Apparemment Sébrysse n'était pas revenu seule, constata Tiriji en relevant la tête de son petit déjeuner, puisque avec elle se tenait Éphrem - qu'elle avait laissé à son poste d'observation en haut de l'escalier - et un jeune humain pas épais dont le regard qu'il porta sur le contenu de la table lui laissa peu de doute. « Votre ami me semble pouvoir avaler deux ou trois petites choses. Le laissez pas comme ça, il doit bien rester de quoi grignoter un peu » dit elle en jetant un regard interrogateur d'une discrétion aussi grande que la légendaire sagesse gnome à la prêtresse de l'aube.

Le jeune homme s'avança jusqu'à la table et prit place. Il tendit la main vers la nourriture mais, avant qu'il ne puisse s'en saisir, Sébrysse intervint, l'interrompant à la fois par ses paroles et par l'incantation d'une prière. L'espace d'un instant, la prêtresse vit comme un voile de terreur passer dans les yeux du jeune homme.

Tiriji, qui était assise en face, et Éphrem, qui se tenait pour le moment debout derrière lui, se rendirent également compte du regard anxieux que le jeune homme lança en direction de la porte d'entrée... qui se trouvait également être la seule sortie de la salle commune, comme s'il avait tout à coup été pris par une envie irrésistible de s'enfuir mais qu'il s'était également rendu compte qu'avec la présence d'Éphrem, celui lui était désormais impossible.

Il déglutit et prononça sur un ton hésitant « Je… je m'appelle… mon nom est Tommen. Je… je n'ai pas vraiment d'autre nom… ni de famille… » Il haussa les épaules et ajouta « J'me débrouille tout seul. » tout en reprenant petit à petit ses esprits.

Il jeta un coup d'œil dans la direction de la nourriture et avala une seconde fois sa salive, cette fois-ci un peu plus bruyamment que la première fois, tant et si bien qu'il se mit à tousser deux-trois fois. Son regard se déplaçait nerveusement entre Tiriji et Sébrysse et, de temps en temps, il tournait légèrement la tête, comme pour apercevoir Éphrem du coin de l'oeil. Il secoua la tête négativement en disant « Je n'suis là à cause de personne. Je n'suis pas envoyé par qui que ce soit, j'vous l'jure. J'ai pas d'plan précis, pas d'intention mauvaise non plus... »

Face à lui, Sébrysse parvint à garder un visage plutôt neutre, à la fois compatissant et sévère. La prêtresse se tenait immobile et fixait le jeune homme qui s'était mis à parler, à l'affût du moindre signe de mensonge… aucun ne s'était manifesté jusqu'ici. Un silence s'installa autour de la table ; les mouvements nerveux du jeune homme contrastaient avec la pause stoïque de Sébrysse, qui attendait visiblement qu'il répondre à toutes ses questions.

Au bout d'un moment, l'atmosphère fut telle qu'on eut pu croire que le jeune homme allait prendre ses jambes à son cou et fuir le Club. Il se retourna une x-ième fois vers la porte d'entrée et posa la même sur la table, comme pour se propulser en arrière et, peut-être, gagner quelques pas d'avance dans sa fuite. Puis il poussa un soupir et ramena sa main vers ses jambes. Son regard se promena sur la nourriture et sur la gnome occupée à terminer son déjeuner…

Et il reprit la parole. « Je ne sais pas trop pourquoi je suis là. Vous z'allez sans doute pas m'croire mais… j'ai laissé mes pas me guider au hasard... je… devais quitter l'endroit où je me suis réveillé hier, et je ne pouvais pas retourner là où je dors d'habitude… alors j'ai marché au petit bonheur la chance et... et j'suis arrivé ici. »

Une expression légèrement plus relaxée s'installa sur son visage et il promena cette fois-ci son regard sur l'intérieur de la salle commune du Club ; prenant tout son temps pour observer les moindres recoins de la grande salle où Briga servait à boire et à manger, du comptoir, de la partie nord qui servait de petite échoppe, et des escaliers qui menaient vers le premier étage. Tommen secoua la tête négativement et fit une légère grimace, comme une moue d'exaspération. « Pas ici, pas cette salle... mais... je n'sais pas... de l'extérieur, j'ai eu l'impression qu'il y avait quelque chose de familier dans ce bâtiment. Pas ici... mais plutôt les toits. Et les étages. Mais c'est bizarre... c'est comme si j'me souv'nais sans vraiment m'souv'nir. Comme si j'étais déjà venu ici en rêve, ou quelque chose du genre. Comme si j'étais déjà venu ici... »

Tommen indiqua qu'il se souvenait d'une salle, avec un lit, une armoire en bois à double battant, une petite table en bois avec un écritoire en cuir... Il décrivit l'endroit en faisant divers gestes pour indiquer l'emplacement des différents meubles... et les trois ex-naufragés se rendirent rapidement compte qu'il était en train de décrire quasiment à la perfection l'arrangement standard des chambres du Club, celles qu'on trouvait à l'étage.

On pouvait lire dans le regard de Tommen que toute cette histoire le laissait sans doute aussi perplexe que les trois ex-naufragés qui l'écoutaient.

Modifié par un modérateur mercredi 4 octobre 2017 08:38:32(UTC)  | Raison: Non indiquée

Comme le sentit Tiriji, le charme venait sans doute d'être rompu. Cela rappelait à Sébrysse que pour le moment, une seule faction à la recherche de Saventh-Yi n'avait pas répondu à l'appel de Sasha : les hommes serpents. Ils ne devaient cependant pas être loin compte tenu du battage du Consortium et de l'annonce quasi publique de leur prochaine exploration.

Il était donc normal que les hommes serpents les aient placés sous surveillance et qu'ils utilisent, comme ils l'avaient fait sur le Jénivère d'autres êtres placés sous leur coupe par la magie ou des charmes.

« Je crains en effet que ce jeune homme a été ensorcelé. C'est aussi sans doute lui qui a tenté de s'introduire dans la chambre pour nous voler il y a quelques jours. Il est probable, jeune Tommen, que tu as été placé sous la domination d'une force magique quelconque. Je crois que c'est désormais terminé mais il faudra sans doute nous en assurer.

Tu peux commencer à manger. »

Elle fit signe à Ephrem de s'asseoir et héla Briga pour qu'elle puisse venir écouter ce qui se dirait par la suite à la table.

« De quoi te souviens tu des jours qui ont précédé ? Où t'es tu réveillé et où dormais tu auparavant ? Que s'est t'il passé ? »

Tommen écouta d'une oreille les conclusions de Tiriji et de Sébrysse tout en lorgnant la nourriture qui se trouvait sur la table. Dès que la prêtresse lui indiqua qu'il pouvait se sustenter, il se jeta sur un morceau de fromage et une miche de pain et se mit à mordre une copieuse bouchée dans chacun d'eux. Les joues gonflées par la nourriture, il se mit à mâcher bruyamment et rapidement tout en partageant son attention entre les discussions qui se poursuivaient, l'arrivée de Briga qui le regardait d'un air à la fois sévère et étonné, et les autres victimes potentielles de sa faim sur lesquelles il allait pouvoir jeter son dévolu dès que ses mains et sa bouche seraient libres.

Entre deux bouchées, il lança quelques mots qui étaient rendus difficiles à comprendre par la nourriture qu'il s'efforçait d'ingurgiter en même temps que de parler. Les auditeurs les plus attentifs purent toutefois comprendre qu'il s'était réveillé dans une sorte de cave ou de cellier, dont la porte était verrouillée ; qu'il n'avait aucune idée de l'endroit où il était, comme s'il avait fait une sorte de long rêve ou de cauchemar et qu'il venait d'en émerger ; que dans ses cauchemars, il y avait l'image d'un individu dont toute la partie droite du visage était blessée comme par un feu ou de bien vilaines cicatrices ; qu'il avait profiter d'un soupirail pour quitter l'endroit et qu'il était arrivé ici.



Hogo jetait de temps en temps quelques coups d'oeil rapides par-dessus son épaule pour s'assurer qu'Ellawa n'était pas trop loin, tout en poursuivant son chemin à pas de course à travers les rues d'Éléder, bousculant au passage certains locaux aux pas trop lents ou ayant trop tardé à se mettre hors de son chemin. Finalement, il déboucha dans la rue qui donnait sur le Club. Comme il le faisait autrefois lors de courses à travers les Plaines cendrées, il régulait machinalement sa respiration sur le rythme de ses pas, pour contraindre son corps et son coeur à suivre la cadence qu'il leur imposait.

Un peu plus loin, Ellawa, sans doute moins habituée à de longues courses, sentait l'air brûler ses poumons quasiment à chaque inspiration. Mais ce qu'elle manquait peut-être en entraînement physique, elle le compensait en volonté. Elle tint bon et parvint à rester au moins à vue de Hogo pendant la majorité du trajet. Ceci dit, d'un certain côté, elle était plutôt contente de voir la rue familière et de sentir arriver la fin de cette épreuve.

Ils avaient quitté Otesha dès que cette dernière avait délivré ses alarmantes informations, sans prendre la peine de demander plus de détails. Si la Mwangie avait dit vrai, l'entrepôt, et donc leur expédition, était peut-être menacée. Et il en allait de même pour les efforts qu'ils avaient mis au service de l'amélioration du statut des Mwangis à Éléder. Toutes ces considérations se bousculaient dans la tête d'Ellawa, à côté des efforts physiques intenses qu'elle fournissait. C'était sans doute là la cause des étranges tintements quasi fantomatiques qu'elle percevait…



Tommen releva la tête un instant, comme aux aguets, interrompit sa mastication et se tourna vers la porte d'entrée. Son étrange comportement incita ceux qui discutaient autour de lui à faire de même. Il y avait comme un son répétitif provenant du lointain, un bruit aigu mais partiellement étouffé qui revenait à intervalle rapide.

Comme pour permettre à ceux qui se trouvaient dans la salle commune du Club de mieux percevoir le son qui provenait de l'extérieur, la porte s'ouvrit... sur un Hogo au souffle court. Derrière lui, on pouvait deviner la silhouette d'Ellawa qui pénétrait dans la cour intérieure, une poignée de mètres derrière lui.

Ce fut Briga qui parla en premier, reconnaissant le son de cloche pour ce qu'il était. Elle grogna puis lança « Y'a le feu quelque part. »

« Si j'en crois les cloches, il va nous falloir courir... » annonça Tiriji en se levant, « Vous êtes plus rapide que moi. Ne m'attendez pas, je connais le chemin. »

Sébrysse avait écouté les déclarations de Tommen qui devait sans doute n'avoir pas mangé depuis plusieurs jours. Le contrôle exercé sur sa personne avait sans doute duré un bon moment, sans même lui permettre de se reposer. Sa "fuite" avait probablement été délibérée pour lui donner l'illusion qu'il était toujours maître de ses actes. C'était un acte maléfique sans aucun doute dont il faudrait à l'avenir se méfier.

Elle orienta ses questions adressées à Tommen vers la description de l'endroit d'où il avait émergé et de la distance à laquelle elle pouvait se trouver du Club, tout en interrogeant la tenancière qui connaissait la ville depuis longtemps.

« Briga, as-tu une idée quant à l'existence d'un lieu tel que pourrait le décrire notre ami Tommen et surtout d'un individu qui aurait été particulièrement défiguré ? »

Cependant, sans même avoir le temps d'obtenir de réponse, entendant les tintements lointains, Briga prêtait déjà attention à d'autres bruits et sa réponse fût fort différente. Alarmés, Hogo et Ellawa finirent de mettre un terme à l'atmosphère redevenue paisible.

Malheureusement, si Sébrysse avait pris son cimeterre pour sortir en ville, elle était sortie sans son armure, simplement avec ses vêtements sacerdotaux pour célébrer la Lumière du matin. Elle n'avait pas imaginé qu'ils auraient à se battre en ville placée sous la protection des autorités du Sargave et d'une armée omniprésente. Encore moins imaginé qu'on puisse s'en prendre à l'entrepôt bien gardé.

« Allez-y, partez devant, je vous rejoins dès que possible. »

Elle se précipita aussitôt vers sa chambre, hésita à enfiler son armure mais se borna simplement à récupérer son bouclier avant de redescendre et de se précipiter vers l'entrepôt. Sarenrae m'accordera sa protection

Briga grogna et se tourna vers Éphrem. « J'peux garder un coup d'oeil sur lui si vous voulez. » répondit-elle en faisant un geste du menton dans la direction du jeune homme.

Une sorte de sourire où semblaient se mêler compassion et dérision marra le visage de la demi-orque. Elle ajouta « Que'qu'chose me dit qu'ça va pas être bien difficile. » en fixant Tommen du regard.

Quand Éphrem se tourna vers le jeune homme, il se rendit que compte que ce dernier, déjà bien repu, semblait avoir de grandes difficultés à garder la tête droite et les yeux ouverts. Sauf s'il s'agissait d'un maître acteur, il y avait fort à parier qu'il ne sombre rapidement dans un sommeil des plus profonds, voire même qu'il s'endorme la tête sur la table ou dans les plats...

Ellawa regarda Hogo repartir en sens inverse et choisit d'attendre quelques secondes pour reprendre sa respiration avant de continuer à le suivre. Elle regarda passer Tiriji qui, malgré sa petite stature, faisait son possible pour rester dans la course.

À l'intérieur du Club, Sébrysse monta quatre à quatre les escaliers de bois qui permettaient d'accéder à l'étage et de rejoindre sa chambre. Au rez, Éphrem échangea quelques mots avec Briga puis se décida lui aussi à partir.

Quand Sébrysse eut récupéré son équipement, elle redescendit vers la salle commune et se rendit compte d'un coup d'oeil que les autres étaient déjà partis. Tommen avait désormais placé ses deux bras sur la table du déjeuner et sa tête se mettait à pencher dangereusement vers l'avant, sous le regard attentif de Briga.

La prêtresse quitta le Club et avança à pas rapide vers la rue puis prit la direction de l'entrepôt. Une bonne centaine de mètres plus loin, elle parvint à rattraper Éphrem qui l'avait apparemment attendue sur le côté de la route.



Hogo était en tête et, au fil des voyages de ces derniers jours, même s'il était loin de connaître les rues d'Éléder comme sa poche, il parvenait assez aisément à s'y retrouver. Il emprunta machinalement la direction de l'entrepôt, et se rendit compte que celle-ci correspondait avec l'origine des sons de cloche qui tintaient un peu partout dans la ville.

Au début, le tintement avait eu un effet plutôt bénéfique : les badauds s'étaient arrêtés et regroupés par deux ou trois pour discuter de la raison de l'alarme et de l'endroit touché par l'incendie. Tout en passant au pas de course dans les rues qui, de ce fait, étaient plutôt dégagées, Hogo entendait quelques mentions du "quartier du port militaire". L'incendie semblait bien être situé dans cette partie de la ville.

Une poignée de minutes plus tard, Hogo tourna pour rentrer dans la rue qui descendait sur plusieurs centaines centaines de mètres et se terminait près des entrepôts. Du premier coup d'oeil, il aperçut une foule qui fonçait vers lui, s'éloignant apparemment de l'incendie. Vu sa stature, il n'avait guère peur d'être renversé par la foule qui allait en contre-sens, mais cela n'allait pas faciliter sa progression.

Plusieurs choix possibles : Intimidation / Diplomatie pour se frayer un passage dans la foule en intimidant/convainquant, Diplomatie pour tenter d'en apprendre plus, Acrobaties / Force pour continuer à avancer malgré la foule, Connaissances (local) pour trouver un moyen de contourner la foule sans perdre trop de temps, ou autre chose...

Hogo prit rapidement la mesure de la situation. La foule qui venait vers lui semblait effrayée, réellement effrayée, sans doute bien plus que par un simple incendie... et il paraissait difficile de pouvoir raisonner avec des gens terrifiés. Le Shoanti prit quelques fractions de secondes pour observer les alentours. À gauche, l'échoppe d'un tisserand qui semblait se spécialiser dans les retouches d'armures et la confection de pièces de grande taille comme les voiles de navire et les toiles recouvrant les chariots. À droite, un bâtiment qui devait abriter des bureaux ou des archives et dont le devanture était ornée d'une enseigne représentant un navire à trois voiles voguant sur les flots... sans doute une des nombreuses compagnies marchandes maritimes qui s'étaient établies à Éléder.

Plutôt que de rester au milieu de la rue, Hogo bifurqua sur sa gauche. Prenant son élan, il sauta sur les gros ballots de toile ficelés qui avaient été déposés devant l'atelier du tisserand. Ainsi placé en hauteur, il pouvait laisser passer la foule sans encombre tout en prenant la mesure de la situation.



À quelques dizaines de mètres de là, Ellawa et Tiriji arrivaient en haut de la rue descendant vers les entrepôts. La chamane avait tenté de suivre Hogo pour éviter de se perdre en ville mais, comprenant qu'il était sans doute plus important de se rendre sur place aussi vite que possible, elle s'était résolue à emboîter le pas à Tiriji... un pas un peu plus lent qui lui convenait tout aussi bien.

La gnome et la Mwangie vire débouler sur la rue un large groupe de gens qui semblaient fuir quelque chose ou quelqu'un. Comme par instinct, Ellawa leva les yeux vers le ciel, cherchant du regard l'ombre rassurante de Simurgh. Lui avait certainement une vue d'ensemble de la situation, mais était incapable de la communiquer précisément avec Ellawa.

Test de Perception pour les Hogo, Ellawa et Tiriji - pour simplifier les choses, on va dire qu'il y a grosso modo 3 rounds d'écart entre les 3 groupes : Hogo / Ellawa et Tiriji / Sébrysse et Éphrem

Ayant pris de la hauteur sur des ballots de toile, Hogo s'arrêta quelques instants pour observer la situation. Il savait qu'il n'avait quasiment plus de chance d'attraper les coupables de ce méfait mais peut-être pourrait-il au moins trouver un chemin efficace pour arriver rapidement sur les lieux ?