Yin-Se, porte de Shenmen

Après avoir salué la nouvelle venue - Shizuru - Miaolin quitta le bastion où logeaient apparemment les gouverneurs, et pris le chemin du hall communal, une sorte de grand bâtiment qui servait à la fois de stockage et de lieu de réunion pour les festivals et autre rassemblement.

Et, dans l'immédiat, il accueillait une bonne partie de la tribu de Miaolin, les autres occupants certaines des maisons vides et délabrées de Yin Se. En entrant, il sentit immédiatement l'odeur des épices et le parfum du thé, ses moustaches frémissant en réalisant que les siens avaient profité de cette interruption dans leur voyage pour prendre le temps de préparer du poisson au piment, un plat traditionnel de Quain.


L'occasion était idéale de discuter avec la tribu durant le repas, mais le premier à prendre la parole fut l'ainé du clan, un vétéran devenu pêcheur, que tout le monde appelait le Vieux Chau.
« Alors, Miaolin...cette expédition? Raconte nous! C'était comment, cette promenade alors qu'on taillait le sol gelé? Par les dix milles dieux qu'est ce qu'il fait humide par ici... »

Modifié par un utilisateur samedi 18 mai 2019 16:34:05(UTC)  | Raison: Non indiquée

La tribu fut parcourue de murmure, et plusieurs s'exprimèrent. Le fils de Miaolin lui sauta au coup, et profita des discussions de la tribu pour venir s'assoir sur son genou et écouter avec lui les paroles de hommes-chats. Le consensus ne mit pas bien longtemps à s'établir, cependant. Les villageois s'étaient montrés méfiants, au départ, mais s'étaient rapidement habitués à la présence des hommes chats. Ils demeuraient réservés et ne parlaient pas beaucoup d'eux, cependant, mais peut être était-ce ainsi dans les terres du Nord?
Leur sens de l'hospitalité n'était pas à remettre en doute, cependant! Ils étaient loin de la liesse et de l'accueil chaleureux des provinces du Sud, mais les conditions à Shenmen étaient rudes, et les villageois de Yin-Se s'assuraient qu'ils aient abris et nourriture. Ensembles, ils réparaient, travaillaient la terre pour préparer les labours du printemps avant que le sol ne soit complètement gelé, relevaient la palissade et réparaient les toitures.
Les hommes-chats se sentaient encore pour l'instant des étrangers, mais ils n'étaient là que depuis trois jours, et déjà les relations se faisaient plus chaleureuse à présent que le premier moment de méconnaissance était passé. Lorsqu'ils avaient interrogé les villageois sur la raison de cette confiance envers des étrangers, les habitants de Yin Se avaient répondu qu'ils se fiaient au jugement de leurs gouverneurs.

Le vieux Chau poursuivit l'histoire.
« J'ai voulu savoir pourquoi, et ils m'ont dis que les gouverneurs avaient risqué leur vie pour les défendre contre une jorogumo. Une jorogumo, vous vous rendez compte? Ah, c'est pas tous les petits seigneurs qui auraient le courage de faire ça! »

Il regarda Miaolin.
« Je pense que je peux parler pour tout le monde en m'exprimant ainsi...Mais à mon avis on a trouvé un bon endroit au moins pour l'hiver. »

Les paroles de Miaolin avaient enchanté l'assemblée. Son fils l'écoutait, son menton sur ses pattes, les yeux émerveillés, bien sûr, mais même les adultes et les anciens étaient captivés par son récit.
Mais pour les adultes de la tribu, ce furent surtout les questions que posa leur leader qui firent mouche. Les murmures se multiplièrent et ils commencèrent à discuter de leur objectif, et des raisons qui les avaient poussé jusqu'à Minkai pour commencer.


Une voix profonde se fit entendre à travers la pièce. Elle appartenait à un homme chat corpulent, dont la bedaine débordait de la ceinture, mais dont la fourrure blanche était tendue sur des muscles noueux qui ne laissaient aucun doute sur sa force. Il se nommait Yao, dit La Baleine autant à cause de sa stature que de son passé de pêcheur.
« Nous allions à Minkai parce que nous savons pouvoir y trouver de nos semblables...mais ce n'est pas le but de notre voyage, je crois. En tout cas, ce n'est pas mon impression. Je pense que nous devons avant tout trouver une terre qui nous acceptera et où nous pourrons vivre en paix, rester qui nous sommes mais aussi construire un futur pour nous mêmes. Ces gouverneurs ont l'air d'être effectivement de bons dirigeants, et en ce qui me concerne, si l'hiver se passe bien, je pense que nous devrions rester. »

Un murmure d'assentiment résonna dans la salle, et Yao, encouragé, poursuivit.
« Mais je pense tout de même que nous devrions avoir une voix...et que tu devrais nous représenter auprès des gouverneurs, Miaolin. Qu'est ce que tu en penses? »

Yin-Se, porte de Shenmen

La tribu de Miaolin s’installa pour l’hiver alors que le conseil se déroulait, le dernier jour de l’année 4718. Cela faisait déjà quelques semaines qu’ils étaient arrivés à Yin-Se, et le village commençait de plus en plus à ressembler à une nouvelle demeure. Les maisons délabrées qui leur avait servi d’abri depuis leur arrivée étaient désormais presque entièrement réparées pour affronter les rigueurs de l’hiver. Depuis leur arrivée, ils avaient passé le plus clair de leur temps à aider les villageois pour les travaux de l’hiver, autant pour s’assurer que le village aurait assez d’abri pour que tout le monde puisse traverser les rigueurs de l’hiver que pour rassembler autant de provisions supplémentaires que possible.

Il était bien sûr trop tard pour les récoltes, mais Vo Minh Phuon guidait régulièrement des groupes de chasseurs aux abords du Bois des Voix, et les talents pour la survie de voyageurs chevronnés étaient toujours les bienvenus dans de telles expéditions. Et bien sûr, la tribu comptait aussi de nombreux pêcheurs émérites. Yao, en particulier, impressionna les locaux comme ses compatriotes en présentant deux énormes brochets pour le festival des Esprits marquant le cœur de l’hiver, qu’il avait pêché à la lance.

Ceux qui n’étaient pas assez valides ou trop jeunes pour vraiment participer à ces efforts s’efforçaient de mieux connaître les habitants de Yin-Se, échangeant coutumes et habitudes, récits de voyage contre légendes, histoires et contes.

Au fil des semaines, alors que le printemps approchait et que les grêles et les neiges cédaient peu à peu la place aux pluies presque incessantes de la saison des moussons, le consensus parmi les félins étaient de plus en plus clair : leur voyage était arrivé à son terme. Même si elle n’était pas parfaite, et bien loin de leur terre natale, ils avaient trouvé une nouvelle terre où s’établir. Bien entendu, il y avait toujours des contradictions, et des mécontents, mais les dangers du voyage vers le Nord contrebalançaient largement l’espoir de peut-être y trouver une meilleure place. Et puis, Yin-Se s’efforçait de se montrer aussi accueillante et tolérante qu’on pouvait l’espérer. Que pouvait on vraiment demander de plus ?