Depuis deux jours qu'il était arrivé à Nid-de-Faucon, Romuald avait bien remarqué qu'une frange importante de la population était tombée malade, mais cela ne l'avait pas inquiété outre mesure; avant d'arriver ici, il avait traversé de nombreux villages, de plus il était lui même très au fait de la rudesse imposée par la vie en pleine nature. Maladies et contagions sont le lot commun des pauvres diables qui vivent à la dure, le jeune druide en avait aussi déjà fait les frais à plusieurs reprises.

De fait, n'eusse été pour le sort de l'infortuné Drum, le halfelin ne se serait jamais alarmé d'une telle broutille, et c'est pour cela qu'il harcelait l'herboriste du coin depuis un bon moment déjà. Pour qu'elle lui donne une fichue réponse. Pourquoi avait-elle attendu si longtemps pour dire quelque chose d'aussi simple ? Romuald l'ignorait, mais tandis que Laurelle déballait - enfin - son propos au dénommé Baleson, il ne pu s'empêcher de la considérer avec un regard mauvais, les bras croisés, légèrement cambré en arrière dans une attitude de défi qui signifiait clairement qu'il désapprouvait la rétention d'information dont elle avait fait preuve.

Il ne dit rien toutefois, se contentant d'écouter la conversation entre les deux humains. La situation semblait dramatique. Romuald n'avait jamais entendu parler de ce champignon, mais il était prêt à croire la femme sur parole tant il était inquiet pour sa propre santé. Une question lui vint soudain à l'esprit. Cela touchait-il aussi les animaux ? Agnès allait-elle bien ?

Quant ils eurent finit, à sa grande surprise, le maire s'enquit de l'aide du halfelin. Manquait-il de bras à ce point ? Ils ne savaient rien l'un de l'autre, mais voilà que celui-ci tentait d'embaucher celui là au débotté comme avec un aventurier de passage ... Romuald n'était pas certain d'apprécier la manigance, mais lui même malade, il avait toutes les raisons d'accepter.

« Je ne vois pas en quoi je pourrais vous être utile, mon bon monsieur, mais si je suis moi-même malade, je ferais tout aussi bien de participer à trouver un remède au plus vite. Je vous suis. » conclu-t-il d'un ton morne, espérant que tout ceci serait reglé au plus vite.

« Hm hmm. » acquièsça le halfelin en commençant à chercher, ses yeux scrutant le sol à la recherche de toute plante suspecte.

Quelque chose le titillait à propos de cette histoire cependant, bien qu'il ne puisse exactement mettre le doigt dessus ...

Bien qu'il fut sur la berge, le halfelin pataugeait dans la boue depuis une bonne douzaine de minutes quand le petit groupe trouva enfin les maudits champignons responsables de l'épidémie, fragiles tubes noirs et spongieux surmontés d'une fine coupole visqueuse en forme de téton.

Peu enclin à aggraver son cas, du fait qu'il n'était pas certain d'avoir contracté la maladie, Romuald ne fut pas très actif dans la destruction des fonges, se contentant tout du long de les écraser du bout du pied, voire, de temps en temps, de les pulvériser en leur balançant un coup de pied sec et plein de dégoût. C'est avec empressement - et un soulagement non dissimulé - qu'il s'arrêta enfin après un certain temps, lorsque qu'il fit trop sombre pour continuer. L'herboriste fit demi-tour, suivit de près par le maire, non sans que celui-ci eu remercié le druide au préalable. Ce dernier, plus intéressé par un futur remède que par la reconnaissance de Baleson, se contenta de lui répondre une politesse d'usage avant de prendre lui aussi le chemin du retour.



Lorsqu'ils atteignirent enfin le village, Romuald était fourbu et sale; il aurait donné cher pour se retrouver à l'instant même dans un bon bain chaud à l'auberge mais il du prendre son mal en patience. Comme elle l'avait justement deviné, la boutique de l'herboriste voyait de nouveau s'agglutiner autour d'elle toute une flopée de patients ... qui, s'ils n'avaient pas tous l'air mal en point, partageaient tous cet air d'inquiétude apeurée propre à ce genre de situation. Laurell s'adressa aux deux hommes.
« Non, moi je file me débarbouiller à l'auberge. » répondit-il en hochant ostensiblement la tête en signe de dénégation, « De toute façon, je ne sais pas quelle aide je pourrais bien vous apporter. Si vous avez besoin de moi malgré tout, vous me trouverez chez Jack, sinon, je passerais vous voir demain en espérant que vous trouviez rapidement un antidote. En vous souhaitant la bonne nuit. » ajouta-t-il en réprimant un bâillement avant de se diriger cahin-caha vers la taverne.

Nyv interpella le trio : « Hola ! ». Puis elle s'arrêta pour reprendre son souffle. Elle enchaîna alors :

« Baleson, Laurell, que je suis heureuse de vous voir. Et ... vous aussi Sir halfelin que je ne connais point. Que se passe-t-il ici ? Attendez, oui, je suis Nyv, Nyv Hustar vous vous souvenez ? Mais qu'est-ce donc que cette maladie qui atteint Nid-de-Faucon au moment où je décide d'y revenir ? Ces bas-de-plafond de ... pardon, ces villageois apeurés pourraient s'en prendre à moi, vous savez. Je compte vraiment vous aider. Et vous, qui êtes-vous, Sir halfelin ? Bref, Baleson, Laurell, que peut-on faire ? Que faisiez-vous hors du bourg ? Je ne laisserai pas les mauvaises langues dire que je veux le moindre mal aux habitants de cet endroit. »

Nyv s'arrêta à nouveau pour souffler, tentant de remettre en place toutes ses idées dans sa tête. Ce que je viens de dire n'avait aucun sens. Vite, je dois me concentrer. Souris ! Vite, souris ! Elle afficha alors un grand sourire au halfelin, au marchand et à l'herboriste : « Bonjour ! ».

Baleson jetta un regard de connivence à l'herboriste qui hocha un sourcil à leur approche avant de répondre aux nouveaux venus : « Nyv ! Bien entendu, la jeune Hustar, accompagnée d'un brave compagnon qui plus est ! Je suis Baleson, anciennement marchant et à présent prévôt de mon état. Je suis ravi de te revoir. Tu m'as l'air d'être devenue une ravissante jeune fille. Je suis également enchanté de faire votre connaissance, ser Tinctoria. Cependant, le temps joue contre nous : accompagnez-nous jusque devant chez Laurell pendant que je vous explique la situation. Après quoi, nous aurons, comme vous vous en doutez, des affaires plus pressantes à mener. Je m'inquiète également pour Marnel, que j'ai laissé seul et souffrant à la maison. »

Le petit groupe se remit donc en route en direction de l'herboristerie pendant que Baleson reprit la parole : « cette maladie, comme vous avez pu le constater, semble dangereuse. C'est pourquoi ser Romuald et moi-même ici présent avons cherché à aider dame Laurell à trouver la source de cette épidémie afin de l'enrayer. Notre entreprise, quoique couronnée de succès demandera vérification. Le manque de lumière nous a forcé à rebrousser chemin. »

Laurell l'interrompit sans pincettes : « Pas de "dame" qui tienne avec moi. Je ne suis pas une dame et si tu m'appelles encore ainsi, je te ferai goûter à cette horrible mixture à base d'orties et de gingembre. » Baleson reprit en faisant mine de ne pas s'en offusquer mais néanmoins pris en compte les propos de l'herboriste : « Je vais donc tâcher d'avertir mes concitoyens que nous avons fais des progrès afin d'apaiser les esprits tandis que da... que Laurell se chargera d'examiner les malades. Nous ne voulons pas d'autres drames après celui de ce pauvre Drum... »

« Et vous, le maître guérisseur, vous allez venir avec moi avant de rentrer où vous voulez. J'aurai un mot à vous dire avant de vous lâcher dans la nature. Votre lit devra attendre un peu » intervint Laurell d'un ton péremptoire. Le temps de ce court échange, le groupe avait atteint la maison de Laurell et déjà les premiers villageois avait remarqué le petit groupe.

Modifié par un utilisateur mardi 1 mars 2016 05:46:29(UTC)  | Raison: Non indiquée