Uktar ne posa qu'une question, ses collègues se débrouillant fort assez bien pour ne pas en rajouter sur les pistes qu'ils avaient lancé. Quelque chose le turlupinais, et elle, savait peut-être ce qu'il en ét ait.
«  Madame, je profite de votre présence et de votre connaissance du docteur, est ce qu'il était pratiquant de lutte, ou de combat? Peut-être d'armes même? Un passé militaire? »

« Un homme intelligent et sage, votre ami. » Il sourit à la jeune femme, pour la rassurer. « Ce qui n'est pas forcément une bonne nouvelle pour nous : nous risquons d'avoir quelques soucis pour le retrouver ! Mais qui sait, peut-être aura-t-il justement l'idée de venir se réfugier au Constabulaire, après la visite de ce "policier" ? Je pense en tout cas que c'est le lieu le plus sûr pour lui, en ce moment. Si il vous contacte, je vous enjoins à le lui répéter. »

Il croisa les bras derrière le dos. Il n'avait pour sa part rien à ajouter. Il était cependant tout récent dans la profession et laissa un ancien conclure l'interrogatoire. Il était en outre assez tard. Il brûlait d'envie de se rendre sur une hauteur pour manger un morceau, puis profiter du cigare de son ami nain en contemplant les étoiles. Hélas, le groupe voudrait sans doute faire un debriefing avant. Non pas qu'il n'appréciait pas ses compagnons. Mais l'appel des étoiles... Heureusement, il avait Liz. Elle était une vraie fenêtre sur la voûte stellaire, à toute heure du jour et de la nuit.

Uktar s'avança vers la dame et lui serra la main maladroitement.
«  Merci Madame Kindleton, merci pour votre aide. » Et faites attention en rentrant.

Dès qu'il fut partie, il ajouta.
«  Ça explique qu'il ait pu mettre en fuite son agresseur. Enfin en partie. J'ai du mal à faire le lien entre le docteur et Nilasa mais se pourrait il qu'il n'y ait d'autre lien que le hasard du lieu? Un peu comme un essai désespéré qu'elle ne soit pas morte pour rien en volant les documents, un peu comme un mourant donnant sa dernière volonté au témoin de sa mort? Tu as peut-être eu des infos de ton côté Vence pour faire le lien entre eux? »

Une fois que Lynn Kindleton fut partie, Vence soupira. « OK Mikal, je comprends. On n'aura pas bossé longtemps ensemble, hein ? Enfin bon, on en aura peut-être de nouveau l'occasion plus tard. Tu veux rester avec nous pour débriefer ? »

Il attendit sa réponse, puis reprit. « J'ai trouvé des pistes éparses, qu'il nous faudra explorer demain.

Nilasa est bien connue des services de police depuis toute jeune, pour vol et abus de confiance, ce qui correspond plutôt bien au profil de la victime dans l'affaire qui nous préoccupe. J'ai d'ailleurs vérifié sa description physique, et elle correspond à la victime, ce qui me laisse supposer que la victime est bel et bien la dénommée Nilasa.

Ses délits ont été effacés suite à une circulaire du gouverneur pour "délit sans gravité commis par un mineur". Mais ça ne l'a pas guérie pour autant. Sa dernière arrestation date d'il y a une semaine, pour "soutien à des activités criminelles", avec la complicité de deux délinquants avérés - et arrêtés - Ford Sorghum et Travis Starter. Ils avaient tenté un raid sur un repaire de criminels suspecté d'être au cœur d'opérations de trafic de drogue et de contrebande.

Ses deux complices sont au Réformatoire Estuarien pour violation des termes de leur libération sur parole. Celui qui a payé la libération sur parole de Nilasa s'appelle Haward Sechim. Il possède une usine d'acides au Lac des Pairs, et il y vit d'ailleurs, mais ce n'est pas lui qui a payé la liberté sur parole des deux autres. Il semblerait qu'il n'y ait rien à reprocher à ce monsieur Sechim : il paie ses impôts, ses activités sont soumises à de nombreux et fréquents contrôles, et il fournit l'armée. Il a tout du bon citoyen... Ce qui me laisse perplexe quant au fait qu'il paie la caution d'une délinquante...

Et en parlant du Lac des Pairs... Il n'y a peut-être aucun lien, mais il semblerait que plusieurs usines aient un ratio matières premières entrantes - marchandises métalliques sortantes qui ne corresponde pas en terme de quantité. Et si tu t'en souviens Uktar, on nous avait alerté quant à la disparition de plaques de métal sur deux bateaux, près d'un pont, peu avant le baptême de l'Impétueux.

C'est bon, vous avez tout intégré, ou vous voulez que je fasse un petit diagramme ? »

Modifié par un utilisateur mercredi 5 juillet 2017 11:26:29(UTC)  | Raison: Non indiquée

Uktar hocha silencieusement la tête en réponse à Vence.
«  tu n'as pas chaumé! Toute cette affaire sent encore plus mauvais. Par où, ou par qui on commence? On ne manque pas de choses à faire à présent. » Uktar en était perdu, il ne savait plus par où commencer, les priorités se bousculaient dans sa tête.

« Au sujet du garde, j'espérais qu'il nous en dise plus sur ce qui s'est passé à l'ambassade. Peut-être a-t-il aperçu la "rencontre" entre Nilasa et le Dr de plus près que tous les témoins que nous avons rencontrés jusqu'à présent ? Il pourrait nous apprendre des détails à ce sujet. » Il déroula les doigts de sa main gauche, en saisissant un à un ses doigts de sa main droite, au fur et à mesure de son énumération.

« Un, rencontrer Heward Sechim. Un patron d'usine, ça se lève tôt, non ? On pourrait commencer par lui. Deux, interroger les complices de Nilasa : ils ne bougent pas, on a le temps. Trois, visiter ses adresses connues : peut-être plus pressé, en effet ? Quatre, questionner le garde de l'ambassade : je peux passer à l'ambassade pour voir s'il est de retour. Cinq, rencontrer P'tit Mat : c'est un fournisseur du poivre de fée utilisé par notre victime. Il peut nous apprendre qui a fourni la substance dans cette affaire, et du coup le client. Mais les complices ou les adresses connues ont la priorité, à ce sujet, je pense. Cet ordre vous convient ? On peut aussi se séparer, éventuellement. Ah, et j'oubliais : six, » il tira la langue en relevant un doigt de sa main droite avec sa main gauche déjà totalement écartée, « personne pour surveiller l'appartement de Kindleton cette nuit ? »

ean avait eu beau renifler le mouchoir, il n'arrivait pas à comprendre quelle était cette désagréable odeur de graisse brûlée qui imprégnait le morceau de chiffon noirci. Liz ne semblait pas très à l'aise en restant trop longtemps près de l'objet, aussi Jean se décida-t-il à utiliser le laboratoire fort élaboré de Zaxim pour analyser le tissu. Le demi-gnome était déjà rentré chez lui depuis belle lurette, tout comme Piper d'ailleurs, mais Jean avait accès à une partie du matériel, en plus des quelques babioles qui lui appartenaient en propre.

Il dit à Uktar qu'il le rejoindrait près de chez Kindleton puis se mit au travail tandis que les autres allaient prendre du repos en vue de la grosse journée du lendemain.

Après une heure et demie passée à se creuser la cervelle secondé par les remarques taquines - voire acides - de Liz, le tiffelin était parvenu à une conclusion : le mouchoir était bien tâché d'une faible quantité d'huile d'entretien pour armes blanches comme l'avait pressenti Mikal. L'odeur indéfinissable provenait quant-à-elle d'une substance noirâtre composée d'huile brûlée et de sang humain, et chargée d'une énergie sombre, théoriquement semblable à celle caractérisant le plan de l'ombre.

C'est donc avec une question de moins à l'esprit - mais peut-être quelques autres en plus - que Jean partit rejoindre Uktar. Celui-ci avait trouvé une ruelle en terre battue presque en face de la boucherie et y restait immobile. Caché derrière des arbustes trapus au tronc noueux qu'un connaisseur aurait identifiés comme étant des dragonniers nains, l'oréade fut même difficile à déceler pour Jean qui n'était pas - il faut bien le dire - le meilleur observateur qu'on puisse trouver à Flint.

Depuis le temps qu'Uktar attendait devant l'appartement de Lynn Kindleton, il n'avait rien de spécial à signaler. La doctoresse avait fini par éteindre sa lumière et personne ne semblait la surveiller pour l'instant. La nuit était maintenant bien avancée et l'aube poindrait déjà d'ici quelques heures.

Demain, on va être claqué.
Rien. Il ne se passait rien. C'était bien tout le paradoxe de leur job. Valait il mieux veiller pour rien ou qu'ils se passent quelque chose. La réponse il la connaissait, mais parfois, il se disait que si ça faisait avancer l'enquête, ça pouvait être une bonne chose. Finalement, le taf prenait parfois le dessus sur sa pensée, au point de risquer la vie d'innocent au nom de la justice, de la loi, et de l'ordre. Il devait rester vigilant à ne pas basculer.

À force d'attendre, en contemplant le ciel, ses étoiles, et la fumée passagère des méfaits de certaines usines, il se tourna vers Jean, qui était plutôt malin.
«  À ton avis Jean, c'est quoi le sens de tout ça? » demanda t'il en regardant le ciel.
«  J'parle pas de l'enquête, mais de la vie, de ce monde. Si c'est vrai, on lutte ici, pour finir par être jugé et passer une éternité dans un lieu, à faire certaines choses. Est ce que c'est vraiment le pied? Et si y avait rien? Les dieux, qu'est ce qui les aurait créer? Notre science qui avance, est ce que c'est aussi une magie? Est ce que ça vient d'un autre monde et ça nous influence? Est ce que c'est un esprit malin qui nous corrompt ainsi? Ou un être de lumière qui nous enlève les ténèbres dans lesquelles nous étions?
Quand je vois cette ville, qui me plaît, je sens un recul de la nature, alors que tout ce qui se créer se crée à partir de ce qu'on y trouve, donc ça devrait être naturel pour nous. Pourtant, j'ai un pressentiment, je crois que nous sommes à un tournant, mais je n'arrive pas à voir vers où, ni pourquoi. Ça t'arrive? »

Uktar regarda le ciel puis ses pieds. Décidément, les longues nuits d'attente lui jouer facilement des tours, se dévoilant comme le ferait un amoureux à sa courtisée.

Uktar sourit à la remarque faussement acerbe de Jean.
«  La sagesse n'est pas avoir les réponses mais continuer à se poser des questions. » Il l'écouta parler tout en regardant les étoiles, elle le happait comme pour combler le vide entre elles et eux.
«  Le fou et l'illuminé sont le même nom de deux facettes : ceux qui ont échoué définitivement, et ceux qui n'ont pas encore réussi. Ensuite, quant ils réussissent, on les appelle "génie". Tu as peu de chances d'y parvenir, tu vises haut, mais pour un amateur d'étoiles, est ce vraiment étonnant? Il ne faut jamais s'arrêter de rêver. Les traditions servent à s'ancrer dans le sol pour ne pas être fauché par les vents, mais ne veut pas dire que les bras et la tête n'ont pas le droit de viser le ciel et l'avenir. »

Uktar observait les ruelles. La ville ressemblait finalement beaucoup à la ruralité ou à la nature : un calme apparent qui masquait la présence de dangereux prédateurs.