Gustav n'eut même pas à relire les chefs d'accusations pour les ressortir de mémoire :

« Meurtre de...de dix villageois de Morast, meurtre de six enfants de la c...communauté agric...cole d'Hergstag, incendie c...criminel au sanc...ctuaire de l'île de K...karb ayant entrainé la mort du docteur Brada, de ses patients et la cécité permanente de son assistant K...karl.  »

A peine était il entré dans la pièce que Gabriel s'était enfermé dans sa mauvaise humeur, plus qu'il ne l'était déjà, n'écoutant plus rien des échanges qui avaient lieu. Sa seule préocupation était à présent Bhrasta. Il ne quittait pas la femme des yeux, en fait si c'est yeux avaient était des arbalètes la femme ressemblerait maintenant a une pelote d'épingles. Il était tellement focalisé sur la surveillance du moindre geste de cette femme, qu'il n'entendit même pas la remarque désobligeante d'Isolde. Ce n'est que lorsque Ethus lui demanda son avis qu'il reprit pied dans la réalité, il ne quitta cependant pas l'être maléfique des yeux pour autant.

« Comme vous voulez Ethus. Tant que nous sortons d'ici au plus vite. J'ai l'impression que l'air de cette pièce est vicié. J'aurais par contre, un témoignage et quelques pièces d'équipement à confier avant qu'on ne partes. »

« Isolde, si ta soif de questions cesse, nous pouvons partir l'étancher avec de possibles réponses dès que tu le souhaites !? »

Hamunaptis n'avait guère besoin de plus de temps en ces lieux : en perdre davantage pouvait coûter la vie à une pauvre créature qui, à première vue, ne semblait pas capable en toute connaissance de cause de telles abominations.

Isolde opina du chef en réponse aux propos d'Hamunaptis. D'un geste de la main, elle invita celui-ci à quitter la pièce et salua l'assemblée. « Nous sommes donc tous d'accord. Nous avons de plus fait montre d'une courtoisie peu commune alors revoyons-nous d'ici peu pour partager nos découvertes : je suis certaine qu'elles n'auront, elles non plus, rien d'ennuyeux. »

La nuit s'était installée sur la ville et posait sur son bouillonnement un voile de calme illusoire. Les rues étaient baignées d'une lumière jaunâtre crue qui perçait difficilement au travers de la brume drue. Les pas résonnaient sur les pavés humides, les quelques visages croisés semblaient bien patibulaires en ces heures tardives. Plusieurs fois, des ombres fugaces provoquèrent sursaut ou inquiétude, les héritiers de Lorrimor tâchaient de chasser leurs craintes infondées. Une impression de danger larvée au creux de nuque ne cessait de revenir à la charge, c'était comme si toute la cité vibrait d'une énergie malsaine.

Gabriel et Ethus rentrèrent au tribunal, un petit groupe de citoyen maintenait surveillance comme d'étranges vigies de verre. Leur silhouette se faisait flou sous l'influence conjuguée des torches, de la fatigue et de la nuit. Dans les locaux se tenaient des gardes sévères, leur mine ne cilla pas lorsque les défenseurs de la Bête retrouvèrent leur bureau mais se dégageait d'eux une nervosité discrète. Ils trouvèrent un courrier écrit de la main de Zorg qui esquissait vaguement leur enquête et promettait de revenir au petit matin pour préparer l'audience. Ils trouvèrent un autre missive de l'écriture châtiée de Gustav, il assurait avoir fait le nécessaire pour préserver la Bête mais Bhrasta et sa suivante avaient profité de leur transfert pour s'enfuir, trois gardes étaient morts étranglés et le quatrième porté disparu. Il précisait avoir vérifié les mesures de sécurité : toutes deux étaient menottés aux bras et aux jambes, un vétéran encadrait l'affaire. Ça n'avait pas suffi...

Plus tard, ce fut au tour d'Hamunaptis et Isolde flanqués de nouveaux compagnons de revenir à la civilisation. Isolde récupéra une lettre à l'auberge et précisa à Hamunaptis qu'elle devrait aller à son rendez-vous au petit matin.

Il était quatre heure et l'épuisement guettait, il leur fallait pourtant partager leurs informations et préparer l'audience qui commencerait dans six heures à peine. Comment allaient-ils procéder ?

Lilith et Clint sont fatigués, il me faudra un jet de vigueur pour les autres

« Oh, un tribunaaa... » elle bailla « ...al. C'est marrant, les humains ont tous l'air sérieux ici. Je veux dire, plus que d'habitude. Biscuit, tu penses que c'est une maladie et qu'ils sont tous contaminés ? »

Elle suivit son nouveau garde du corps, parce qu'elle avait décidé qu'il serait son garde du corps même si lui ne le savait peut-être pas encore, jusqu'à ce qu'ils rencontrent un duo. Effectivement, ils avaient tous deux l'air d'être des combattants de leur foi, sans l'ombre d'un doute. A vrai dire, Lilith se demandait ce que pouvait faire Isolde dans ce groupe. Mais elle n'était pas là pour juger, après tout elle-même semblait tellement hors de sa place : Une enfant, sorcière, accompagnée d'un chat anthropomorphe, lui-même armé d'une paire d'outils technologiques crachant des billes capable d'imploser des crânes.

Les yeux à moitié fermés, elle commençait à se perdre dans ses pensées jusqu'à ce qu'Hamunaptis prononce son nom en la présentant à ses compatriotes.

« Ah, oui. Lilith Lucereine... »

Elle cligna des yeux à plusieurs reprises, dans une tentative de bien se réveiller, avant de se laisser sur la table, allongée sur ses propres bras. Décidément, cette journée s'était avérée éprouvante, et elle avait bien hâte de pouvoir dormir.

« Une histoire de prisonnières ? Vous enfermez des gens ? »