Cercle de Pierre



Ling Ten grimaça lorsque Tao évoqua les Lois Célestes. Elle soupira et pris un instant pour essayer de rassembler ces pensées.
« Malheureusement, je n'ai qu'un aperçu extrêmement limité des Lois Célestes, et je n'ai pour l'heure pas réussi à convaincre un esprit de m'en dire plus sur le sujet. Ma compréhension n'en est que parcellaire, je le crains. Mais à ce que j'en sais, ce sont les lois qui gouvernent la relation des esprits avec le monde matériel. J'en ignore presque tout, mais je sais que les esprits ont interdiction de s'incarner hors du monde spirituel. Ils ont aussi pour commandement absolu de protéger leur "ancre" dans le monde matériel.

Cela affecte leur nature profonde...Les onis sont formés par ceux qui rompent ces lois. Je ne sais pas quels autres commandements les esprits peuvent suivre, en revanche, et je ne suis pas certaine que nous mortels puissions les comprendre. »



Ling Ten jeta un regard distant vers les cieux, mais à cette heure, la lune n'était pas encore levée.
« Le Prince Tsukiyo...ou la Princesse Tsukuyo, selon ses phases, est celui qui intercède entre les mondes matériels et spirituels. En appeler à sa bénédiction ne peut être que positif, son influence est diplomatique...subtile. Elle vise à éviter les conflits spirituels et à bannir les esprits trop dangereux.

Je dirais que cela dépend. D'ordinaire, oui. Mais en appelant des esprits hostiles, sombres, en colère...si le rituel attire son attention, il est possible que son influence limite activement le potentiel des rites. »

La shamane fronça les sourcils, pensive.
« C'était un esprit des collines...Les végétaux qui pousse dessus ne lui posaient pas problème. En revanche, un esprit du savoir est...plus délicat. Parce qu'il nous faudrait un lieu de savoir, pour cela, et un lieu d'importance, suffisamment ancien pour que les âmes des lettrés y aient allumé l'étincelle d'un esprit.

Si je devais m'y hasarder...les monastères pharasmins dans les montagnes seraient de bons candidats. »

La notion des jorogumos jeta une ombre sur l'expression de la shamane.
« Je n'en suis pas sûre. Mais les jorogumos sont des yokai cruelles, manipulatrices et dangereuses. Et elles n'hésitent pas à tordre les lois de la nature à leur avantage. Je doute que les esprits les apprécient. »

Cercle de Pierre



Ling Ten hocha la tête en réponse à Tao. L'oracle pouvait sentir, malgré le fait que Ling Ten se concentrait avant sur le fait de lui apporter des réponses, qu'elle même était aussi curieuse de la nature de ces Lois Célestes.
« Première option. Une des difficultés que j'ai rencontré est que les Lois Célestes sont apparemment intrinsèquement liées à la nature des esprits, au point que ces derniers peinent à les exprimer - et les esprits ne sont déjà pas faciles à comprendre dans le meilleur des cas. »



Cette fois, c'est avec une détermination teinté d'inquiétude que Ling Ten réfléchit.
« Je le pense aussi. Les Jorogumos emprisonnent tout ceux qu'elles croisent dans leurs toiles, y compris les esprits. Elles ne se font pas d'amis dans le monde spirituel, même si elles en maîtrisent la magie.

Je n'ai moi même entendu que des rumeurs sur les monastères pharasmins...Mais j'en ai visité un, après avoir quitté Baakai. Les lieux sont...sinistres. En fait, je ne suis même pas entrée. Je suis presque certaines qu'ils sont hantés.

Mais ils pourraient aussi être la clé de nombreux mystères, et je pense que c'est une opportunité importante.

Et d'un point de vue plus pragmatique, ce serait l'occasion de vous exercer à exorciser des esprits malins. »

Cercle de Pierre



Ling Ten sourit en réponse à la question plutôt innocente de Tao.
« Bien sûr! N'importe qui avec la curiosité, la discipline et le talent pour l'occulte nécessaire peut devenir un exorciste. Même si c'est...disons, une spécialité dangereuse. »

Elle reposa sa coupe, pensive, jouant toujours avec ses cheveux.
« Je ne sais pas si laisser ces secrets dormir est dangereux, mais les fantômes vagabonds ne sont jamais une bonne nouvelle.

Mais c'est une discussion qui devra malheureusement en rester au stade de l'hypothèse pour l'heure; explorer ces monastères est trop dangereux pour que nous le fassions seuls. »

Cercle de Pierre



Ling Ten répondit d'une voix chaleureuse, et se voulant rassurante, plongeant son regard dans celui de Tao. Elle avait les yeux gris.
« Chuanyu n'est pas encore perdue, Tao. Elle est toujours piégée par sa malédiction, mais nous pourrons l'en libérer, un jour. J'en suis certaine. Alors ne culpabilisez pas.

Et si vous parvenez à organiser une expédition vers les monastères des montagnes, je serai plus que ravie de pouvoir vous accompagner et terminer les recherches que j'avais entreprises à l'époque. Je ne serai pas un poids mort, je pourrais vous être utile, une fois sur place. »

La shamane se releva et épousseta ses robes, ajoutant avec un sourire.
« Tenez moi au courant si vous avez des nouvelles! »

Modifié par un utilisateur mercredi 13 octobre 2021 21:26:20(UTC)  | Raison: Non indiquée

Il était sans doute étrange, à une heure aussi tardive, de tomber sur une étrangère Tian-Min, en ces contrées désolées. Mais il était sans doute également étrange que l’individu ouvrant la porte soit vêtu en armure de la tête aux pieds à cette même heure.

Tao mit un petit moment avant de comprendre que la guerrière était la première à répondre à son appel, et cela malgré l’annonce tendu. C’était rapide ! Il saisit lentement cette dernière, s’appliquant à ne faire aucun geste brusque, professionnalisme légèrement forcé. Il était plutôt habitué à être informel, malgré ses manières de soldat. Du haut de ses deux mètres et de son allure de buffle, il n’était pas difficile de paraitre imposant, mais c’est avant tout sur son comportement et sur son sang-froid que l’oracle comptait pour convaincre son interlocutrice de ne pas être un amateur ayant la folie des grandeurs.
«  Effectivement…  » répondit-il calmement, jugeant la guerrière.

Une attitude directe et désinvolte, appréciable, et un équipement peu commun… sans doute adapté à des pratiques peu communes. L’armure lourde lui laissait supposer qu’elle avait pratiqué des heures durant, autrement aucune personne du peuple ne serait en mesure de se balader aussi aisément avec un attirail de plus de vingt kilos sur les épaules. Le katana doublé du wakizashi lui rappelait les coutumes des samouraïs de l’Est, chacun adapté à une utilisation différente. La hache, quant à elle, lui faisait plutôt penser à une arme de support, dédiée au jet. Pour finir, le symbole de Tsukiyo, la Lune de Jade, patron des esprits, lui évoquait de bons souvenirs avec Ling Ten.

L’oracle s’écarta de sa porte, invitant la guerrière à entrer, si elle le souhaitait.
«  Il est déjà bien tard, ne restez pas plantée dehors, entrez donc je vous prie. Venez vous rassasier et vous reposer, guerrière de la Lune, il est toujours plus agréable de discuter autour d’un repas chaud. Vous venez de Gaotong, je présume ? Fa-Lung, peut-être ? » demanda-t-il, attendant de voir si elle allait accepter son offre ou la décliner, même si elle n’avait sans doute pas réellement d’autre endroit où aller.

Tâchant de faire bon hôte, Tao aida son invitée à ôter armure et équipement afin d’être plus à l’aise, puis il la guida vers la pièce voisine, juste à côté du vestibule, dédiée aux repas et aux discussions. La seule pièce d’accueil en réalité. Au centre de la pièce, une cheminée traditionnelle de Po Li, rudimentaire, servait à la fois à réchauffer les convives mais également les plats.

Reconnaissait le style Min, Tao s’appliqua à appeler correctement son interlocutrice.
«  Enchanté Ishimazawa-san, tout le plaisir est pour moi. Pour être transparent avec vous, moi aussi, je n’en espérais pas tant en si peu de temps. Je m’attendais davantage à des volontaires sans grande expérience du combat, et d’ici plusieurs semaines, voire plusieurs mois… Vous êtes la première à répondre à cette proposition, et j’espère bien que d’autres personnes de votre trempe suivront.  » expliqua-t-il honnêtement, s’éloignant dans la cuisine ouverte voisine.


Il restait quelques brochettes de bœuf braisées en sauce, du riz frit mélangé à quelques carottes et champignons locaux, le tout accompagné d’un petit bouillon maison, plutôt épicé, mais tenant bien au ventre. Il posa tout ça dans un demi-bambou accompagné d’un petit bol, qu’il apporta et proposa à son invitée, le tendant à deux mains. Il lui servit ensuite une tasse de thé, puis à lui-même, et finit par s’assoir en face d’elle, de l’autre côté de la table, coudes posés sur cette dernière et mains jointes, et reprit ses explications.
«  Tenez. »

Thème de la Guilde Kongming


«  Cet appel donc… Eh bien, comme vous le savez peut-être, le Shenmen est une région en proie à de nombreux monstres et yôkai peu amicaux. Jorugomos, Goryos… On a même repéré un ver tisseur dans les collines, loin à l’Est, vers la mer.

Je ne dis pas ça pour vous effrayer, il s’agit là de cas exceptionnels… mais les cas mineurs sont légion, qu’il s’agisse de loups, de bandits ou de yôkai. Les habitants de cette région n’osent pas sortir de leurs terres, aller dans la forêt voisine, réputée hantée, et encore moins s’approcher des montagnes… A travers tout le Tian Xia, l’on dénombre sans doute plus d’une centaine de victimes dû à des causes similaires, chaque mois. Autant de rêves brisés, de familles déchirées, d'orphelins et d'oubliés...  »


Tao se releva, s’approchant de la fenêtre du logis, une tasse de thé à la main, regardant les derniers nuages encore visibles à cette heure tardive, pensif.
«  J’ai un rêve Ishimazawa-san. Un rêve que nombreux jugeront insensé, mais que je compte bien mener à bien, à force de patience et de persévérance. J’ai à cœur que les habitants de cette ville, ainsi que ceux des villes voisines, voire même dans tout le Tian Xia, puissent un jour vivre librement, sans cette crainte. C’est dans ce but que je fonde aujourd’hui la Guilde Kongming, la Guilde du Dragon Assoupi. Une guilde rassemblant tout type de personnes, tout type de compétences, unis autour de ce même objectif.  »


Il fit une pause dans son discours, laissant celui-ci s’imprégner et en profita pour boire une gorgée de thé. Puis il reprit sur une note plus légère.
«  Ça, et les perspectives qui vont autour, la fortune, les camarades, la vocation, ce genre de choses. Enfin bref, je vous bassine, et vous voyez sans doute où je veux en venir. Le fait est que pour ce genre d’entreprise, il faut bien commencer bas, et cette région a bien besoin d’un coup de pouce.

Voilà mes raisons, j’espère que ça répond à votre question ? J’imagine que vous devez en avoir d’autres ?  » demanda l’oracle, serein.

Modifié par un utilisateur dimanche 17 octobre 2021 22:47:35(UTC)  | Raison: Non indiquée

Tao sourit en réponse à Kasumi, ravi de voir qu’elle semblait apprécier leur cuisine. Et… Tout vieil officier opportuniste et manipulateur qu’il pouvait être, Tao avait du cœur lorsqu’il s’agissait de partager son repas ou de faire connaissance. Il écouta attentivement les remarques de son invitée, puis lui répondit, sans lui couper la parole, un sourire amical au coin des lèvres.
«  Oh, je ne suis pas entré dans le détail pour ne pas vous prendre la tête durant des plombes, mais effectivement, de nombreux êtres, esprits, kamis et même sans doute yokai en souffrent, c’est une triste réalité, je partage votre avis.

Je n’entends pas éradiquer à tour de bras sans être certain de la raison qui me pousse à cette extrémité. Et même si je doute également que cela soit possible d’éradiquer ces créatures, "limiter les dégâts" et "permettre aux gens d’être un peu plus sereins" serait déjà une bien appréciable évolution.  »


Le sujet du test fit de nouveau sourire Tao, d’un rictus amusé. Il fit mine de reprendre une gorgée de boisson avant de continuer, se délectant de cette ambiance planant dans l’air, amicale mais légèrement électrique.
«  Les tests… Eh bien, comme je le mentionnais dans l’annonce, il ne s’agit pas seulement d’informer les gens de la création de la guilde, de l’offre de formation ou encore de celle d’un lopin de terre, il s’agit d’une coquette somme pour attirer des candidats compétents… potentiellement tel que vous. Cela représente plus de deux années de salaire pour un paysan, à titre de comparaison, et plus d’une demi-année, pour un officier.  »


Parler d'argent, ça ne faisait pas tout, mais une telle solde donnerait à rêver à la plupart des soldats qu'il avait pu connaitre.
« Ce que j’attends de vous tout d’abord, n’est pas une tâche en particulier. Je ne me verrai pas comme votre supérieur hiérarchique. Je vois cette guilde plutôt comme un ensemble d’individus collaborant, s’entraidant, et répondant, à la demande et sur la base du volontariat, à des contrats de chasse ou à des raids de leur propre initiative, qui vont constituer le cœur de l’activité.

Absolument rien ne vous sera imposé dans la Guilde. Les revenus se font sur la base du volontariat à la commission, à la revente d’artisanat, ou à l’enseignement des jeunes recrues. Celui ou celle capable de tomber seul un Yoaguai et souhaitant enseigner ses compétences à ses pairs sera riche et glorifié, celui qui souhaitera y faire le minimum nécessaire pour vivre y trouvera sans doute sa place, mais rien de plus.

Par exemple, reprenons ce Yaoguai, et on va dire qu’il terrorise une ville, qu’il a même fait plusieurs victimes. Nous pourrions proposer notre aide pour enquêter, puis éliminer le yokai, moyennant une compensation. A côté de ça, nous pourrons disposer du corps de la créature pour en extraire divers composants utiles à nos alchimistes, nos mages et nos autres artisans, ce qui constitue également un gain conséquent.  »


Tao marqua une pause dans son explication, avant d’en revenir à la question de son invitée.
«  Ce que je peux attendre de vous donc, c’est d’avoir un certain niveau d’expérience au combat et dans la nature, d’être consciente de ce à quoi vous allez être confrontée, et surtout d’être prête à vous investir pour la Guilde. Vous fréquenterez sans doute davantage de personnes moins compétentes que vous que l’inverse, et il s’agira potentiellement de les former afin que vous puissiez, à terme, composer des équipes afin de répondre à des contrats.

Les "tests" consistent donc à m’assurer que vous répondez à ces trois critères. Nous pourrons faire tout cela demain, si cela vous convient. Vous avez peut-être d’autres questions, avant que je ne vous en pose, vous et… notre noble ami le dragon de fumée qui semble accompagner vos pas ?  » demanda-t-il, joueur, ne pouvant réellement voir le kami mais ayant ressenti sa présence.

Heureux de voir que son invitée partageait une idéologie semblable à la sienne, Tao sourit, détournant son regard vers l’extérieur un bref instant, nostalgique.
«  Mff… Je pense comprendre ce que vous voulez dire. C’est une sensation… particulière. Mais oui, je mise sur cette approche collégiale, comme vous dites. J’aime à penser que cela procurera aux membres de la Guilde un environnement plus sain que la plupart des organisations classiques, afin de s’épanouir.

Ne vous prenez pas la tête avec ces histoires d’entrainement. Ce n’est d’ailleurs nullement obligatoire comme je le disais. Gardez simplement à l’esprit que je tiens aux notions d’entraide, d’esprit d’équipe, et de partage de savoir, entre membres.  »

Le regard de l’oracle se perdit dans la contemplation de l’esprit dragon. Une créature remarquable. Kasumi pouvait définitivement être une recrue d’exception, à en juger par celle qui l’avait déjà adoptée.
«  Tekina donc…  »

Tao s’inclina légèrement devant l’esprit avant de conclure.
«  Je n’en doute pas, elle semble remarquable. Nous pourrons vérifier ça demain donc. Pour l’heure, reposez-vous, vous êtes ici chez vous, si cela est votre souhait. Il y a également une auberge en ville, ainsi que le temple de Desna.  »

3 Sarénith 4719 - Yin-Se, demeure des Shu
Le clan Shu




Le lendemain matin, c'est à la lumière claire du soleil d'été que Tao retrouva Kasumi, et la forme fuligineuse de Tekina qui flottait autour d'elle. La chasseuse de yokaï paraissait reposée, et elle n'avait pas encore enfilé son armure, ne portant qu'une tenue de voyage à la mode Tian-Min. Pratique, quelques pièces de cuir pour la protection, mais pour l'essentiel, des vêtements ample, aérés.

Cependant, même dans l'état de relative décontraction de la première membre de sa guilde, elle était suffisamment sur ses gardes pour avoir son daishô au côté, et la hache accrochée dans son dos. Et à présent qu'elle était marginalement moins couverte, Tao pouvait distinguer un tatouage au creux de sa gorge - un sceau de protection portant le symbole du métal - et deux autres sur ses paumes, représentant une lune croissante et décroissante...peut être consacrés à Tsukiyo?

Kasumi le vit approcher et le salua en s'inclinant légèrement.
« Bonjour à vous, Tao! Merci de m'avoir recommandé l'auberge, j'avais oublié ce que c'était de dormir dans un lit. Si vous avez des épreuves à me faire passer, je suis prête! »

Le clan Shu




Kasumi haussa un sourcil intéressé. Tekina, elle, salua Tao d'un signe de tête.
« Un esprit lacustre? C'est déjà une nouveauté...à Goka, on a plusieurs esprits des canaux, mais je suis curieuse de voir ce qui les sépare de leurs cousins plus sauvages. Ce serait avec plaisir.  »

La seconde proposition de Tao ne tomba pas non plus dans l'oreille d'une sourde. Elle s'arrêta un instant, prenant le temps d'examiner Tao et sa garde.
« Pourquoi pas. Cela me rappelle un peu les enseignements de Shizuru, vous savez? Seriez vous un adepte de l'Impératrice Céleste, à tout hasard? Mais avant que nous commencions...donnez moi une minute, le temps que j'enfile mon armure. »

Kasumi s'éclipsa, revenant quelques minutes plus tard, cuirassée d'acier lamellaire. Elle s'inclina poliment face à Tao, et porta la main à la garde de son wakizashi, Tekina tournoyant par dessus son épaule.
« En garde? »