23-24 Kuthona 4716 - Schloss Caromarc & Lepidstadt, comté de Vieland
Les deux jours suivant furent un véritable tourbillon d'activité pour Gazda. Il passa la première journée à assister Lukas, fouillant chaque étagère du véritable capharnaum qu'était la bibliothèque du comte. Malheureusement, leurs efforts ne donnèrent pas grand chose...enfin, il n'en était pas sûr. A eux deux, les chercheurs avaient découverts un curieux poème marqué d'un sceau de la Voie dans l'un des ouvrages du comte, mais ils n'étaient pas certains du sens à lui donner. Du moins, pour le moment, si ce n'est qu'il était écrit en ancien varisien.

Poème de la Couronne putréfiée


Le second jour fut tout aussi occupé. Il dût faire ses adieux à sa famille...enfin, il ne partait pas indéfiniment, mais il ignorait pour combien de temps...où s'il reviendrait. Il prit également le temps...presque contraint et forcé...de prendre contact avec soeur Winter Klakzcka de l'église de Pharasma. Cette dernière l'écouta attentivement, mais ne s'opposa pas à son départ. Il était du devoir de tout fidèle de la Dame des Tombes de traquer et détruire les viles nécromants de la Voie des Murmures, et Winter aurait été bien en peine de trouver un défaut à la quête de Gazda. Elle lui donna son assentiment, avec sa promesse de faire des rapports réguliers à l'église quand il en aurait l'occasion. Elle le questionna également sur Lukas, et sur Zaonessa, mais il parvint à s'en tirer, au déplaisir de la religieuse, avec des réponses vagues.

Finalement, il fit un détour par la boutique d'Albine l'enchanteresse, afin de faire ensorceler une partie de son équipement. Etant donné la puissance sinistre de la Voie, cela ne serait pas de trop. Enfin, au coucher du soleil au soir du 24, il était fin prêt. Plus qu'une bonne nuit de sommeil réparatrice et il pourrait se mettre en route...

« Bonjour madame ! Je vous en prie, pas de “messire” avec moi, je ne suis qu’un modeste étudiant de Lepidstadt. Je sais que votre poste est important ici, et vous donne beaucoup de travail. Aussi je ne vous dérangerai pas longtemps. Je m’appelle Gazdă, pour vous servir. Peut-être puis-je vous aider, du reste ? »

Il marqua une pause. Il porte éventuellement un sac de linges ou l’aide à étendre un drap. Il poursuivit son interrogatoire. « J’aimerais juste savoir si vous avez pris en charge des clients particuliers, je dirais il y a au moins une semaine ? Du genre inquiétant ou étrange, pas comme la majorité des gens, voyez ? En tout cas, ils ne devaient guère ressembler à des nobles ou des chasseurs. Le moindre soupçon d’idée m’intéresse, n’hésitez pas. »

Le spirite savait que les invités actuels n’avaient pas rencontrés de nouveaux clients. Or à part un cas, tous ceux dont il connaissait la date d’arrivée, étaient là depuis cinq jours. Cela devait donc faire au moins une semaine que les adeptes de la Voie étaient passés par là.

« Nous avons un contentieux à régler avec eux, mon amie ici présente et moi-même. Mais ne vous inquiétez pas, vous ne serez pas impliquée, bien sûr ! » Il formait le pari que ces invités n'avaient pas dû être particulièrement appréciés du personnel.

Et s'ils venaient rencontrer quelqu'un, le plus probable selon moi, je me demande bien qui. « Si cette personne est encore là, on doit sans doute la perturber, avec toutes nos questions pas du tout discrètes ! » ajouta Anya

Le spirite hocha la tête, l'air un peu inquiet. Qui avait l'air le plus perturbé par leurs interrogatoires ? Un nom lui vint bien sûr immédiatement à l'esprit.

« S'ils sont restés si peu longtemps sur place qu'ils n'ont pas utilisé de chambre, ils ont au moins déposé leurs chevaux à l'écurie. Allons voir le palefrenier, peut-être les aura-t-il rencontrés... Dites donc, vous avez une santé de fer, pour remuer autant de linges ! » Il sourit a la brave femme. « Hum... Je me demandais... Belik m'a paru sur les nerfs, depuis notre arrivée. J'espère que nous ne l'avons pas vexé d'une quelconque manière ? Ou bien est-ce son caractère habituel ? »

Il demanda ensuite où trouver le palefrenier, ainsi que son nom, et s'il était plus aimable que Belik.

L'Ustalavien lui rendit son sourire.

« Bonjour, heureux homme. Vous devez avoir l'occasion d'approcher de belles bêtes, avec tout ce beau monde, n'est-il pas vrai ? Je m'appelle Gazdă, et voici Trestelame. Nous sommes de passage dans cette bien belle propriété. Nous recherchons une poignée d'hommes, qui ont dû passer ici il y a de cela au moins une semaine. Leurs chevaux ne devaient pas être très bien traités, du reste, car ils ne sont pas du genre à faire attention aux animaux. Ni même aux vivants, si vous voyez ce que je veux dire... Ils ne seraient pas restés la nuit et seraient donc repartis rapidement. Sans doute vous ont-ils paru étranges, malsains, voire les deux. Cette description correspondrait-elle à certains visiteurs dont vous vous souviendriez ? »

Le sang de Gazdă s'accéléra aux propos du palefrenier. Il semblait qu'il ait fait mouche ! D'une voix plus excitée, il relança :

« Oui, ce doit être eux ! Combien étaient-ils, vous en souvenez-vous ? Savez-vous s'ils ont été voir quelqu'un d'autre, ici, hormis Mme Ivanja ? Et vers où ils sont repartis? »

Il demanda ensuite où ils pouvaient trouver cette dernière.

Il jeta un regard interrogateur en direction de Trestelame, et si elle avait fini de son côté, il proposa de laisser travailler leur interlocuteur, lui assurant qu'il avait été très utile, le remerciant mille fois.

« Au tour de Mme Ivanja ? Enfin, des indices tangibles ! Nous approchons du but ! Je me demande tout de même qui ils sont venus voir ici. »

« Oh, bien sûr ! C'est tout à fait compréhensible. Nous allons attendre, tout simplement. Peut-être pouvez-vous la prévenir que Gazdă Duch et Trestelame souhaiteraient lui parler ? Ça ne prendrait que quelques minutes. »

Il se tourna vers Trestelame. « Bien sûr, tu peux rentrer, si tu préfères. Je vais aller voir du côté de ces deux bâtisses, là en attendant. »

Il désignait sans le savoir la maison du maître chasseur et ses cages, dont il désirait faire le tour, des fois qu'il remarque quelque chose d'inhabituel.

« C'est trop irrésistible. J'ai une idée ! » ajouta-t-il, avec un clin d'œil vers Trest'.

Le spirite regarda autour de lui et choisit un coin où personne ne pouvait le voir, le cas échéant. Puis il libéra Anya, qui se livra à son habituel manège effréné, dès qu'elle fut sortie, trop heureuse de retrouver l'extérieur.

« Tu explores rapidement, et tu reviens, mère, d'accord ? »

« Ne t'inquiètes pas, mon fils chéri. C'est mon rôle habituel, après tout ! »

Elle traversa la porte... que le colosse toucha aussitôt. Elle s'illumina. Ainsi, son fantôme aurait de la lumière, pour voir de l'autre côté.

Lumière sur la porte.

Anya revint, toute affolée. « C'est affreux ! Il y a tout un tas de créatures, là-dedans ! Les pauvres... Enfermées comme des condamnés attendant leur tour à l'échafaud ! »

Lorsqu'elle eut fini d'énumérer les pensionnaires, Gazdă dodelina de la tête. « Tes condamnés forment tout de même une belle brochette de monstres ou de prédateurs très dangereux. Que suggères-tu, que nous les libérions ici même ? »

La fantôme eut l'air affligé. « Non, bien sûr, mais ils ne méritent pas un tel... »

Le spirite la coupa, un brin énervé. Non par les propos de sa mère, mais par son impuissance, face à la situation, comprit tout de suite cette dernière. « Hélas, nous ne pouvons rien y faire. Il y aura toujours des gens fortunés, prêts à payer pour le frisson d'une chasse exceptionnelle. Ils ont suffisamment à manger chaque jour, sans effort. Seul le sport compte, pour eux. Voilà où mène l'oisiveté ! Ces nobles sont devenus des monstres, eux-mêmes. Je suis sûr que certains ont déjà songé à pourchasser des êtres humains, pour le plaisir... En tout cas, il n'y a pas trace de ceux que nous cherchons, a priori. Nous n'avons donc plus rien à faire ici. Retournons à la tour, attendre notre tour. »

La tête basse, Anya commença à avancer d'un morne pas et déclara, le ton désabusé : « trop drôle, ton dernier vers... » Elle fut soudainement aspirée par son hôte, qui enchaîna, tout guilleret, « à ton tour, bon retour. Tu ne croyais pas, suivre tous nos pas ? » Il se tourna vers Trestelame. « Désolé pour cette mesquinerie, mais ces petites victoires font du bien, tu ne peux pas savoir ! Ceci dit, elle n'a pas tort. Je ne sais pas ce que tu en penses, mais ces prétendus chasseurs me dégoûtent au plus haut point ! C'est pour cela que je n'aime pas les chats, du reste. Ils jouent avec leur proie, avant de la tuer. Des bestioles aussi sadiques que ces pervers, vraiment. »

Le spirite ne s'attendait pas à trouver Melfur chez la voyante. Il lui jeta un regard interrogateur, sans s'attarder, néanmoins, afin de répondre à son interlocutrice.

« Bonjour, Madame Ivanja. Nous avions quelques questions à vous poser, mais vous devez y être habituée. Ce qui est plus inhabituel est que cela vous concerne et fait appel à vos souvenirs. » Il s'interrompit brièvement, le temps pour lui d'indiquer à Melfur qu'il pouvait rester, bien sûr, avant de reprendre le fil. « Nous savons que des hommes sont venus vous voir, récemment. Des êtres malfaisants, dont l'un portait un étrange animal sur l'épaule. Vous devez bien savoir de qui je parle, n'est-ce pas ? Voulez-vous bien nous révéler le pourquoi de leur visite ? Vos informations pourraient se révéler cruciales, pour sauver Golarion de sombres machinations, rien moins que ça ! »

Il espérait qu'elle ne trempait dans cette affaire, d'une manière ou d'une autre, et observa attentivement sa réaction.