Ne voyant rien de plus intéressant (et commençant quand même à être un peu inquiète de leur situation) Tiriji fit signe à Hogo qu'il serait peut être temps d'aller retrouver les autres et leurs faire part de la situation...

Sokiba écouta avec intérêt le récit de ses deux compagnons. Il y avait donc une espèce de sorcière (s'agissait-il de la dénommée Nylithati dont parlait le journal de la cabane ?) ainsi que d'autres sauvages au nombre indéterminé. Et cet endroit avait l'air d'être leur camp.

La Mwangi réfléchit à la situation. « Que fait-on maintenant ? Essaye-t-on d'entrer en contact avec eux pour en savoir plus sur cette île et sur les solutions pour la quitter ? Au risque de se faire attaquer et de tomber sur plus fort que nous évidemment. »

« Où bien va-t-on chercher du renfort au camp avant d'essayer de parlementer ? »

La prêtresse regardait, indécise, ses compagnons.

« Il vaut mieux prévenir les autres » répondit Tiriji que la présence si proche de gnomnapeurs mangeurs de chair rendait un peu nerveuse « Avec tout ces bâtiments, ils sont sans doutes plus nombreux que nous... »

Les quatre explorateurs optèrent pour la prudence : ils s'éloignèrent du village aussi discrètement qu'ils y étaient venus puis reprirent la piste en refaisant le chemin parcouru les derniers jours à l'envers. Ils connaissaient les directions à prendre et craignaient moins de rencontrer des pièges sur leur trajet, aussi se permirent-ils de hâter un peu le pas.

Ainsi, ils ne mirent que deux petites journées pour rejoindre le campement, arrivant sur place le 2e jour du mois de Rova. Lorsqu'ils revinrent à l'endroit où ils avaient trouvé quelques semaines plus tôt un petit cabanon ravagé par le temps, c'est bel et bien une petite place fortifiée qu'ils découvrirent ; ceux qui étaient restés là avaient bien travaillé ces derniers jours… sans doute que l'attaque sur Tiriji avait contribué à accroître leur motivation !

Sokiba admira silencieusement le travail d'Ishirou et des autres sur le cabanon. Finalement, il serait presque dommage d'abandonner ce camp retranché.

Après avoir écouté Hogo, elle ajouta : « Même si ce sont des cannibales et qu'il y a toutes les chances qu'ils essayent de nous sauter dessus pour nous dévorer, j'aimerais quand-même essayer de communiquer avec eux. Ils sont là depuis longtemps, ils connaissent cette île et pourraient nous en dire plus sur elle et peut-être nous indiquer comment en partir. Qu'en dites-vous ? Certains d'entre vous seraient-ils volontaires pour nous accompagner ? »

Comme tout un chacun aurait pu s'en douter, Sasha était la première volontaire à répondre à la question de Sokiba. « Moi, j'en suis ! » dit-elle en faisant tournoyer ses kukris. « Surtout que, vu la manière dont s'est déroulée la première rencontre avec Tiriji, ça va certainement être sanglant ! » Elle arborait un large sourire.

Gélick n'avait pas dit un mot (contrairement à son habitude), mais l'expression de son visage indiquait clairement qu'il n'était pas très chaud pour se lancer dans un combat. Finalement, il dit « Il ne faudrait pas non plus négliger le campement… il faut que certains d'entre nous se sacrifient et restent ici pour le protéger… »

Jask, quant à lui, avait baissé le regard vers le sol. Il poussa un soupir puis dit « Je ne suis pas un homme de combat, et je doute que je vous sois d'une quelconque utilité une arme à la main. Par contre, si vous pensez que c'est nécessaire, je pourrais vous accompagner pour soigner les blessures. » Il se tourna vers Sasha et ajouta « Contrairement à notre jeune amie, je ne me réjouis pas de ce qu'il risque d'arriver mais… comme elle, je pense qu'un affrontement sanglant est inévitable. Ces êtres ont l'air de nous considérer comme de la nourriture et pas du tout comme des interlocuteurs pour un dialogue. »

Aérys avait pris un air renfrogné pendant quelques secondes, comme si elle pensait à quelque chose d'autres. Puis elle avait fini par dire « Je sais me battre, aussi bien que qui que ce soit d'autre, même un homme. Si vous pensez que ce sera utile, je serai à vos côtés. » Elle avait ponctué sa phrase en hochant la tête.

Gélick regardait tour à tour chacun des intervenants qui se disaient prêts à accompagner les explorateurs et à se joindre au combat. À chaque nouveau mot, son visage arborait une expression mêlant un peu plus d'inquiétude et, peut-être, de contrariété.

Comme il le faisait souvent, Ishirou avait attendu que tout le monde s'exprime avant de prendre la parole. « Le gnome n'a pas entièrement tort… mais je ne pense pas que ce campement soit notre priorité. Ce qu'il faut éviter avant tout, c'est que le groupe qui partirait rencontrer les sauvages ne laisse derrière lui des personnes incapables de se défendre seules. Je ne vois que deux solutions : soit nous faisons deux groupes équilibrés, un qui part et un qui reste ici, soit nous partons tous. Dans tous les cas, un affrontement me semble inévitable. Autant qu'il se déroule selon nos termes plutôt que selon les leurs. » Tout en disant cela, le tianais avait tapoté le katana qui pendait à son côté.

La bouche de Gélik s'était peu à peu ouverte au fil de l'intervention d'Ishirou, de telle sorte qu'elle était maintenant grand ouverte. Lorsque les regards se tournèrent vers lui, il la referma ensuite, pour la rouvrir à nouveau. « C'est… c'est sûr. » commença-t-il en hochant la tête, comme pour se donner du courage ou appuyer ses dire. « Ishirou a raison. Aussi courageux que je sois, ce serait du suicide de rester seul ici pour protéger le campement. Et puis, qui pourrait raconter mes… euh, nos aventures héroïques si jamais les sauvages venaient me capturer, hein ? » Il déglutit, avant de conclure « Si tout le monde y va, je pense que je devrais y aller également. »

Une fois de plus, la décision semblait se trouver dans le camp des explorateurs : les cinq autres naufragés étaient tous d'accord pour les accompagner, chacun avec ses appréhensions ou ses envies, ses capacités et ses faiblesses. Et c'était à eux de trancher.

Bon, et bien, on dirait que je suis la seule à vouloir discuter se dit la prêtresse.

« Tout le monde a donc l'air d'accord pour aller attaquer les cannibales » dit-t-elle. « Leur camp est à deux jours de marche d'ici.  »

Elle dessina sur le sol un plan sommaire représentant le campement des sauvages. « En gros, il y a deux moyens de pénétrer chez eux. Par la piste principale et par la jungle, au sud. »

« Comment voyez-vous les choses ? Comme nous sommes neuf, il vaut peut-être mieux privilégier l'invasion par la jungle où il y a plus d'espace ? Ou alors se séparer en deux groupes, un par la piste et un par la forêt, pour les prendre en tenailles ? »

Devant les remarques et les regards des autres aventuriers, Hogo proposa, « Dans ce cas-là, faisons un seul groupe. Il en faudra certains d'entre nous qui aillent au contact pour permettre aux autres de tirer ou lancer des sorts... Je ferai partie de ceux qui seront en première ligne. »