Le flou... D'abord l'oracle peina à trouver la concentration... Mais une fois la sérénité et la méditation suffisantes pour laisser derrière lui toute l'agitation du combat passé, Rakyel parvint à arpenter le chemin sinueux et mal balisé du Grand Au-delà.
Les vagues de visions s'échouaient dans son esprit en laissant des images éclatées d'écumes difficiles à saisir.

La voilà!
Andaisin! Ça y est, il l'avait trouvée. Il la percevait... Mieux, il avait remonté suffisamment le temps pour la voir agir.
Le bruit de sa faux coupant les énormes spores du Coeur Cordicéen firent sursauter le corps squelettique du fossoyeur, ses yeux toujours révulsés. Il scruta la scène puis s'arrêta un instant sur la sacoche de la prêtresse : elle cultivait les spores, les conservait... Visiblement immunisée contre toute contagion, elle était donc simplement venue faire sa moisson!
Mais dans quel but?
Ramenant sa propre réflexion dans ce flot de pensées, Rakyel perdit le contrôle! Convulsant, transpirant, il allait lâcher prise mais son esprit s'accrocha dans ce tumulte cérébral!

...

Rouge... tout était désormais rouge...
D'un rouge sanglant, maladif.
Le fossoyeur croyait avoir sombré dans l'inconscience mais sous cette teinte écarlate, il aperçu un pavé.
D'abord il se concentra dessus... Puis remontant sa vision vers ce qui devait être le ciel, il aperçu un toit... Et une maison, une rue, des quartiers entiers, des bâtiments immenses, le Grand Mastaba!
C'était tout Korvosa qui était recouvert de cette moisissure rampante, la ville toute entière dans laquelle déambulaient des hordes d'infectés! Leurs corps fongiques se mêlaient les uns aux autres à mesure que la cité envahie par le Voile Sanglant plongeait sous les spores, ne finissant plus que de ressembler à une immense forêt de champignons toxiques!
Parmi l'agitation, il vit les Drakes, courant en tous sens... Il compta les Médecins Royaux encore valides qui portaient le masque aviaire, tous affairés à transporter les malades jusqu'à l'Hospice de la Demoiselle Bénie. Les voiles rougeâtres qui passaient devant ses yeux l'empêchait de saisir tous les détails, comme si son esprit le protégeait d'une vue qu'il n'aurait pu supporter...
Faisant demi-tour, l'odeur du feu l'invectiva pour pénétrer tous ses sens : les Demoiselles Grises brûlaient des maisons entières pour lutter contre l'épidémie! Paralysé par l'horreur des événements, l'absurdité de la situation obligeant à détruire Korvosa dans la violence pour mieux prémunir le contingent de vivants qui luttaient contre la mort, l'oracle perdit le fil précis de la situation...
N'en pouvant plus de subir de telles atrocités psychiques, il tenta d'hurler!
Mais aucun son ne sortit...
A la place, Rakyel s'écroula au sol et des spasmes l'envahir un instant. De l'extérieur, on aurait pu croire qu'il subissait une étrange torture.

...

D'un coup sec, ses mains frêles et noircies agrippèrent le sol de la fonderie. Sa capuche tombée alors que son visage creusé gisait par terre, il commença à agiter ses pupilles jaunâtres sous ses paupières presque translucides désormais closes. Pharasma, ou quel qu'en soit la déité qui voulait bien accorder ce don au fossoyeur, avait visiblement décidé de le pousser dans ses retranchements!
L'esprit de Rakyel se stabilisa. Un parfum humide, qui ne correspondait en rien à l'air marin korvosien, vint adoucir l'atrocité observée dans la ville. Une rivière, l'oracle était maintenant au bord d'une rivière. Cette dernière bordait visiblement un champ. Un champ qui s'étalait à perte de vue mais dans lequel il distinguait clairement des machineries et engins de siège en construction! Pourtant, le chantier semblait abandonné...
Commençant à courir à la recherche d'âme qui vive, Rakyel erra un moment avant d'apercevoir une barricade! Les ouvriers s'y étaient réfugiés. Se focalisant sur les forcenés qui paraissaient se démener pour finaliser leurs remparts, il ne prit conscience de ce qu'il observait que lorsque tout son corps trembla!
Regardant d'un coup d'oeil précipité à 180 degrés, il aperçut à l'horizon une silhouette écarlate, ses ailes de cuir rouge battant l'air, qui surgissait au dessus des collines en crachant le feu et la destruction!
La peur... Voilà ce qu'il ressentit face à la terrible créature!

...

Cette peur, son esprit voulu l'éviter! Le noir complet se fit quelques secondes, comme une protection mentale.
... revenir... il faut que... je revienne...
Clairement, l'oracle était victime de sa catatonie divine.
Et d'un coup sec, il crut retrouver le plan matériel!
Mais alors qu'il sentait ses jambes, sa tête sur le sol de la fonderie, ses mains agrippées par terre, sa vue encore brouillée révéla une autre réalité!
Un éclair fulgurant traversa son esprit, faisant apparaître une vision d'écailles cette fois bleu azur et le regard vicieux, ophidien, d'un Wyrm! Cet oeil, celui qu'il avait déjà aperçu dans une vision précédente lui glaça le sang, comme s'il l'avait fixé en sachant où le trouver! Tel un coup de marteau sur le crâne, Rakyel subit une énorme douleur psychique accompagnée d'un coup de tonnerre, une odeur de sang et d'ozone et un vomissement sur le sol froid de la fonderie avant de perdre, cette fois-ci, belle et bien connaissance.

...

Le souffle court, les membres tremblant, l'air hagard, il constata qu'il avait été absent un long moment... sans pour autant être capable de déterminer précisément combien de temps. La maîtrise de son corps était visiblement revenue grâce à l'énergie divine qui l'avait subitement empli, tel un réceptacle, une plante qu'on aurait décidé d'arroser après des heures au soleil. Il n'avait jamais traversé aussi fortement les limbes du Temps et de l'Espace. Mais d'où provienne son pouvoir, une entité semblait veiller sur lui pour empêcher son âme d'être à jamais éloignée de son objectif!
Tentant péniblement de se rasseoir alors que ses os craquaient avec un bruit sinistre résonnant dans la vieille fonderie en ruine, il récupéra son bâton sur ses genoux.
Étrangement, il se sentait bien. Même plus fort! Plus à même de poursuivre sa mission. C'était comme si l'âme de Korvosa l'avait appelé à l'aide en lui montrant toute la souffrance à éviter, les obstacles à franchir et les pistes à suivre pour trouver le chemin de la guérison!

« Hmm... Mes amis... J'ai l'impression que cette rencontre avec la Prêtresse d'Urgathoa a fâché Korvosa. Notre cité malade a plus que jamais besoin de notre aide! » expliqua-t-il lentement de sa voix grave et rauque.
Et une fois l'attention de tous, il détailla ce qu'il avait pu voir, ce qu'il interprétait et ce vers quoi les Drakes devaient se tourner.

Lurch n'était pas très frais et ne sentait pas la rose. "Ne pensez-vous pas qu'il faille prévenir Sa Majesté de la présence d'Andaisin en ville et de l'avancée, toute relative il est vrai, de nos investigations ?" Le gobelin difforme regarda ses compagnons les uns après les autres en quête de réponse. "Si c'est le cas, je pense qu'un bain est de rigueur. Et ce d'autant plus que je ne peux m'empêcher d'imaginer des spores en train de se développer tranquillement sur mon corps..."

Méry s'était concentré sur la fouille exhaustive des lieux, usant très naturellement de sa vision détectrice de magie... notamment dans l'espèce d'autel qu'Andaisin avait improvisé dans la forge des batteurs de cuivre. Laissant aux intello's le soin d'échaffauder des hypothèses, il ne manqua pas de les rappeler à la réalité :
- fallait soigner Lurch qu'est en piteux état
- ils étaient dans la Vieille Korvosa, au milieu des émeutes.
- il y avait quelque chose de foncièrement anormal dans la transformation de Baris Vox en demi-orque femelle jouant rôle d'agitateur -sous couvert de syndicalisme- !
- ils avaient besoin de se ressourcer (repos, récupération de sorts, refaire le plein de feu grégeois et de bombinettes à Teva).
Quand le grand brûlé posa la question des boules de spores, il se permit de rappeler :

« Ben faut écouter les copains et les copines, hein ?! J'rappelle qu'on a trouvé des notes du fils de poulpozombie-d'égoût, le Rolth a laissé dans ses notes a propos du machin qu'on vient de cramer :
" Fongus muté avec l'aide d'un alchimiste Varisien, devenu ce que Rolth appelait un Coeur Cordycéen, qui était alimenté par la maladie et en retour aidait à accélérer sa propagation. Une fois que les spores étaient en contact avec un organisme vivant, ils colonisaient leur hôte, sapant ses forces, et tentant de l'utiliser comme un nouveau Coeur Cordycéen. Ces hôtes mourraient invariablement avant la fin du processus. Cela n'empêchait pas les mousses fongiques de prendre, dans de rares cas, le contrôle de l'organisme mort de leurs hôtes, les contrôlant comme des marionnettes (ça c'est les infectés qu'on a lattés sur le Pont des Cendres), cherchant à propager les spores au maximum pour assurer sa propre survie. Rolth était fier de ce phénomène, comme si il était de sa responsabilité.
Par ailleurs, il est mentionné qu'Andaisin a demandé à ce que les spores de plus en plus volatiles du Coeur soient concentrées, peut être pour un projet particulier...les notes ne mentionnaient rien d'autre que l'implication d'Agven."
Alors bon, les travaux d'Agven, ils étaient pas encore achevés, et on les a piqué (aussi !)... c'était un moyen pour transmettre les spores via des bombinettes, sous forme gazeuse.
Enfin... faut pas oublier que Jolistina a dit que Rolth n'était -lui- qu'à bosser sur une forme "liquide".
Je dis ça... moi, je suis pas alchimiste, hein ? C'est sûr qu'on a besoin de l'avis de nos belles du Théumanexus... mais nom d'une pipe, c'est à l'autre bout de Korvosa !!!  »

Ensuite, il y eut l'exhibition du grand malade ; faut dire que c'était peut être pas l'endroit le plus sécurisé pour causer tranquillement à sa Dame, aussi... enfin bon, il avait pas vomi, c'était déjà ça.
Le réveil fut difficile, et les complications révélées en cascade.
Deux dragons ? La vache... comme si c'était déjà pas assez compliqué ! C'est allégorique, j'espère ? Fiente d'ottyugh ! a priori non : si l'un d'eux représentait Andaisin, il/elle serait noir, à tous les coups...
Malgré son besoin immédiat de vacances, le halfelin grommela à la remarque de Rakyel :

« Ouais ! Bah faudrait d'ailleurs pas oublier de remercier Korvosa ! Sa muzicà nous a guidés jusqu'ici, au bon endroit, au bon moment, alors qu'on manquait d'indices, et qu'on en avait bien besoin !
Bon, je sais pas vous, mais moi, j'l'ai déjà dit, j'ai besoin de repos, et j'aurais rien contre une bonne bouffe malgré vos manipulations gerbantes... Orion, j'te préviens, il n'est pas question que je mette tes bouts de charogne dans mon sac ! On s'en fout qu'ils crèvent, d'ailleurs, on n'est pas là pour les cultiver, nous...
Par le couillu cornu ! On n'a même pas fêté notre victoire ! $:!#%!@!#!! (ça doit être en hobbit, ce truc grommelé et censuré)
... et si on choisit de quitter la vieille Korvosa, tout de suite, faudra que je fasse un (minime) détour par chez moi, dans les Tuiles de Près du pont, pour sortir Jovian et Rubia de ce merdier, si tout le monde décide de l'abandonner... »

Modifié par un utilisateur mercredi 1 juillet 2020 22:23:17(UTC)  | Raison: Non indiquée

Méry fronça les narines... ça sentait fort la mort, et notamment en armure. Désignant ce désolant constat, il déclara à ses compagnons :

« Je n'ai pas besoin de vous pour aller chercher les petits : on n'a pas d'armures et on peut courir sur les Tuiles.
Concentrez votre discrétion sur votre trajet pour sortir d'ici : je vous retrouverai de l'autre côté du Pont des Cendres, ou au Théumanexus... »

Modifié par un utilisateur mercredi 1 juillet 2020 22:35:33(UTC)  | Raison: Non indiquée

Lorsque Lurch vit l'émeute et la violence qui régnaient dans le quartier, il craignit le pire. Dans son état, il se voyait mal affronter des infectés et encore plus des habitants en bonne santé. Et voilà qu'il allait falloir se montrer discret. Il regarda dubitatif son harnois. "Bon, quand faut y aller..." Et à sa grande surprise, il se fit pas (trop) de bruit. "Orion, pourriez-vous presser le pas, même si je comprends votre curiosité ?"

Lurch n'aurait pas imaginé être heureux de revoir la clinique de fortune que les Drakes avaient contribué à établir. Néanmoins, ne voyant pas Méry, il n'était pleinement rassuré. Mais il ne pouvait rien faire d'autre que d'attendre.
Le gobelin s'efforça de répondre au mieux aux interrogations de Trissia. "Nous avons trouvé le Coeur de l'épidémie et nous l'avons détruit. Malheureusement, il est à craindre qu'un autre se reconstitue à partir d'un foyer d'infection. En prime, nous avons eu maille à partir avec Anduisin, qui a pu fuir, et qui va poursuivre ses machinations afin de faire sombrer définitivement la cité. Bref, rien de très réjouissant. Et ici, comment cela se passe-t-il ?"

Korvosa - Voile Sanglant


Trissia passa une main sur son crâne chauve, l'air épuisé.
« Rien pour l'instant, je le crains...enfin rien...pas de résultat concret, disons. A ce que j'ai pu voir sur les échantillons et sur les corps des infectés qui n'ont pas survécu, développer un remède va être très compliqué. Les spores colonisent le système nerveux, et je n'ai pas la moindre idée de comment je pourrais développer quelque chose qui pourrait les en arracher sans prendre le risque de faire plus de mal encore au malade. Pour l'instant, je me concentre sur un vaccin, c'est un principe que m'a appris Teva: empêcher les spores de prendre racines en rendant l'organisme hôte hostile à leur présence. J'ai fais quelques avancées, j'espère pouvoir avoir quelque chose de testable d'ici quelques jours, peut être une semaine. Mais avec les fragments du Coeur, je pourrais peut être faire quelque chose de plus efficace.... »

La dernière remarque d'Orion l'interpella.
« Des bourgeons...? Je veux bien un dessein, tout cela m'interpelle. Vous n'avez pas trouvé de piste pour retrouver Andaisin? »

Korvosa - Voile Sanglant


Trissia fronça les sourcils, ses plumes se hérissant en découvrant le dessin.
« Il faudra que j'en parle à Teva...je n'ai aucune idée pourquoi elle cultive des diffuseurs de spores, mais ça ne peut rien présager de bon, surtout si elle a préféré les récolter plutôt que de les laisser vomir leurs toxines librement. Je me demande si ça a un rapport avec les grenades à spores d'Agven et de ses rats...? »

Lurch eut un vertige. Alors qu'il avait espéré pouvoir arranger la situation dans Korvosa avec la destruction du Coeur, il dut vite déchanter. Non seulement ce qu'ils avaient fait n'avait pas dû beaucoup ralentir Anduisin, mais en plus on apprenait que leur ennemi étudiait de nouvelles façons de répandre plus aisément et rapidement la maladie dans la cité. Le gobelin n'entrapercevait pas le bout du tunnel et le désespoir le frappa de plein fouet devant l'hospice au fur et à mesure que ces compagnons égrainaient leurs funestes découvertes. Sa peau émeraude tourna au vert pâle. Et il faut dire que ses blessures ne facilitaient pas les choses.

22 Gozran 4716, dans la nuit - Salle du Trône, Grand Mastaba


Sa Majesté Ileosa


La scène leur devenait familière...Rassemblés dans la salle du trône, sous le regard des vitraux nouvellement réparés, les Drakes de Korvosa, incluant Orion, l'arrivant le plus récent, faisaient face à sa Majesté Ileosa. Cette fois, ils avaient bien piètre allure, portant encore les marques des affrontements et des épreuves de la journée, l'odeur des spores, du sang et de la fumée, pour faire face à la magnifique reine en robe verte, l'ivoire et l'acier brillant de sa couronne brillant sur son front.

Outre la reine, sa garde du corps et la générale des Demoiselles Grises, Sabina Merrin, les observait et les écoutait depuis l'autre côté de son heaume, aussi impénétrable qu'à son habitude.

Leur arrivée au palais n'avait pas été particulièrement remarquée, mais les gardes et surtout les Demoiselles Grises qui assuraient désormais la garde du palais étaient sur le qui-vive, plusieurs portant encore les marques des combats, leurs armures désormais marquées par la bataille. Apparemment, elles avaient du se mêler des émeutes en ville...

Ileosa elle même ne paraissait pas au mieux de sa forme. Ses traits étaient certes empreints de beauté, mais son visage semblait s'être un peu creusé, et elle portait les marques d'un souverain s'épuisant à maintenir son royaume en un seul morceau. Mais malgré ses cernes, elle était concentrée lorsqu'elle leur parla.
« Heureuse de vous revoir! Je n'ose demander si vous apportez de mauvaises nouvelles...mais je vois que votre journée a été plus que mouvementée, comme la mienne. Korvosa ne brûle pas encore, cela dit, donc nous avons à parler. Quelle nouvelle? Comment marche votre hopital improvisé? Est ce que vous savez comment Andaisin a fait pour répandre ces...mensonges, cette bile sur mon compte? »

Elle soupira, passant une main sur son visage.
« Avez vous une idée sur ce qui se passe dans cette ville? »