Hogo fut rassuré lorsqu'il découvrit la personne qui se cachait derrière la forme qu'ils avaient perçue. Il tenait son arc baissé et regarda, silencieux, pendant de longs instants la jeune femme. Puis, il répondit, « Je m'appelle Hogo et avec mon amie, nous sommes bien ceux qui amenons régulièrement de la nourriture aux habitants de la jungle. Maintenant, cela ne veut pas dire pour autant que l'on ne doit pas se méfier des personnes qui essaie de nous suivre sans se faire remarquer. Qui es-tu ? que nous veux-tu ? Tu n'as à craindre de nous si tes intentions sont justes. » Tout en parlant, le shoanti jetait des coups d'oeil aux environs pour s'assurer qu'ils n'allaient pas tomber dans un piège.

Ellawa commença à parler d'une voix grave qui lui était peu familière puis elle se rappela de libérer son corps et de laisser s'échapper les contentions magiques qui lui permettaient de le remodeler en homme mwangi, reprenant sa forme habituelle avant de poursuivre son discours. Si son changement de forme étonna son interlocutrice, cette dernière n'en laissa rien paraître.

Tout en parlant, la chamane scruta le visage de la femme. Elle l'avait déjà vue avant, elle en était certaine. Peut-être lors d'une distribution de nourriture ? Quelque chose lui disait que ce n'était pas ça, mais le souvenir lui échappait pour le moment. Toutefois, elle était certaine de l'avoir déjà croisée dans l'Outremur.

La femme ouvrit la bouche, puis la referma. Puis elle l'ouvrit à nouveau et répondit à Hogo. « Otesha. C'est mon nom. Je m'appelle Otesha. » dit-elle, ponctuant sa phrase d'un hochement de tête. « Je vous ai déjà croisé en Outremur et... » elle se retourna et laissa s'échapper un soupir puis ramena son regard sur ses interlocuteurs. « ... et j'ai voulu savoir où vous passiez la nuit. »

Elle inclina la tête, comme en signe de soumission ou peut-être pour présenter ses excuses. « Je n'aurais pas dû tenter de vous suivre à votre insu. J'en suis désolée. »

Elle resta silencieuse pendant un court moment, hochant la tête aux propos d'Ellawa lorsque cette dernière aborda le sujet de l'expédition, puis hésita un moment et demanda finalement « Vous êtes liés à une des expéditions ? ». Elle fronça légèrement les sourcils et ajouta « Devons-nous nous méfier de ces offres ? »

Modifié par un utilisateur jeudi 14 septembre 2017 18:46:47(UTC)  | Raison: Non indiquée

La femme secoua la tête négativement. « Je ne cherche pas spécialement à participer... mais d'autres, des amis, sont intéressés. C'est pour ça que je me demandais... ». Elle continua à poser son regard interrogateur sur le Shoanti et la Mwangie en face d'elle.

Ellawa, quant à elle, ressenti une impression de sérénité et de concentration sur la femme mwangie ; c'était sans doute là la manière de Simurgh de lui indiquer que leur interlocutrice était seule et qu'il n'avait pas détecté de dangers aux alentours.

Otesha croisa les bras et fixa longuement Ellawa, comme si elle réfléchissait ou hésitait. Puis les paroles et le comportement de la chamane semblèrent la convaincre de lui accorder sa confiance. Elle hocha la tête et dit « Comme je le disais, je n'ai pas particulièrement l'intention de m'engager dans cette voie… mais d'autres pourraient être intéressés, aussi j'ai envie de me renseigner. »

Elle prit une profonde respiration et demanda « Et, plus particulièrement, je cherche à comprendre pourquoi des gens qui, visiblement, veulent venir en aide à l'Outremur, et apportent de la nourriture à ceux qui en ont besoin, s'allient avec le Gouvernement qui nous opprime et nous exploite. » Elle referma la bouche rapidement, comme si elle regrettait la franchise de sa question, puis son visage se détendit légèrement et elle resta figée, les bras croisés, à attendre la réponse des deux ex-naufragés.

Ellawa soupira. Elle non plus n’avait pas voulu former des alliances. Elle avait exhorté le groupe de partir en expédition seuls sans l’aide de quiconque, mais visiblement ce n’était pas possible.

« Cela ne m’enchante pas plus que vous. Mais nous n’avions pas d'autres options. Cette alliance était le moins mauvais choix que nous puissions faire. Le Général s’est engagé et a donné sa promesse de respecter ceux qui s’engageront de notre côté dans cette expédition. Ils seront considérés comme des hommes libres, payés et entraînés au combat par des soldats aguerris et non traités comme des esclaves. Les autres factions ne peuvent pas en dire autant. Ceux qui se joindront au Consortium par exemple seront considérés comme des esclaves, peu importe les pertes pour ces gens-là, seul le profit les intéresse et ils sont prêts à employer des moyens violent et répréhensibles afin d’arriver à leurs fins. Le général a consenti à un effort concernant les mwanguis, à nous maintenant de lui prouver que les mwanguis méritent une meilleure place et de meilleures conditions dans cette société. Nous avons obtenu une porte ouverte et une main tendue, à nous de saisir cette opportunité. »

« Parmi les mwanguis de l’Outre-Mur, je suis certaine qu’il y a de très nombreuses personnes de bonne volonté qui peuvent apporter beaucoup pour permettre à l’ensemble de la communauté de considérablement améliorer la misère qui s’est installée actuellement. Mais pour cela, il faut se retrousser les manches et s’organiser. J’espère sincèrement que cette expédition et cette alliance avec le gouvernement favorisera cela. Nous savons qu’il y a un groupe de personnes qui essaient d’agir pour aider l’Outre-Mur, les Hommes Libres… J’espère pouvoir les rencontrer à nouveau et cette fois pouvoir discuter et échanger avec eux. La dernière fois ce ne fut pas le cas. Ils nous ont sommés d’effectuer des choses qui vont à l’encontre de nos convictions : le massacre et le vol… Et puis quoi ensuite ? Fomenter une rébellion ? Entrer dans une guerre ou guérilla perdue d’avance ? Nous pensons qu’il y a d’autres moyens. Les mwanguis ont toujours vécus sur ces terres et ont toujours survécu dans la jungle. J’espère qu’ils comprendront et je souhaite être leur alliée. »

Le lendemain matin, une bonne heure avant l'aube, Sébrysse quitta le Club comme à son habitude et se rendit à la rue des Temples pour y célébrer le lever du soleil en compagnie du petit groupe de fidèles qui s'était formé au fil des jours. Après avoir quitté la petite cour qui s'étendait devant le Club, elle emprunta la route au sol irrégulier qui menait vers une des artères principales d'Éléder, sans se douter du regard inquisiteur qui suivait ses mouvements depuis l'ombre d'un porche situé non loin de là.



À peu près au même moment, dans la jungle, Ellawa et Hogo quittait leur campement pour rassembler un peu de nourriture à amener en Outremur avant de rejoindre leurs compagnons au Club pour briser le jeûne et déterminer la manière dont ils allaient passer la journée.

Trouver de quoi sustenter les Mwangis était de plus en plus difficile... et sans doute cela ne représentait-il qu'une maigre goutte dans un océan de famine... mais leurs efforts n'étaient clairement pas passés inaperçus, comme l'avait rapporté la femme qu'ils avaient croisée la veille en revenant dans la jungle.

Alors que le soleil se levait au-dessus de la ville, Ellawa et Hogo entraient dans l'Outremur pour distribuer leur récolte. Dès leur arrivée, de nombreux enfants et quelques Mwangis plus âgés vinrent à leur rencontre en poussant des cris joyeux.



Après la cérémonie, Sébrysse prit quelques minutes pour parler avec Ferdnan et les autres fidèles puis elle reprit le chemin du Club, sans doute impatiente de goûter aux plats préparés par Briga puis de retourner s'informer à la bibliothèque des Éclaireurs.



De leur côté, Éphrem et Tiriji restèrent dans leur couche jusqu'à ce que le soleil soit bien visible à l'horizon. Le jeune Mwangi s'étendit tout en se dirigeant vers la fenêtre de sa chambre pour jeter un coup d'oeil dans le rue. C'était là un spectacle familier... après les nombreuses heures qu'il avait passées à observer les alentours et à guetter la moindre menace.

Au fil des jours, il s'était mis à reconnaître les visages des locaux : le couple et les trois enfants qui occupaient la maison en face, la femme âgée qui vivait un peu plus loin et qui passait elle aussi le plus clair de ses jours à regarder la rue, puis le jeune couple de Chéliaxiens qui venait apparemment d'emménager un peu plus loin. Cela lui permettait également d'identifier plus facilement les visages qui n'étaient pas à leur place.

Après avoir jeté un coup d'oeil à la fenêtre, il se détourna et s'apprêta à vaquer à ses occupations habituelles, mais quelque chose, comme une arrière-pensée, l'incita à observer la scène à nouveau. Il se rapprocha donc de la fenêtre et, se tenant immobile derrière les rideaux brodés, scruta la rue. Il ne lui fallut guère de temps pour identifier l'élément qui lui avait mis la puce à l'oreille : il s'agissait d'une jeune homme, sans doute à peu près du même âge que lui, qui se tenait dans l'ombre du porche d'une des maisons situées en face de la cour du Club. Un amateur, pensa-t-il, se rendant compte que, si le jeune homme avait pris soin de se mettre à l'abri des regards provenant du niveau de la rue, il ne semblait pas avoir pensé aux regards qui venaient de plus haut.

Éphrem était trop loin pour distinguer les traits du visage du jeune homme qui semblait s'intéresser avant tout au Club, promenant son regard sur la cour, sur la façade, et même sur les toits. Par contre, il reconnut les habits... était-ce là le même jeune homme que celui qu'il avait aperçu la veille au soir en rentrant ? Avait-il passé toute la nuit là ?

Il entendit le bruit de la porte de la chambre de Tiriji qui s'ouvrait ; la gnome s'apprêtait sans doute à descendre déjeuner.



La distribution ne prit guère plus d'une dizaine de minutes. Ellawa et Hogo quittèrent l'Outremur pour rejoindre la route qui leur permettait de rentrer en ville et de rejoindre le Club.

Ils s'interrompirent toutefois un peu avant d'arriver aux portes de la ville. Ils avaient repéré Otesha. Elle se tenait, adossée à un cabanon Mwangi, les bras croisés, et les observait fixement. Son visage était relativement fermé. C'est à ce moment-là, en la voyant appuyée contre un mur, que les deux compères la reconnurent : ils l'avaient déjà vu dans l'Outremur, et plus précisément devant le bâtiment où ils s'étaient rendus pour discuter avec les représentants de la Fraternité des Hommes Libres.

Modifié par un utilisateur dimanche 17 septembre 2017 18:12:24(UTC)  | Raison: Non indiquée

Tiriji réprima un bâillement. « Un truc à manger, quelqu'un qui nous observe, voir qui est parti, » énuméra t-elle avant de poursuivre sa descente vers les cuisines en se parlant tout haut. « Oh! Sébrysse est probablement au Temple pour la cérémonie de l'Aube et Ellawa et Hogo ont encore passé la nuit dans la jungle... »

Elle fit une pause avant de continuer. « Tu crois qu'Ellawa et Hogo... » commença t-elle avant de s'interrompre en rougissant.

« Hemmm... Non, oublies ça... Pas encore réveillé ce matin... Vais me renseigner pour voir si les autres sont déjà descendu déjeuner... » poursuivit elle en descendant rapidement les escaliers.

Tiriji fit un signe de la tête aux habitués avant de répondre à Briga. « Bien, bien, » dit elle en examinant le contenu de la table d'un air intéressé, « Je vais remonter dire tout ça à Ephrem que ce genre de choses intéresse. Et puis lui monter un petit quelque chose à manger, vu qu'il est occupé à surveiller un guetteur. »

« Mais je redescend tout de suite, » rassura t-elle, « Il serait dommage de laisser le petit déjeuner refroidir... »

Sébrysse était ragaillardie par le lever du soleil et abordait la suite de sa journée d'un air décidé. Lors de l'office, elle avait constaté l'enthousiasme des quelques fidèles de la déesse présents.

Elle avait discuté avec ces derniers quelques instants pour leur indiquer qu'elle allait participer d'ici quelques jours à une expédition qui serait menée conjointement avec le gouvernement et les éclaireurs en vue de découvrir une civilisation antique.

Elle souligna aussi que l'expédition comptait recruter des volontaires parmi la population d'Éléder ou des alentours, qu'il s'agisse de porteurs ou de personnes dont les autres talents pourraient s'avérer utiles par leurs connaissances ou leur profession mais qu'il faudrait sans doute prévoir plusieurs semaines d'absence.

Elle espérait que des partisans de la déesse pourraient se joindre à l'expédition ou d'autres personnes de bonne volonté et qu'Absalom aurait aussi le temps d'envoyer un prêtre qui pourrait officier dans la ville durant son absence pour ne pas laisser la communauté sans aucun représentant, au risque de voir dépérir les fidèles.

Elle rentra au Club pour prendre un copieux petit déjeuner dans la salle commune avant de remonter dans sa chambre pour mettre à jour les notes prises la veille. Elle espérait que Jask pourrait rentrer pour le déjeuner et avoir le temps de traiter avec lui les sujets qui méritaient une recherche plus exhaustive dans la bibliothèque des éclaireurs dont elle n'aurait pas le temps de faire le tour.

Elle escomptait profiter du temps partagé du repas pour pouvoir aussi faire le point avec les autres aventuriers sur leurs propres avancées et faire un état d'avancement des préparatifs.

Même si c'était une maigre pitance comparée à l'immense misère de l'Outre-Mur, Ellawa aimait voir les enfants sourire. Elle n'avait pas besoin de récompense, rien que de voir la joie dans les yeux des aînés et des futures générations lui suffisait. Son sourire s'estompa lorsqu'elle remarqua Otesha adossée la mine contrite. Elle accompagna Hogo jusqu'à elle et une fois que le shoanti eut terminé ses question, elle prit la parole à son tour avec une voix qui se voulait amicale et rassurante - « Ça ne s'est pas passé comme tu voulais, hein ? Les hommes s'entêtent parfois, surtout si c'est une femme qui leur parle. Nous ne sommes pas considérées comme étant la voix de la sagesse et bien souvent ils nous préfèrent aux tâches de ménage, de cuisine et d'élever les enfants, plutôt que de s'occuper des problèmes de la tribu. Tu veux faire un bout de chemin avec nous ? Nous allons vers la ville. Nous pourrons parler en chemin si tu le souhaites. »