Méry releva son crayon, accueillant l'ex-mendiant momifié relooké en riche inquisiteur avec un sourire en coin, posant les mains à plat sur la table où il étalait son plan :
« Hey, v'là notre célèbre mécène... salut grand homme! Bah dis donc, t'as déjà découvert les vertus de la grasse matinée réservée aux rupins qu'ont pas besoin de gagner leur journée ? Désolé, hein ! Mais tu va découvrir -avec- qu'c'est comme ça qu'on se lève trop tard pour goûter l'excellentissime baklava des belles des Trois Anneaux !
Bon c'est pas le tout, revenons-en au plat principal, maintenant qu'on est tous là, alors... voilà "le royaume des araignées" :
Le premier bateau en arrivant, sur la droite, c'est les chambres d'hôtes, le deuxième à droite c'est le "Temple des nuages" aux charmantes hôtesses œuvrant aux heures de coucher plus ou moins agité selon les besoins de la clientèle masculine.
De l'autre côté, le premier navire sur la gauche quand on descend le quai, c'est "Les Tigres jumeaux" le tripot : dés, cartes, et duels ; vachement fréquenté le soir -j'ai pas visité aux heures creuses- c'est facile de s'y glisser discrétos' entre les videurs et les joueurs, tous les deux en nombre ! La deuxième barquasse c'est "Le corridor du Dragon" une fumerie, aussi animée que le quartier gris, y'a qu'des camés qui viennent prendre un dernier frisson avec ce qu'il leur reste de vie. Un petit vieux rabougri suffit à surveiller ces zombies.
Le bateau central, c'est l'Anguille. C'est le palais du Roi des araignées... et il paraît que la cale est pleine de ces velues à huit pattes modèle king size que le seigneur des lieux utilise pour se débarrasser des indésirables. Ce fameux mister B. se fait royalement appeler ainsi parce qu'il "contrôlerait" ces bestioles... d'ailleurs il en a toujours une sur lui (de taille raisonnable)... ça doit être une espèce de magillon "rénégat" avec un familier vermine, ou quelque chose comme ça...  »

Modifié par un utilisateur lundi 13 février 2017 00:37:41(UTC)  | Raison: Non indiquée

Ninaerthil reconnut que le halfelin, aussi irritant soit-il, faisait du bon travail. Il batifolait dans ce milieu comme un poisson dans l'eau. Il se pencha sur la carte et afficha une moue approbatrice. "Remarquable." Se tournant vers Gracchius : "Mais je ne pense pas qu'il faille se séparer. Car je gage que si ce couple de négociateurs avec leur garde demande audience, aucune autre personne étrangère n'y participera. Les "autres clients" devront sagement attendre hors de... euh... l'Anguille, c'est bien cela ?" fit-il en attendant une approbation de Méry. Puis il se redressa. "Je pense donc qu'il est préférable que nous y allions tous ensemble. Qu'en pensez-vous ?"

Modifié par un utilisateur dimanche 12 février 2017 23:44:14(UTC)  | Raison: Non indiquée

Rakyel sourit à la remarque de Méry, amusé par son ton toujours aussi jovial.
Si seulement c'était le sommeil qui m'avait retardé...
Et lorsque chacun évoqua son point de vue, penché sur la carte admirablement décrite par le halfling éclaireur, l'oracle releva le nez, réfléchit un moment et questionna :
« Soit, nous resterions ensemble. Mais comment estimez-vous possible que nous arrivions à nous entretenir avec Barvasi?
Parce qu'en admettant qu'il accorde audience, ce qui est loin d'être une certitude, il faudra un prétexte valable pour débarquer aussi nombreux dans son antre sans éveiller ses soupçons! Sans compter que vous pensez Méry capable de discuter avec cet homme : je ne pense pas qu'il soit du genre à accorder toute son attention et son écoute à quelqu'un sans une bonne raison. Reste à savoir quelle sera cette raison! »

A sa surprise, Sagacius s'éclipsa : lui qui d'habitude était adepte des plans retords, là il abandonnait la partie alors même que la milice investiguait sur son terrain de jeu...
Mais il reprit tout de même :
« Donc comme je l'évoquais, il faut trouver une raison valable de se présenter devant ce mafieux, en prenant en considération la taille de notre groupe, pour le forcer à nous écouter.
Deux choix peuvent s'offrir à nous :
- Soit aller droit au but en lui proposant de l'argent contre les documents, mais ça serait dévoiler notre jeu en révélant qu'on connait la nature et l'origine des papiers... et accepter de payer sans même connaître la somme qu'il accorde à ces informations... sachant que si on y accorde trop d'importance, il sera plus dur en affaire et réalisera que le trône veut mettre la main dessus à tout prix. Il pourrait alors faire monter les enchères sans que nous ne puissions suivre...
- Ou alors jouer de stratagème en se faisant passer pour un groupe indépendant, ce que nous sommes justement, et c'est pour ça que la Reine a fait appel à la milice de Zellara plutôt qu'un contingent sous sa coupe, en proposant d'échanger quelque chose qui aurait de la valeur à ses yeux contre un troc de valeur équivalente, en l'occurrence les documents. »

Rakyel marqua une pause, le temps de recevoir son plat.
Il chercha des yeux Sagacius dans l'espoir de le voir revenir à l'intérieur mais visiblement, le nobliau ne semblait pas à son aise aujourd'hui.
Du coup, il termina par une proposition :
« Que diriez-vous de proposer à Barvasi de lui donner une information qui protégerait son commerce en échange des papiers de la Reine? Il doit forcément avoir des ennemis et tenter de jouer la carte de la protection contre un paiement raisonnable pourrait suffire à le faire plier : le doute d'être mis en défaut dans son activité et perdre son statut doit valoir plus que tout pour ce genre d'homme, non? »

Grahius insiste sur son plan.

«  Nous pourrions dire que nous avons été engagés par le Noble victime du chantage pour faire disparaitre les preuves et lui demander combien il demande pour nous les donner.
Si nous les récupérons pour une somme raisonnable, la mission sera accomplie sans combattre et nous aurons satisfait sa Gracieuse Majesté.
S'il refuse, nous aurons pu repérer les lieux et prévoir un plan pour lui voler les documents.
Mais, ce qui est embêtant c'est d'arriver à six pour discuter, surtout que certains d'entre nous auront du mal à passer pour des diplomates.  »

Réfléchissant

«  Sans vouloir aller trop loin, Sorina pourrait aussi user de son charme naturel pour le mettre dans de bonnes dispositions pour négocier.  »

« Méry est dans le vrai : Barvasi n'est pas un enfant de cœur! Il n'est pas non plus un commerçant qui marchande naïvement. » avait souligné l'oracle de sa voix des plus graves.
Et, relevant le menton, il nota, après que le petit homme ait sauté de sa chaise pour allumer sa pipe :
« Des ennuis avec les Bleus?!
Voilà peut-être notre opportunité!
En supposant que Barvasi ait eu quelques idées d'indépendance face à la société Céruléenne, pourquoi ne ferions-nous pas d'une pierre deux coups? »

Regardant alternativement les protagonistes, il s'attarda sur Gracchius :
« La Maréchale vous a parlé de cet homme? Je suppose qu'elle ne le porte pas dans son cœur... »
Puis joignant ses mains sur la table, après avoir fini son assiette :
« Voilà mon idée : nous nous faisons passer pour un groupe qui veut également entrer dans la dance, en s'affranchissant de la guilde de voleurs.
Nous engageons la conversation avec Barvasi pour lui proposer un partenariat excluant la société Céruléenne : nous lui fournissons régulièrement... disons... de la drogue ou bien des produits de contrebande, ou encore des esclaves de plaisir - à nous de choisir ce qui serait le plus crédible - moyennant un paiement honnête des livraisons.
...
Pour notre couverture, rien de plus simple : se faire passer pour des contrebandiers extérieurs à Korvosa doit être simple vu les temps qui courent... On prétextera l'opportunité de se faire un nouveau client dans une cité où les Bleus nous empêchaient de mettre les pieds! Et à la première occasion, le plus tôt sera le mieux, on s'arrange pour le prendre la main dans le sac lors d'une livraison organisée à l'extérieur de son cercle de confort, là où la garde sera ravie de se trouver - complètement par hasard bien évidemment! »

Rakyel décroisa les mains et tapota l'index sur la table, comme pour soulever un problème épineux :
« Reste à déterminer comment lui faire parler des documents et surtout de l'inciter à nous les transmettre, qu'il s'agisse via un paiement, un troc ou un échange de service... Raconter qu'on a des informations sur les Céruléens, qu'on sait qu'il est dans leur viseur et qu'on veut lui apporter de l'aide moyennant récompense ne sera peut-être pas adéquat pour parvenir aux documents... mon idée a besoin d'être étoffée mais ce début permettrait de l'approcher, justifiant notre nombre, sans générer d'effluves de sang, du moins pas dans l'immédiat. Et comme disait Gracchius, ça aura au moins le mérite d'approfondir notre reconnaissance des lieux. Qu'en pensez-vous? »

Les méninges du fossoyeur avaient rarement autant travaillé mais depuis ces derniers jours, il se découvrait une sorte de vocation, certes un peu retorde, l'obligeant à prendre activement part à la défense de sa cité.
Peut-être est-ce la rencontre avec la Reine qui me motive autant? se surprit-il à penser!
En tout cas, la milice devrait trouver un moyen et le plus tôt serait le mieux pour éviter que Barvasi n'utilise à mauvaise fin tous ces documents royaux!

Pendant ce temps-là, l'enquêteur ruminait dans sa barbe à l'extérieur. « Mais qu'est-ce qu'ils foutent ? À tous les coups,ils sont encore en train d'échauder des plans sur Triaxus... Si dans 5 minutes, ils ne sont pas sortis, tant pis pour eux ; j'irai faire un repérage tout seul ! »

Totalement inconscient des idées proposées par les uns et les autres, Sagacius commençait à s'impatienter. Et dans un petit coin de sa tête, sa conscience se demandait pourquoi lui-même était si nerveux aujourd'hui. Les enjeux de sa famille ne l'avaient jamais ainsi travaillé.

Grachius écoute tous ses associés. Chacun à ses arguments et tous sont défendables, mais il va falloir se fixer pour de bon sur une démarche et prévoir aussi des alternatives.

«  Une chose qu'il ne faut pas oublier, c'est que le dénommé Barvasi commence à se prendre pour le roi du monde.
Cela doit normalement de rendre "illogique" si on le flatte, qu'on lui fait valoir sa haute réputation, la place de plus en plus importante qu'il prend dans la ville, la crainte qu'il suscite auprès de ses concurrents et même des autorités.  »

Souriant à la belle sorcière

«  Et c'est pourquoi, un visage aimable comme le tien pourrait lui faire baisser sa garde.  »

Grachius sourit au petit homme.

«  Je n'ai pas bien compris ce que tu voulais dire, mais je suis d'accord.  »

Mercantdi 16 Pharast - Impasse de l'Anguille, début d'après midi

Une fois leur plan plus ou moins arrêté, ils prirent la direction de l'Impasse de l'Anguille. La marche à suivre était toujours sujette à discussion, mais ils avaient la base de leur expédition, et il ne servait à rien de délayer plus longtemps, d'autant qu'ils auraient largement le temps de discuter des détails en route étant donné qu'il fallait presque une demi-heure pour se rendre jusqu'à l'Impasse de l'Anguille. Sagacius, qui avait pris de l'avance, sans doute impatient d'en finir, fut en fait rattrappé quelques instants plus tard par le reste du groupe. Ils avaient pris leur décision simultanément, peut être un signe que les grands esprits se rencontraient, à moins que la muzicà ait quelque chose à y voir...ou qu'il ne s'agisse d'une simple coincidence.

Les rues de la Pointe Nord étaient plutôt calmes, et à cette heure de la journée, cela offrait un contraste saisissant avec l'activité qui les prenaient d'ordinaire alors que les marchés du Mercantdit battaient d'ordinaire leur plein. Mais en ce mois de Pharast, les conséquences de la mort du roi Eodred II se faisaient encore lourdement sentir. Ils croisèrent un trio de Chevaliers Infernaux qui leurs adressèrent des regards perçants à travers les fentes de leur heaume. Les autres passants, qu'ils soient marchands, artisans ou pickpockets, gardaient leurs pensées pour eux, mais on sentait dans les regards lourds, les expressions tendues, et le pas pressé, que les choses étaient encore loin d'aller mieux.

Si Pointe Nord était envahie de tension, la Vieille Korvosa était une poudrière. Au niveau de l'unique pont de pierre, dressé parmi les passerelles de bois de Pied-du-pont, ils apercurent une patrouille de la garde en pleine discussion avec un groupe d'ouvriers et de dockers. Ces derniers ne semblaient pas sur le point d'en venir aux mains avec la garde, mais les soldats étaient tout de même nerveux, et leurs interlocuteurs clairement énervés. Leur chemin croisa également celui d'une patrouille de Chevaliers Infernaux de la Pointe qui escortaient des prisonniers, fers aux poignets...et à en juger par les marques sur leurs visages, l'arrestation avait été violentes. Les Chevaliers, visages anonymes derrière leurs casques, trainaient à demi l'un de leurs prisonniers, une naine, qui avait perdu connaissance. Le seul avantage de cette situation était qu'aucun gang n'osait se montrer tant que le soleil était levé...




L'Impasse de l'Anguille, en revanche, était bien plus tranquille. A cette heure, seuls les joueurs les plus enthousiastes et les junkies sévèrement accros venaient chercher l'adrénaline du jeu ou le réconfort de leur drogue de prédilection. Les amateurs de compagnie étaient un peu plus nombreux, préférant ne pas traîner trop tard, mais dans l'ensemble, l'allée et le ponton n'étaient pas très fréquentés.

Les Tigres Jumeaux étaient tranquilles, bien loin de l'animation à laquelle Méry avait pu assister lors de son repérage. Il en allait de même pour le Souffle du Dragon, mais il était difficile de juger de l'activité de la fumerie depuis l'extérieur. En revanche, le pont de la Maison des Nuages était toujours occupés par une dizaine de personnes, jeunes hommes et femmes à l'apparence sensuelle et aux atours aguicheurs, qui jetaient des oeillades aux passants. De temps à autre, l'un ou l'une d'entre eux discutait un instant avec un client avant de les accompagner à l'intérieur.
Le Faucon Doré, qui servait plus ou moins de lieu de repos pour les amateurs de frisson, de jeu et de chair qui fréquentaient l'Impasse, était quand à lui carrément désert.
En résumé, ils n'étaient pas seuls, mais il serait bien difficile de se dissimuler dans la foule.

Quand au vaisseau amarré à l'autre bout de l'Impasse, l'Anguille elle même, où se trouvait le fameux "Roi des Araignées", Devargo Barvasi, il y avait toujours quelques gangsters et autres voyous qui trainaient sur le pont, comme attirés par l'aura et l'influence de Barvasi. Ceux là jouaient aux cartes, discutaient en buvant un coup ou dormaient simplement dans quelques uns des hamacs accrochés dans la mâture, mais ils ne paraissaient pas bien dangereux, tout juste de vulgaires truands.
Enfin, il y avait tout de même quelques sentinelles. Deux flanquaient la grande porte marquée d'un symbole d'araignée qui menait à la dunette arrière de l'Anguille, et quatre autres, par duo, arpentaient le ponton et les ponts des autres navires, vigilants, dans leurs armures de cuir clouté, matraque à la ceinture.

Ninaerthil était plutôt satisfait. Méry avait décidé d'une tactique similaire dans ses grandes lignes à ce que lui même avait proposé. Et cela lui convenait parfaitement car c'était la plus aisée à assimiler. Son esprit et son manque de sociabilité l'avaient rendu nerveux à l'idée de devoir se plier à un jeu de rôle au scénario alambiqué. Il était certain qu'il aurait gaffé tôt ou tard. Présentement, la solution finalement adoptée par le halfelin avait le mérite d'être simple.

La situation ne s'était pas améliorée en ville et la tension ne semblait pas vouloir s'atténuer. L'attitude des chevaliers infernaux ne facilitait pas les choses. Le semi-elfe aurait voulu aider la naine, mais il s'en savait incapable. Et sa langue n'ayant pas l'agilité de celle de Méry, il n'aurait pu convaincre les infernaux de le laisser relever la pauvre femme. Les traits de son visage s'assombrirent. Ils se fermèrent complètement lorsqu'il vit le spectacle navrant de l'impasse de l'anguille. Ce lieu de débauche était un des symboles de la misère qui régnait sur Korvosa. Quelque part, même les soudards qui travaillaient pour Barvasi en étaient les victimes.
L'image des 5 navires attachés les uns aux autres lui donnait l'impression d'un immense radeau sur lequel essayaient de survivre des naufragés de la vie.

Ninaerthil se plaça dans le dos de Méry indiquant clairement qu'il comptait lui servir d'escorte pour les négociations à venir.

Modifié par un utilisateur dimanche 19 février 2017 12:01:55(UTC)  | Raison: Non indiquée