Rexus leva les yeux du lourd grimoire relié de cuir et de fer qu'il lisait.
« Hum...hein? Ah, vous cherchez Eilif...il est parti enquêter sur quelque chose, je ne sais pas trop quoi. Un rapport avec les Cloches du Diable... »
Il referma le livre et secoua la tête.
« Les Serres de la Rivière, hum...? Je ne suis pas expert en criminologie, mais il me semble qu'ils sont là depuis la guerre civile, soixante dix ans à peu près. Les tengus n'ont pas bonne réputation, les gens ont tendance à associer leur aspect de corbeau avec une prédilection pour le vol et l'escroquerie, et les Serres ne font rien pour arranger. Je ne sais pas qui était leur premier chef, mais sans doute pas Ravzee, les tengus ne vivent qu'une soixantaine d'année en général. Quand à leurs pratiques...et bien ce sont surtout des cambrioleurs et pickpockets, mais pour autant que je sache, ils ne laissent pas de trainées de cadavres derrière eux, en tout cas pas souvent. D'un autre côté, quand les victimes ne sont pas des tieflings, les autorités prennent ça un peu plus sérieusement...Mais enfin, c'est pratiquement de notoriété publique. Il faudrait consulter des sources plus précises pour s'en assurer. »

Pour autant, les archives du palais de justice avaient l'air de confirmer les dires de Rexus. Les Serres ne passaient apparemment pas souvent devant la justice, sauf pour des crimes mineurs, surtout des vols et du racket. Soient ils n'étaient effectivement pas trop sanguinaires, soient ils dissimulaient bien leurs traces. Ravzee, en revanche, faisait l'objet d'un mandat d'arrêt pour extorsion, meurtre et autres méfaits plus brutaux, mais les pistes le concernant étaient bien minces, et il n'avait pas de condamnations antérieures...

Les abords du premier pilier étaient particulièrement mal-famés. Pas autant que Toits-Rouges, mais on devinait aux vitres crasseuses, aux ruisseaus d'eau souillé et aux rats qui s'enfuyaient à l'approche des passants que l'endroit avait vu des jours meilleurs. Même les quelques navires, des barques de pêcheurs, amarrés sur ces docks étaient vermoulus et semblaient prêts à sombrer spontanément.
Sous le pont lui même, il n'y avait personne, même si l'obscurité naissante gênait considérablement Dorian. Au moins, avec toutes les ruelles du quartier, il n'avait que l'embarras du choix s'il devait mettre les bouts en vitesse, mais il était à craindre que les tengus connaissent mieux encore les lieux que lui.

Alors qu'il attendait depuis déjà quelques minutes, un bruit de plumes et de tissu attira son attention. Une silhouette atterrit doucement près de lui, surgissant des hauteurs du pont. C'était un tengu, portant une sorte de cuirasse sous son manteau et une lame courbe au côté. Dorian ne l'avait jamais vu, mais son allure indiquait qu'il était dangereux. Même dans la pénombre de ce début de nuit, Dorian pouvait voir les yeux jaunes du volatile le fixer, et le sonder, examinant aussi les alentours. Le tengu poursuivit son examen pendant près d'une minute avant de finalement parler. Il avait la voix rauque, erraillée.
« Pas très impressionnant. Tu voulais me voir? »

Je rajoute le jeton ce soir

Modifié par un utilisateur mardi 2 août 2016 21:32:29(UTC)  | Raison: Non indiquée

Rôdeur dans les ombres

Le tengu étrécit les yeux, comme si il cherchait le mensonge dans les paroles du jeune voleur. Ne le trouvant pas, il resta silencieux quelques instants de plus, réfléchissant aux paroles de Dorian. Son visage se tordit en un rictus sarcastique.
« Je vois. Roost n'avait pas menti, vous êtes vraiment des idéalistes. Ca fait beaucoup de demande, tout ça, et bien peu de garanties...Commençons par le commencement: que se passera-t-il si vous mettez des mois - des années? - Barzillai? Je laisse les Serres mourir de faim ou mendier dans le ruisseau. Même si j'étais disposé à le faire, combien de tentatives de remplacement devrais je affronter avant qu'un autre tengu ne reprenne les rênes? Ensuite, si vous échouez et que les Serres sont à vos côtés, les tengus vont finir comme ces imbéciles de rebelles à Couronne d'Ouest il y a quelques années, morts, ou esclaves. Nous ne sommes pas fiers à ce point là, si il faut se cacher dans les ombres pour survivre, et bien...Les ombres nous conviennent.  »

Il se mit à faire les cents pas, agitant les serres pour souligner ses propos.
« Et même si vous reprenez la ville...qu'est ce qui vous fait croire que vous aurez le pouvoir de me donner ce que vous proposez - si ce n'est pas une promesse en l'air, ce dont je ne suis pas convaincu. Le pont, traditionnellement, était ouvert à tous avant que Barzillai n'arrive en ville. Ce Pont est déjà à moi, pourquoi est ce que je mettrais ça en danger vous les Corbeaux? »

Il se reprit, et braqua de nouveau son regard sur Dorian.
« En bref, beaucoup de risques et de restrictions pour la faible chance que vous ne finissiez pas comme la première génération de Corbeaux d'Argent. Pour l'instant, Dorian...je peux t'appeler Dorian? je ne suis pas convaincu. Bien sûr, vous avez prouvé que vous ne plaisantiez pas en tuant Scarplume, mais ça reste une promenade comparé à la maison Thrune, même avec la guerre civile. Nous tengu n'avons pas survécu jusque là en choisissant le camp des perdants. »

Rôdeur dans les ombres

Le tengu fixa le petit humain dans les yeux, silencieux et impressionné par sa véhémence. Ravzee ne répondit pas tout de suite, il semblait être dans ses habitudes de ne jamais agir dans la précipitation.
« Je vois...c'est bien, l'enthousiasme, mais ça ne gagne pas les guerres. Du moins pas seul. Mais j'entends bien. Voilà ce que je te propose: jusqu'à ce que vous en arriviez à un affrontement direct, les Serres vont ignorer votre présence, et ne pas interférer. Si jamais vous perdez la partie avant, et bien, nous n'aurons pas de liens avec un groupe révolutionnaires. Une fois que ça bouge, on peut vous tenir au courant de ce qui se passe, et des mouvements des Thrunes. Pour ce qui est du reste...trop tôt pour le dire. A prendre ou à laisser. Qu'est ce que t'en penses? »

Rôdeur dans les ombres

Le tengu l'observa un instant supplémentaire, le doute passant fugitivement sur son visage, mais répondit à sa poignée de main, prenant garde à ne pas le blesser avec ses serres.
« Dans ce cas, nous nous reverrons, Dorian. D'ici là, bonne chance. »

Dorian ne comprenait pas. Les nerfs. Dorian avait les nerfs. A force de taper dessus, ils finirent en boule, une vraie pelote à vif.

Des clowns ! Pensa-t-il en tapant dans le premier saut de merde venu, éclaboussant ses bottes de fumier.

Des fumistes ! Il accéléra le pas de façon spectaculaire, ne remarquant pas qu'il marcha dans une flaque de pisse, aggravant le cas de ses chaussures de mauvaise qualité.

Des amateurs ! Un chat de gouttière fit les frais de cette pensée, après un nouveau coup de pied qui le fit voltiger à la verticale.

Des révolutionnaires du Solardi ! Cette fois, l'une de ses bottines ne résista pas à l'impact de son pied sur une barricade de bois qui se brisa sous l'impact, déchirant le tissu qui protégeait le pied du jeune homme.

Il mit un certain temps à se rendre compte qu'il ne savait pas où il allait. Au fond de lui-même, il éspérait tomber sur une patrouille et faire couler le sang pour refroidir le sien. Il retomba sur terre douloureusement lorsqu'une des sœurs Fushi lui fit remarquer sa présence en parlant.

« Ouai... ouai j'vous suis. » Balbutia-t-il, incapable d'aligner deux mots sans montrer que son énervement était encore d'actualité.



En marchant discrètement et suivant les Tengus, Dorian comprit l'ampleur de son acte d'avoir quitté les corbeaux d'Argent. Il savait qu'il s'était emporté, qu'il en avait trop fait. Mais derrière cette montée d'adrénaline juvénile se cachait une réelle motivation, un réelle rébellion face à ces adultes trop peu entreprenant à son goût bien que déterminé. Dorian souffrait de plus en plus de son passage à l'âge adulte, il n'avait connu nul réconfort de petite-amie, de famille, d'animaux voir d'ami d'enfance lors de sa longue et tortueuse adolescence. Il se sentait puéril de penser cela car il était vrai que ces récents alliés mettaient aussi leurs vies en jeu et certains leurs proches. Mais il ne pouvait pas accepter l'idée que tout ces récents efforts mis en place pour les Corbeaux volent en fumée à la première trahison, à la première erreur, à la première fuite de leur identité.

Identité...

Dorian, en sueur dans cette rue qu'il connaissait mal, s'arrêta quelques seconde après avoir ralentit sa marche. Il avait soudainement pris conscience du problème qui le concernait et qui envenimait sa vie depuis la mort de ses parents, il comprit d'où venait sa colère.

Il détestait qui il était. Tout ce qu'il faisait n'avait pour but que de s'éloigner de sa vie d'esclave, de se rapprocher du fantôme de son prodige de frère.

Dorian comprenait. Il avait besoin de reconstruire qui il était avec ce qu'il avait de plus solide comme matériaux : sa foi.



La Murène Sanglante... sérieux les filles...

Dorian connaissait cette taverne de réputation Folklore local et évitait du mieux qu'il pouvait d'approcher ne serait-ce que de l'enseigne au goût douteux. Il avait eu l'habituelle bonne idée de cacher son minois d'humain avec sa cape elfique, ce qui lui assurait une assez bonne couverture, d'autant plus que les soeurs Fushi étaient des "habitués" de ce lieu merdique.

Dorian but qu'une seule gorgée de sa mousse au fumet d'urine et aux bulles de pets de gobelin. Son cerveau était en ébullition, comme après une séance de lecture clandestine dans la bibliothèque d'Avernia. Qu'allait-il faire maintenant ? Il avait pris la responsabilité de partir des corbeaux car ces derniers n'agissait pas de manière à faire mal au pouvoir en place directement.

« Ce qu'on va faire ? » Il bu une seconde gorgée, la chaleur lui obligeait. « On va saboter. »

Dorian avait toujours en travers de la gorge le fait que ses anciens camarades décidèrent de soulever le peuple pour renverser le pouvoir, le jeune homme croyait dur comme fer que les actions prioritaires d'un groupe de rebelle était la malveillance programmée, organisée et destinée à l'effondrement intrinsèque du pouvoir. Les peuples finissent toujours par se rebeller par eux même contre un pouvoir qui ne tien plus debout.

« Faites moi confiance, moins on est nombreux, plus on est efficace dans les projets que j'ai en tête. » Il jeta plusieurs regards discret autour de lui, à l’affût d'une conversation concernant sa première actionJet de perception.« Vous savez quoi sur les nouvelles taxes du pont morne ? Les serres vont bouger ? » Puis montrant ses chaussures dans un état aussi lamentable que le bistrot à l'autre coin de la pièce « Et si vous avez une idée d'où j'pourrais récupérer des bottes un peu plus solides... et efficaces... »Un coin où acheter les bottes elfique.

Il termina sa première conversation indépendante par une pensée qui lui sauta soudainement à l'esprit.

« Merde... j'crois que j'ai 17 ans aujourd'hui... c'est ma tournée les filles. » Termina-t-il en ne sachant pas s'il avait vraiment grandi aujourd'hui.

« Merci pour le tuyau, j'irais seul chez ce Chuko demain. Vous pouvez m'en dire plus à son sujet ? C'est quel genre de commerce ? Neutre ? » Dit Dorian en enfilant sa bière « Ouai j'suis jeune... à mon âge, les gars commencent à peine leurs vrais métiers ou commencent leurs grandes études. » Il continua à propos du Pont Morne « Ouai, c'planqué de Ravzee va pas montrer ces plumes avec l'augmentation des patrouilles, j'pense agir sans le contacter, à mon avis, si on fait bouger les choses, c'est lui qui viendra vers nous. Demain après mon passage à la Cage de guerre, on s'retrouve devant le péage du Pont, discrétos bien entendu. » Il apostropha ensuite une serveuse d'une race qui lui était inconnue pour demander de quoi boire à nouveau puis il dit aux sœurs à voix basse« Vous savez... avant de rentrer chez les corbeaux, j'étais en contact avec un intermédiaire de la Rose de Kintargo mais j'ai plus eu aucune nouvelle depuis la Nuit des Cendres. J'servais d'indic en quelque sorte, 'fin j'avais pas le choix et ça m'convenait. C'était ma manière à moi de pratiquer ma foi et de ralentir la progression de l'église Asmodéenne. J'avais l'habitude d'être contacté une ou deux fois par mois et même parfois discuter avec cet interlocuteur dans une taverne de la ville. »La taverne de Caliban ? Dorian semblait pensif. « Je devrais penser à reprendre contact si la Rose compte toujours fleurir. Et vous ? Vous avez un Dieu principal ou vous êtes polythéistes ? »

Puis entendant les rumeurs de la nuit d'un coin de son oreille, il rajouta aux deux sœurs qui avaient très certainement entendu la même chose. Dorian était à deux doigts de cracher au sol en entendant le nom de Zon Kuthon, le Dieu des enculés.

« Y en a vraiment qui prient n'importe quoi d'nos jours. »

« Pas pour demain, enfin normalement. On prendra la température sur le Pont Morne et on essaiera de localiser les péages et le déplacement des douaniers. Récupérer la caisse et rembourser les marchands n'est qu'une solution à court terme. Il faut prévoir un plan plus judicieux... » Dorian réfléchissait et une idée lui sauta à l'esprit, il termina sa dernière bière de la soirée non sans jeté un regard torve à un vieil Halfelin qui le relookait d'un peut trop près. « Il faut créer un marché parallèle à l'aide des serres. Un péage secondaire, plus cher que l'ancienne taxe, mais beaucoup plus raisonnable que la nouvelle. Une taxe temporaire dont une partie irait dans la poche des serres qui en contrepartie arrêterais de faire les poches aux clients des marchands du pont. Double intérêt donc, d'une part la sécurité pour les clients et d'autre part, un moyen de redorer le blason des serres en les faisant faire les passeurs pour le compte des clients. »

Dorian sorti deux parchemins et un encrier avec de quoi écrire.

« Jane, tu peux faire un plan du Pont Morne ? On le connait bien maintenant depuis qu'on a passé des jours pour prendre contact avec les serres. » Dit Dorian alors que celui-ci commençait à écrire pour développer son programme « L'ancienne taxe était de trois pièces de cuivre. Montons-là à une pièce d'argent et non cinq comme actuellement. Cinq pièces de cuivre iraient aux marchands pour assurer leur commerce et ainsi leur permettre de passer "légalement" le pont tout les jours et les cinq autres aux Serres pour leur assurer de ne plus voler. Vous en pensez quoi ? C'est un plan qui pourrait plaire à Ravzee ? » Et Dorian hésita « J'suis peut-être naïf... au bout d'un moment les autorités vont s’apercevoir du business... à moins que les serres jouent le jeu à fond. »

Modifié par un utilisateur mardi 3 janvier 2017 18:29:32(UTC)  | Raison: Non indiquée

« Hmm... J'ai peut-être vu trop gros pour un premier coup... » Dit Dorian en se grattant la tête, faisant la moue « On devrait se tenir au plan à court terme, saboter le pactole de ce péage de merde. S'ils se font voler au bout de deux jours, ils vont peut-être y réfléchir à deux fois avant d'augmenter les taxes n'importe comment. » Il prit une plume dessina à son tour sur son parchemin, mais beaucoup moins précisément que Jane. «  Seize tours, si Korva nous rejoins demain, ça nous permettra de nous diviser pour surveiller quatre tours chacun pendant la journée et noter où vont les pièces d'argent ainsi que le nombre de garde posté à chacune de ces tours. » Il pointa de la plume de son stylo les plumes de ses complices « Vous pouvez pas voler ? Vous pensez que le trésor sera en haut d'une de ces tours ? Si Chuko est aussi bon que tu le dis, il aura peut-être de quoi me faire planer demain... » Dorian pense aux bottes Elfiques

Dorian se dirigeait vers la Cage de guerre a grand pas, évitant le plus possible les patrouilles et hésitant plusieurs fois avant de tourner dans certaines ruelles, de peur de croiser un ou plusieurs corbeaux d'argent. La nuit lui avait porté conseille et il s'était convaincu d'avoir pris la bonne décision tant que les choses n'accéléraient pas. Et en parlant d'accélérer, il se pointa à la Cage avec ses chaussures en mauvais état et la dernière semelle se décolla au moment où Chuko s'adressa à lui.

« Heu... »Dit Dorian en regardant un morceau de sa chaussure se faire la malle « Vous auriez pas d'quoi mettre aux pattes ? D'efficace ? » Puis parlant à voix plus basse de peur qu'un aventurier à l'éthique douteuse l'entende « J'viens de la part des sœurs Fushi. Elle m'ont dit que vous auriez d'quoi m'équiper convenablement... j'ai d'quoi payer. J'voudrais une paire de godasse qui pourrait m'éviter de mourir avant d'passer l'âge adulte. » Finit-il par dire très sérieusement.