent tout de suite après avoir poussé la peau qui faisait office de porte. Dans la yourte, plusieurs litières avaient été aménagées le long du périmètre le plus large, dans chacune d’elle un cadavre de shoanti défunt. Il y en avait 7, sans doute les guerriers qui étaient tombés au combat durant l’assaut contre les brigands. Chacun d’eux reposait sur le dos, portait son équipement de guerre et serrait son arme sur sa poitrine. Ma base de la litière était ceinte de pierres qui formaient un début d’élévation comme si on commençait à dresser un cairn. Chacun avait quelques objets fabriqués de façon artisanale et rudimentaire posés à côté ou sur eux. Ces objets avaient probablement une signification mais Oradin était bien incapable de savoir laquelle. Chacun avait enfin une marque sur le front et le torse à l’emplacement du cœur : une spirale réalisée avec l’espèce de pâte que le chamane malaxait quelques instants avant. Au centre de cette yourte mortuaire, crépitait un petit braséro bas dont la cuve touchait presque le sol et qui rependait une épaisse fumée à l’intérieur pâle et fortement épicée à l’intérieur. Le chamane devait brûler des herbes en plus d’une espèce de charbon qui rougeoyait dedans.

Il invita de la main Oradin à s’asseoir près du braséro, désignant un amas de peaux et de coussins sur lequel on pouvait facilement se vautrer voire s’allonger si on voulait dormir, tandis qu’il faisait le tour des défunts pour vérifier sans doute certains détails, semblant réciter un petit rituel à chacun avant de venir s’accroupir en face du nain. L’emplacement qu’il avait choisi pour lui n’avait ni peau, ni coussin, ni quoi que ce soit et sa position accroupie donnait l’impression que l’oiseau se tenait prêt à s’envoler. Tandis qu’il farfouillait dans une de ses sacoches de ceinture ventrale pour en sortir une sorte de pipe droite à large foyer et décorée tout du long avec des reliefs ressemblant à des runes ou des symboles cabalistiques, avec deux plumes noires qui pendaient près du foyer, il regarda Oradin droit dans les yeux, sans ciller pendant un laps de temps si long que le prêtre commençait à se demander si le chamane état vraiment une personne vivante ou mort-vivante – « Je m’appelle Kar’Uz, héritier de Mille-Os et Corbeau de la Dame des Tombes » – Sa voix était toujours aussi peu… chaleureuse… Il bourra la pipe avec un mélange d’herbes qu’il sortit d’une blague à tabac et commença à l’allumer avec une braise du braséro. Tirant une profonde bouffée qu’il garda longtemps dans ses poumons avant d’expirer, il laissa la pipe bien monter en température et son foyer bien prendre de façon harmonieuse dans le volume d’herbe qu’il contenait.

Kar'Uz

« J’appartiens au Skuan Quah, le Clan du Crâne. Nous sommes chargés d’accompagner les défunts vers l’Ossuaire afin qu’ils ne deviennent pas les serviteurs de la Princesse Pâle et ne viennent hanter les Plaines Cendrées. » – Il tendit la pipe à Oradin après avoir tiré une autre bouffée lui permettant de vérifier qu’elle était à point et parfaitement opérationnelle. – « Ouvres ton esprit Gardien du Premier Coffre-fort. Durant mes méditations avec les esprits ancestraux, ton image est apparue et avec elle, le sphinx à tête de mort. Je dois comprendre pourquoi j’ai eu cette vision. Depuis mes nuits sont hantées par des cauchemars. Je vois des tempêtes, des orages. Je vois un navire fantôme aux voiles déchiquetées et noires, le pavillon noir flotte aux vents et son équipage et à moitié vivant à moitié mort-vivant. Derrière flotte l’image d’une chose immonde mi femme-mi squelette avec un bras osseux en forme de faux. C’est la marque de la Princesse Pâle, l’ennemie jurée de la Dame des Tombes. Qui es-tu, Gardien du Premier Coffre-fort ? Quelle est ta quête ? Cela pourrait éclaircir le mystère de mes visions et mes cauchemars et peut-être que je pourrais t’aider. »

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#17 Envoyé le : samedi 7 octobre 2017 15:10:25(UTC)
poulosis
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Oradin
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À l’invitation du chaman, tel un rocher immuable, Oradin s’assit lourdement sur les peaux étalées à terre. Son armure émit quelques grincements de protestation, vite étouffés par la sérénité du nain. Il était dans l’antichambre du royaume des morts, mais aucune peur ne transparaissait. De fait, sa foi profonde en Abadar l’accompagnait partout, le protégeait de toute couardise. Le nain ne craignait pas la mort. Ce n’était que le début d’un autre voyage, plus proche de son dieu. Il était convaincu qu’il en était de même pour l’homme en face de lui. Par contre, il ne pouvait se défendre d’un certain malaise, qui s’installait petit à petit. La sensation de ne pas être à sa place, comme un citadin confronté aux vociférations d’une tribu de sauvages dansant au clair de lune.

Le barbare ressemblait déjà tellement à un cadavre. En pénétrant dans sa demeure, il avait la sensation d’avoir franchi un seuil menant vers un autre monde, sur un plan extérieur à Golarion. La lumière pénétrait difficilement l’endroit, tamisée par les parois de la yourte avant d’être chassée par l’épaisse fumée produite par l’encens. Pire encore, l’odeur de mort était omniprésente. Pas celle du sang frais, lourde, cuivrée et chaude. Celle si riche qu’elle était écœurante et conférait la sensation que la vie rôdait encore dans les parages. Comme si elle venait tout juste de quitter brusquement les corps dans une explosion saturant l’atmosphère. Non, ici, c’était l’odeur d’après, quand toute chaleur s’était définitivement estompée. Suffisamment froide et doucereusement entêtante pour plisser le nez de dégoût et vous faire sentir que vous n’étiez pas à votre place.

Oradin considérait le prêtre de Pharasma d’un œil curieux. Il se demandait si lui-même dégageait autant d’aura divine que cet homme. La foi imprégnait le shoanti au point de propager le royaume de sa déesse jusque sur le plan physique, attirant ses interlocuteurs dans son univers. En était-il de même, avec lui ? L’église d’Abadar lui semblait tout de même moins en décalage avec le quotidien des vivants. Elle ne visait qu'à épanouir les individus au travers d’une civilisation plus organisée et communicante. Elle veillait à ce que chacun puisse tirer profit de la communauté, pour le bien-être de tous. De fait, il se considérait plus jovial et accessible que son hôte. N’eut été son passé commun avec une autre tribu, il aurait sans doute ri de ce rituel ridiculement primitif. Mais il avait vu des choses, alors... Il y avait de la sagesse à écouter ces hommes et ces femmes.

Le chaman interrompit ses réflexions en commençant enfin à parler. Lorsqu’il lui tendit la pipe, une lueur d’intérêt s’alluma dans ses yeux bleu acier. Instinctivement, sa main gauche se porta à sa ceinture, où trônait habituellement la sacoche abritant sa blague à tabac. Elle se ravisa lorsque le nain se rappela qu’il avait préféré la conserver chez lui. Compte-tenu de la nature de sa mission, laquelle le mènerait tôt ou tard à naviguer - et le plus tard sera le mieux ! - le risque de mouiller son précieux chargement était trop grand, et donc inacceptable. Aussi empoigna-t-il sans vraiment réfléchir la pipe offerte par le chaman pour aspirer son contenu. Mais la méfiance reprit aussitôt le dessus. Il suspendit son geste, dans l’attente d’apprendre pourquoi Kar’Uz l’avait convoqué, avant d’en tirer une quelconque bouffée. Ce qu’il lui révéla de ses visions le décida à finir de porter à sa bouche le calumet. Des adeptes d’Urgathoa se cachaient-ils vraiment derrière la recrudescence de la piraterie dans le golfe ? Il ne saisissait pas le lien. Aussi, après une première goulée, il éclaira le chaman.

« Je m’appelle Oradin. Je suis en mission pour l’église d’Abadar. Nous nous inquiétons du fort ralentissement du commerce dans le Golfe de Varisie, à cause de pirates beaucoup trop entreprenants. Leurs activités croissantes paralysent les échanges. Il faut que cette situation cesse, pour que chacun puisse à nouveau renouer des liens profitables à tous. Je dois donc découvrir ce qui se trame. Si tu peux m’aider, je t’en serais reconnaissant. Comme beaucoup d’autres avec moi... »

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#18 Envoyé le : samedi 7 octobre 2017 22:27:20(UTC)
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Oradin avait gardé la pipe traditionnelle shoantie, tirant des bouffées de cet étrange tabac qu’il ne connaissait pas, un mélange d’herbes sans doute, mais qu’il semblait apprécier malgré que ce soit relativement fort. C’était fort sans doute pour des personnes de petite constitution, mais pas vraiment pour un nain bien-sûr, les nains avaient un corps capable d’absorber des substances coriaces qu’elles soient alcoolisées, droguées ou empoisonnées et ce n’était pas le mélange d’herbe de ce chamane malingre qui allait venir à bout du serviteur d’Adabar à l’esprit si ordonné et civilisé. Kar’Uz avait sorti une sorte de petit tambourin, un hémisphère en bois à la surface de laquelle on avait sculpté puis peint des motifs ou symboles étranges à l’image de ceux qu’il avait sur la figure. Il ponctuait les phrases d’Oradin en frappant sur la peau tendue sur la partie plane et creuse. Sur les côtés pendaient des lanières de cuir qui passaient dans toute sorte d’osselets et de pièces métalliques trouées qui s’entrechoquaient et venaient ajouter des bruits de grelot au son du tam-tam.

Le nain fumait le calumet comme il fumait sa pipe, se plongeant dans ses réflexions, ses rêveries, une transe, il avait chaud, le son du tam-tam s’amplifiait, prenait de plus en plus de volume, Oradin se sentait de plus en plus hypnotisé par les rougeoiements du brasero devant lui, le foyer prenait la forme d’un foyer de forge, l’air au-dessus ondulait sous l’effet de la chaleur, il entendait ensuite un bruit lointain qui lancinait. Il se concentra dessus, ça devenait de plus en plus fort, le choc de l’eau sur la roche, puis encore et encore, le ressac des vagues contre la falaise, une grande étendue d’eau agitée par le vent, un vent de tempête qui se levait soudain, la surface de l’eau du golfe qui se couvrait de moutons blancs, l’écume des vagues qui se formaient, une myriade de voiles blanches qui s’affolaient et tentait se mettre à l’abri dans les criques les plus proches car ils n’avaient plus le temps d’aller jusqu’à un port, les pêcheurs s’affairaient sur les ponts des navires, les pêcheurs mais aussi les marchands et les autres bateaux.

Puis la tempête se leva définitivement, des trombes d’eau, un déluge constant, des vagues qui passaient par-dessus les ponts, des voiles qui se déchiraient et une écume noire qui se détachait d’une falaise pour fendre les eaux au milieu des bateaux de pêche, fonçant droit vers un navire marchand bien dodu qui tentait de rester à flots. Ne se préoccupant pas des bateaux de pêche sur son passage, le deux-mâts aux voiles noires déchirées les percutait et les éventrait sur son passage, l’ombre de la mort dans son sillage. Le fracas du bois qui éclate, les cris des marins, matelots et pêcheurs qui se noient ou finissent éventrés par une esquille de bois ou écrasé par un morceau de bateau qui leur tombait dessus, une ombre glaciale qui une fois morts dans d’atroces souffrances baignait les victimes de volutes brumeux verdâtres dans laquelle ils semblaient disparaître définitivement. Mais c’était pour mieux réapparaître sur le pont du navire fantôme après avoir atteint la non-vie qui marche et c’était pour faire déferler cette force surnaturelle et maléfique sur le navire marchand qui fut entièrement ravagé, pillé puis détruit par ces pirates servants de la Princesse Pâle.

Oradin voyait encore les combats et les massacres sur le pont du navire marchand, ici u matelot prit à partie par deux pirates morts-vivants qui le frappaient à coups de poings jusqu’à ce qu’il devienne un corps décharné sanguinolent, là-bas un maître d’équipage qui se battait contre une femme en rouge avec un bandeau sur l’œil et qui prenait un énorme plaisir à placer des petites attaques blessantes avec ses lames fines et courbes, des blessures plutôt vicieuses qui à priori faisaient énormément mal sans pour autant être mortelles. Le maître d’équipage tentait de rester en vie et tentait de repousser son adversaire, mais il se vidait de son sang de plus en plus à chaque nouvelle blessure douloureuse. Sur le pont du navire fantôme, un groupe de personnes qui se délectaient du spectacle dont cette femme aux cheveux blancs qui paraissait si froide et cruelle, elle portait une robe sacerdotale rouge avec des pièces d’armure noire et visiblement elle exerçait un contrôle sur les non-morts qui attaquaient les marchands. Et bien d’autres scènes dont l’atrocité fit frémir le nain et le fit sortir de sa transe.

Kar'Uz

Il respirait bruyamment comme s’il cherchait son souffle. Il tenait encore fermement le calumet manquant de le briser avec sa poigne de fer, il avait chaud et transpirait. La dernière image était ce navire fantôme qui disparaissait dans la falaise, un flot de sang dans son sillage et enrobé de son nuage de volutes verdâtres. Sur la droite, au loin, Oradin percevait les lumières d’une ville coincée entre les montagnes et la mer. Le chamane rouvrit les yeux et cessa de tambouriner sur son tam-tam. Il saisit délicatement le calumet des mains du serviteur d’Adabar qui semblait avoir perdu d’un seul coup toutes ses forces – « Je ne sais pas ce que tu as vu. Tout ce que je sais, c’est que les esprits des défunts t’ont visité. Un nom m’est apparu : Gruankus. Il y a une écume noire près de Gruankus. Ce mystère t’appartient et ce n’est pas à moi de l’élucider cette fois. Maintenant je sais qu’il se passe quelque chose d’important et de grave d’après ce que tu m’as révélé et que c’est ta quête et non la mienne, La Dame des Tombes m’a placé sur ta route parce que ceux que tu dois combattre sont des serviteurs de la Princesse Pâle. Maintenant, je sais que tu es sur la bonne route, alors je ne peux plus rien faire pour toi. » – Kar’Uz se leva et fit le tour des défunts, reprenant son travail de Corbeau. D’ailleurs, la yourte en était envahie. Ils avaient dû rentrer pendant la transe et ils s’étaient fichés partout mais aucun n’était posé sur un corps, toujours à côté, tel des gardiens.[/dit]

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#19 Envoyé le : lundi 9 octobre 2017 01:57:48(UTC)
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Ce n’était pas du margoulin, là. Non, on avait sauté plusieurs catégories et directement tapé dans le viandar. Et du redoutablement létal, avec ça. Il n’était pas un trousse-pet, mais sa mission poquait ferme ! Il avait foutument besoin de tiser. Du très costaud. La séance l’avait déshydraté, qui plus est. Après une journée de combat, toutes ces horreurs commençaient à peser lourd sur son âme. Tant de sang, tant de chaos…

Le temps de reprendre son souffle et ses esprits, le paladin contempla le chaman, histoire de refixer ses repères dans l’espace et marteler son maudit mal de mer bien à plat. Le barbare reprenait tranquillement ses activités, l’air de rien, entouré de ses ouailles emplumées. Cet homme ne faisait plus montre d’aucune émotion. Décidément, il avait déjà un pied dans la tombe, même les deux. Cependant, il lui était redevable. Grâce à la substance qu’il lui avait fait aspirer, ou ses pouvoirs magiques, voire les deux, il avait pu découvrir le vrai visage de ses ennemis. En admettant qu’il n’ait pas menti, bien sûr. Quelle autre cible que des adeptes d’Urgathoa un fidèle de Pharasma pourrait-il désigner ?

Les scènes de sa vision défilèrent de nouveau dans sa tête, lui imposant la même nausée qu’il avait ressentie plutôt. Toute cette eau secouée de soubresauts, ballotant des cadavres figés par l’horreur, les combats sanglants, Lame Rouge, aussi vicieuse que borgne, et Cheveux d’Argent à l’esprit corrompu, qui relevait les morts… Il frissonna de dégoût et serra le poing de colère. Non, tout cela était trop vivant, comportait trop de détails, pour que ce ne soit pas la réalité. En outre, le nom de Gruankus revenait sur l’enclume. La nature de son ouvrage se précisait.

Le chaman avait la responsabilité de sa tribu. Celle-ci avait déjà bien souffert contre les culs verts. Les hommes se devaient d’aller secourir leurs bavettes. Il ne pouvait demander davantage aux shoantis, qui avaient déjà sauvé leur caravane d’un anéantissement certain, au prix de nombreux morts dans leurs propres rangs. Son esprit enfin focalisé sur le réel, il se redressa, bien qu’avec difficulté. Pharasma était la déesse des prophéties, également. Il ne connaissait pas leur salut traditionnel, aussi improvisa-t-il.

« Puisse le destin t’être favorable, Kar’Uz, pour toi et les tiens. »

D’un pas lourd et mal assuré, il sortit de la tente et se dirigea vers la première bouteille de tord-boyaux qu’il aperçut. Il en avala une large rasade. Pour désinfecter tout le mal qui avait souillé son cœur et ses pensées, en ce jour funeste. Demain, quand ils auront honoré les défunts, il irait trouver Maître Hakeen pour lui confirmer sa destination : Gruankus.

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#20 Envoyé le : samedi 14 octobre 2017 17:24:07(UTC)
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Oradin laissa les shoantis et leur chaman derrière lui, rejoignant les varisiens et les ulfes et se laissant aller à quelques boissons fortes avant de retrouver sa couche pour une nuit sans rêves, enfin il aurait bien aimé sans doute. Cette journée avait mis chacun à rude épreuve et la séance avec le chamane shoanti n’avait pas arrangé les choses. Cette nuit-là, le serviteur d’Adabar rêva de mer agitée, de vent de tempête, de bateau fantôme, de l’ombre de la mort en marche qui planait et qui étendait ses tentacules au-dessus du Golfe de Varisie, prenant le contrôle des navires, de la flotte des pirates, des iles de l’archipel puis s’accrochant à chacune des villes et chacun des villages le bordant. Gruankus, Port-Énigme, Baie-de-Roderic, Pointe-Sable, Magnimar, toutes ces villes étaient touchées et envahies par ces membres pourrissants. Chaque fois qu’une ville était touchée, des gros rats sanguinaires semblaient sortir de partout et envahir la ville, répandant la maladie et semant la mort autour d’eux, que ce soit à cause de la maladie purulente comme la peste ou par leur nombre lorsqu’ils se jetaient sur des victimes pour la dévorer avant même de l’avoir tuée. Des cris, des visages horrifiés, l’ombre noire du mal s’étendait sur chaque village ou ville de la moindre importance à la plus grande et finissait par semer la mort sur son passage avant de les relever pour former une armée de morts-vivants qui allait poursuivre l’œuvre de mort et de destruction dans les terres. Bientôt toute la côte serait infectée et après ?

Plusieurs fois Oradin se réveilla en sursaut et en sueur, les images encore devant ses yeux engourdis, puis il essayait de se rendormir en maudissant ce chamane qui lui avait sans doute retourné l’esprit et provoqué cet état de cauchemars permanents. Le calumet… Ce devait être une sorte de drogue et il était en plein délire. C’était sûrement ça ! Comment une bande de pirates, avec un seul navire et un équipage même mort-vivant avec leur prêtresse impie pouvaient provoquer autant de ravages ? Enfin quand même, il y avait des faits. Rares étaient les navires marchands qui parvenaient à ressortir indemnes du Golfe de Varisie ces derniers temps, alors soit les pirates étaient beaucoup plus nombreux et entreprenants ces derniers temps, comme pour se venger d’avoir été chassés de Port-Énigme par les Mages du Code, soit ce navire aux voiles ressemblant à des linceuls existait réellement et leur équipage était vraiment dangereux. La nuit finit par passer et l’aube semblait bien froide au nain qui avait un mal de crâne pas possible et toute la fatigue de la veille qui ne s’était pas évacuée. Dehors des gens s’agitaient, il se força à regarder. On était à l’approche de l’hiver, il faisait froid, la brume s’était levée. Oradin aurait bien aimé rester sous les couvertures et près du feu, mais les varisiens et les ulfes étaient déjà à l’ouvrage. Les uns préparaient le déjeuner du matin, d’autre organisaient le campement, on avait redistribué les tâches et les armes afin de former un groupe de défense et de sentinelles et aussi bien les nomades que es marchands y participaient, il en allait de la survie de la caravane.

Il y avait quelqu’un qui approchait, Oradin essaya de se concentrer dessus mais sa vision restait brouillée par la brume et il avait l’impression d’être sur le pont d’un navire en pleine tempête. Un homme, grand, assez robuste, le nain se raidit, prêt à en découdre, il remarqua que même bouger lui demandait un effort considérable et pire que tout, il avait l’impression que chacune de ses articulations était endolorie et que chacun de ses muscles était courbatu. Il était plus ma qu’il n’y croyait. La silhouette s’était approchée et Oradin n’avait pas réussi à se lever. Les bottes se plantèrent près de lui, des bottes épaisses recouvertes de peaux maintenues par des lanières de cuir. Une voix parla, Oradin mit un moment avant de la reconnaître et de comprendre ce qui avait été dit. C’était Hakeen, il avait déposé un bol en terre cuite rempli de quelque chose – « Tiens, le chamane shoanti a dit que tu aurais besoin de ça ce matin. Je suis bientôt prêt à partir pour Baie-de-Roderic. Rejoins-moi quand tu seras prêt. »

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