ozreh semblait être de leur côté ce matin-là : une brume relativement épaisse recouvrait la cité qui, à cette heure fort matinale, semblait avoir du mal à s'extirper de sa langueur nocturne.

La veille en fin d'après-midi, Grau était passé à la Poissonnerie pour leur apporter les petits équipements qu'ils avaient demandés et pour leur indiquer que les messages et autres missives avaient été délivrées en bonnes mains. Le sergent avait passé un peu de temps avec eux, évoquant les événements qu'ils avaient partagés et mettant au point les détails de la diversion pour le lendemain. Il régnait dans l'air comme une ambiance à la fois triste et résolue de séparation imminente. S'il fallait croire la Maréchale, il y avait de grandes chances pour que la plupart des aventuriers, malgré les réticences déjà exprimées par Théobald, doivent chercher le salut de Korvosa à l'extérieur des murs de la ville… et cela impliquerait une absence potentiellement longue. Bien malin celui qui pouvait deviner ce qui allait se produire au cours de tout ce temps, et ce qu'ils trouveraient - et qui ils trouveraient - quand ils reviendraient.

Après s'être réparti l'équipement qu'ils comptaient emmener avec eux et avoir vérifié qu'ils ne laissaient rien d'important derrière eux, les aventuriers avaient pris la direction des égouts. Théobald en tête, ils avaient parcouru à nouveau le chemin sinueux qu'Éries leur avait indiqué quelques jours plus tôt. De temps en temps, certains d'entre eux avaient l'impression d'apercevoir une silhouette ou un mouvement dans les ombres… difficile de dire s'il s'agissait seulement de leurs craintes qui prenaient la forme d'illusions visuelles ou si c'était les alliés d'Éries qui surveillaient leur passage. Quoi qu'il en fût, à part ces étranges ombres furtives, leur trajet se déroula sans encombre.

Ils arrivèrent ainsi à une bouche d'égout qui surplombait le canal Sainte-Alika, celui-là même qui séparait la partie principale de Korvosa de l'île d'Endrin et qui, autrefois, était surplombé par de nombreux ponts. Mais, depuis la déclaration de la Quarantaine, tous ces ponts avaient été détruits, sauf un seul... qui était lourdement gardé. Et, justement, ce matin-là, c'était Grau qui était de faction, en compagnie de quelques surveillantes Vierges grises… Une poignée de cailloux vint frapper la surface de l'eau à quelques mètres de la bouche d'égout… c'était le signal convenu.

Alors qu'Abbaër s'emparait du jeu de cartes magiques qui contenait l'esprit de la Varisienne Zellara afin de renforcer encore l'épaisseur des brumes matinales (on ne pouvait pas être trop prudent), les autres aventuriers faisaient glisser les pirogues shoanties vers l'eau et y déposaient délicatement le matériel emmené. Quand tous eurent pris place, des éclats de voix plus tonitruants se firent entendre dans le brouillard… selon Grau, une dispute de plus ou de moins entre les gardes et les Vierges, cela ne ferait pas de différence, à peine un œil au beurre noir ou une petite coupure.

Kar'Uz et Peau-de-Pierre, qui avaient repéré les lieux la veille, prirent la direction de la manœuvre pour emmener les pirogues vers l'autre côté du canal, à travers un brouillard des plus épais. Pendant ce temps-là, les éclats de voix cessèrent pour céder la place à quelques bruits métalliques que les aventuriers n'eurent aucun mal à identifier… la dispute semblait tourner mal, mais Grau leur avait dit que ça pourrait être le cas. Le plus frustrant était sans doute de ne pas pouvoir intervenir, et même de ne rien voir à l'affrontement.

Si les Shoantis ne s'étaient pas trompé et avaient suivi la bonne direction, les pirogues arriveraient à peu près au niveau du Bout de l'Anguille, un ramassis de navires anciens amarrés de manière permanente à un pont de bois et ayant servi autrefois de trou à vices divers (drogues, jeu, boisson, prostitution…) avant la démise du propriétaire. Dans cette jungle de piliers de bois et de cordages, les petites embarcations passeraient sans doute inaperçu et les aventuriers pourraient assez aisément gagner la terre ferme.

Heureusement pour tous, les deux Shoantis avaient un bon sens de l'orientation… la brume épaisse les empêchait encore de voir avec précision ce qui se passait autour d'eux (et encore plus ce qui se trouvait de l'autre côté du canal), mais ils étaient sur un sol sec.

Cependant, quelque part, la brume envahissante, l'étrange silence qui régnait sur le Vieux Korvosa, et l'appréhension de ce qu'ils allaient y trouver colorait fortement cette expérience. C'était quasiment comme s'ils débarquaient sur un autre territoire, un autre monde, une contrée sauvage à conquérir…

La traversé s'était bien déroulée, mais commençait maintenant l'exploration du quartier. Arlandeth se demandait comment avait bien pu évoluer ce dernier. Coupé du reste de la ville et du monde, Arlandeth d'un naturel plutôt optimiste commençait à douter que la lumière ait pu inonder de sa bienveillance ce quartier livré à lui même. Il parla à tous en sourdine, cmme pour ne pas réveiller une catastrophe qui semblait s'annoncer.

« Pressons-nous. Nous avons beaucoup de travail. »

L’inquisiteur avait senti la tension qui régnait au sein de leur groupe, tous savaient qu’ils ne reviendraient peut être pas de ci tôt de ce côté-ci. Mais Théobald ne voulait pas se laisser aller à la fatalité. Il y avait encore un long chemin pour découvrir et surtout contrer la reine.

Il les avait guidés à travers le labyrinthe que représentaient les égouts, puis s’était à son tour laisser mener par les deux Shoantis. Ayant une grosse pensée pour soutenir le Soldat Grau, qui encore et encore devait risquer la blessure fatale, pour leur permettre de passer sans être dévoilé. Théobald vit certain de es compagnons mettre le masque des médecins, « Je ne sais pas si c’est une bonne idée, le peu de médecins que les habitants de l’ile ont vu doivent être parti, ou même ont été chassé depuis, à mon avis un petit moment !! »

Quand Abbaër leur fit part de son intention d’aller en tout premier lieu dans la demeure de Grigan, Théobald acquiesça,«  je suis d’accord avec toi, il faut mieux nous préparer un point de repli, nous ne savons pas comme cela va évoluer !! Allez on te suis, de toute manière, tu vas être notre guide !! »

À la demande générale, Abbaër prit la tête du convoi et la direction de la petite maisonnette de la rue Sainte-Alika qui avait autrefois appartenu à Grigan et à Horiadoc. L'heure était encore très matinale et les rues, quasi désertes. Le groupe n'eut aucun mal à parcourir discrètement les quelques premières centaines de mètres qui les séparaient de leur destination, tout enveloppés qu'ils étaient dans l'épais manteau de brume qui s'était abattu sur l'île d'Endrin, Korvosa et les environs.

Arrivant sur place, ils trouvèrent le bâtiment déserté. Sans doute était-ce mieux ainsi : après tout, si l'un de leurs compagnons, Grigan ou Horiadoc, était venu se réfugier ici, il aurait sans doute dû affronter non seulement le Voile Sanglant qui sévissait sans opposition sur l'île d'Endrin, mais également les gangs qui avaient envahi les rues… et que, jusqu'ici, le groupe était parvenu à éviter.

Abbaër n'eut aucun mal à vaincre la serrure de la maisonnette ; celle-ci n'était pas prévue pour résister à des mains aussi expertes que les siennes. Aussi silencieusement que possible, il pénétra dans la pièce qui, à elle seule, composait tout le rez-de-chaussée de l'édifice. C'était là qu'ils avaient eu plusieurs fois l'occasion de partager des repas préparés par le propriétaire halfling.

Le nain s'avança prudemment vers l'escalier de bois qui permettait d'accéder au premier étage, qui lui aussi ne comprenait qu'une seule grande chambre commune dans laquelle on trouvait quelques matelas placés sur le sol et deux autres de plus adossés au mur. Là non plus, aucune trace de présence… ni même de passage récent.

Quand il fut rassuré que l'endroit était sûr, Abbaër invita ses compagnons à rentrer dans la modeste demeure. Ils prirent un peu de temps pour faire connaissance avec les lieux, pour déposer certains objets dont ils n'auraient pas un besoin immédiat, et pour faire le point sur la situation. Le temps de commencer l'installation et, déjà, le matin avait point.

Dehors, dans la petite rue Sainte-Alika, une voix s'éleva — c'était une voix de femme, légèrement tremblante, qui semblait haranguer les passants. En écartant l'une des tentures, les occupants de la petite maison de la rue Sainte Alika purent l'apercevoir, sur le troitoir d'en face. « Champignons pour teintures. Bleu foncé, brun, et écarlate. Qui veut des champignons pour teintures ? » Entre deux interpellations, la femme semblait marmonner entre ses dents, s'interrompant parfois pour pousser de profonds soupirs.

«  Oui, effectivement!! Peut être qu'on pourrait aller lui poser quelques questions, mais il ne faut pas qu'elle nous voit sortir d'ici, on sait jamais.

Quelqu'un vient avec moi?? Ou préférez vous voir le maitre d'armes avant de se faire remarquer?? »

Fergus s'était préparé à affronter les dangers qu'avaient remontés la quarantaine forcée du quartier. Il n'était pas à l'aise et ne dit mot jusqu'à ce que le groupe atteigne la maison de la rue Sainte-Alika.

Une fois sur place il s'installa comme il put, laissant dans un coin de la pièce du rez-de-chaussée son labo portatif puis monta préparer sa couche. Lorsqu'il redescendit, il entendit comme ses compagnons la vendeuse. S'approchant de la fenêtre, il tenta d'abord de lire sur ses lèvres et de comprendre ce qu'elle disait pour elle...

Modifié par un utilisateur dimanche 29 septembre 2013 15:07:57(UTC)  | Raison: Non indiquée

Fergus soupira de soulagement. Non seulement, la marchande ne semblait pas leur en vouloir à eux précisément, mais en plus, elle semblait totalement inoffensive. Il s'adressa à ses compagnons. « Elle ne fait que maugréer sur son sort... Peut-être pourrions-nous aller lui acheter quelques petites choses... Nous n'avons rien pour nous nourrir ici... Et je suis sûr qu'elle nous sera reconnaissante et que nous pourrions en apprendre sur ce qui se passe réellement ici... »

Il regarda ensuite ses compagnons et ajouta. « Mais je ne crois pas qu'il faudra que nous y allions trop nombreux. Cela l'effraiera et les passants risquent de se demander ce qu'il se passe. Je propose qu'Abbaër - parce qu'il est le plus au fait de la ville - et Arlandeth - la tenue des serviteurs de Sarenrae fait toujours bon effet - aillent lui acheter de quoi nous sustenter et en profite pour lui poser quelques questions... »

Puis il s'approcha du prêtre et lui glissa. « Elle s'inquiète surtout pour ses enfants malades. Peut-être pourrions nous lui donner un petit quelque chose qui aide à les soulager ? »

Modifié par un utilisateur dimanche 29 septembre 2013 18:17:29(UTC)  | Raison: Non indiquée

Théobald s'était levé pour sortir, mais devant l'avis général, et sans faire part de son accord, se rassit. Tous avaient probablement raison, il serait temps de se rapprocher de la population pour avoir plus d'information ou de précision à la suite de la conversation d'avec le maitre d'armes.

« Ok pour ceux qui insistent je vous laisse y aller alors!! »

Le groupe s'était plus ou moins décidé, même si rien n'avait été dit ouvertement pour ignorer cette pauvre femme. Une fois Vencarlo vu, ils pourraient accepter d'aider le peuple de ce quartier et pourquoi pas tenter d'enrayer le voile sanglant en créant un laboratoire comme ils l'avaient fait à la pêcherie.

Il ne fallait pas trop traîner et une fois tout le monde prêt le groupe grimpa sur le toit pour progresser sur les tuiles. Et avancer autant que faire ce peu par ce chemin avant de redescendre de l'autre côté du bâtiment sur la rue parallèle. Il ne resterait qu'une centaine de mètres à faire vers le nord-ouest pour tomber sur l'académie du maître d'armes.