Profitant enfin de l'invitation, Coriolis se mit à l'aise sur sa chaise, vida un premier verre de vin cul-sec avec un soupir de plaisir bruyant puis se mit à siroter immédiatement un second verre.

La discussion avait finalement pu démarrer sur des bases plus apaisées, mais visiblement, elles avaient tapé à côté avec leur première offre. Il semblait que la dague avait bien plus de valeur que leur première impression, mais Coriolis n'avait aucune idée de combien. Seulement, la Rouge-gorge lui avait donné une ouverture. Si elles pouvaient simplement mettre la main sur la dague, ne serait-ce qu'un instant, et si elle avait compris le fonctionnement de ces rituels, il suffiraient qu'elles se réveillent et leur mission ici serait accomplie. Elle tenta son coup en espérant que les autres comprennent son jeu.

« Ha ! Vous êtes donc également convaincue qu'il s'agit de plus qu'une simple dague d'argent. C'est effectivement pour cela que la cliente a pris tant de précaution. Cependant, afin que nous soyons sûres de ce que nous allons récupérer, j'aimerais pouvoir examiner l'objet de près. Disons que je suis la caution "dagues" de la cliente, » appuya-t-elle d'un regard entendu en tapotant sur l'une de ses dagues de sombrefeuille.

Elle tendit l'autre main, paume ouverte comme pour inviter leur interlocutrice à y placer l'objet.

« Evidemment, si vous craignez une entourloupe, vous pouvez mettre en œuvre toutes les contremesures que vous souhaitez, je peux même procéder à l'examen de la dague avec votre lame sous la gorge si cela vous chante, » annonça-t-elle, confiante, avec un grand sourire et un regard en coin à Scath.

Modifié par un utilisateur dimanche 16 janvier 2022 19:24:16(UTC)  | Raison: Non indiquée

Quelque peu rassuré par la tension qui s'était envolé après son intervention, Byar se remit en retrait pour siroter sa bière tout en taillant bavette avec deux des gars de la rouge-gorge. Le reste du groupe avait les choses sous contrôle et Byar voyait bien qu'ils négociaient dur. Même un vendeur de cheval aurait fort à faire face à eux. Pour un peu, il aurait presque apprécié cette soirée étrange. Il ne manquait qu'une paire de dés pour rendre la soirée agréable...

Jaugeant les gars d'en face d'un regard qu'il espérait neutre, il leur lança sur un ton complotiste : « Psst ! Dites, les gars ! Vous auriez une paire de dés sur vous ? Ca serait pas mal pour passer l'temps, non ? » Après tout, rien ne l'empêchait lui de s'amuser quand les autres s'occuper des choses sérieuses.

Prise au dépourvu que le subterfuge ait fonctionné, sa surprise pouvait également s'interpréter comme due à la découverte de l'objet. Lorsque la Rouge-gorge révéla la dague, l'éclat d'argent sembla briller au plus profond des pupilles de l'Elfe. Ses yeux traduisaient la plus remarquable des gourmandises, telle une enfant devant un magasin de friandises. Avant de se mettre à saliver, elle se rappela qu'elles étaient surtout ici pour Scath et que cette dague représentait encore sûrement plus pour cette dernière que pour elle-même.

Elle jeta alors un regard interrogateur et inquiet à la Tieffline, par réflexe, comme pour lui demander la permission de toucher. Puis, ce même regard bascula vers l'autre Scath, onirique celle-là, ne sachant plus exactement qui solliciter.

Tandis qu'elle soutenait son regard, elle tendit doucement la main en direction de la dague. Son bras avançait au rythme de sa respiration : lente et délibérée. Respiration qui sembla, à ses oreilles, se faire de plus en plus forte, jusqu'à devenir assourdissante. Ses doigts, fébriles, touchèrent enfin le pommeau, après ce qui sembla des minutes entières, et glissèrent lentement le long de la poignée, dans un mouvement qu'elle connaissait par cœur. Tandis qu'ils s'enroulèrent lentement, son souffle se fit plus profond, plus assuré, et puis, au bout de leur course, se verrouillèrent sur le manche, dans une prise parfaite, comme elle croyait n'en avoir jamais connue. La sensation était incroyable, et lui coupa un instant la respiration.

Bien ! Voilà, tu l'as en main, et elle a l'air fantastique à manier. Je donnerais cher pour pouvoir la planter entre les omoplates de Lowls, mais il va falloir que tu t'y fasse ma pauvre : c'est pas pour toi.

Elle prit une grande inspiration, un sourire se dessinant sur son visage.

« Un objet magnifique, à la hauteur de sa réputation. J'avoue être bien triste qu'il ne me soit pas destiné. »

Elle adressa un dernier regard à la Rouge-gorge. Et bien triste de pas explorer plus longtemps le lien entre toi et notre Scath, mais il va falloir partir maintenant. Direction : la base d'opération onirique.

« Je vais également regretter ce verre promis je crois. »

Puis, elle balaya ses compagnons des yeux - avec l'air d'une gamine qui vient de réussir une bêtise - puis les ferma.

Elle n'entendit aucune réaction, seul un silence feutré et apaisant l'enveloppait. Ce silence ainsi que l'odeur qui parvenait à ses narines la rassura. Ne pouvant les garder clos plus longtemps, elle ouvrit les yeux et confirma sa réussite : elle était bien dans le salon des songes. Elle sauta littéralement de joie, la laissant éclater comme jamais depuis qu'elle s'était réveillée, amnésique, enchaînée à ce mur à Thrushmoor.

« YYYEEESSS ! YESYESYES !!! Bien joué grande asperge, je savais que je pouvais réussir au moins un truc ! »

Avant que l'inquiétude concernant le destin de ses compagnons ne la saisisse comme d'habitude, elle profitait bruyamment de son succès.

Thème de Scath : L’envol du phénix

La tension montait de seconde en seconde. Scath tentait tant bien que mal de conserver son sang froid, souhaitant ne pas trahir le génie de Coriolis. Dans cette partie d’échecs, finesse menait la danse. A trop se concentrer sur les figures, l’on en oubliait les gardes. Et ceux-ci progressaient, inexorablement, vers un mat des plus astucieux.

Dès lors que Coriolis disparut avec la dague, le regard de Scath s’enflamma. Sentant la tension monter, et Byar s'inquiéter, elle essaya de faire au mieux pour agir au plus vite. Si c’était “sa” dimension onirique, et qu’ils étaient en quelque sorte dans sa tête… son départ devrait briser la connexion, avec un peu de chance. Du moins l’espérait-elle. Le topo avait été fait en amont, dans tous les cas. Mais espérons simplement que cela se fasse en douceur. Pique d'adrénaline.

Avant même que les voleurs n’aient pu réagir, elle planta son regard dans celui de la tieffeline, la gratifiant d’un sourire sadique et rancunier.
«  Nous nous reverrons… Scath.  » affirma-t-elle simplement, triomphante, avant de disparaître à son tour du rêve.

Un rêve s'effondre


La sortie de Coriolis prit tout le monde au dépourvu. En un instant, l'elfe avait disparu, comme un songe emportée par le matin...mais si ses compagnons avaient une bonne idée de là où elle avait pu aller - le Salon des Songes - les Oiseaux Chanteurs et Rouge-Gorge ne purent que regarder le vide un instant, interdits.

Scath ne manquait pas d'un certain sens du théâtral...et profita de la confusion pour déserter le rêve à son tour. Le ciel se fendit. Et les lumières qui jusque là baignaient la taverne dans une douce lueur dorée s'étranglèrent jusqu'à n'être plus que des braises à peine visibles dans la nuit qui venait de tomber. Quelque part, un craquement et un énorme bruit d'eau se fit entendre.

La confusion s'intensifiait à l'intérieur de la Lamproie, et Théodora ne resta pas le temps d'en voir plus: elle disparu également, quittant le songe.

Enfin, les Oiseaux et Rouge-Gorge se reprirent tirant leurs lames face à un Byar terrifié, et à une Raayaatma fébrile. Tatiana était elle aussi frénétique, bouclier et lame en main en un clignement d'oeil. Elle lança à Raayaatma.
« Je peux nous donner quelques secondes. Si tu as une idée... »

Dehors, un nouveau craquement apocalyptique se fit entendre, et toute la taverne trembla sur ses fondations. Le bruit d'une vague se fracassant sur la roche résonna dans l'obscurité.

Heureusement, la psychiste avait une idée: alors que les voleurs s'apprêtaient à se jeter dans la mêlée, et que les ombres enveloppaient Rouge-Gorge, elle usa de sa magie, parvenant à calmer, pendant un instant, les esprits.


Rouge-Gorge lança à sa proposition.
« Si je ne les vois pas dans la seconde, je repeins cet endroit avec votre sang. »

Tatiana raffermit sa prise...les choses n'allaient pas être faciles, et ils n'avaient pas beaucoup de temps. Théodora, Scath et Coriolis avaient déjà fuit. De nouveau, la taverne trembla, et ils réalisèrent, à la faible lueur des lanternes, à peine plus que des braises, que des vagues frappaient les vitres de la taverne, sans pour l'instant parvenir à les briser...mais le verre commençait à se fendre.

Etrangement...les voleurs, ou le reste des entités présentes dans le rêve, ne semblaient pas inquiets de cet état de fait. Mais il était évident que les choses se dégradaient très, très rapidement.

Modifié par un utilisateur mardi 25 janvier 2022 12:25:20(UTC)  | Raison: Non indiquée

Pendant ce temps, dans le salon

« Certains membres de l'expédition risquent de revenir blessés si le rêve s'effondre. Je vais préparer quelque chose pour les aider. »

Théodora déploya un tapis de prière, son grimoire ésotérique et décrocha son scarabée d'or. Lequel alla lui tenir le livre et tourner les pages au fur et à mesure qu'elle prononçait des paroles incompréhensibles.

L'étrange rituel dura une minute complète.

« Bien, ils peuvent revenir. Je devrais pouvoir soigner tout le monde si jamais on en a besoin. »

Wandering ritual - valable pour une heure.
Esprit sélectionné : Vie
Habilité gagné : canalisation d'énergie positive 4d6 3/3
Sorts déverrouillés :
- detect undead (1st),
- lesser restoration (2nd),
- neutralize poison (3rd),
- restoration (4th)

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Plus tard

Théodora profite de ce passage au salon pour saluer le fragment de l'ennemi devenu soi-disant autonome. Elle pensait que l'effort de volonté suffirait à regagner le monde physique. Malheureusement, le salon semblait servir d'ancrage plus fort que ce qu'elle pensait. Le lieu n'était donc pas qu'un construct mental bâti autour du fragment mais était véritablement connecté au groupe. La chamane observait les lieux sous un jour nouveau.

« Dites-moi, vous qui êtes maintenant un résident de la dimension des rêves. Ce lieu... J'aurais une théorie. Serait-il possible de ramener des morceaux d'autres rêves pour faire que celui-ci gagne en force grâce à notre lien ? Je repensais à ce que vous disiez au sujet des ancres nécessaires pour voyager dans la bibliothèque interdite. Si d'aventure nous arrivions à enrichir et renforcer cette portion de la dimension des rêves, est-ce qu'on ne pourrait pas s'en servir comme un phare en plus des ancres personnelles qui sont déjà les nôtres ? Ce phare nous permettrait en terre inconnue d'avoir une meilleure emprise sur les rêves que nous visitons. Qu'en pensez-vous ? »

Modifié par un utilisateur mercredi 26 janvier 2022 11:17:22(UTC)  | Raison: Non indiquée

Les choses allaient de mal en pis. Coriolis avait disparu avec la dague. Scath sans prévenir avait fait de même. Il ne restait plus que Raayaatma, Tatiana, Théodora et Byar face à ce groupe de voleurs sanguinaires.

Si au départ, le paysan faisait confiance à ses compagnons, il voyait bien que les règles avaient changé et que pour l’instant, c’était chacun pour soi et dieux pour tous. Par Desna, je vais mourir dans un faux rêve, tuer par des faux bandits après avoir bu une fausse bière pour me donner du faux courage… sanglota t-il silencieusement alors que sa dernière gorgée de bière atterrissait dans son estomac. Si à sa gauche, le siège laissé par Scath restait vide, à sa droite, l’image de la noble s’estompa de la même manière. C’pas possible, elle aussi ! ajouta t-il sentant ses yeux se remplir d’humidité. À mesure que les secondes s’écoulaient, le tableau empirait.

Regardant le gang de la fausse Scath, Byar voyait les regards meurtriers et les grimaces remplies de promesses assassines. Avalant avec difficulté sa salive, le pauvre homme transpirait à présent abondamment. Si Raayaatma n’avait pas calmé les choses grâce à son charisme naturel, l’alchimiste se serait vu déjà mort et enterré. Jamais de sa vie, il ne s’était imaginé fricoter avec des brigands pour ensuite les doubler. Heureusement, la chef du groupe gardait les derniers vestiges de cohésion et tenta de les sortir de là, entiers. Répondant à son ordre, il lâcha sa choppe pour essayer d’attraper sa main. Mais quelque chose dérapa. Sous sa peau, il sentit une brûlure intense au contact de son alliée tandis qu’une voix d’outre-tombe se fit entendre. « Non. Toi, tu es à moi ! ». Byar reconnaissait cette voix terrible et cela le fit reculer tremblant. Simultanément, Raayaatma et Tatiana disparurent sans laisser de traces, le laissant seul face au danger.

Seul.

Cette pensée le terrifia et des larmes commencèrent à se former au coin de ses yeux. Par tous les dieux, mon âme est perdue. gémit-il. La pensée était si forte en lui qu’elle emplissait la totalité de son esprit. Alors que son coeur battait comme les tambours de la création dans sa poitrine, il bégaya piteusement à la fausse Scath : « J-j-j-je sais pas c’qui s’est passé ! J’vous jure. Mais j’vous en prie, aidez-moi ! » Sa voix était emplie d’une détresse pressante que le voleur en face de lui choisit d’ignorer. D’un geste vif, il fit apparaître une dague dans sa main, qu’il planta d’un geste expert dans celle de Byar. Cloué à la table, toute possibilité de fuite semblait à présent impossible. Seule la pensée de sa mort prochaine résonnait dans sa tête, espacé seulement par les battements de son coeur. « Je vais mourir.. »*bo-bom*« Je vais mourir.. »*bo-bom*« Je vais mourir.. »*bo-bom* Et à mesure que cette pensée se répétait dans sa tête, le rêve se mit à clignoter créant une alternance de clair-obscur.

« Tu ne peux pas m’échapper. » La voix dans la tête de Byar se rapprochait tandis qu’il sentait le sol se mettre à trembler. « Il arrive… il arrive. Il arrive ! IL ARRIVE !!! J’vous en prie, j’vous en prie, j’vous en priiiiie ! Il est là pour moi. Aidez-moi, aidez-moi, aidez-moi !!!! Aidez-moi, aidez-moi, aidez-moi, j’vous en prie, j’vous en priiiiiiiie !!! » geignit-il sur un débit rapide et ininterrompu, les larmes coulant sur ses joues. La douleur de sa main transpercée était oblitérée par la peur viscérale qu’il ressentait et même le visage de la fausse Scath se mit à trahir des émotions contradictoires devant l’épouvante affichée du bossu. Alors qu’elle réfléchissait à toute vitesse, une dernière secousse plus violente que les autres fit trembler la taverne sur ses fondations. La bouche ouverte, Byar attendait interdit. « Trop tard… » lâcha t-il dans un souffle inaudible pour d’autres que lui.

Soudain, la lumière ambiante disparut pour laisser place aux ténèbres. Puis le carnage et la folie envahirent la place. Des hurlements et des cris de douleur s’élevaient de partout. Des tables et d’autres objets massifs se mirent à voler. Byar tomba à la renverse, gardant dans sa main meurtrie le poignard enfoncé jusqu’à la garde. Quelque chose vint le percuter au ventre. Dans le noir le plus total, il se mit à tâtonner pour comprendre ce qu’était l’objet mou qu’il tenait entre ses mains. De forme arrondie de la taille d’une vessie et entourée d’une foule de poils, quelque chose de pointu occupait son centre. Sur le côté gauche, une ouverture béante contenait des excroissances pointues couvertes d’un liquide visqueux. Et sur la droite, deux protubérance de même taille semblaient contenir quelque chose de mou. A la compréhension de cet objet, Byar se mit à vomir toute l’excellente bière qu’il avait ingurgité quelques minutes plus tôt.

Alors qu’il commençait à perdre ses nerfs, des voix se firent entendre.
« Byar, laisse-moi faire ! On doit dégager d’ici fissa ! »
« Allez, respire. Ça va aller. Respire et relève-toi. Tu ne peux pas rester là »
« ByaaAAAaaAAaar ! Je veux pas mourir comme çaaAAaaAAaa !!! »
« Garçon, ressaisis-toi et vite ! »
« Byar chérie, on doit s’en aller. »

Dans sa tête ou dans le rêve, il n’arrivait pas à le déterminer. Tout ce qui important, c’était ce massacre aveugle qui avait lieu devant lui, et la tête d’un macchabée qu’il tenait entre ses mains. L’odeur de fer, caractéristique du sang qui coulait à flot emplissait ses narines jusqu’à l’écoeurement. Et alors que ces voix l’aidaient à se ressaisir, quelque chose d’énorme vint le bousculer pour le renverser de nouveau sur le dos. Autour de lui, des gémissements et des cris de douleur s’élevaient de toute part. Et au dessus de lui, quelque chose d’inhumain renifla son odeur avant de déclarer d’une voix caverneuse : « Je t’ai retrouvé ! »

L’instant d’après, la voix de Byar couvrit toutes les autres alors que deux entités disparaissaient du rêve.



Groggy mais de retour dans le Salon des Songes quelques instants après le retour de Raayaatma et Tatiana, l’alchimiste se redressa de manière éduquée avant de réajuster ses vêtements froissés avec application. Puis voyant d’exubérante Coriolis s’adresser à sa personne, il se décida à répondre d’une voix posée: « Byar… est indisponible. Je ne puis répondre pour lui. » avant d’incliner sa tête très légèrement mais avec délicatesse.

Levant les yeux aux ciels devant cette femme de basse extraction qui la faisait se répéter, elle pesta avec emphase : « Oui, Byar est indisponible. Ça me parait évident, non ? » Levant légèrement le menton, elle ajouta « Je suis là, et Byar non. » comme si cela constituait une explication suffisante. Les bras sur sa taille, la femme se tenait aussi droite que Byar se tenait courbé. Qu'elle aurait porté une couronne sur la tête que cela n'aurait pas paru déplacé. « Que vous faut-il de plus ? » Le ton était clairement suffisant, presque méprisant.

Puis embrassant le reste du groupe du regard, elle sembla réfléchir deux secondes avant de se tourner vers Théodora et de lui sourire d'une manière étudiée. « Très chère. Je me nomme Jeanne. Ravie de vous rencontrer. J'imagine que vous devez être à la tête de ce groupe hétéroclite de serviteurs ? » fit-elle tout en agitant sa main pour désigner les autres personnes présentes. « Si cela vous sied, pourriez-vous demander à l'une de vos servantes ici présente de bien vouloir me guider vers ma chambre ? Cet endroit de manque pas de style, mais je souhaiterai m'étendre. Les derniers événements ont été éprouvants. » La voix fine et féminine jurait avec l'allure dépenaillée du pauvre alchimiste. Mais le port altier donnait une allure au personnage aux antipodes de ce que le groupe pouvait constater chez Byar.

Thème de Scath : L’envol du phénix

Soulagée d’être de retour au Salon des Songes, et éclatant de rire lorsque Coriolis lui sauta au cou, lui rendant son étreinte, la joie de Scath fut de courte durée lorsqu’elle comprit que son départ n’avait pas suffit à éjecter tout le monde de son propre rêve. Pas le temps de songer à comment régler ce problème à l’avenir, ça pourrait attendre. Pour le moment, l'inquiétude prenait pied sur tout le reste.

Acquiesçant à Théodora et Coriolis, elle se prépara même à retourner dans le rêve récupérer ses compagnons d’infortune, avant de se rendre compte que c’était une décision potentiellement dangereuse. Elle se résigna donc et se prépara également à soigner les blessés, comme elle avait déjà pu le faire par le passé au manoir du comte. Shélyn accorderait bien cette nouvelle danse à la ménestrelle, songea-t-elle, songeant aussi bien le corps que le cœur.

Finalement, voici qu’ils débarquèrent tous, et en bonne forme. Soupir de soulagement.
Elle mit sa main sur l’épaule de Coriolis, se voulant rassurant envers cette dernière.

«  Allons, détends toi ma grande. Tout le monde va bien. C’est vrai que l’on aurait pu répéter le plan avant d’entrer dans la gueule du loup, ç’aurait été moins pour tout le monde je pense… Faudra faire ça les prochaines fois. Vous allez bien ?  »

Et voilà que Byar en profita pour montrer l’une de ses nouvelles facettes, ou de ses nouvelles invitées. Si elle avait été sûre du non-risque de ses absences, elle aurait trouvé ça rafraîchissant comme moment… A une exception près. La fâcheuse tendance qu’avait cette nouvelle venue de les voir comme des êtres inférieurs. Des serviteurs hein… Pour qui elle se prenait, celle-là, à vouloir lui passer la laisse au cou ?

Sortant subitement de sa montée de colère, Scath se rendit compte d’une chose, une chose qui lui glaça le sang. Elle avait la dague en main, ses phalanges serrant cette dernière jusqu’à faire pâlir ses doigts écarlates. Cette Scath, dans le rêve… était-ce son passé ? ça coïncidait avec ce que lui avait dit le marin, mais… cela pouvait toujours venir de son subconscient… Mais elle éprouvait une intense tristesse et colère en tenant cette dague, comme si les souvenirs tâchaient de se frayer un chemin jusqu’à son âme, hurlant derrière les barreaux de l’amnésie. Qu’est ce qui s’était passé à Cassomir pour en venir là ? Qu’est ce que cette ville lui avait fait ? Foutues questions sans réponses…

Mais pour l'heure, elle laissa les autres se débrouiller avec... Jeanne. Ils s'en sortaient très bien et n'avaient pas besoin de la fougue de la tieffeline comme cerise sur le gâteau. Mais inconsciemment, elle n'accepterait pas qu'on ne lui rende pas Byar, l'homme qu'elle avait pu apprendre à découvrir, et qui, en dépit de tout, était très humain. Elle en vint à se demander si ce n'était pas la femme à laquelle il avait déjà fait allusion... Creuse toi la tête pauvre cruche... Jeanne... Non, Tiléa.

La réponse de Byar... ou plutôt de Jeanne, à l'exubérante expression de soulagement de Coriolis eût l'effet d'une douche froide. Si les premiers mots avaient instigué suffisamment de doute pour freiner l'Elfe dans ses exclamations, la suite de son discours sonnait comme des coups de fouet à ses oreilles - et pas ceux de Calisitria. Salve après salve, l'Elfe semblait se décomposer. Comme d'habitude, son esprit était assailli d'un tas d'images à la fois, plus qu'elle ne pouvait en absorber, mais celles-ci étaient à présent chargées d'angoisse et non plus de succès. Elle fût immédiatement ramenée à leur dernière rencontre avec une autre personnalité de Byar, et c'était probablement le pire de ses si rares souvenirs. Elle se souvint de la rage d'Ulaf, de son sourire narquois, de sa poigne et de sa pulsion de mort qu'elle avait senti passer de près. Elle subit également les symptômes de la crise qui avait sévi à cette occasion : jambes fébriles, mains tremblantes, souffle court, sanglots retenus... et puis comme si ça ne pouvait pas être pire, il fallait que cette nouvelle personnalité soit une noble hautaine, condescendante et qui savait précisément ramener la roturière à sa condition d'inférieure.

En quelques mots, quelques attitudes, elle avait presque réussi à la mettre à genoux et cela la terrifiait. Comment pouvait-elle être si paniquée face à une simple évocation de son rang par une personnalité éphémère et immatérielle de son pauvre ami troublé ?

Cette fois-ci, cependant, elle ne se retrouva pas en première ligne, et cela changeait tout. La main de Scath sur son épaule, les mots et les soldats de Théodora entre elle et l'intruse, le détachement rassurant de Raayaatma, Coriolis pu profiter de ces soutiens pour retrouver un minimum de contenance. Elle posa un regard reconnaissant sur ses camarades et laissa faire la Taldorienne qui semblait maitriser parfaitement le genre de joute rhétorique que l'Elfe discernait. Sans vouloir y apporter son grain de sel habituel, à la fois par respect et par crainte, elle marmonna néanmoins une explication vague à la question de Théodora :

« Euh... dur à dire, c'est toujours Byar, enfin non, mais c'est bien lui, physiquement. Et Jeanne euh ben elle est là dedans, avec pas mal d'autres je crois, dont Byar, mais des fois ben... les autres prennent la main, et c'est pas toujours beau à voir. En tout cas moi je préfère Byar. Si... si tu peux négocier avec elle pour qu'il revienne ? Si c'est un lit confortable qu'elle veut, on peut peut-être lui trouver ça en échange ? »

Elle avait soufflé tout ceci à Théodora sans jeter le moindre regard à Byar/Jeanne de crainte d'y trouver courroux, mépris ou toute autre forme de jugement.

Modifié par un utilisateur mercredi 2 février 2022 10:03:34(UTC)  | Raison: Non indiquée