Printemps sur Siyin



Junko acquiesça.
« Bien reçu! Le temps de m'installer, et je prendrais contact avec Tomoyo-san. Honnêtement, trouver un endroit où dormir ne devrait pas être bien difficile.

Je ne suis pas pharmacienne, mais j'ai un peu chassé, je pourrais peut être donné un coup de main là dessus également? Je n'irais pas jusqu'à me dire experte, en revanche, mais je dois avoir assimilé les principes de base.

Est ce qu'il y a autre chose que je devrais savoir, puisque je vais rejoindre votre communauté? »

La famille Shu


Ming Shu, la mère de Tao, ressurgit à ce moment là de la cuisine en portant un plateau. S'y trouvait une théière en font, ainsi que trois bols de céramique peinte. Le thé répandait un parfum floral dans la demeure familiale.
« Tu as raison, Tao, ça me rappelle le jour de la course des bateaux-dragons...il pleut encore souvent, en cette saison là. »

Elle déposa le plateau sur la table et entreprit de disposer les éléments du set devant chacun de ses invités, suivant les gestes millimétrés et immémoriaux de la cérémonie du thé. Aujourd'hui, le thé semblait avoir été réaliser avec des fleurs de prunier.

Sans lever les yeux de son ouvrage, Ming poursuivit à l'adresse de Shiori.
« En tout cas, sache que vous êtes toujours les bienvenus sous notre toi. Je considère que tu fais partie de la famille, Shiori. Si nous pouvons faire quoi que ce soit... »

Tao se gratta la tête, songeur.
«  Tu as sans doute raison… Mais j’ai entendu parler d’une ingénieure, en ville, qui avait un problème d’étanchéité pour ses cartouches. J’imagine qu’il s’agissait davantage de les protéger une fois en extérieur ?  »

Mimant la sourde oreille, reprenant une gorgée de thé dans le plus grand des calmes, Tao laissa le temps se trainer avant d’apporter une réponse à la question de Shiori.
«  Hum…
Non. Ils me font confiance, tout comme je leur fais confiance. Ces risques dont tu parles… ils visent tout le village. Mais j’ai bon espoir qu’ils puissent être résolus.  »

Nouveau moment de blanc, faussement comblé par une autre gorgée de thé. Difficile sur ce point d’entrer dans les détails. S’il avait bien compris ce que Shiori entendait par "risques", l’ignorance de sa famille pouvait jouer en sa faveur, dans le pire des scénarios.

Puis, ne souhaitant pas rebondir immédiatement sur le fait que l’elfe n’avait pas répondu à sa question, il enchaina sur autre chose, tentant une pointe d’humour pas forcément très bien placée, à défaut d’être pertinente à ses yeux.
«  Dans cette contrée remplie de monstres et avec la menace du Nord qui plane sur nous, les risques… C’est un peu notre quotidien pour l’heure… Je préfère être optimiste concernant notre avenir.

Et puis… à manger ici, c’est peut-être toi qui prend des risques tu sais ! Imagine que ce soit Zhou ou moi qui cuisine demain !  »

De trois choses l'une. Soit ton trouble t'avait empêché de voir la réaction de Tao, soit ce dernier n'avait rien remarqué... soit il était tellement habitué a ce genre de sorties de la part de sa génitrice qu'il ne se questionnais plus à ce propos... Enfin... Tu profite du thé qui t'es offert pour reprendre ton calme. Les manières des humains... Tu les côtoie depuis bientôt un demi-siècle et tu ne peux pourtant pas cesser de t'étonner encore...

Tu répond avec un sourire triste :

« C'est bien ce qui m'inquiète... J'apprécie sincèrement votre sollicitude. Mais le passé me laissent craindre que ce qui me menace ne représente un plus grand danger pour mes proches que pour moi. »

Enfin... Puisque tu as pris ta décision et qu'il semble improbable de faire changer la matrone d'avis d'une manière ou d'une autre, autant accepter son approche. Il n'en restait pas moins qu'un certain fils allait devoir répondre a certaines questions lorsque sa mère ne serrait pas là pour les entendre. En attendant...

« C'est votre choix. Ayez simplement en tête qu'un danger venu du Sud nous guette donc également.

En tout cas, si vous n'avez pas peur de l'inventivité, je pourrais également prendre mon tour pour nous permettre à tous d'échapper plus longtemps à la cuisine de Tao... »

Bien. Cela étant, ou en étiez vous avant qu'on ne vienne te couper avec des affirmations gênantes ? Ah oui... L'avenir... tu l'aborde d'un ton parfaitement égal, plus ou moins comme si tu abordais simplement un détail à propos d'une technique d'irrigation :

« Enfin bref... Pour en revenir a ce que je disais, j'ai bien prévu de m'installer ici quelques temps. Même si analyser et briser la malédiction qui pèse sur Tomoyo me prendra probablement des mois... J'avais dans l'idée de faire payer la responsable. Il est peu probable que cela me prenne moins d'une ou deux décennies et Yin Se me semble un pied à terre tout à fait approprié pour se consacrer a pareille tâche.

Et puis... Cela fait bien longtemps que je suis sur les routes. J'ai envie de travailler sur quelque chose d'un peu plus grand que mes petites enquêtes. »

Lâchant un demi-sourire mélancolique quant à la remarque de sa mère suivie de celle de Shiori, Tao songea un instant, égocentriquement peut-être, à sa propre situation. Des menaces… évidemment qu’il y avait un risque. Il y aurait toujours un risque… Et s'il était assez malin pour s'estimer à la hauteur de tout risque, il n'en serait pas là, dans une carcasse à la fois cuirasse et tombeau. Leurs décisions avec Chuanyu comportaient déjà des risques pour tout ceux les entourant… Si la solution était de faire éviter la moindre menace à sa famille, alors ils devraient à nouveau partir… Encore une fois. Et si Shiori et sa famille devaient être évités, d'autant plus qu'ils étaient précieux aux yeux de l'oracle... qui ne serait pas à éviter ?

Mais au-delà des jorogumos, qu’il craignait à chaque instant de voir débarquer devant sa porte, toutes puissantes et infiniment cruelles, n'osant imaginer quels supplices pourraient-ils subir entre leurs griffes, l’oracle n’oubliait pas qu’une autre menace pesait sur sa famille, et sur tous ses proches : celle de côtoyer quelqu’un de sa nature. Si cela venait à parvenir aux mauvaises oreilles, soit à peu près n’importe quel gouvernement voisin, il serait aussitôt considéré comme l’homme à abattre ou à capturer.

Si cela venait à se savoir, le Roi du Lingshen déferlerait les enfers sur cette contrée sans se soucier des dégâts collatéraux simplement pour éviter de voir l’une de ses possessions battre la campagne, quand au Conseil Oraculaire, qui essayait depuis des années de dérober les secrets des shenxians… il ne serait qu’un jouet sur une table de dissection.

Pensant, peut-être à tort, deviner ce que Shiori avait derrière la tête, Tao se contenta d’acquiescer sur le sujet, jetant un regard calme mais déterminé à sa mère, l’air de lui signifier de ne pas creuser sur le sujet pour l’heure.

Il ricana dans sa barbe à la mention de la cuisine, avant de reprendre sur le sujet de l’avenir, souriant.
«  Reste sa monnaie à la jorogumo donc… un beau projet… Il est certain qu’il vous profitera, à toi et Tomoyo, tout comme il nous profitera à tous…  » répondit-il, accompagnant ses propos de gestes, désignant vaguement les nommés.

«  Un peu d’aide dans cette tâche ne sera pour de refus j’imagine… Ni refusable de toute manière…  » plaisanta-t-il, à demi-mot, mais néanmoins très sérieux.

Modifié par un utilisateur dimanche 3 octobre 2021 01:52:01(UTC)  | Raison: Non indiquée

Calme, faisant mine de savourer son thé, devenu simple consommable sans saveur comme si la plupart de ses sens avaient été paralysés, Tao écoutait Shiori, essayant de comprendre où elle voulait en venir. Ses problèmes de goût, urgents ? Certes, ça comptait pour lui… Mais il n’arrivait à discerner si c’était une pointe d’humour ou non.

Dans le doute, le shenxian se laissa quelques secondes de réflexion, laissant le thé… disparaitre quelque part dans sa carcasse supposa-t-il, ne sachant absolument pas comment fonctionnait ce corps de terre cuite. Puis il finit par aller dans le sens de son interlocutrice.
«  Mes problèmes sensoriels comme tu dis… Pas la moindre idée. Nous avons déjà essayé les prêtres, les artificiers et même les sorcières de l’antique jungle de Chang Liao… Rien n’y a fait. Ce délicieux thé a un goût de cendres.  » soupira-t-il, rauquement.

«  J’ai toujours l’espoir de retrouver mon corps un jour... A ce jour, la seule voie que j’ai pu pleinement explorer, à ma faible connaissance cela dit, c’est celle des esprits. Mais je n’ai jamais rencontré un esprit capable d’y remédier… Et il existe un sortilège de résurrection selon les contes, une étrange forme de transmutation, mais… d’après les mêmes artificiers shu chez lesquels j’ai entendu ces rumeurs récemment, les âmes des shenxian seraient liées à leur nouvelle enveloppe, ce qui empêcherait le sort de fonctionner…

Pour le moment, c’est le cul de sac… »

Levant les yeux au plafond, réfléchissant, Tao s’appliqua comme pour essayer de trouver un goût dans sa bouche. En vain.
«  Non… C’est plus comme une sensation… Un peu comme si tout finissait en cendre ou en terre, comme l’autre que l’on se chamaille étant gosse et que l’on mange la poussière après avoir trébuché sur un caillou.  » répondit-il, une pointe de tristesse nostalgique sur les traits du visage.

«  L’odorat… C’est un peu pareil. Je "sens" les choses, je sens les variations, j’arrive à distinguer les choses, mais… il y a aussi quelque chose qui bloque, comme si l’enchantement me liant à cette carcasse m’empêchait d’y trouver du plaisir. C’est… difficile à expliquer…  »

La réponse suivante de Shiori sembla plonger l’oracle dans une forme de pessimiste ironique, comme s’il s’était déjà fait à l’idée un millier de fois, mais qu’il avait toujours un mince espoir, un espoir secoué à chaque fois qu’il se résignait. La mention de "miracle divin", en revanche, lui éveilla un petit sourire en coin. Ça, il préférait ne pas y compter… Et ces choses là avaient souvent un prix plus élevé encore, selon la divinité…

La proposition d’utiliser la magie pour simuler les sens perdus, plutôt que de chercher à les retrouver, le surprit. C’est vrai qu’il n’avait jamais essayé ça… Et si… ?
«  Tu penses que… ?  » marmonna l’oracle, avant de se perdre dans ses pensées.
«  Tu penses que ça pourrait marcher ?  » finit-il par demander, intéressé.

«  Des priorités… Oh, j’ai eu le temps de me faire une liste longue comme le bras de plats à tester, de spiritueux à goûter… Mais je donnerai cher pour pouvoir de donner profiter d’un bon bain chaud et de sentir les gens lorsque je lui serre dans mes bras.  » répondit-il, rêveur, avant d’être gêné et de détourner les yeux également.

Toussotant, il repartit sur le précédent sujet.
«  Et donc, ces sorts… Tu en connais par hasard ?  »

Bougeant les mains, touchant chaque doigt à tour de rôle avec le pouce, Tao semble s’efforcer d’essayer de ressentir quelque chose de différent.
«  Le toucher… Si, je l’ai. Mais c’est… différent. C’est un peu comme toucher le monde à travers d’énormes moufles. Sans doute suffisamment fonctionnel pour le combat, mais rien de plus, j’imagine…

La vue et l’ouïe en tout cas, de ce côté-là, rien de bien différent. J’ai même tendance à croire qu’elles se sont accrues.  »

Écoutant Shiori se confondre en excuses, bien qu’étant sans l’ombre d’un doute l’une des personnes s’intéressant le plus à sa condition, Tao se surprit à sourire, compatissant. Il posa l’une de ses lourdes palourdes de main sur l’épaule de Shiori, s’efforçant d’être le plus doux possible, ayant du mal à contrôler sa force, faute aux sens.
«  Prends tout ton temps.  » tenta-t-il, espérant être rassurant, surtout pour Shiori, mais également un peu pour lui-même, sans doute inconsciemment.

«  Si tu peux trouver quelque chose… n’importe quoi, je suis preneur. Même si ça me prend des années à appréhender ne serait-ce qu’un peu tes méthodes… ou à modifier mon corps en celui d’un chat le temps de goûter à un plat !  » plaisanta-t-il à moitié.

Nouvelle inspiration.
«  D’ici là… Tu vas trouver ça bête, mais… Tu accepterais de goûter à tout ce que je ne peux pas, plats comme autres petits plaisirs de la vie, et de me donner ton avis ? Histoire d’entretenir mes rêveries et ma liste de choses à faire, quand on aura atteint cet objectif...  » demanda-t-il maladroitement, mais utilisant cette fois-ci les termes “quand on” plutôt que “si on”.

Le toucher était donc, de ses différents sens, celui qu'il serrait le plus intéressant a étudier : là ou la vue et l'ouïe avaient été achevées et le goût comme l'odorat quasiment ignorés, le toucher semblait avoir d'une manière ou d'une autre été laissé a mi-chemin... Son fonctionnement pouvait donc servir de pont pour mieux comprendre les autres.

Le problème étant qu'il faudrait disposer de moyens d'accéder aux procédés rituels derrière ce résultat. Et les dieux savaient qu'il était compliqué, pour ne pas dire impossible, de déduire du résultat d'un rituel les détails de son fonctionnement. Les grandes lignes... c'était une chose... mais les nuances...

Enfin. Tao semblait bien prendre les choses. Et même si tu n'as pas pu t'empêcher de tressaillir lorsqu'il t'as posé la main sur l'épaule, tu as bon espoir qu'il ne s'en soit pas rendu compte... ou qu'au moins il n'ai pas réalisé que ta surprise n'avait rien a voir avec sa poigne.

Autant tu aurais maudit Ming quelques minutes plus tôt, autant cette fois, elle t'offre une diversion bienvenue pour te permettre de contrôler l'afflux de sang dans tes joues. Si tu ne dissimule pas ton sourire, il faut vraiment que tu réussisse a mieux te tenir en présence de cet imbécile... Et puis cette fois, le temps qu'on t'as laissé t'as même donné l'occasion de trouver une remarque qui devrait lui rendre un peu la pareille :

« Je ne suis pas certaine de pouvoir faire ça pour tous les plaisirs de la vie... enfin... j'ose espérer que tu ne me demande pas vraiment ça... Mais pour toi je peux faire quelques efforts et ne pas me contenter de te raconter les petits plats. Enfin selon ce qui t'intéresse bien sur... »

Modifié par un utilisateur jeudi 4 novembre 2021 23:00:42(UTC)  | Raison: Non indiquée

Et bien voilà ! Au moins tu n'es plus la seule a bredouiller l'air gênée. Ca lui fera les pieds. Tu lui adresse un rapide clin d'œil mais n'insiste pas plus. Après tout sa mère est juste là et elle se fait déjà beaucoup trop d'idées inappropriées sur ta personne sans qu'en plus tu lui donne du grain à moudre...

« J'y songerais... »

Il se raccroche en essayant de détailler quelque chose concernant ses souvenirs... Et force est d'admettre qu'il est difficile de jauger ce que cela signifie réellement pour toi... Des souvenirs d'enfance comme ceux qu'il évoque tu en as, bien entendu, mais... ils sont tellement lointains que tu es parfaitement consciente qu'une partie, au moins, d'entre eux n'est rien d'autre que le souvenir d'un souvenir ou d'un récit fait par tes parents cinquante ans plus tôt...

Et puis tu songe a une petite anecdote :

« Les souvenirs évoluent... C'est normal. Quand tu pourra à nouveau sentir ils retrouveront leur netteté. Je me rappelle, une fois un vieil ami m'a transmis un de ses souvenirs... Et quand je me remémore son souvenir maintenant, j'ai l'impression qu'il voyait la magie comme moi... alors qu'il n'utilisait pas de détection pendant ce souvenir. »

Mu Cheng. Pour le coup, il aurait probablement pu vous aider a résoudre une partie des problèmes qui allaient se présenter a vous... Après tout il avait suffisamment de souvenirs pour parvenir à lancer des sorts divins en se basant sur sa magie invocatoire... Mais bon... Les regrets ne servaient à rien. Enfin... Tu te redresse :

« Je dois écrire une petite lettre. Je devrais pouvoir obtenir un parchemin qui nous servira de base pour commencer sans trop de peine. »

Tu passe une main dans tes cheveux pour les repasser derrière ton oreille, en profitant pour effleurer le fil de cuivre qui te sert de focalisateur pour ton sort de message...

« Je reviens vite. »

Puis, bien plus bas, et profitant que tu tourne le dos aux présents pour dissimuler la vague de gène qui t'emplis lorsque tu ajoute dans un murmure pour les seules oreilles de l'oracle :

« Si c'est toi je veux bien réfléchir à tout décrire... enfin si tu veux. »

Bon... bien entendu il reste en mesure de te répondre mais tu n'as pas a soutenir son regard après ça.

Modifié par un utilisateur dimanche 7 novembre 2021 23:20:31(UTC)  | Raison: Non indiquée