De ce que Soléas en sait, ce collègue aurait la puissance pour prendre la place de leur capitaine-aventurière s'il le souhaitait. Or c'est moins un bureaucrate qu'un homme d'action. Ce qui est plus surprenant, c'est qu'il aurait l'oreille directe du Décemvirat, qui est le groupe de dix notables qui dirigent la Société des Eclaireurs. Il ne sait pas plus de détails à son sujet.

" Le mieux c'est que vous alliez voir par vous-même. J'aimerais bien rester plus longtemps discuter avec vous, mais j'avais oublié l'heure, j'ai encore beaucoup de choses à faire. "

Il s'en va précipitamment. Bertanos n'a pas besoin de creuser loin pour comprendre qu'il a posé la question de trop. Il doit apprendre à avancer dans la vie sans tout savoir. Le temps en plus passé à se préparer, c'est d'autant de gagné pour les adversaires qu'ils pourraient croiser sur la route. Il faut parfois faire confiance à son instinct.

Ils vont à sud toute car ils ont la tour à l'horizon, ils n'ont pas l'intention de faire de halte ni de détour. Le trajet est morne, ils voient une succession de boutiques et de clients à en mourir d'ennui, ils y feront un tour quand ils auront un budget plus conséquent. A leur grand soulagement, ils commencent à quitter les grandes artères pour s'engager dans des couloirs plus populaires, avec plus de calme, pour plus facilement profiter du paysage. Pour certains, il s'agit de tout simplement prendre l'air, pour d'autres de regarder de jolies jeunes femmes passer.

Ils sont arrachés à cette torpeur quand ils commencent à avoir la sensation d'être observés alors qu'ils sont dans une petite ruelle. Vous avez un round pour vous préparer Les rares passants s'écartent alors que cinq jeunes varisiennes s'approchent dans leur direction, l'attitude certainement pas charitable. Elles auraient pu arrêter n'importe qui, mais le groupe a l'impression qu'eux étaient plus particulièrement visés. Elles semblent appartenir à la branche des Sczarnis. Leur chef, qui est restée un peu en retrait, est plus finement habillée que les armures de cuir clouté de ses sous-fifres, la sienne doit être faite d'un matériel plus rare. Ils n'ont pas le temps de faire un examen plus fin car elle commence d'un ton impérieux :

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" Tiens tiens, voyez-vous ça, un groupe d'éclaireurs. Vous cherchez Natalya Vancaskerkin, n'est-ce pas ? "

Son ton leur fait penser qu'elle connait déjà la réponse, mais qu'elle veut voir comment ils vont réagir.

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" Ouais, mais non. C'est une affaire entre Sczarnis, des étrangers n'ont pas à s'en mêler, normalement. Mais si nous n'avons pas à nous salir les mains, je peux faire un compromis. Je dois quand même vous prévenir que ce n'est normalement pas ce qu'on propose d'habitude... et c'est parce que nous savons que vous avez bien traité avec le vieux Zogarthy. Et ne me faites pas l'insulte de discrètement vous équiper. Votre compagne, ou qui que ce soit, magicien, peut le faire sous nos yeux. "

Elle n'est pas complètement fermée à l'idée, mais il faudra être persuasif, l'intimidation ne marchera pas.

Jet de diplomatie

Bertanos pensait avoir reconnu le groupe Sczarnis des filles de la tour. Elles avaient surement entendu parler des questions que le groupe d'éclaireurs avaient posé, et cette rencontre avait probablement pour but de les dissuader de continuer leurs recherches.
Le prêtre en bon homme d'église commença par sourire, laissant Soléas tenter de transformer la situation tendue en une discussion pacifique. Ses arguments étaient bien trouvés et Bertanos préféra ne rien dire au début.
Puis il décida de s'avancer pour aider Soléas dans la discussion.
« Bien le bonjour Mesdames. Comme mon compagnon l'a très bien souligné je vois que nous avons un but commun, et il serait quand même dommage que nous ne puissions pas trouver un terrain d'entente. »

Bertanos sent qu'il n'améliore pas la situation. Il n'est pas assez convaincant lui-même pour aider Soléas. Il n'aggrave pas la situation, mais il s'en est fallu de peu. Leur hostilité aurait augmenté dans ce cas. Mais pour le moment, ils n'auront pas à s'en soucier. Le groupe de femmes, bien que franchement sur la défensive, accepte de les laisser passer.

" Je peux vous laisser le bénéfice du doute, à défaut de vous faire confiance. Comme nous vous l'avons dit, nous avons un souci avec Natalya, mais pas des moindres. Vous avez sans doute des questions, mais vous connaissez certains de nos concepts, le temps c'est de l'argent. "

Bertanos se rendant compte que ses mots n'avaient pas eu l'effet escompté, préféra ne plus rien dire et laisser Soléas gérer seul la négociation. Mais le prêtre restait attentif aux moindres gestes suspects de ce groupe de femmes.

" Vous gérez comme vous voulez. En ce qui me concerne, je n'attends que le moment où je pourrai enfin tourner la page. Je ne serais pas fâchée de rester sur des opérations moins dangereuses pendant un certain temps. "

Elle ne le dit pas, mais sa réaction est due au fait d'avoir été marquée par un mauvais souvenir lié à leur problème actuel.

Ils peuvent poser les questions qu'ils souhaitent, le problème n'est pas là. Mais il n'a pas de mal à imaginer que Natalya a dû les rosser au point où elles ont eu peur pour leur vie. Les autres femmes laissent Terisha exprimer le sentiment qui domine.

" Des blessés, oui ... pas qu'un peu. Physiquement on a pu se retaper. Mais psychologiquement, ça te marque quelqu'un à vie. Imaginez que le collègue est un peu comme vous et rien qu'avec l'objet, il devienne dix fois plus. Rien qu'à y repenser, ça me fait mal.

Elle résiste beaucoup mieux aux sorts qu'avant, a gagné en assurance alors qu'elle était très discrète avant, et peut se dédoubler alors qu'avant ça lui était impossible. "

Sa mémoire bloque. Il faudrait la rassurer pour qu'elle puisse se concentrer et éventuellement dire quelque chose de plus.