Source : blog Paizo ; Auteur : James L. Sutter ; Illustration : Wayne Reynolds



L'honneur est ma force. C'est une maxime que Nakayama Hayato connaît depuis sa naissance, et dont il ressent encore les effets au plus profond de sa chair. Mais Hayato connait également une vérité plus profonde encore : une épée doit pouvoir se plier pour éviter de se briser, et il en va de même pour l'honneur. Et plus l'acier est rigide, plus il est facile de le briser.

Hayato est né de domestiques travaillant dans le manoir du Seigneur Nakayama Hitoshi, à quelques journées à cheval de la grande cité d'Oda, au Minkai. Fils de maître fauconnier, Hayato (dont le nom signifie "faucon") a rapidement fait preuve d'un talent de fauconnier aussi grand que celui de son père et d'une nature fière et féroce semblable à celle de ces dangereux oiseaux.

C'est alors qu'il accompagnait son père lors d'une sortie des faucons du Seigneur Nakayama que ce dernier le remarqua pour la première fois. Alors qu'il avait huit ans, Hayato avait l'honneur d'être l'assistant personnel du fils du seigneur, Masao, missionné pour l'aider à s'occuper de son faucon. Tout se passait bien jusqu'à ce que le fils noble, qui était encore un novice à ce sport, fit une erreur de manipulation avec son oiseau et faillit perdre un œil. Le jeune seigneur, furieux, voulut tuer le faucon sur-le-champ mais Hayato s'interposa et expliqua l'erreur du garçon. Masao, dont cette interruption avait encore renforcé la rage, se mit à battre Hayato, ce qui attira l'attention du reste du groupe. Hayato se laissa faire et accepta les coups violents de son maître mais il ne pleura pas et ne demanda pas pitié. Quand Masao en eut enfin assez, le seigneur Nakayama lui-même s'adressa à l'enfant-serviteur ensanglanté et lui demanda pourquoi il avait osé corriger une personne qui lui était supérieure. Sans fléchir, Hayato s'inclina devant le seigneur et dit simplement "Parce que c'était la vérité".

À partir de ce moment-là, le seigneur Nakayama prit le jeune Hayato sous son aile. Il lui donna fréquemment des devoirs à effectuer à l'intérieur du manoir, l'engagea comme compagnon de son fils et organisa son éducation tant au niveau martial qu'au niveau intellectuel. Avec le temps, Hayato devint un combattant puissant et il s'éleva jusqu'au rang de samouraï en chef des terres des Nakayama. Quand Masao mourut au cours d'un duel de saoûlards à l'âge de 20 ans, ce qui priva le seigneur Nakayama d'héritier officiel, le seigneur en peine se mit à considérer Hayato de plus en plus comme son fils, allant jusqu'à lui permettre de porter le nom de sa famille.

Mais la mort de Masao n'était que le début des malheurs de la famille Nakayama. Peu de temps après cet épisode, le manoir Nakayama fut visité par Kaneka Yoshiro, un seigneur itinérant et représentant officiel du gouvernement avec une position importante à la Cour impériale. Kaneka, qui disposait d'un prestige et d'une influence beaucoup plus importantes que Nakayama, fut reçu en grand honneur mais il devint rapidement évident que l'invité désirait autre chose que de la simple hospitalité. Au bout de quelques jours, les insultes rusées de Kaneka, ses avances évidentes envers la femme de Nakayama et ses défis à peine voilés contre Nakayama lui-même ne laissèrent aucun choix au seigneur de Hayato. L'honneur lui interdisait de laisser ces injures impunies. mais défier un supérieur appartenant au gouvernement revenait à demander la mort.

Finalement, c'est l'honneur qui gagna, une issue que Kenaka avait prévue. Nakayama défia Kaneka en duel et fut rapidement tué par le talentueux épéiste. En compensation pour "l'insulte" que Kaneka avait endurée, la Cour Impériale lui céda les terres de Nakayama. La veuve de Nikayama, dont le futur se résumait à une vie de déshonneur au sein des paysans, n'eut d'autre choix que d'accepter la proposition de mariage de Kaneka afin de conserver sa position.

Les samouraïs de Nakayama avaient reçu de la Cour l'ordre direct d'honorer ce nouvel arrangement et furent couverts de cadeaux par leur nouveau maître, mais Hayato s'était rendu compte que cela n'était en fait qu'un vol. Plusieurs nuits plus tard, après avoir attendu que les gardes de Kaneka finissent leur célébration et boivent jusqu'à tomber inconscient, Hayato se faufila dans la chambre à coucher de son ancien maître et confronta l'usurpateur alors même qu'il couchait avec sa nouvelle femme. Kaneka hurla pour appeler ses domestiques mais, en fin de comptes, il fut évident que sa seule option était de combattre. Kaneka prit l'épée que Hayato avait lancée sur le lit et fit tout ce qu'il pouvait pour tuer le samouraï aussi vite que possible. Mais Hayato tenait à sa revanche. Finalement, alors qu'il souffrait de nombreuses blessures, Hayato parvint à percer la garde du noble et à clôturer son emprise sur le manoir des Nakayama dans une gerbe de sang.

Kaneka tomba au sol, de la mousse rosâtre s'écoulant de sa bouche. Hayato lâcha son épée et s'agenouilla à côté de lui. Il savait qu'attaquer un seigneur (ou, pire encore, celui que le gouvernement considérait comme son maître légitime) de cette manière le conduirait à coup sûr à se faire exécuter. Il tira son tanto et se prépara à mourir avec son honneur intact.

Mais une main posée sur son épaule l'empêcha de terminer son œuvre. Quand Hayato releva le regard, il contempla la Dame Nakayama (désormais dame KAneka) dans sa robe de nuit dont la soie jaune était tachée du sang de son plus récent mari. Les yeux remplis de larmes, elle remercia Hayato pour avoir vengé le Seigneur Nakayama et pour avoir remis le manoir sous son contrôle. Mais, avec sa respiration suivante, elle le condamna à tout jamais. La noble prit la main du samouraï dans les siennes (un signe d'affection et de familiarité inimaginable) et interdit à Hayato de prendre sa propre vie. Au lieu de cela, elle l'aida à quitter discrètement le manoir et à embarquer dans un carrosse pour Oda avec rien d'autres que quelques pièces, son armure et l'ordre de vivre le mieux possible. Quand le soleil matinal se leva, Hayato se trouvait dans une caravane voyageant vers le nord en direction des étendues gelées de la Couronne du Monde, avec pour destination finale, les mystérieuses contrées de la mer Intérieure.

Hayato, qui a aujourd'hui la trentaine, est un homme rude et solitaire. Cela fait longtemps qu'il a appris à parler le taldan mais sa nature le pousse à rester silencieux la plupart du temps ; il pense d'ailleurs que la plupart des gens dans son nouveau chez-lui parlent trop pour ne rien dire. Il travaille en tant que mercenaire téméraire mais doué, ou "ronin" comme il s'appelle lui-même et se met au service des causes qui lui semblent justes mais il refuse de se soumettre à quelque individu que ce soit, quel que soit son statut social, expliquant simplement qu'il a déjà eu son lot de maître. Hayato est loyal envers ses rares amis qui sont parvenus à voir au-delà de son visage de pierre mais il reste déchiré intérieurement à cause de son sens de l'honneur. Continuer à vivre en tant que samouraï sans maître (pire encore, en tant qu'individu qui a commis un crime terrible) est honteux mais désobéir à l'ordre de Dame Nakayama serait tout aussi honteux. En l'absence de réponse claire, Hayato a temporairement mis ce problème de côté. Mais, au plus profond de son cœur persiste un espoir secret : que, peut-être, un jour, il parvienne à rassembler une armée de champions et à repartir de l'autre côté de la Couronne du Monde pour y éliminer les politiciens corrompus de sa patrie d'origine et rétablir son propre honneur, celui de sa famille d'adoption et le code du samouraï. Ce code qu'il est né pour servir.