« Pas de souci pour manger en route. Un bon repas manqué me fend le cœur et l'estomac, mais enfin, le travail d'abord. » Te voilà raisonnable, c'est bien !

Il se tourna ensuite vers Aarkus pour écouter ce qu'il avait à dire. Sa première question assombrit grandement son visage, et son humeur. « Hélas, oui... Enfin, si j'ai un membre de cette secte qui me tombe sous la main, il passera un sale quart d'heure ! »

Je suggère la suite sur ton fil, Aarkus, puisque c'est l'histoire de ton perso avant tout.

Aarkus proposa au groupe: «  Si nous allons à cheval nous irions plus vite, et nous serons en position de force pour fuir une embuscade, si toutefois nos chevaux ne s'affolent pas... » Il se tourna vers Takal, qui l'avait sagement attendu. «  Et toi, mon grand? Que veux tu faire? »

Melfur fronça les sourcils. "Si ce sont des humains normaux ? Pensez-vous que les villageois aient pu être éradiqués et transformés eux aussi en mort-vivants ? Cà parait improbable car il est situé très près de Lepidstadt et cela ne serait pas passé inaperçu. Enfin je pense. Et puis nous irons de jour, ce qui devrait nous prémunir contre certaines mauvaises surprises, n'est-ce pas ?" Puis, adoptant le ton badin qu'il utilisait lorsqu'il faisait un peu d'humour noir : "Notez que si tout le monde est mort là-bas, il n'y aura plus de témoin pour accuser la Bête, et elle sera innocentée de ce crime également. Notre mission sera ainsi promptement accomplie et nous pourrons ripailler à satiété !"

Gustav Kaple put au moins apporter la réponse à deux de leurs questions.
« Non, je pense que vous n'avez rien à craindre. Lorsque l'ancien du village a reçu sa convocation à comparaître, il y a quelques jours, tout allait bien à Morast, en dehors de l'accueil des villageois. Quand à la Bête, elle a nié avoir même été jusqu'à Morast, donc je ne pense pas qu'elle pourra nous apprendre quoi que ce soit. Bonne route, dans tous les cas, et soyez prudents! »

Suivant les suggestions de Melfur, ils ne poussèrent même pas jusqu'à la demeure de Kendra, se contentant de récupérer leurs montures pour filer vers Morast. Ils ne pouvaient pas galoper, afin que Takal puisse les suivre, mais ils avançaient tout de même à un bon trot, et il ne leur faudrait sans doute qu'un peu moins de deux heures pour atteindre le village, ce qui correspondrait au début d'après midi.
Leur passage dans les rues ne passa pas inaperçu, et plusieurs passants crachèrent sur leur chemin, d'autres leur jetèrent des regards hostiles, d'autres encore des insultes, même si quelques uns leur adressèrent aussi des encouragements. Leur rôle dans le procès de la Bête avait à présent fait d'eux des personnages publics...
Mais à cheval, et accompagnés d'un ours, il ne leur fallu pas très longtemps pour atteindre les faubourgs de la ville et s'enfonçer dans la campagne marécageuse des rives de la Moutray.


Environs de Lepidstadt
Les collines autour de Lepidstadt se firent rapidement de moins en moins vallonnées à mesure qu'ils s'aventuraient vers l'Est. Elles devinrent peu à peu marécageuses, et lorsqu'ils atteignirent les alentours du village, le terrain était devenu un patchwork de lande et de tourbières, traitre et spongieux. Même la neige était éparse, tenant mal sur les landes et les tourbières. Même sur la route, devenue une simple piste de terre battue, les sabots des chevaux s'enfonçaient un peu, et il devenait difficile de savoir jusqu'où s'étendaient les marécages.
Alors qu'ils arrivaient à quelques centaines de mètres de Morast, la conversation animée de Gazda, Aarkus et Lukas s'arrêta. Trestelame n'avait pas l'air particulièrement ravie d'être là, et c'était un sentiment compréhensible.

Morast méritait à peine le nom de hameau. Les maisons étaient plus proches de cabanes ou de huttes, et certaines avaient du être construites sur pilotis pour ne pas s'enfoncer dans les marais. Il devait y en avoir une vingtaine, tout au plus. Plusieurs barques à fond plat étaient attachées à l'unique ponton du village. L'endroit empestait la vase, et s'ils n'avaient pas été au début de l'hiver, il ne faisait aucun doute qu'ils auraient déjà été assailli par les moustiques.


Trestelame retint sa monture, jetant un oeil au misérable amas de cabanes.
« Je crois que nous y sommes...c'est vraiment un trou perdu. Moi qui croyait que Ravengro était paumé et isolé... »

Aarkus taquina le magicien fougueux: «  Dites-donc, je vous rappelle qu'on vous regarde, les tourteraux! Et vous Sire Merrimac, avec vos sous-entendus à la noix, on va finir par vous brûler pour atteinte à la pudeur, vu ce qu'ils on fait à l'apiculteur... » Il reprit son sérieux: «  Plus sérieusement, il vaudrait mieux sélectionner la méthode douce: en y fonçant tête baissée, on risquerait de s'attirer les foudres de Lepdistat. De ce fait, la Bête ne pourra pas être disculpée et un innocent mourra dans d'atroces souffrances, comme maman... » Il reteint un sanglot, son passé était trop douloureux...

Gazdă ruminait les propos de l'avocat. En partant du principe que la Bête était innocente et racontait la vérité, il se demandait pourquoi les villageois l'accusaient d'avoir commis dix meurtres ici.

« C'est bien pensé, Melfur. En espérant toutefois que la nouvelle de notre intervention ne soit pas parvenue jusqu'ici. Notre célébrité temporaire peut nous précéder, si un villageois est venu assister au premier procès. Ce qui est plus que plausible, les locaux étant très concernés par cette affaire. Avec dix meurtres dans cette petite communauté, je serais très étonné qu'aucun membre d'une des familles concernées ne soit pas venus à Lepidstadt. Ce qui nous sauverait serait que ces probables visiteurs de Morast soient restés sur place pour le procès de demain. Enfin, nous verrons bien ! Ce mensonge ne causera pas davantage de torts, de toute façon. »

Ne rentre pas dans ce trou paumé ! Vous allez vous faire lyncher ! Du calme, mam'. Je ne suis pas un lâche, ni un benêt. Et notre groupe est solide. Nous avons affronté avec succès des adversaires coriaces à Herstag. Tu n'as jamais eu affaire à une foule en colère ! Une foule ?! Ici ?!

« Trouvons ce Lazne et obtenons sa version de l'histoire. Je suis curieux de savoir comment il a pu apercevoir la Bête, si Elle n'était pas là, selon Sa version. Si c'est bien le cas, soit la Bête nous a menti, ce qu'elle n'a pas fait jusqu'à présent, soit quelqu'un se fait passer pour Elle pour lui mettre sur le dos dix meurtres. Il me parait en effet difficile de confondre une telle créature avec quelqu'un d'autre. Soyons concentrés sur les détails. Il nous faut obtenir une description très précise des événements et de ce qu'a vu le témoin. »

Melfur rumina un peu les réflexions de Zaonessa et Gazda. "Vu que nous sommes partis dès la fin du procès, je pense que nous sommes tranquilles quant au risque d'avoir été repéré par un habitant à Lepidstadt. En effet, on l'aurait croisé sur la route. Et un tel habitant aurait sans doute décidé de passer la nuit en ville plutôt que de se taper un aller-retour supplémentaire. Quant à l'idée de se faire passer pour les envoyés de Pharasma, cela me rebute un peu. En premier lieu parce qu'à part vous, nous ne faisons pas partie du culte. Or, j'ai l'impression que ce ne sont pas les coreligionnaires qui manquent. En second lieu, inutile de parler de puissances contre-natures dans un pays confis de superstitions. Attendons de voir, et d'entendre, les premières réactions des indigènes avant d'avancer de tels arguments. Nous marchons sur des oeufs." Se tournant vers ses compagnons qui n'avaient pas encore donner leur opinion sur la meilleure approche à adopter : "Qu'en dites vous ?"

Trestelame sourit à Zaonessa en retour.
« Et je ne vous remercierai jamais assez pour ça! Même si je ne suis pas la seule, je vous dois une fière chandelle! Ca s'applique au clergé de Pharasma en général, d'ailleurs...nous autres sommes mal armés pour affronter les fantômes, et honnêtement vous avez beaucoup de courage d'oser affronter de telles créatures. »


Le petit groupe se dirigea vers Morast, attendant de voir la réaction des villageois avant de décider quelle approche adopter. Ils n'eurent pas à attendre longtemps. Lorsqu'ils entrèrent dans les allées boueuses qui servaient de rues au village, Trestelame se retenant de pester contre la boue qui collait à ses bottes, ils furent intercepté par un groupe de villageois: hommes, femmes, jeunes et vieux. Ils étaient une dizaine, et si ils n'avaient aps l'air ouvertement hostile, la méfiance était palpable dans l'air. Aucun ne paraissait être un guerrier, mais ils portaient tous des armes improvisées: harpons de pêche, marteau, serpes, faucilles, couteaux et bâtons. Ils étaient menés par un homme d'une bonne cinquantaine d'années, aux cheveux et à la barbe blanche et à l'air revêche, qui portait un bandeau sur l'oeil gauche. Il les héla.
« Halte étrangers! Qu'est c'que vous v'nez faire à Morast, hmm? Y'a pas beaucoup d'gens des landes qui viennent dans nos marais. C'est qu'on s'méfie, les temps sont dangereux. »

Selon lui, Melfur avait oublié les invectives d'une partie de la population à leur égard, en quittant Lepidstadt. En tant que témoins, tout le monde les avait aperçus. Mais enfin, il valait mieux laisser l'optimisme les guider que le pessimisme les paralyser.

Le spirite soupira intérieurement. Les hommes en face ne lui paraissaient guère croyants ou éduqués. Alors, pourquoi Zaonessa se présentait-elle comme prêtresse ?! Son intervention allait à l'encontre du plan. Une fois de plus, le clergé de Pharasma n'en faisait qu'à sa tête, attitude qui le confortait dans ses convictions. Il était beaucoup moins reconnaissant que Trestelame envers les pharasmines...

Aussi, et compte-tenu de ses fantastiques talents de négociateur, il préféra ne pas envenimer la situation par des mots trop durs ou déplacés. Il resta en retrait, laissant aux autres une chance d'intervenir plus diplomatiquement que lui. Il guettait tout de même les réactions de leur comité d'accueil, analysant leurs attitudes pour prévenir une attaque soudaine. Peut-être n'étaient-ils pas tous obtus ? Il tenta en même temps de repérer un individu peut-être plus ouvert que les autres. Ou plus... bizarre...

L'homme qui le menait fit un signe aux autres, et le petit groupe se dispersa en marmonnant, tout en gardant un oeil sur ces étrangers qui osaient entrer dans leur village. Le vieil homme ne se dérida pas vraiment, cependant.
« Mouais. On a pas vu la Dame des Tombes dans l'coin depuis des années. Pourquoi qu'vous vous réveillez maint'nant? On a pas b'soin d'vous, on s'est débrouillés seuls contre la Bête! »
Il les dévisageait tous d'un air soupçonneux.

Psychologie