Ce n'est pas que Barruk a peur bien sûr : un gobelin n'a jamais peur, et certainement pas Mor'la'guibolle. Ce que les humains appellent la peur est en réalité une manœuvre stratégique d'une complexité difficile à appréhender pour des grandes guibolles, qui vise à garder dans son champ de vision ses ennemis et ses alliés en même temps. Ainsi, Barruk déploie tous ces trésors de stratégie et ferme la marche. Tout ça pour ça oui. Mais eu moins il le fait avec panache.

Il invoque quand même un caillou, prêt à le lancer dans le tas d'os au moindre signe suspect. Ou plutôt au moindre signe menaçant. Ou plutôt...

Barruk perd patience et jette directement son sortilège sur le tas d'os. Frappe préventive : la tactique c'est définitivement son truc.

Les os ne réagissent pas aux coups donnés à première vue, puis semblent glisser au sol à une vitesse plus soutenue, comme si une rivière invisible les entraîneurs vers le centre de la salle.

Peu après, le centre de la salle apparaît enfin au groupe : là, les lents flux d'ossements se rejoignent en une masse cartilageuse au pied d'un kobold à l'allure desséchée et défraîchie.
Ce dernier semble marmonner des incantations aux sons rauques et hachés, tout en paraissant guider de ses mains les os pour qu'ils forment d'étranges arcs de cercle qui se lèvent dans les airs avant de retomber dans un amas bizarre et inquiétant de par ses protubérances pointues.
Le kobold ne semble pas avoir remarqué votre arrivée, et commence à façonner une sorte de longue forme d'os, qui ressemble de plus en plus à un long crâne reptilien orné d'une couronne de cornes, d'une taille prodigieuse...

En voyant Shamissa fondre sur le kobold, Barruk prend la décision de la laisser attaquer sans interférer. Après tout, c'est une professionnelle. Il prépare juste son sort le plus puissant, histoire d'offrir un supplément cailloux au rongeur d'os si d'aventure l'attaque de Shamissa se révélait insuffisante.

Shamissa frappe le kobold par surprise et celui-ci s'étale de tout son long, inconscient. La forme squelettique reste comme figée en l'air, et de petits gémissements semble en émerger. D'autres formes, à moitié squelettiques et moitié fantomatiques, apparaissent soudainement autour des aventuriers en émergeant de la couche d'os, produisant de petits cris emplis de douleur, puis une forme semblable à un rat mais a tête fortement pointues semble parler aux autres :
«  Père.... Père... Pourquoi dors-tu ? »

Barruk se glisse dans le ombres, mais a l'impression que les tas d'ossements l'épient, aussi étrange que cela paraisse. Autour d'Han Bao et de Shamissa, les formes semi-fantomatiques semblent se stabiliser, sans agressivité mais avec une peine réelle. Au fur et à mesure qu'elles s'ossifient, elles ressemblent de plus en plus à des kobolds, sauf la plus grande, qui ressemble à un dragon.
«  Pourquoi avoir mis père à terre ?  »demande la plus grande forme, dans un murmure piteux et gémissant.

Les formes mi-éthérées semblent soudainement très inquiètes.
«  Aidez... Aidez... Il faut que vous aidiez Père... C'est lui qui nous a redonné un corps...  »

Plusieurs d'entre elles semblent tourn er sur elle-même en signe de détresse, mais la plus grande, celle qui a la forme d'un dragon, se rapproche du groupe.
«  L'ophidium ? Qu'est-ce que c'est ? Dites-nous, et nous pourrons sauver père... »

En effet, à terre, il n'y a plus que des bouteilles et des écuelles vides, avec des pinceaux à moitié secs mais enduits d'une substance huileuse, ainsi que des baguettes très fines et très pointues.

La queue de la grande créature semble trahir son mal-être intérieur, battant fébrilement le sol et soulevant des nuages de poussière d'os.

L'un des kobolds "revenants" s'approche de Shamissa et, tout douceùent, comme s'il s'apprêter à caresser un chaton fragile et effrayé, il prend la main de cette dernière. Elle sent l'os froid et râpeux lui toucher la main, comme communiquant un court instant de gel de printemps.

«  Père a son atelier près d'ici. Venez... »

Le kobold fantomatique vous montre un établi situé derrière un tas d'os, une quinzaine de mètres plus loin.
De nombreux produits en fioles et bocaux sont posés sur une grande planche en bois de champignon, et toutes portent des indications écrites d'une main maladroite, en draconique.

L'un d'entre vous connaît le draconique ?

Les êtres fantomatiques regardent Barruk pendant de longues secondes, tournant leurs têtes sur le côté comme pour mieux l'apprécier, puis l'une d'elles s'approche de lui.
«  Lire ? Qu'est-ce que c'est ? Il n'avait pas d'autres choses pour nous faire renaître. Il mélangeait cela, l'appliquait sur nous, en l'air sans pouvoir nous toucher, en grommelant des choses étranges, et ensuite les os viennent se coller sur nous, c'est vraiment très étrange... Je me sens comme ... affamé... »