Intro Tika : Songe d'une nuit d'automne

Année 348, Brunissement 8, jour du culte, à peu près 1ère veille.

Tika et Otik travaillaient dans l´auberge comme chaque jour, et la soirée ne faisait que commencer. L´auberge du dernier refuge étaient une des meilleures auberges de Krynn, et ce pour plusieurs raison. Premièrement la situation géographique de Solace qui en fait une plaque tournante entre les gens des plaines au nord et ceux des villes au Sud, ainsi que les elfes. Ensuite -et pas des moindre- une auberge en hauteur située dans un vallonier n´était pas chose courante. Et finalement l´accueil chaleureux qui était offert à toutes et à tous par Otik Sandath, propriétaire de l´établissement.

Une odeur de bière mélangée avec celle des patates épicées d´Otik planaient dans la salle. Toutes les tables -ou presque- étaient occupées, et le brouhaha incessant des discussions animées et des différentes sortes de vaisselles qui s´entrechoquent -assiettes, chopes, couverts- forçaient les clients à crier afin de se faire entendre par Tika. Son plateau en fer forgé des initiales "FF" -Flint Forgefeu-, l´ancien forgeron de la ville, transférait la chaleur des plats qu´il supportait jusqu´à la main agile qui le retenait. Les doigts collaient quelque peu à cause du surplus de bière qui avait coulé des chopes précédemment livrées à une table de paysans dont les yeux roulaient vers des points précis de l´anatomie de la serveuse.

Quelques minutes -et plateaux- plus tard, un gars sacrément costaud fit son entrée dans l´auberge. Sa carrure semblait familière. Repoussant un client qui lui tirait quelque peu le tablier pour se faire entendre sa commande, elle se dirigea vers un point où elle pourrait mieux observer le nouveau venu. Ce qui se passa bien mieux qu´elle ne l´aurait cru car elle se retrouva en face de lui, à moins de 50cm d´elle. Lorsqu´il la reconnu, son visage s´illumina d´un sourire et il la prit dans ses bras. Cette étreinte agréable dura quelques intenses secondes avant qu´il ne la relâche, toujours souriant, en lui disant : « Hé bien jeune fille, tu as bien grandi ! Cela te fait quel âge? 14? 15?»L´esprit de Tika sembla faire un tour à l´extérieur de son corps en passant autour des deux tourtereaux, volant par dessus les têtes des clients de l´auberge en des cercles de plus en plus rapides. Ce tourbillon emporta Tika qui sembla tomber, tomber, tomber, tomber, ...

Le choc fut tellement rude que sa tête la compressait, mais elle était incapable d´ouvrir les yeux. Les paroles de Caramon semblaient tourner en boucle et se répéter à l´infini. Tout à coup ils furent stoppés par trois frappes sur le front de Tika. Toc-toc-toc Cela se répéta jusqu'à...

Jusqu'à ce que la belle ouvrit un œil puis l'autre. Les souvenirs de la nuit précédente lui revinrent immédiatement à l'esprit. Les compagnons qui s'étaient retrouvés. Leur fuite -aidés par Tika- à travers la ville. La poursuite jusqu'au Lac par les gardes et les gobelins, et le retour au calme vers le milieu de la nuit avec quelques interrogatoires rapidement passés. Puis le retour à sa maison pour un repos difficile à concrétiser...



Toc-Toc-Toc

« Tika ! Ouvre moi, vite ! » la voix étouffée d'Otik parvint aux oreilles de la belle au vallonier dormant. Un rêve, ce n’était qu’un rêve… Un horrible cauchemar… Son cœur battait la chamade à un rythme effréné alors que ses mains tremblantes frottaient ses yeux encore collés par le sommeil. La chute lui avait paru si réelle et ces mots raisonnaient encore à ses oreilles, s’insinuant comme un insidieux poison dans le brouillard de ses pensées.

Toc-Toc-Toc L’espace d’une seconde elle songea, les mains plaquées contre ses tempes, à hurler pour faire cesser ce tambourin qui martelait sous son crâne puis elle réalisa, abasourdie, que ces bruits étaient bien réels. Que… Qui… Otik a écrit :« Tika ! Ouvre moi, vite !» La voix semblait lointaine, mais elle la reconnut aussitôt : son patron était à sa porte, pressant. À cette heure ?

« Voilà, voilà… J’arrive ! », lança-t-elle en sautant au bas de son lit, la voix éraillée. Sans prendre la peine d’allumer la moindre chandelle, après tout elle était chez et connaissait parfaitement la position de ses meubles, elle se précipita à sa porte, manquant de tomber en marchant sur l’une de ses bottes qui trainait dans le passage. Étouffant un juron, la jeune femme se remémora la soirée précédente. Cela aurait dû être un soir de fête : le retour tant attendu des compagnons, de Caramon... Mais ce ne fut malheureusement pas le cas. D’abord ces deux abrutis qui avaient manqué de finesse avec l’aînée des Majere, puis cette elfe qui perdit connaissance dans un grand cri, l’étrange bâton de cette femme des plaines qui soignait les blessures… Et, ensuite, tout s’était enchaîné. Vite, trop vite ! Et voilà qu’ils étaient tous partis, Otik et elle facilitant leur fuite. S’ensuivirent des heures à répondre aux mêmes questions pour toujours donner les mêmes réponses… Il ne fallait pas s’étonner si maintenant elle n’avait presque plus de voix ! L’épuisement avait été tel qu’elle s’était débarrassée de ses vêtements un peu n’importe comment en rentrant chez elle avant de s’effondrer sur son lit, espérant un repos mérité qui prenait visiblement fin bien trop tôt…

« Que se passe-t-il ? » La jeune femme qui ouvrit la porte n’offrait pas son meilleur profil à son visiteur nocturne : ses boucles rousses étaient emmêlées au dessus de sa tête ; des cernes violacés sous ses yeux verts -le regard mauvais d'une personne que l'on sortait trop tôt de son lit- dissimulaient une partie de ses tâches de rousseur ; elle portait une chemise débraillée, qui protégeait à peine sa féminité, lui arrivant à mi cuisse, en guise de chemise de nuit… Otik aurait presque pu ne pas la reconnaitre si elle ne portait pas autour de son cou le seul souvenir qu’elle conservait de son père : un anneau doré accroché à une chaine. L’air terriblement frais de cette nuit d’automne la prit à vif et finit de la réveiller. Elle s’écarta prestement de l’ouverture, laissant son patron -son père de substitution- pénétrer son antre alors qu’elle attrapait un plaid suspendu à un crochet à côté de sa porte et s’enroulait dedans, attendant la réponse à sa question. Otik insista encore en frappant contre la porte et en appelant Tika à se dépêcher. Lorsqu'elle ouvrit la porte, c'était un Otik aux cernes prononcées et aux yeux rougis par le manque de sommeil qui se tenait là. Ses vêtements étaient les mêmes que la veille au soir, le tablier encore tout taché par l'huile de cuisson et la mousse des bières servies. L'odeur des épices, de la bière et de la sueur emplit les narines de la belle. Son patron était encore tout essoufflé, comme s'il venait de grimper les marches menant à sa maison quatre à quatre. Derrière les larges épaules, le soleil commençait à chasser la nuit, et annonçait une nouvelle journée. Celle ci se teintait de gris au vu des nuages qui parsemaient le ciel.

Très rapidement Otik attrapa le bras dénudé de sa pupille en la poussant à l'intérieur de la maison. Sa main calleuse tenait fermement Tika mais aucune agressivité n'émanait de l'aubergiste. C'était un geste de protection. Il ferma la porte derrière lui tout en parlant et en jetant des coups d'œil inquiets vers l'extérieur. Il n'avait même pas vérifié qu'il s'adressait bien à elle. Mais une seconde de doute précédant sa phrase lui apprit qu'Otik avait fini par regarder à qui il parlait : « Je-reviens-directement-du-conseil-des-questeurs ! » Il reprit rapidement son souffle après avoir lâché le bras de la jeunette. Il se dirigea vers la fenêtre qui se trouvait juste à côté de la porte d'entrée et continua, pas du tout préoccupé par la tenue de Tika : « Ils-ont-discuté-toute-la-nuit ! ... Ils cherchent un bouc émissaire... et ces deux chiens ! » -il frappa de son poing dans sa paume- « Tu sais, les deux salauds qui ont créé des problèmes à la femme des plaines et à la sœur de Caramon, Fruds et Girkal? » -ses yeux fixaient Tika droit dans les siens, projetant plusieurs petits films dans la mémoire de la serveuse. Elle avait du elle-même mettre dehors ces deux pervers qui avaient tenté à maintes reprises de balader leurs mains sur son corps- « Ben les deux ont témoigné mordicus que t´avais aidé les fuyards ! » -de la colère, son expression se mua en tristesse- « J´ai bien essayé de dire que c´était moi et que tu n´avais rien à te reprocher. Mais les membres du conseil ont avancé que j´essayais de te protéger et que je n´avais rien à voir dans l´histoire ! » -Il s'approcha et prit les mains de Tika dans les siennes, les larmes aux yeux- « Je... notre auberge, tu... » Les mots moururent dans sa gorge. L'utilisation du terme "notre" était chargé de sens. Otik considérait Tika comme sa propre fille même s'il n'en avait jamais parlé ouvertement, et l'auberge du dernier refuge était autant sa maison que celle d'Otik. Il savait aussi que, vu la situation, elle n'y remettrait sans doute plus jamais les pieds. Et cette séparation, cette déchirure était douloureuse pour l'homme d'âge mûr qu'il était. Lui qui n'avait jamais eu d'enfants. Cet instant sembla perdurer jusqu'à ce qu'Otik le brise : « Vite, prépare tes affaires ! Les gardes ne vont pas tarder à arriver ! Je viens directement du conseil qui s´est tout juste terminé. Ils doivent être en train d´informer la garde ! » Il se retourna vers la fenêtre, l'air inquiet, scrutant les moindres recoins. Mais pouvait-il encore seulement voir quelque chose? Ses yeux étaient totalement remplis de larmes... Tika fut surprise par l’entrée d’un Otik à court de souffle, tant par sa brusquerie -même si c’était dernière n’était nullement tournée à son encontre- que par sa mise qui n’avait pas changé depuis la veille, lorsqu’ils s’étaient quittés. Que Diable a-t-il pu se passer cette nuit..?Elle ouvrit la bouche pour lui en faire la remarque mais l’attitude inquiète -pour ne pas dire affolée- de son patron l’empêcha de sortir la moindre remontrance. Sentant la confusion dans ses propos, elle essayait de comprendre où il voulait en venir quand son coup de colère la fit sursauter. Ces deux-là, elle les connaissait bien. Leurs regards salaces, surtout, dès lors que sa poitrine avait commencé à se former, leurs crasses mains baladeuses, juste freinées dans leur élan par les grognements du tenancier jusqu’à ce jour où elle fût suffisamment assez forte pour se débrouiller seule et démît le pouce de cet enfoiré de Fruds… Ces images refluèrent à sa mémoire pour venir s’écraser contre la réalité qui se dessinait dans les yeux d’Otik…

Non ! Ce cri résonna dans sa tête alors qu’elle restait muette, abasourdie par la nouvelle et qu’il prenait ses mains dans les siennes, larges et calleuses, chaudes et réconfortantes. Le temps parut s’arrêter pour la jeune femme alors que les rouages de son cerveau se mettaient en branle et assimilaient les informations qu’ils recevaient. Par deux fois, elle cligna des yeux, bouche bée. « Mais… Que..? J’peux pas… » Incrédule, elle ne savait plus comment réagir, un étrange voile opaque commençait à couvrir son regard… Puis la voix, impérieuse, de l’homme s’éleva à nouveau sous son toit et Tika comprit l’urgence de la situation. Un déclic dans son cerveau et elle se mit en action. Partir ? Abandonner Otik ? Elle ne le voulait pas. Pas plus qu’elle ne voulait donner raison à ces deux sales pervers. Mais elle savait qu’il avait raison. La situation aurait été différente, elle serait restée pour se justifier… Mais même. Avec son passé, quand bien même Otik l’avait protégée et que peu était au courant, cela aurait été trop risqué… « Oui ! Tout de suite… » Son corps agit alors tel un automate. Elle couru à sa chambre, ses yeux désormais habitués à l’obscurité environnante, ramassant sa botte au passage, ouvrit vivement son armoire et en sortit un sac à dos poussiéreux. Sans réfléchir, elle le remplit avec les premières choses qu’elle attrapa main à commencer par le plaid qu’elle avait sur les épaules, retrouvant dans un tiroir de sa commode un jeu de couteaux qu’elle croyait oublié depuis longtemps, des outils dont elle ne s’était plus servie que pour ouvrir des serrures coincées… Courant à sa pièce principale, elle ouvrit un placard d’où émanait d’agréables odeurs d’épices, fourrant son sac avec ce qu’il lui tombait sous la main. Ses doigts, alors, touchèrent un objet froid et lourd. Machinalement, elle l’amena à elle : une large poêle à frire, cadeau de son patron lorsqu’elle s’était installée ici, elle aussi marquée d’un FF comme la plupart des objets en métal de l’auberge… Elle la regarda un instant, devinant son contour plus qu’elle ne le vît dans cette pénombre du petit matin, releva la tête vers le dos vouté d’Otik qui, inquiet, montait la garde à sa fenêtre, revint à ce qu’elle tenait en main…et l’ajouta à son barda déjà bien chargé. Dans sa garde robe, elle avait attrapé un vieux pantalon de cuir et ignorait si elle pouvait encore entrer dedans. Sautillant au milieu de la pièce pour l’enfiler en vitesse, elle prononça enfin les mots qui se bousculaient à ses lèvres « Et toi ? Que vas-tu faire ? » Elle souffla en se redressant. « Pour l’auberge… Et ils vont savoir que tu m’as prévenu… » Son talon claqua contre le plancher quand elle eut fini de glisser son pied dans sa botte. La seconde en main, son sac accroché à une épaule, elle avança en claudiquant jusqu’à lui, posant une main sur son épaule. La gorge serrée, elle dit « Je… Qu’est-ce qui va se passer maintenant ? » Otik avait bien fait de se retourner vers la fenêtre. Non seulement pour cacher ses larmes, mais surtout pour s'épargner la vue de sa protégée dont la foule de sentiments se dessinaient rapidement sur le visage. Il s'essuya les yeux d'un revers de manche et ponctua les fouilles de Tika par des grognements caractéristiques. Ceux qu'il faisait quand il était à la bourre dans son travail à l'auberge. « Et toi ? Que vas-tu faire ? »

Un nouveau grognement se fit entendre. « Essayer de te mettre à l´abri avant que ces foutus gardes n´arrivent ! » « Pour l’auberge… Et ils vont savoir que tu m’as prévenu… »

Il se retourna et observa sa fille avec un mélange de tendresse et de tristesse : « Ne t´inquiète pas pour ça. De toutes manières qui d´autres qu´Otik ... » -ou Tika !- « pour tenir l´auberge ! Je ramène trop de clients et... » sa voix mourut et il lança son bras en arrière, et fit demi-tour, comme pour balayer ses paroles sans importances. Il se figea à la fenêtre, et ses muscles se raidirent... « Ils...ils sont là... » Il se retourna, blême, vers sa pupille. Après un court instant il vint embrasser sur le front Tika puis lui dit : « Vite, la porte arrière ! » -qu'il désigna du doigt- « Je vais les retarder... » et il se tourna vers la porte qu'il ferma à clé. Il se retourna pour voir Tika partir en lui enjoignant de se dépêcher par des gestes de la main.

Une minute plus tard, la porte principale de la maison fut secoué par des frappes que Tika entendit à travers toute la maison. Elle jeta un coup d'oeil rapide à l'extérieur mais ne vit rien. Elle posa ses pieds sur la passerelle en bois qui reliait les maisons entre elles, et se dirigea dans le sens contraire aux visiteurs indésirables. Elle ne fit que quelques pas qu'elle se retrouva face à deux gobelins. Elle se retourna et aperçut deux gardes humains derrière elle. Aucune échappatoire... Le sol se trouvait à plusieurs dizaines de mètres en contre-bas, et une chute serait fatale...

Le silence… Cet assourdissant silence qui précédait les moments de tension. Voilà ce qui emplissait présentement l’esprit de la belle, là, sur cette passerelle, coincée entre deux groupes d’individus qui ne le voulaient certainement pas du bien. Ce silence l’empêchait de réfléchir correctement, ses mains tremblaient et sous elle, ce vide si attirant, si effrayant.

Otik… Son patron, son mentor, son protecteur... Toutes ses pensées étaient tournées vers l’homme qui avait prit de grands risques pour lui permettre de fuir l’injustice du Conseil et, à cet instant, tentait de protéger sa fuite…laquelle virait au cauchemar ! Comment avait-elle fait pour ne pas voir ces gobelins qui arrivaient ? Ou ces hommes qui fondaient sur elle ? Ses yeux embués, son cœur battait la chamade. Il lui semblait que sa vie était tombée dans une sorte de spirale, un tourbillon où tout lui échappait...

Arrêtée dans son élan, elle tenta de reprendre le contrôle de ses sens. Elle ferma les yeux une demi-seconde pour prendre une grande inspiration. Elle ne pouvait pas se laisser capturer comme ça. Elle devait tenter quelque chose… Elle jeta encore un coup d’œil devant elle. Les gobelins, petits et furieux, seraient un réel problème. Les hommes, derrière, restaient des hommes d’armes. Avec un peu de chance, ils étaient encore moins éveillés qu’elle ; les réflexes encore endormis… Il suffirait de les surprendre… Sa décision précise, elle se pinça les lèvres, déglutit et… se retourna pour courir vers les deux hommes qui s’avançaient vers la passerelle. Arrivée à leur hauteur elle plongea -pieds en avant- et tenta de glisser entre les jambes de ses messieurs…

La belle Tika s'élança vers les deux gardes humains. Ils se préparèrent à la recevoir, mais elle glissa entre leurs jambes. En quelques pas elle allait se débarrasser d'eux. Leurs yeux rougis et les cernes qui soutenaient leurs regards ébahis en disait long sur leur état physique. Elle se retourna, prête à prendre ses jambes à son cou ... pour buter face à d'autres gardes humains et gobelins qui venaient pour l'arrêter. C'était peine perdue. Des mains solides lui attrapèrent les bras, et l'odeur de la sueur sèche envahit son nez. Les gardes lui attachèrent les mains dans le dos, et la soulagèrent de ses affaires ainsi que de ses armes...

Sans ménagement les gardes humains poussèrent Tika à descendre les marches pour rejoindre le sol. Des gobelins aux yeux mauvais se trouvaient un peu partout, comme s'ils vérifiaient que tout se passait bien. Les gardes passèrent le relais à deux des gobelinoïdes. Les créatures serraient maintenant les bras de la belle en se faisant un plaisir d'enfoncer leurs ongles dans sa chair. Un peu plus loin, un étrange convoi était en attente. Une énorme cage sur roue -dont la porte était ouverte- se trouvait entourée par la population de Solace. Hommes, femmes, enfants étaient tenus à distance par un cordon de gobelins aux ordres de Toede, l'immonde gobelin à tête de crapaud. Son fouet claquait : « Reculez !!! J´ai dit : reculez ! Sinon vous aurez droit au fouet ET à la cage comme cette traîtresse, cette folle par qui le malheur va arriver ! » Les visages se tournèrent alors tous vers Tika quand un enfant la désigna du doigt, tirant sur la robe de sa mère qui mit sa main devant sa bouche, retenant ses larmes. Quelques personnes toisaient durement la serveuse pour sa folie, sa traîtrise qui risquait d'amener la destruction sur Solace à cause de ce bâton bleu. Mais la plupart des autres visages étaient tristes, révoltés ou présentaient de l'incompréhension. Toede se tourna à son tour, et son visage se fendit d'un sourire carnassier. Il talonna sa monture pour se rapprocher : « Ah ! On fait moins la maline ! Maintenant qu´on va se retrouver interrogée par les questeurs de Haven ! Allez hop ! Dans la cage ! Le carrosse de mâaaadame attend »

Une voix s'éleva d'au milieu de la foule : « Laissez là ! » Une autre répondit : « Oui, elle ne voulait pas mal. » Puis encore d'autres s'élevèrent. Même les gobelins reculèrent devant cette foule en colère... « Assez ! » cria Toede en faisant claquer son fouet à quelques centimètres des villageois les plus proches. « Ceux qui se montreront rebelles à l´ordre de Solace seront châtiés sévèrement ! » Ses yeux foudroyaient le moindre de ceux qui osaient le regarder. La plupart finirent par baisser la tête. Toede se redressa, fier : « Ah ! Vous êtes redevenu sages et intelligents. Qu´il fait bon vivre ici ! »

« Laissez là je... » la voix d'Otik à une trentaine de mètres de là fut stoppée par un bruit mou. On venait de le frapper. Son visage était traversé par une coulée de sang. Il s'était sans doute débattu mais les gardes avaient eu raison de lui. Ils trainèrent son corps inconscient en direction de l'auberge, et Tika fut poussée par les gobelins jusque dans la cage. Ils la projetèrent violemment et fermèrent la porte qui fut verrouillée par un cadenas dont la clé fut remise à Toede. Ce dernier la récupéra en regardant Tika. Il montra bien la clé quand il la rangea dans sa poche afin qu'elle comprenne que c'est LUI qui contrôlait sa liberté. Il se détourna alors vivement, fit claquer son fouet et cria : « Allez ! En route ! Bougez vous, gens de Solace ! » Le chariot se mit en branle, tiré par deux chevaux, et accompagné de deux cochers gobelins. Six gardes -quatre devant, deux derrière- entouraient le chariot. Toede lui-même à cheval fermait la marche. Dans la foule, les enfants se serraient contre les robes de leurs mères. Un bébé se mit à pleurer très fort, et les hommes de la ville suivirent la procession comme s'ils assistaient à un enterrement. Quelques uns osèrent regarder Tika dans les yeux, mais la plupart se détournèrent.

Elle était passé ! Contre tout attente, elle avait pu franchir le barrage de ce deux hommes. Tout n'était donc pas perdu, l'espoir était en train de renaitre dans le cœur de Tika dont le visage s'anima malgré elle d'un demi-sourire...jusqu'à ce que de fortes poignes la saisissent par les bras. Son univers s'effondra. La jeune femme voulut se défendre, protester, mais ils étaient trop nombreux et une gifle bien sentie calma ses ardeurs.

La fatigue revint au galop, l'adrénaline due à l'urgence s'évaporait désormais comme neige au soleil et elle n'avait d'autre choix que de laisser ses malotrus la pousser dans les escaliers où, au moins, elle serait sur la terre ferme. Sans un mot, le visage fermé et la mâchoire crispée, elle avançait la tête penchée en avant, dissimulant ainsi sa joue rougie et, surtout, les larmes de rage qui lui montaient aux yeux. Le souffle court, elle releva la tête lorsque les gardes passèrent la main aux gobelins, serrant les dents avec fierté lorsque leurs ongles pénétrèrent ses chairs et jetant un regard noir derrière le voile de ses larmes vers le grotesque Toede et son stupide fouet, sans vraiment comprendre où son cortège l'emmenait. Tournant la tête vers le public, elle vit l'enfant qui la pointait du doigt. Elle inspira et trouva la force de lui sourire comme on la trainait vers cette cage roulante.

La foule grondait et Tika guettait du regard un signe, un geste. Otik... Ses pensées la ramenèrent à son patron : était-il là ? Avait-il seulement pu s'en sortir devant les gardes ? Mais l'harangue de tête de crapaud calma ceux qui avaient des choses à dire...excepté une voix. Otik ! Tika tourna vivement la tête vers l'homme. « Otik ! » Horrifiée par ce qu'elle vit, elle réagit vivement, sans réfléchir, cherchant à se libérer des doigts griffus qui la maintenaient. Elle se jeta en avant, hurlant : « Salauds ! » Mais c'était peine perdue et elle ne put que voir le corps de son protecteur trainer en direction de son auberge. Puis elle fut jetée comme une malpropre dans la cage tandis que l'affreux gobelinoïde la narguait. Elle cracha tout le ressentiment qu'elle pouvait à sa face, l'émeraude de son regard virant au noir haineux.

Péniblement, Tika se releva alors que le cortège se mettait en route. La jeune femme ne voulait pas donner le plaisir de paraitre faible malgré la situation. Tant bien que mal, elle se redressa, la tête bien droite. Elle chercha dans la foule les deux pervers qui devaient se réjouir de la situation ; elle voulait qu'ils sentissent tout le mépris qu'elle avait pour eux, sans se rendre compte que ses joues étaient mouillées du torrent de larmes qu'elle ne pouvait maitriser... Le chariot et sa sombre procession s'éloignait petit à petit. Dans la foule, aucune trace des deux lascars. Soit ils avaient autre chose à faire comme retourner se coucher, compter leurs pièces d'acier ou tout simplement n'avaient ils pas eu le courage de se montrer et d'assumer leur fourberie. Cette dernière option était la plus probable...

En quelques minutes, le convoi se retrouva sur la route de Haven. La sortie du village atteinte, les gobelins diminuèrent le rythme par deux. Sans doute désiraient ils se préserver pour la longue marche... Le chariot atteint le pont qui enjambait les gorges de Solace -qui finirait par rejoindre Blanche-rage puis enfin la Nouvelle mer- et s'arrêta. Seul le bruit assourdissant des flots se faisait entendre. Tika n'eut qu'à suivre les regards des gobelins pour comprendre la raison de cet arrêt. Dans le ciel, au-dessus du lac, plusieurs explosions fantastiques se succédaient les unes aux autres. L'incompréhension se lisait sur les visages. Après quelques secondes, les déflagrations cessèrent. Les gobelins regardaient un peu partout autour d'eux, les mains crispées sur les hampes de leurs lances. Plusieurs minutes passèrent. Toede finit par faire claquer son fouet : En Gobelin « Allez en route tas de larves ! On va pas rester ici à attendre la fin de la journée !!! »

Les cochers remirent le chariot en mouvement, et la garde -toujours nerveuse- suivit.

Après plus de deux heures, le chariot fit à nouveau une halte. C'était un plaisir. Le chariot n'avait pas été prévu pour le confort des passagers. Et il était impossible de se reposer à cause des incessantes secousses dues aux ornières qui parsemaient la route. Une voix non gobeline parvint aux oreilles de la prisonnière : « Je t´ai demandé si tu m´entendais ! » Levant les yeux, elle découvrit un vieil homme habillé d'une toge qui avait été autrefois blanche, et coiffé d'un chapeau pointu de la même teneur que sa robe. Il semblait menacer un chêne avec son bâton. « Je t´ai dit de bouger ! J´étais sur cette pierre, assis tranquillement, à lire un livre très intéressant qui euh, bref, je reposais mes vieux os en profitant d´une petite éclaircie, et toi, tu as eu le culot de me faire de l´ombre ! Je t´ordonne de te déplacer que je puisse à nouveau en profiter ! » -l'arbre ne répondit pas plus qu'il ne bougea- « Quelle insolence !!! Je... je vais te... » -il donna plusieurs coups de bâton dans le tronc de l'arbre. Toede fit signe à ses soldats : « Mettez moi ce vieux fou dans la cage, ça fera un peu de distraction... » Les gardes saisirent le vieil homme qui commença à leur donner des coups de bâton très faibles jusqu'à ce que les gardes lui retirent son "arme". « Mais laissez moi tranquille ! C´est cet arbre que vous devez arrêter ! La raison? Son crime? Cacher la lumière du soleil ! Et je... » -ils jetèrent sans ménagement le vieil homme dans la cage puis la refermèrent- « Oh, mais quelle brutalité ! » -Il releva la tête et son chapeau lui tomba sur les yeux- « Qui a éteint les lumières !!! Je .. Ah ! Je vous l´avais bien dit de vous méfier de cet arbre ! Maintenant on y voit plus rien et... » -le convoi se remit en mouvement, et une roue passa dans une ornière, secouant toute la cage et propulsant l'humain sur son postérieur- « Aie ! je euh... » - son chapeau se remit en place et il regarda autour de lui, surprit. Une douce odeur d'épices se dégageait de ses vêtements- « Hum, bon, humpf... » il regarda Tika un instant, lui fit un sourire, puis se leva, secoua ses vêtements et remit son chapeau en place. Puis il tendit la main vers la jeune femme : « Bonjour mademoiselle, à qui ais je l´honneur? Je me présente, je suis... euh... » - tout en tenant la main de la prisonnière, il releva un doigt sur son menton et leva les yeux au ciel, comme s'il y cherchait une réponse- « Je euh, -comment je m´appelle déjà- Ah oui ! Fizban ! » Il sautillait sur place comme s'il avait fait la découverte du siècle ! « Ma foi, je suis bien content de vous accompagner dans ce voyage, nous n´aurons pas besoin de marcher. Quel luxe ! Mais je vous en prie, installez vous, faites comme chez vous ! » Il s'assit à même le sol comme s'il s'agissait d'un volumineux fauteuil confortable, les bras soutenus par des accoudoirs... Qui n'existaient pas. « Bavardons un brin, voulez vous? » -sans attendre de réponse il enchaîna- « Je peux vous le dire, cette forêt est vraiment magnifique, il y a des euh hum, j´ai oublié le nom, mais il y a des fleurs absolument ma-gni-fi-que ! Et que dire des oiseaux ! Certains n´existe qu´en ce lieu ! Si vous saviez la chance que nous avons ! Car elle n´est pas ouverte à tous ! L´eau y est pure et douce à boire, et les plantes aromatiques y sont nombreuses »-dit il avec un clin d'oeil, comme s'il faisait une confidence digne d'intérêt- « Et sinon, comment ça va chez vous? Comment va ce bon vieux râleur d´Otik? Il me semblait avoir des maux de tête la dernière fois, serait ce à cause d´une nouvelle épice qu´il aurait testé? » Il approcha sa tête et son torse comme s'il allait faire une confidence « Vous savez, je l´ai aidé à mettre au point sa recette ! » -il fit un nouveau clin d'oeil- « Bah, je dois vous ennuyer avec mes histoires, vous qui êtes jeune... Quelle âge déjà? 19 ans? » -il mit sa main devant sa bouche comme s'il avait dit une bêtise- « Oh, excusez moi, c´est inconvenant de parler de l´âge d´une femme ! »

Impuissante, Tika resta un long moment à regarder disparaitre le village de Solace, jusqu’à ce que ce dernier ne fut plus qu’un point, se tenant tant bien que mal aux barreaux de cette cage bringuebalante. Toutes ses pensées étaient tournées vers son protecteur, espérant qu’il s’en sortirait malgré tout. Après tout, lui n’est pas dans cette cage… Accrochée à cette idée vaguement rassurante, la jeune femme reporta alors son attention sur ses geôliers, maitrisant mal une grimace de dégoût tant ses créatures n’avaient pas la faveur de son estime. Sans parler de l’immonde tête de crapaud qui se pavanait fièrement sur sa monture et dont les claquements du fouet lui faisaient grincer des dents à chaque fois qu’ils retentissaient. Et qu’ont-ils fait de mes affaires ?, songea-t-elle tout à coup alors que son regard passait d’une face hideuse à l’autre. De sa position, elle chercha dans le cortège si, par un grand miracle, ses tortionnaires avaient eu l’idée d’emmener des preuves de sa traitrise avec eux… Enfin, pour ce que ça m’avancera… Ce n’est pas ça qui me sortira d’affaire ! Mais elle avait besoin de se raccrocher à certaines petites choses concrètes comme celle-ci et elle scruta les rangs de gobelins jusqu’à ce que le cortège s’arrêtât brusquement. « Qu’est-ce que… » Manquant de tomber à la renverse, son regard suivit ceux des gobelinoïdes qui encadraient le charriot, tous tendus à l’extrême, les yeux levés au ciel. Le spectacle était impressionnant et, aussi bref fut-il, il était difficile de s’en détacher, les explosions scintillantes se reflétant dans les prunelles d’une Tika ébahie. Malheureusement, ces déflagrations ne furent pas d’un grand secours pour la jeune femme qui fut propulsée, une fois de plus, au fond de la cage lorsque celle-ci redémarra avec brutalité.

Grommelant, soudain submergée par la fatigue, la jeune femme tenta de se caler dans un coin de son sinistre carrosse -là où les cahots se faisaient le moins sentir- le dos contre des barreaux trop durs, ses genoux entre ses bras. Ballotée, elle chercha vainement à pouvoir s’assoupir, le front sur les genoux, quand une voix humaine la tira de sa somnolence. Fizban a écrit :« Je t´ai demandé si tu m´entendais ! » La scène lui paraissait saugrenue. Un fou ! Mais cela semblait amuser Toede et avant que ni elle ni le pauvre hère ne comprissent quoi que ce fut, le vieil homme était jeté manu militari dans la cage en compagnie de la belle, son étrange chapeau sur les yeux. Celle-ci voulut l’aider à se redresser mais la rencontre d’une roue avec une nouvelle ornière la repoussa dans le fond de la cage, tandis que l’homme y voyait à nouveau clair. Il sourit. Bien qu’étrange, la jeune femme trouva l’homme touchant et lui sourit en retour alors qu’il s’approchait d’elle, la surprenant à nouveau en lui saisissant la main. « Heu… En…enchantée ! », bredouilla-t-elle en écarquillant les yeux, faisant craquer les sillons séchés qui couraient sur ses tâches de rousseurs. Elle n’eut pas le temps de poursuivre que déjà, il repartait sur une nouvelle tirade, s’installant dans leur prison sur roues comme on s’installerait tranquillement sur son fauteuil dans son salon. Ce type a un problème, visiblement… N’ayant guère d’autre choix, elle s’assit en tailleur devant lui, gardant un œil interrogatif sur son vis-à-vis, essayant de suivre son babillage. « Otik ? » Elle faillit crier lorsqu’il prononça le nom de son patron, portant soudain sa main à ses lèvres. Ses sourcils se froncèrent et elle avança son visage vers l’homme, jetant un coup d’œil vers les gobelins. « Il va… Comment vous… » Mais déjà il repartait vers de nouvelles « confidences », lâchant au passage son âge. À elle. Elle se recula subitement, surprise, et dévisagea le vieillard. « Co… On se connait ? » Son visage avait prit une expression mutine, les sourcils froncés, tout comme son nez fin, faisant danser les tâches de rougeurs sous ses yeux cernés. « Qui êtes-vous au juste ? Comment vous me connaissez ? Et Otik ? », Lâcha-t-elle enfin, sur la défensive, lorsqu'elle put en placer une. Le chariot avançait inlassablement. Les chevaux étaient robustes et leurs muscles bien développés, contrairement aux gobelins à pieds qui peinaient de plus en plus et finirent tous par être dépassés par la cage. Toede prit la tête du convoi, et rappelait régulièrement à sa piétaille : « C´lui qui traîne trop loin, j´le fouette jusqu´à c´qu´il chiale ! » Ce qui faisait son petit effet...

En les regardant passer ainsi que Toede, Tika ne vit absolument aucune trace de ses affaires. Elle en était maintenant sûre : son sac n'était pas avec eux ! Tika a écrit :« Heu… En…enchantée ! »

Les yeux de Fizban pétillèrent d'intérêt. Il répondit quelque part au milieu de ses divagations : « Oh, vous êtes magicienne alors? Intéressant, intéressant... » Tika a écrit :« Qui êtes-vous au juste ? Comment vous me connaissez ? Et Otik ? »

Le vieil homme assis dans le chariot fronça les sourcils : « Comment? » -il se releva péniblement- « Je ne me suis pas présenté? Avec l´âge j´en oublie les règles de la politesse !!! » -il fit une légère courbette en se présentant- « Fizban, pour vous servir demoisel... » -en se relevant son chapeau lui retomba devant les yeux- « Ah non ! Pas encore ! Je... ah oui... » -il remit son couvre-chef en place en accompagnant le mouvement d'un léger grognement et d'une moue impatiente. Une fois le tout en place il enchaîna- « Si je connais Otik? Mais... » -il fronça à nouveau les sourcils- « ... je viens de vous parler de lui ! » -son visage crispé se détendit pour exprimer un doute- « Ou bien était ce à ce vieux fou qui me faisait de l´ombre? » -se demanda-t-il en retirant son couvre chef, révélant une calvitie bien développée sur le front et le dessus du crâne qu'il gratta énergiquement- « Étrange... »

Son regard se détourna pour se poser sur la gauche du chemin, vers l'ouest : « Ah ! Nous voilà arrivés ! » dit-il en désignant du doigt une série de pins regroupés au milieu des feuillus bordant le chemin. Il s'adressa aux conducteurs du chariot : « Veuillez arrêter le carrosse s´il vous plait ! Nous voilà arrivés à destination ! » Les gobelins de prime abord surpris se mirent à rire sans répondre au vieillard. Fizban fit alors un pas depuis l'arrière de la cage et se retrouva face à Tika, gêné : « euh, excusez moi euh... Votre nom déjà? » puis sans trop faire montre d'une grande patience en vue de la réponse, il alla taper dans les barreaux sous les fesses des gobelins : « Oh, vous m´avez entendu !? » Les gobelins rirent de plus belle, accompagnés par Toede et l'arrière garde. Remettant son couvre-chef en place, il se tourna vers Tika : « Je suis désolé de vous demander cela, mais hum, auriez vous un peu de fiente de chauve souris sur vous? J´aimerais ouvrir cette porte là. » Il désigna la porte solide de la cage. Magicienne… Que raconte-t-il ?

Tika cherchait à déchiffrer le visage de son interlocuteur, essayant de repérer une quelconque logique à ses babillages incongrus. Secouant la tête, ses boucles auburn dansèrent autour de son visage -où les derniers enfantins tendaient à disparaitre- pour se déposer avec douceur sur sa poitrine alors qu’elle cherchait dans sa mémoire où elle aurait rencontré cet étrange olibrius. À l’auberge, assurément, mais quand ? Elle ne pouvait s’empêcher d’écarquiller les yeux, pantoise devant ses sauts de phrases intempestifs, indécise sur les réponses à lui donner ou soupirant d’exaspération lorsqu’elle accourut vers lui pour l’aider à nous et qu’il la regardait, encore, comme s’il venait de la voir pour la première fois. Mais il la surprit à nouveau quand, frappant contre les barreaux, il demanda à arrêter le "carrosse" car arrivé à destination… Voulant arrêter la mascarade, et ne supportant plus les rires de ces néfastes gobelins, la jeune femme inspira et s’avança vers le vieil homme, une main tendue vers lui. « Non, attendez… » Elle n’eut pas le temps de poursuivre que déjà il se retournait vers elle, demandant de la fiente de chauve-souris. Sa main suspendue dans l’air, elle arrêta son geste et eut un mouvement de recul. « De la...quoi ? » Son front se plissa d’incompréhension. Puis, se ravisant, elle soupira en écartant les bras, agitant doucement sa tête de gauche à droite. « Non ! Ils m’ont pris mes affaires…

N’avez-vous donc pas remarqué que ces malotrus nous ont enfermé pour nous mener à une destination qu’il ne sierra qu’à ces affreux ?? », fit-elle un brin désinvolte, la tête légèrement penchée sur le côté… Tika a écrit :« Non ! Ils m’ont pris mes affaires… N’avez-vous donc pas remarqué que ces malotrus nous ont enfermé pour nous mener à une destination qu’il ne sierra qu’à ces affreux ?? »

Le temps sembla se figer autour de Tika et de Fizban. Le vieil homme fixait maintenant la jeune femme droit dans les yeux. Dans ses pupilles dansait un reflet, celui de la prisonnière. Et Fizban posa ses mains de part et d'autre de ses boucles rousses, créant un poids sur chacune de ses épaules qu'elle n'aurait pu imaginer pour de si vieux membres. Il approcha son visage et lui murmura d'un air sérieux : « La destination importe peu, seul compte le voyage ! ». Le reflet dans ses yeux sembla parcourir...

Et tout cessa quand Fizban détourna le regard en annonçant : « Tant pis, je vais devoir improviser alors... » -il se lissa sa vieille barbe- « Ah, au fait ! » -il secoua son corps et passa sa main dans un des plis de sa robe- « Je pense que vous pourriez utiliser cette arm... » -il sembla surpris de ce qu'il découvrait au toucher- « Mais ce n´est pas... » abasourdi il sortit une petite poêle. Son visage afficha la stupéfaction de la découverte. « Oh, ce n´est pas ce que je... Bon, tant pis... ça devrait faire l´affaire... » Il mit la poêle dans les mains de Tika et ajouta : « Il faudra donner un grand coup de poêle ! » -il mima avec ses mains le geste- « Dans la serrure ! » -il releva le doigt pour mettre en garde- « Mais pas avant que j´agisse ! » Il se retourna pour faire face à l'arrière de la cage, laissant Tika dans son dos.

Les gobelins se demandaient bien pourquoi le vieil homme faisait de grands gestes avec ses mains et s'exprimait dans un langage inconnu de tous. Mais ils redoutaient plus le fouet de Toede que la folie d'un vieillard... Ils continuèrent donc à marcher derrière le chariot tranquillement.

Tout à coup, Fizban pointa la serrure, et une boule jaune-orangée fut propulsée de son index et vola jusqu'au cadenas... où elle explosa en une gerbe de feu géante ! Tika eut à peine le temps de se cacher derrière le vieux bonhomme en tirant sa cape devant ses yeux pour se protéger ! La déflagration fut suivie immédiatement par des cris d'horreurs et une odeur de chair calcinée atteint les narines de la belle.

Les barreaux à l'arrière de la cage étaient tous rougis par la chaleur de l'explosion, ainsi que le cadenas qui était encore fermé. Au-delà des barreaux, le chemin et l'herbe étaient noircis par le feu, et six petits corps tous calcinés gisaient au sol. Au dessus, les deux gobelins qui guidaient les chevaux s'étaient retournés et poussaient des petits cris stridents en remuant sur place et en désignant les corps... Toede cria : « Mais que...?! »

De Fizban, il ne restait que le chapeau pointu sur le sol de la cage. Un des bords avait pris feu, et de la fumée se dégageait au travers des fibres depuis le dessous du couvre-chef.

Le poids sur ses épaules avait surpris la jeune femme plus qu'elle ne l'aurait cru, aussi avait-elle écarquillé légèrement les yeux...pour se retrouver plongée dans son regard à lui ! La destination importe peu, seul compte voyage ! Cette phrase à peine murmurée avait résonné dans sa tête comme une litanie lancinante, le temps s'étant suspendu autour d'eux, et s'était répercutée encore et encore sans qu'elle pût en saisir toute l'essence malgré ses tentatives...jusqu'à ce qu'il fût détourné. Et sans rien y comprendre de plus, tout s'était enchaîné à une vitesse surréaliste ; tout comme l'apparition de cette petite poêle qu'il lui avait fourré dans les mains avant de s'en retourner vers le fond de la cage qui fut tout aussi rapidement le théâtre d'une terrible déflagration qu'elle n'avait compris qu'à la dernière seconde, évitant de justesse de brûler l'émeraude de ses yeux.

Le spectacle était ahurissant. Devant elle -tenant une petite poêle en main- ne restaient plus qu'un chapeau fumant, un cadenas rougeoyant et les corps calcinés de la troupe gobelinoïde en arrière plan. Et maintenant..? La voix de Toede retentit derrière elle. Tika n'osa pas tourner la tête par-dessus son épaule, son regard allant de son "arme" au cadenas...au regroupement d'arbres, non loin, qu'avait indiqué le dénommé Fizban quelques instant plutôt. Si je pouvais les atteindre... Mais il est à cheval...et armé d´un fouet ! Si seulement il n´était pas à cheval... Elle leva les yeux une demi-seconde, au-dessus de la cage. À deux mètres, maximum... Les barreaux sont assez resserrés... Si j´pouvais... Non, c´est complètement dingue. Mais après tout ! Et puis mieux vaut tenter quelque chose que de subir la brûlure de son fouet... Une idée folle venait de lui traverser l'esprit. Tellement saugrenue qu'elle pouvait, peut-être, avoir ses chances...

Un dernier regard vers ses arbres puis elle ferma les yeux. Elle prit une grande inspiration.

Imitant le geste de l'étrange mage, elle porta un violent coup avec sa poêle contre le cadenas et, à son grand soulagement, ce dernier céda. Déjà elle entendait l'affreuse tête de crapaud réagir derrière elle. Mais elle avait décidé de le surprendre. La porte ouverte, elle sauta...pour attraper les barreaux au-dessus d'elle et tenter par un mouvement de balancier avec son corps de grimper au-dessus de la cage !

Les roues arrières du chariot avaient été carbonisées elles aussi. Dès que Tika eut escaladé la cage, ces dernières s'affaissèrent, enfonçant l'essieu dans la route, et stoppant au passage le "carrosse". Même en ayant utilisé un tissu pour sa main, la belle pouvait sentir la morsure du feu sur sa peau. Elle en avait connu d'autre avec la cuisine. Au mieux sa peau resterait rouge pendant un ou deux jours, au pire elle aurait une cloque...

Les deux gobelins se levèrent en tirant leurs épées courtes, puis avancèrent en direction de Tika. Le premier se dandina sur les barres jusqu'à Tika et prit une posture défensive. Derrière lui, son collègue fit deux pas, puis rapetissa d'un coup lorsque son pied glissa. Son entrejambe prit un coup de barre et lui coupa le souffle. Quand il put récupérer, il vociféra en direction de Tika : En gobelin « Espèce de... @#§ç&*µ » Son compagnon n'avait pas remarqué jusqu'alors qu'il se retrouvait tout seul en face de Tika. Il déglutit péniblement en regardant l'humaine...

Toede fit tourner sa monture et frappa avec la poigne du fouet son cheval. Il se dirigea alors vers la cage et avisa la disparition de Fizban. Sa bouche s'entrouvrit : « un mage... » Sa figure verte pâle devint un peu plus blanche et il frappa encore plus violemment de sa cravache sur le cheval en criant : « Oh ! » -au passage, il rajouta en direction des deux gobelins- « Couvrez ma glorieuse retraite ! » Et son cheval se déplaça à toute allure en direction de Solace...

Tika vit déguerpir avec un certain étonnement, visible sur son visage, l'affreux et pleutre crapaud vers Solace. La jeune femme cilla un instant pour reprendre le cours de ses pensées. Elle avait grimper là dans le cas où il aurait voulu l'attraper et avait compter sur le fait qu'il viendrait la harceler pour tenter de lui sauter dessus et lui "emprunter" sa monture. Sale lâche !

Elle tourna lentement la tête vers la créature qui se tenait face à elle, tout en cherchant comme se sortir de la situation. Avec un mouvement mesuré, elle leva au-dessus du gobelin la poêle qu'elle avait en main, resserrant sa prise malgré la brûlure. Les sourcils froncés, elle darda un regard sévère sur son adversaire. Serrant les dents, elle dit en détachant chacune de ses syllabes : « Tu ferais mieux de faire comme ton chef, si tu ne veux pas terminer comme tes petits camarades et finir à la casserole ! » Elle n'était pas une guerrière, même si elle savait se défendre, et préférait que ces gobelins déguerpissent d'eux-même plutôt que de devoir se battre... FORMATTER ERROR (":" and "&" not supported in Page Names) Toede galopait maintenant à toute vitesse sur la route. En quelques instants il disparut à un angle du chemin. Le gobelin devant Tika cligna des yeux, hésita un instant, puis sauta de la cage jusqu'au sol et se rattrapa sur ses petites jambes. Dès qu'il eut repris son équilibre, il détala à toute vitesse dans la même direction que Toede. Son collègue avait toujours la jambe coincée entre les barreaux, et tentait de retirer son pied, en vain. Il devenait de plus en plus nerveux en regardant Tika. Son pied frappait les barreaux à chaque fois qu'il essayait -en force- de le remonter. Il accéléra le mouvement, et sa peau devenait de plus en plus rouge... Une image revint à Tika, celle d'un illusionniste qui avait un singe et qui l'accompagnait partout. Un jour le singe s'était enfui et personne n'arrivait à l'attraper. Par contre, des vivres disparaissaient régulièrement dans la réserve d'Otik. Le sage fit faire une boite en bois dans laquelle des cacahuètes étaient entreposées. Une seule petite ouverture permettait de passer la main. Le lendemain on retrouva le singe la main dans le "sac". Il tenait une pleine poignée de cacahuètes et avait essayé toute la nuit de se dégager la patte. Les contour de son petit bras étaient rouges et il s'était blessé. Mais pas une seule fois il avait pensé à lâcher les cacahuètes pour se libérer... Même quand on vint pour l'attraper ! Dans le cas présent le gobelin n'avait qu'à tourner le pied... Mais son cerveau n'avait pas eu le déclic...

« Humpf... » À peine remise de la surprise que lui provoqua le succès de son coup de bluff, le regard de la jeune femme tomba sur le second gobelin coincé entre les barreaux de la cage. Tika avait du mal à contenir le rire qui montait à sa gorge devant la pitoyable scène à laquelle elle assistait. Mais elle ne pouvait s'attarder car déjà Toede n'était plus qu'un point dans le paysage ; combien de temps mettrait-il à revenir avec des renforts sous quelques prétextes mensongers de son invention ? Elle ne pouvait rester plus longtemps en ces lieux... Décidant d'éviter la créature coincée, elle avança jusqu'à l'avant de la cage dans l'idée de descendre par le siège des conducteurs. FORMATTER ERROR (":" and "&" not supported in Page Names) Sautant souplement au bas de son "carrosse", La jeune femme s'apprêtait à libérer les cheveux qui le tiraient, espérant ainsi avoir un moyen de locomotion plus rapide (et éventuellement une monnaie d'échange à un quelconque village), quand elle se retourna soudain. Interpellant le gobelin coincé : « Hep, toi ! J´ai ma dose de gobelins grillés, alors je vais être sympathique avec toi : Tu lâches ton arme et je t´explique comment sortir de là, d´accord ? » FORMATTER ERROR (":" and "&" not supported in Page Names) Les chevaux se tenaient tranquilles. L'un d'eux grattait de temps en temps le sol de sa patte. Plus loin sur la route tout semblait calme, si ce n'est qu'une pluie battait les feuilles orangées et se rapprochait de Tika. Derrière le chariot, le gobelin en fuite disparu à son tour derrière la végétation. À mi-chemin entre le gobelin disparu et Tika se trouvait le bosquet indiqué par "feu" Fizban dont le chapeau n'avait pas encore bougé de place. Ce souvenir pesa à nouveau sur les épaules de la belle. Comme si elle portait le poids du monde. Il faut dire que la nuit avait été courte et que cette sensation devait sans doute venir de courbatures récoltées la veille. Tika a écrit :« Hep, toi ! J´ai ma dose de gobelins grillés, alors je vais être sympathique avec toi : Tu lâches ton arme et je t´explique comment sortir de là, d´accord ? »

Le gobelin se figea, l'air sidéré. Puis, lentement, il tourna son doigt vers son torse puis se retourna pour voir si c'était bien à lui que Tika s'adressait. Avisant qu'il était vraiment le seul présent il bégaya : « Euh, moi euh, lâche arme, d´accor´ ! » -il lança son épée courte de l'autre côté de la cage, par terre.- « Toi dire gentil avec moi, hum, tenir promesse? Moi...plus arme ! » -il leva ses deux paumes jaunâtres vers le ciel pour montrer qu'elles étaient bien vides- « Toi promet pas -hum- griller moi? » Un demi-sourire s’épanouit sur les lèvres de la jeune femme alors qu’elle sentait s’insuffler dans son être un étrange sentiment de satisfaction, de puissance, qui lui donna presque le tournis. L’espace d’une seconde, elle se souvint du visage de Kitiara Uth Matar, l’aînée des Majere, lorsque la veille au soir elle avait soumis sous sa botte les deux pervers qui avaient osé les insulter, elle et l’étrangère au bâton bleu tant convoité. Était-ce donc ce qu’on ressentait en ce cas ? Un frisson parcourut Tika et elle secoua la tête brièvement avant de pousser un petit soupir alors qu’elle reportait son regard sur la créature prise au piège de la cage qui avait vainement recommencé à tirer sur son pied. Il mériterait presque que je le laisse là…

La jeune femme sauta au bas de la cariole et alla ramasser l’arme jetée au sol. Elle l’étudia une seconde et releva la tête vers le gobelin auquel elle répondit enfin. « Je n’ai qu’une parole ! Bon, si tu veux sortir de là, tourne ton pied ainsi, parallèlement aux barres. » Elle lui montra par des gestes comment le positionner. « Ensuite, tu le tires et hop ! Tu es libre… » Elle eut à peine le temps de finir sa phrase que déjà l’être tremblant avait dégagé son pied. Il hésita un instant, observa la rouquine qu’ils avaient chargée plus tôt, puis sauta à son tour et sans se retourner il s’enfuit à la suite de son collègue aussi vite que son pied endolori le lui permettait.

Désormais seule sur cette route, une vague odeur de charogne brulée empestant l’atmosphère, une grande sensation de vide s’empara d’elle. La tête lui tournait et elle dut s’appuyer contre les barreaux. Mais dès que sa main toucha le métal, sa paume lui fit atrocement mal et elle l’ôta en vitesse. Voyant l’état dans lequel elle s’était mise, elle arracha les manches de sa chemise et se fit des bandages de fortune. Quand elle eut fini, le gobelin claudiquant n’était plus qu’une ombre au lointain. Elle était seule. De son compagnon d’infortune, il ne restait qu’un chapeau… Un chapeau ? Comme son regard tombait sur le couvre-chef fumant, elle décida de le récupérer. Pourquoi ? Elle l'ignorait. Peut-être pour garder quelque chose de concret et d'être sûre qu'elle n'avait pas rêvé la déflagration et tout le reste...

Alors seulement elle se rapprocha des chevaux de bâts. Fort heureusement pour Tika, ces bêtes semblaient dociles. Elle défit leur harnachement, prit le longe de l’un et grimpa sur le second. Grimper à cru n’était pas son fort, mais elle préférait avoir mal à l’arrière-train plutôt qu’aux pieds, tout en espérant pouvoir parcourir une plus grande route avant qu’on ne se lançât à sa poursuite. Oui, mais par où maintenant ? Je ne peux pas retourner à Solace et n’ai nul autre endroit où aller… Au bout, c’est Haven. Mais c’est par là qu’ils voulaient m’emmener… Son regard se porta à l’Ouest, vers un bosquet d’arbres. Il a dit que c’était là la…destination… C’était quoi son nom déjà ? Fiz… Fizban ! Un fou, certes, mais un fou efficace… Il y avait peut-être un semblant de vérité dans ses délires… Sans plus attendre, Tika pressa ses genoux sur les flancs de sa monture et se dirigea à petit trot en direction de ce bosquet. Qu’importe la destination, seul compte le voyage ou un truc comme ça… Avançant vers son destin, elle ne prit pas garde aux larmes qui s’échappaient de ses émeraudes inondant ses joues et y collant ses mèches auburn… Tika ramassa le chapeau. Ce dernier dégageait la même odeur épicée que le vieux fou, et ce répit olfactif fit oublier un instant les émanations désagréables des cadavres. Elle se dirigea ensuite vers les chevaux qui attendaient paisiblement... Lorsqu'elle monta sur le cheval, elle eut une étrange impression de gêne. Sa mémoire lui revint et lorsqu'elle avait sauté au bas de la cage, elle avait senti un contrepoids dans son dos. Elle avisa ses épaules et se rendit compte que des lanières en cuir étaient posées sur chacune d'entre elles. Dans son dos elle portait un sac. Et pas n'importe lequel, son sac ! Et il était tel qu'elle l'avait rempli...

Après cette étrange découverte, elle s'avança avec sa monture jusqu'au bosquet de pins. Les arbres avaient l'air tous à peu près normaux et il y en avait une bonne trentaine. Le bosquet semblait s'ouvrir en un chemin d'aiguilles fraîchement tombées qui zigzaguait entre les troncs sur une vingtaine de mètres. Les aiguilles craquèrent lorsque la cavalière passa dessus. Au bout de ce tracé se dessina une petite clairière. La verdure y était plus développée, car des feuillus l'entouraient. Elle s'engagea dans ce lieu, mais il semblait que ce soit un cul de sac. Elle fit un tour sur elle-même et découvrit que le chemin à travers les pins avait disparu ! Les chevaux semblaient toujours calmes, jusqu'au moment ou celui qu'elle montait sembla recevoir un coup et qu'il se cabra ! Heureusement, la jeune femme réussit à se tenir et resta sur le dos de l'animal. Juste après, tranquillement, il s'installa à même le sol et déposa sa tête dans l'herbe... Endormi. Son homologue eut la même réaction une seconde plus tard.

Une minute plus tard, Tika perçut une ou deux petites voix...

« - ... malin de parler aussi fort, tu vois? Elle regarde dans notre direction ! - ... - Comment ça c´est moi qui parle fort? N´importe quoi ! - ... - Ouais, tu as raison, ça sert à rien de rester cacher... »

Sortant de derrière un buisson, un drôle de petit bonhomme se présenta à l'autre bout de la clairière. Il salua de la main Tika en écartant bien les doigts. Il ne dépassait pas la hauteur d'une table, on aurait dit un elfe en miniature. Il se retourna vers le buisson d'où il était sortit et faisait signe de la main à quelqu'un de sortir. Mais il n'y eut aucune réaction. Il mit ses poings aux hanches et attendit encore un instant avant de secouer la tête et de se détourner pour rejoindre Tika. Il avançait en sautillant, les deux mains dans le dos. Sa démarche ressemblait à une danse et il sifflotait pour rythmer sa marche. Arrivé à hauteur de Tika, il la salua avec le même geste de la main aux doigts écartés. « Bonjour ! Vous êtes perdue? Parce que sinon le chemin il est juste derrière vous. » dit-il en se penchant et désignant du doigt la direction de la route par laquelle était passé le chariot. Le chemin à travers le bosquet était à nouveau là, visible. Le petit être avait toujours une main dans le dos, mais rien dedans. « Vous savez, y a rien d´intéressant par ici hein... » Il regardait tout autour de la clairière comme s'il la découvrait avec Tika. Il semblait à Tika que la découverte du chemin au travers du bosquet et son avancée au son des crissements des sabots sur les épines qui recouvraient le sol se faisait comme dans un rêve. Les couleurs des arbres qui l’entouraient lui arrivaient par le prisme de son regard embué de larmes, telles des tâches d’aquarelle diluées allant du roux à des verts plus soutenus en passant par divers nuances de bruns au fur et à mesure qu’elle avançait. Encore abasourdie par la découverte de son sac sur son dos en sautant au bas de la cage -elle aurait pourtant juré ne plus l’avoir lorsqu’on l’avait jetée à l’intérieur- elle n’avait même pas pris la peine de changer de vêtement ou même d’enfiler sa veste et ses bras étaient couverts d’une chair de poule légitime pour cette saison. Mais elle n’en avait cure. Ses pensées étaient tournées vers l’Auberge du Dernier Refuge. Cela avait le sien, de refuge, ces dernières années. Le seul endroit où elle avait l’impression d’avoir une place. Un lieu de travail, certes, et tous savaient qu’Otik était un patron exigeant, mais un lieu de joie aussi, car tout exigeant qu’il était, Otik était un homme bon. Comme un père… À cette heure-ci, elle aurait dû être avec lui, à nettoyer les tables et s’assurer que tout serait prêt pour le prochain coup de feu. Il devait en y avoir, d’ailleurs, du travail…mais pas pour les bonnes raisons ; ce qui aurait dû être une soirée de fête avec le retour du groupe d’aventuriers qu’ils attendaient -et Caramon, surtout…bien sûr !- s’était transformé en une fuite -légitime- des frères Majere et de leurs compagnons. Fuite qu’elle avait soutenue, aidée même. Et pour cette aide, elle avait perdu tout ce qui avait fait sa vie depuis cinq ans…

À la pensée des amis en fuite, elle se demanda soudainement où ils pouvaient être en cette heure. Pouvait-elle seulement espérer les rattraper ? Les retrouver ? Ce fut cet instant que choisit sa monture pour effectuer une petite figure improvisée… « Hé… Qu’est-ce qui t’arrive ! » Tika réussit de justesse à se maintenir sur la croupe de l’animal, mais ce dernier sembla trouver particulièrement à son goût l’herbe de la clairière sur laquelle elle venait de déboucher ; en tout cas suffisamment pour vouloir s’y coucher et…dormir !! Bien vite rejoint dans cette initiative par son camarade dont la jeune femme tenait toujours la longe… « Hé ! Ho ! C’est vraiment pas l’heure vous savez… » Rien n’y fit. Les canassons dormaient et Tika porta machinalement sa main bandée à la tête pour la passer dans ses boucles auburn, incrédule face à la situation. Ce fut alors qu’elle entendit des petites voix dans les fourrés. Elle tourna la tête, le front plissé, dans la direction d’où les bruits venaient, immobile au centre de cette clairière où le chemin qu’elle avait emprunté semblait avoir disparu.

Une créature apparut alors, hésita, s’adressa à un être invisible tandis que Tika écarquillait les yeux devant cette surprenante apparition. Elle ouvrit la bouche, la referma comme cet sorte d’elfe format kender Et encore, j’crois que Tass’ est plus grand… s’approchait en dansant et sifflotant. petit être a écrit :« Bonjour ! Vous êtes perdue? Parce que sinon le chemin il est juste derrière vous. »

Étonnée, la jeune femme leva une main de la même manière et se retourna pour voir le chemin «revenu» tout en babillant : « Perdue ? Heu... Non… Enfin je… » Les paroles de Fizban lui revinrent en mémoire. N’ayant pas encore rabattue le bras qui saluait son vis-à-vis, son autre main se porta au chapeau qu’elle avait glissé à sa ceinture. Elle revint alors vers la petite créature, « Pas sûre que par là ce soit une bonne idée. C´est-à-dire que… Un…ami voulait venir ici, mais il ne reste que son chapeau et… Je ne sais pas… J’espérais, peut-être… Oui, retrouver d’autres amis… Mais j’ignore où ils sont et… » Ses sourcils se froncèrent à nouveau et elle se pencha légèrement vers son interlocuteur. « Êtes-vous réel ou suis-je en train de rêver ? Je veux dire… Tout cela est tellement fou. Ce qui est fou ne peut être réel, n’est-ce pas ? » Voilà que je me mets à parler comme ce vieux fou ! Allons, ma fille, ressaisis-toi ! Elle se redressa et prit une grande inspiration avant de reprendre avec un petit sourire timide : « Pardon, je raconte n’importe quoi ! Reprenons depuis le début si vous le voulez bien. Je m’appelle Tika, et vous ? » Le petit être fixait de ses grands yeux ronds Tika sans ciller. « Pas sûr que ce soit une bonne idée de se déporter dans le sens opposé? Bah ici c´est un fond-de-sac de toutes manières. » dit-il en haussant les épaules. « Et vous avez un ami? Mais il ne reste que le chapeau? Alors vous cherchez d´autres amis? » Il ramena un bras en dessous du coude opposé, et de la main il se lissait son petit menton, pensif. « Je pense que je ferais pareil... » Son oreille pointue gauche se décala légèrement comme si elle écoutait... « -... » « -Bonne remarque ! » -dit-il en opinant de la tête en direction de sa gauche comme si quelqu'un lui parlait. Puis il se tourna à nouveau vers Tika- « Qu´est ce qu... » Tika a écrit :« Êtes-vous réel ou suis-je en train de rêver ? »

« Euh... » Coupé dans son élan, le petit être ne sut trop que répondre, puis se reprit : « Non non, pas encore... » dit il, jovial. Tika a écrit :« … Tout cela est tellement fou. Ce qui est fou ne peut être réel, n’est-ce pas ? »

« J´ai déjà connu des fous, ils étaient comiques ! » -Il se tourna sur la gauche- « On a bien rigolé hein !? » « -... » « -Hihihi, oui ! » Tika a écrit :« Pardon, je raconte n’importe quoi ! Reprenons depuis le début si vous le voulez bien. Je m’appelle Tika, et vous ? »

Le petit être se retourna vers Tika : « Joli nom ! Moi c´est Nim et lui là » -il désigna sa gauche du pouce- « C´est Pim ! » -Il souriait de toutes ses petites dents- « Dites, vous avez les même tâches sur le visage que moi, et vos cheveux sont presque de la même couleur. On pourrait être de la même famille non? Vous êtes marié? Des enfants? Ils doivent vous ressembler non? Pim et moi on se ressemble, on est de la même famille ! Et sinon y sert à quoi votre grand rond noir avec une poignée? J´ai jamais vu quelque chose comme ça par ici ! » « -... » « -Oh, et Pim demande s´il peut essayer le drôle de chapeau ! Voir le garder si vous le jetez, parce qu´il est assez vieux et usé. » Contrairement à Nim -puisque tel était son nom- Tika ne pouvait empêcher ses longs cils s’abattre à un rythme régulier devant l’émeraude de ses yeux. Le coin gauche de ses lèvres remonté en un demi-sourire -creusant au passage une adorable fossette dans sa joue- elle renifla. Poussée tant par l’accumulation de fatigues nerveuses et physiques que par l’inconfortable fait d’être quasiment pliée en deux pour regarder la petite créature dans les yeux, la jeune femme croisa ses chevilles et, dans un mouvement souple, s’assit en tailleur devant celle-ci. « Enchantée ! », fit-elle avec sincérité avant d’ouvrir grand les yeux sous le flot de surprenantes questions qui se déversaient de la bouche de ce petit personnage. Ses épaules se secouèrent alors, comme lors d’un éternuement, tandis que sa cage thoracique se contractait…jusqu’à ce qu’il lui fût impossible de retenir l’éclat de rire qui naissait ainsi en son sein…

« Pardon… Désolée… », réussit-elle à prononcer au bout d’un instant tout en portant une main à sa bouche pour essayer de se contenir. Tika déglutit tant bien que mal et essuya du revers de son bandage de fortune une larme (de joie celle-ci) qui s’échappait au coin de son œil. « Pardon. Mais vos questions m’ont…désarçonnée, je dirais. Enfin, pour vous répondre, cher Nim, je ne crois pas que nous soyons de la même famille, mais tout est possible. Après tout, je sais peu de chose de ma famille. » Sa voix s’éteignit doucement à la fin de sa phrase pendant qu’une boule se formait dans sa gorge et que son regard devenait fuyant. Machinalement, ses doigts se portèrent à l’anneau qu’elle portait à son cou et dont elle ne se séparait jamais. Mais elle chassa bien vite cet élan de nostalgie inopportun pour revenir à son interlocuteur. « Et non, je n’ai pas d’enfant ; je suis trop jeune pour ça ! Et je ne suis pas non plus mariée même si j’ai un amoureux… » Les mots semblaient franchir seuls la frontière de ses lèvres et elle s’interrompit soudain en réalisant ce qu’elle venait de dire alors que le visage de Caramon apparaissait à son esprit. « Enfin, » reprit-elle, « il n’est pas vraiment au courant et je ne suis pas sûre que ce soit réciproque mais…heu… j’l’aime bien et… Mais passons ! Ceci » Elle souleva vivement la petite poêle pour la montrer, la tenant comme pour la poser sur un feu ou une plaque de cuisson, non sans avoir secouer la tête pour se débarrasser de l’image qui flottait devant ses yeux. « est une poêle. Cela sert à faire cuire les aliments que nous, les humains, consommons. On met les ingrédients dedans, un peu de gras avec pour pas que ça attache, et on pose le tout sur un feu ou un poêle à charbon… Si vous le souhaitez -et si l’on a le droit de faire un feu par-ici- je peux vous faire une démonstration ! » Reposant l’objet à même le sol devant elle, Tika retira l’étrange chapeau qu’elle avait glissé à sa ceinture. Le portant à son visage, elle ferma les yeux et huma les odeurs d’encens qui s’en dégageait. Non, je ne suis pas cinglée… Tout cela est étrange, mais bien réel, en fin de compte !! Puis elle rouvrit ses paupières et dirigea son regard vers les buissons où le dénommé Pim devait se cacher. « Je veux bien laisser le sieur Pim essayer ce chapeau s’il daigne se montrer ! » La jeune femme affichait un large sourire avenant. Puis elle revint à son vis-à-vis. « Je n’avais pas l’intention de le jeter ; il me permet de prouver que je n’ai pas totalement rêvé tout ce qu’il m’est arrivé depuis ce matin. Mais si votre ami souhaite le garder après essayage et bien… nous verrons bien ! », conclut-elle d’un clin d’œil. Le petit être écouta Tika sans perdre son sourire. Son visage se muait à la teneur des paroles de la serveuse du dernier refuge. Il se contenta de hausser les épaules d'indifférence lorsque Tika lui apprit qu'ils n'étaient pas de la même famille. Il remarqua assez vite l'anneau au cou et le montra de son petit doigt « Oh, ça brille ! » Mais ce n'était qu'une remarque et il écouta la suite en secouant sa tête au rythme des paroles de la jeune fille. Il fut interloqué quand elle parla de Caramon : « Ben ! S´il ne sait pas, i´faut lui dire qu´il est amoureux ! C´est comme moi quand j´avais du pollen sur le nez. Heureusement Pim était là pour me le faire remarquer... » Tika a écrit :« Mais passons ! »

Il fit oui de la tête et pris un air sérieux. Il se pencha en avant afin de bien observer l'étrange objet. Il écouta à nouveau très attentivement et au fur et à mesure des explications, ses yeux s'agrandirent et il se remit droit. Son petit corps bougeait de gauche à droite : « Génial ! C´est une idée des dieux ! » -Il se tourna vers "Pim"- « Tu as vu, ça sert à faire à manger ! » -Il s'adressa à nouveau à Tika- « Vous pouvez nous faire goûter? On a jamais essayé quelque chose comme ça. D´habitude on mange tous les fruits comme on les trouve dans la nature, on a jamais tout mélangé ! Et euh, c´est quoi un feu? Mais je suis -presque- certain que c´est pas interdit ici ! » Tika a écrit :« Je veux bien laisser le sieur Pim essayer ce chapeau s’il daigne se montrer ! »

« Oh, bien sûr ! » Il se tourna vers Pim : « Allez arrête de faire le râleur et montre toi ! »

- Pfff pas poss'b d'pas f'r com' toi t'l'as dé'cidé hin? À trois mètres du duo Tika-Nim, juste à côté d'un arbre, commença à se dessiner les contours d'un être et de son siège. Au bout de quelques secondes les couleurs apparurent et finalement Tika pu voir celui qui se faisait appeler Pim.

La créature était vraiment minuscule. Sa taille était à peu près la moitié de celle de Nim. Il portait de vieux vêtements de laines et il sourit en direction de l'humaine. Il sauta en bas de son champignon et attrapa une brindille au passage. Il la mit en bouche avec un air assuré et s'approcha tranquillement pour voir le chapeau. Il n'était clairement pas à sa taille, et il pouvait aisément se mettre sous le chapeau sans même que l'on sache qu'il s'y trouvait ! Laichez moi voir ch'te choje... -Il examina le chapeau d'un oeil expert, et Nim, légèrement en retrait, mit ses deux mains devant sa bouche pour se retenir de rire- Hum, intérechant ! -Il retira la paille de sa bouche- J'veux bien vous l'échanger contre -hum- une de mes possessions. Qu'e' k'vous z'en dites? Tika n'avait pas relevé le fait qu'il serait judicieux de parler à Caramon de ce qu'elle ressentait car pour elle, c'était tout sauf une bonne idée. Surtout après le rêve -le cauchemar plutôt- de sa dernière courte nuit. Non, s´il n´est pas capable de voir ce qu´il a devant lui, je... Oh et puis, flûte. De toute façon, je ne suis même pas certaine de le retrouver alors pas besoin d´y penser.... La jeune femme préféra se concentrer sur ses explications, plus vivantes, du maniement de la poêle. Nim a écrit :Et euh, c´est quoi un feu? Mais je suis -presque- certain que c´est pas interdit ici !/dit Il ne connait pas le feu... Wahou !! Elle écarquilla les yeux devant sa réponse mais elle avait déjà commencé à répondre à celui qui voulait "essayer" le chapeau.

Lorsque Pim apparut, Tika fut encore plus surprise de découvrir une créature encore plus petite que la précédente, au langage mâchouillé et à l'allure nonchalante. Il pouvait aisément disparaitre sous le chapeau et personne n'aurait su qu'il était là. Tout en se demandant ce qu'étaient réellement ce petits êtres, elle ne pouvait s'empêcher de sourire devant l'étude minutieuse qu'opérait le dénommé Pim sur la coiffe de Fizban. Un coup d’œil discret à son voisin lui fit comprendre que ce dernier trouvait la situation tout aussi comique qu'elle... Pim a écrit :Hum, intérechant ! -Il retira la paille de sa bouche- J'veux bien vous l'échanger contre -hum- une de mes possessions. Qu'e' k'vous z'en dites? La proposition semblait très sérieuse alors la jeune femme prit son menton entre ses doigts et leva les yeux au ciel, une moue très sérieuse sur le visage, faisant mine de réfléchir. « Humm.. Je ne sais pas trop. Il faudrait que je réfléchisse. » Son regard d'émeraude revint vers le lilliputien. « Qu´avez vous à m´échanger qui pourrait avoir une valeur digne de cette échange ? » Pim remit sa paille en bouche et plongea son regard et sa petite main dans une besace qu'il tenait sur le côté. Nim regardait par dessus l'épaule de Pim, juste derrière lui avec une moue de curiosité non dissimulée. Du sac, la minuscule main présenta quelques objets : une bille marbrée noir et rouge, une petite cloche en argent, une flûte en bois noir, une perle, une plume blanche et un petit sac en cuir noir.

Voilà ce que ch'possède. -un à un il présenta les objets en les tenant par deux doigts- Une petite bille agrechive -cha che voit aux couleurs-, une cloche des matines, une flûte des bois, une jolie perle, une plume que cha chert à faire des mechages, et enfin... -Il ferma le poing et avec ses deux mains fit un large cercle comme pour impressionner un public- ...de la poudre pour dichparaître !

De ses deux petits yeux grands ouverts, il fixait -amusé- Tika en attendant sa réaction. Derrière lui Nim prenait une moue impressionnée, même si, sans aucun doute, il connaissait déjà la collection de son "frère". Tandis que Pim auscultait sa besace, la jeune femme sortit son vieux manteau de propre sac car, maintenant qu'elle était assise dans cette clairière avec ces étranges personnages Pas sûre qu´ils soient réellement frères, ces deux-là..., elle commençait à ressentir la fraîcheur sur ses bras nus et l’adrénaline de sa "fuite" étant retombée, sa peau s'était recouverte d'une chaire de poule légitime. Pim a écrit :Voilà ce que ch'possède. -un à un il présenta les objets en les tenant par deux doigts- Une petite bille agrechive -cha che voit aux couleurs-, une cloche des matines, une flûte des bois, une jolie perle, une plume que cha chert à faire des mechages, et enfin... -Il ferma le poing et avec ses deux mains fit un large cercle comme pour impressionner un public- ...de la poudre pour dichparaître ! Lorsque que le petit bonhomme au brin d'herbe lui présenta ses diverses possessions, Tika se pencha vers lui et prit un air attentif et concentré, le coude posé sur son genou et tenant son menton entre deux doigts. « Hum, hum... », fit-elle régulièrement. regardant tour à tour le chapeau de Fizban et les divers objets Il y a là des choses bien intéressantes... À dire vrai, je ne souhaites pas faire un choix ou, pire, le déposséder de sa "fortune"... Mais a-t-il seulement idée des utilisations qu´un esprit mal intentionné pourrait faire de ces choses ?? Finalement, après mûre réflexion, elle passa la langue sur ses lèvres et finit par dire, regardant la petite créature dans les yeux : « Je vais honnête avec toi, tout ce que tu as là m´a l´air des plus intéressants. Faire un choix m´est presque impossible tellement ce serait malhonnête de ma part. Alors voilà ce que je te propose, cher Pim, je te laisse toi-même établir la valeur que tu donnerais à ce chapeau -qui n´est que sentimental pour moi- et te laisse me donner ce que tu préfères en échange. Cela te va-t-il ? » La jeune femme, toujours assise en tailleur, s'était redressée et, croisant ses bras sur son ventre, attendit la réponse du petit être. Pim et Nim écoutèrent d'un air sérieux la réponse de Tika. Ils gardèrent cette moue quelques longues secondes encore après qu'elle eut terminé de s'exprimer, immobiles. Puis, comme si quelqu'un avait claqué des doigts, ils sortirent tous les deux de leur torpeur. Pim regarda les différents objets, décontenancé, pendant quelques secondes, puis prit la parole -tout souriant- en tendant la perle : « Voilà, affaire conclue alors ! » Sans attendre de réponse il récupéra le chapeau avec ses deux petites mains et... il disparut de la même manière qu'il était apparut aux yeux de Tika, non sans lui lâcher un clin d'oeil complice.

Nim haussa les épaules ne sachant que dire. Le silence remplit la clairière quelques longues secondes. Nim regardait tout autour, les mains croisés dans le dos. La lassitude eut raison de son silence : « Vous v´nez des villages humains non? On m´ a raconté qu´il y avait pas loin d´ici une ville dans les arbres, mais que c´était pas conventionnel c´est vrai? Moi j´habite avec ma famille dans la forêt, on a des terriers, des maisons dans les arbres et on s´amuse beaucoup à faire des jeux ensembles, pas cache-cache parce que sinon tout le monde gagne, alors on joue plutôt à se poursuivre dans les bois et à découvrir des... »

La conversation s'en fut encore mais semblait de plus en plus lointaine...

Elle avait attendu sagement la réponse que lui ferait la petite créature, bien qu'elle ne se fût pas attendue à ce que sa proposition les missent dans une telle perplexité. Aussi, après un temps qui lui parût interminable, elle sursauta légèrement quand enfin Pim prît sa décision. Jeudi a écrit :Pim regarda les différents objets, décontenancé, pendant quelques secondes, puis prit la parole -tout souriant- en tendant la perle : « Voilà, affaire conclue alors ! » Elle eut tout juste le temps de tendre sa main avec un petit sourire pour recevoir la jolie perle que déjà la petite créature s'emparât du chapeau et disparût comme elle était arrivée... Elle haussa les sourcils « Rapide... » et observa d'un peu plus près l'objet qui reposait sur son bandage, se désintéressant quelques instant de celui qui était resté, Nim... Nim a écrit :« Vous v´nez des villages humains non ? On m´ a raconté qu´il y avait pas loin d´ici une ville dans les arbres, mais que c´était pas conventionnel c´est vrai ? Moi j´habite avec ma famille dans la forêt, on a des terriers, des maisons dans les arbres et on s´amuse beaucoup à faire des jeux ensembles, pas cache-cache parce que sinon tout le monde gagne, alors on joue plutôt à se poursuivre dans les bois et à découvrir des... » Le petit être babillard la tira de sa contemplation et bien que ses paupières s'alourdirent de seconde en seconde, elle conserva son doux sourire, hochant la tête pour confirmer ses dires par deux fois, tout en glissant machinalement la perle dans sa poche de pantalon. Sa tête lui semblait lourde et la voix de la créature lui paraissait de plus en plus lointaine. J´ai vraiment pas assez dormi moi..., songea-t-elle alors qu'elle cillait pour la troisième fois et qu'elle se rendît compte qu'il lui fallait faire un effort de concentration pour parvenir à suivre ce que lui racontait Nim. Mais tout son corps s'était engourdi. Il lui était impossible de lutter plus longtemps. Et lorsque ses paupières s'abattirent pour la quatrième fois, elle ne les releva pas et son corps s'affaissa doucement sur le côté...

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