Les puissances coloniales

La France

Après un début de siècle difficile, à cause des guerres de religion, la France est en 1648 l’une des grandes bénéficiaires de la fin de la guerre de Trente ans. Elle acquiert des territoires qui consolident sa frontière à l’est avec l’Empire. De plus, elle est parvenue à créer un équilibre avec sa grande rivale, l’Espagne, qui était au siècle précédent la première puissance européenne. Ce gain est le résultat de la politique entreprise par le roi Henri IV visant à desserrer l’étau Habsbourg, qui règne de Madrid jusqu’à Vienne. Depuis la mort de Charles Quint, il existe en effet deux lignées distinctes, l’une occupant le trône espagnol et l’autre étant investi presque par droit héréditaire du titre prestigieux d’Empereur du Saint Empire Germanique. Cependant, une union est toujours à redouter, ce qui placerait la France dans une position délicate. Les liens familiaux entre le monarque espagnol et celui d’outre Rhin sont renforcés par de fréquents mariages. Durant la guerre de Trente ans, la France catholique n’a donc pas hésité à soutenir les princes protestants allemands et scandinaves, ennemis des Habsbourgs de Vienne. Durant la guerre, le cardinal de Richelieu poursuit cette politique anti-Habsbourgs. Cet habile politique sait se rendre indispensable à Louis XIII, le fils et successeur de Henri IV. Les complots pour éliminer Richelieu ne cessent toutefois de foisonner depuis son entrée au cabinet du roi.

Richelieu crée des compagnies de commerce pour encourager le développement de colonies en Nouvelle-France et aux Antilles. Il réorganise aussi la marine de l’État. Cependant, après sa mort et celle de Louis XIII, les entreprises coloniales et maritimes sont abandonnées à l’initiative des particuliers. En effet, de 1648 à 1660, la France connaît une période de troubles intérieurs proche de la guerre civile, la « Fronde ». Les nobles cherchent à contrôler la régence du jeune Louis XIV et destituer le principal ministre du roi, le cardinal de Mazarin. Celui-ci a toute la confi ance de la reine régente Anne d’Autriche. Ces divers mouvements d’opposition viennent des Parlements et des princes de la maison royale du jeune roi, qui ont toujours joué un rôle majeur dans la conduite des affaires du royaume.

Louis XIV prend personnellement en main la direction du royaume à la mort de Mazarin. Il achève l’oeuvre entreprise par ses prédécesseurs et par leurs ministres. Toutefois, il ne désigne pas de Ministre principal, se rappelant trop les exemples de Richelieu et de Mazarin. Malgré leurs fidèles services, leur toute puissance porte ombrage au roi et encourage les factions. D’ailleurs Nicolas Fouquet, Marquis de Belle-Isle et successeur de Mazarin, est exclu du conseil, ainsi que les parents du roi et les membres des vieilles familles nobles. Ils ne servent désormais le roi qu’à la Cour et sur les champs de bataille.

Le ministre Jean-Baptiste Colbert se distingue à la gestion des finances et de la Marine du royaume ainsi que du commerce et des colonies. Son oeuvre continue l’action de Richelieu et l’amplifie. Il réorganise la Marine du roi, laissée pratiquement à elle-même à la disparition du cardinal. Il fait aménager Dunkerque, Le Havre, Dieppe et Saint-Malo pour recevoir les vaisseaux du roi, comme Richelieu l’avait fait avec La Rochelle. Grâce à ses efforts, la Marine de Louis XIV devient la plus grande flotte au monde, au début du XVIIIe siècle, avec 205 vaisseaux (soit près du double de la Royal Navy). De plus le mode de recrutement par tirage aléatoire de conscrits évite la « presse », qui accroît le sentiment d’oppression du peuple, et incite même les jeunes gens à s’engager, car c’est là le seul moyen de disposer d’un poste important dans la flotte de commerce.

Cette marine n’est pas seulement destinée à faire la guerre. Elle sert aussi à protéger le commerce avec les colonies. En effet, Colbert réorganise les entreprises coloniales de la France par l’intermédiaire de compagnies de commerce. Il crée en Amérique la Compagnie des Indes Occidentales et en Orient la Compagnie des Indes Orientales. Même si ces compagnies ne sont pas toutes des réussites financières, les colonies américaines de la France sont mieux encadrées et mieux protégées à partir des années 1660.

La suprématie française s’étend sur terre comme sur mer, mais au prix de quatre guerres coûteuses menées par le belliqueux Roi Soleil, qui a reçu les enseignements de Turenne. Les premières guerres opposent la France et ses alliées à l’Espagne, mais l’Angleterre et les Pays-Bas, réconciliés au terme de vingt ans de guerre, s’allient bientôt contre la nouvelle puissance européenne. Ces affrontements ruinent les paysans, qui doivent loger gratuitement les armées du roi, et vident les caisses de l’État. C’est donc épuisés que les belligérants mettent fin à la Guerre de Succession d’Espagne, avec le traité d’Utrecht en 1713.



L'Angleterre

À la fin du XVIe siècle, Elizabeth Ière, dernière des Tudors, met elle aussi à mal les forces navales de la puissante Espagne, en entretenant des corsaires, les Seadogs. Richard Greenville, John Hawkins et Francis Drake reçoivent les honneurs de leur reine, avant de détruire avec la flotte anglaise l’Invincible Armada espagnole. L’Angleterre attaque Cadix en 1596 afin d’éviter une reconstruction de l’Armada. À la mort de la reine, Jacques Ier unifie l’Angleterre, l’Écosse et l’Irlande, et met fin à un demi-siècle de guerre avec l’Espagne. S’ouvre alors une ère de prospérité pour l’Angleterre, loin des guerres civiles qui touchent la France et l’Espagne. L’Angleterre se tient en effet à l’écart de la Guerre de Trente Ans, mais nombre de mercenaires anglais ou écossais participent aux combats sur le continent, tant au service de l’Empereur que de ses adversaires protestants.

Ces bandes armées, commandées par des chefs aussi prestigieux que Fairfax ou Cromwell, sont plus ou moins à l’origine des flibustiers qui lanceront des raids à partir de la Jamaïque dans la seconde partie du XVIIe siècle . Elles jouent aussi un rôle décisif lors du conflit naissant entre le Roi et le Parlement, sous le règne des Stuarts, successeurs des Tudors. En effet, pendant que la guerre fait rage en Allemagne, un conflit sourd oppose les rois James Ier puis Charles Ier au Parlement. Les monarques anglais veulent brider ce dernier – et notamment la Chambre des Communes –, qui s’oppose à eux sur les problèmes de la levée des impôts et la question religieuse : tous les rois Stuarts de 1603 à 1688 ont été suspectés par les puritains de vouloir réintroduire le catholicisme en Angleterre. Reprochant à l’Église anglicane son faste, ces puritains entendent purifier l’Angleterre de toute pratique romaine. Dans les années 1620 et 1630, persécutés et ne pouvant imposer leurs vues, les « dissenters » sont nombreux à émigrer vers les Pays-Bas, l’Amérique du Nord ou les Antilles. Depuis lors, les initiatives de colonisations dans le Nouveau Monde sont dirigées et financées par des commanditaires puritains. D’autre part, certains puritains des Antilles, ruinés par les planteurs catholiques n’auront d’autre choix que de rejoindre la flibuste, puis la piraterie. Ils y apporteront leurs idéaux et leurs règles.

Ce conflit politique et religieux débouche sur une guerre civile qui dure de 1642 à 1648. Au terme de cette guerre, le roi Charles Ier est condamné pour trahison et exécuté sur ordre du Parlement. Mais le vrai vainqueur de la guerre civile est l’armée du Parlement, formée de ces hommes qui craignent Dieu et qui s’en inspirent. Dirigée par des généraux tels que Fairfax, Cromwell ou Lambert, elle s’illustre contre les royalistes, les Écossais et les Irlandais. Oliver Cromwell, puritain convaincu et brillant chef de guerre, s’impose en tant que Lord Protecteur de l’Angleterre. Disposant de tous les pouvoirs d’un roi sans en avoir le titre, il pacifie l’Irlande et l’Écosse, et devient le champion de la cause protestante en Europe. Cela ne l’empêchera pas de mener une courte guerre (1652-1654) avec les Provinces-Unies pourtant protestantes. L’ambition de Cromwell de déposséder l’Espagne de toute l’Amérique n’aboutit qu’à la prise de la Jamaïque, d’une importance capitale dans le système colonial britannique.

Cromwell meurt en 1658. Son fils et successeur, Richard, est incapable de conserver le pouvoir. Deux ans plus tard, la monarchie est restaurée et le prince de Galles est couronné sous le nom de Charles II. Celui-ci gouverne intelligemment l’Angleterre jusqu’à sa mort en 1685. Charles agit comme un souverain modéré et instruit des erreurs de son père. Il apporte à l’Angleterre une stabilité et un répit bénéfiques. Son règne de 25 ans ne connaît que quatre années de guerre (1665-1667 et 1672-1674) avec les Provinces-Unies. Le relâchement général des moeurs dans le royaume contraste toutefois fort avec le régime inspiré de Dieu instauré par Cromwell. C’est au cours de cette période que se généralise le recrutement par la « presse », véritable rafle dans les villages côtiers. À bord des navires règnent une discipline de fer et des conditions effroyables, pour le plus grand malheur des marins qui font la guerre contre leur gré.



Les Pays-bas

Au XVe siècle, la région des Flandres est constituée de comtés et de provinces, qui dépendent du Saint Empire Romain Germanique. Par le jeu des alliances, la région a été intégrée aux vastes possessions du duc de Bourgogne. Elle passe dans le camp des Habsbourgs lorsque l’héritière de la maison de Bourgogne épouse le futur empereur Maximilien Ier. Au milieu du XVIe siècle, quelques années avant sa mort, l’empereur Charles Quint partage ses possessions entre son frère Ferdinand et son fils Philippe (Felipe II). Ce dernier hérita en même temps des Flandres et de l’Espagne. Avant la fin de son règne, sept des dix-sept provinces formant les Pays-Bas se révoltent contre leur souverain.

Le roi Felipe II veut moderniser et centraliser l’administration et le gouvernement de cette partie de son empire. Il se heurte alors aux privilèges et libertés traditionnelles de la noblesse, du clergé et de la bourgeoisie. En frappan, le duc d’Albe, le représentant de Felipe II, fait alors le commerce d’un impôt spécial pour financer la lutte contre les rebelles et les hérétiques, fait alors basculer la classe marchande dans le camp adverse. Les Gueux de la mer, qui font la guerre sur mer aux Espagnols, trouvent des chefs dans la petite noblesse convertie au calvinisme du sud des Flandres. Finalement le centre de la révolte se déplace vers le nord du pays et abandonne le sud à l’Espagne. La guerre ne s’arrêtera qu’en 1609 pour reprendre neuf ans plus tard sous la forme d’une guerre de course.

Dès 1579, pour faire face à la menace espagnole, les sept provinces du nord (Hollande, Zélande, Utrecht, Gueldre,Overyssel, Groningue et Frise) forment l’union d’Utrecht. De cette union naît un état protestant et républicain connu officiellement sous le nom d’États généraux des Provinces Unies des Pays-Bas. Cet état dominé par les provinces de Hollande et de Zélande est gouvernée par une classe de marchands riches et prospères. À la tête de chaque province, un lieutenant, le « Stathouder », est chargé des fonctions militaires et diplomatiques. Cette dignité devient héréditaire, et se transmet de père en fils dans la famille des princes d’Orange ou celle des comtes allemands de Nassau. L’histoire des Provinces Unies est d’ailleurs marquée par les conflits entre le Stathouder et le Grand Pensionnaire de Hollande et de Zélande. Ces conflits se terminent parfois dans le sang.

Les Provinces Unies sont riches en ressources et en capitaux, mais pauvres en hommes. Elles doivent faire appel aux services de mercenaires pour leurs armées, qui ne comptent pas plus d’un million d’âmes, contre dix pour la France. Son économie est tournée vers la mer : pêche et commerce pour la Hollande et guerre de course pour la Zélande. Avec la paix de Westphalie (1648) qui marque la fin des hostilités avec l’Espagne, le commerce l’emporte sur la guerre.

Après la fin de la guerre contre l’Espagne, c’est contre l’Angleterre que les Provinces Unies se battent. Au début du siècle, les deux États protestants se sont affrontés dans les Indes, où tous deux ont établi des comptoirs commerciaux. Malgré cela, Anglais et Néerlandais sont partis en course ensemble contre l’Espagnol, leur ennemi commun. Les trois guerres qui opposent les Provinces Unies à l’Angleterre (1652-1654, 1665-1667 et 1672-1674) sont surtout des guerres navales. Après le traité de Westminster (1674), la rivalité anglo-néerlandaise s’atténue. Sous l’impulsion du prince d’Orange, nouveau chef de l’Union, les Provinces Unies se rangent aux côtés de l’Angleterre, contre la France. Celle-ci est en effet devenue la première puissance catholique de l’Europe.

Les Néerlandais créent de nombreuses innovations en matière de navigation et de construction navale. Ils disposent au début du XVIIe siècle de la meilleure flotte de guerre européenne, qui produit d’excellents marins tels que Tromp, De Ruyter ou Piet Heyn, issus des rangs de la noblesse ou de la bourgeoisie d’affaires. La domination des Provinces Unies s’estompe au milieu du siècle devant la France de Louis XIV.

L'Espagne

Le royaume d’Espagne est né de l’unification des possessions des Couronnes de Castille, d’Aragon et de Navarre. Son roi règne aussi sur le royaume de Naples, une partie du nord de la péninsule italienne, les Flandres, ainsi que sur la Nouvelle-Espagne et les Philippines. De plus, pour un temps, le monarque espagnol est roi du Portugal. Il est donc le souverain le plus puissant de la Chrétienté, portant d’ailleurs le titre prestigieux de « roi catholique » que lui a décerné le pape. Cependant, tous ces titres et possessions sont trompeurs. Dès le milieu du siècle suivant, la puissance du roi d’Espagne s’efface au profit de celle du roi de France.

Les successeurs de Charles Quint et de Felipe II ne se montrent pas à la hauteur de leur rang. Felipe III et Felipe IV laissent la conduite des affaires entre les mains de favoris incapables et cupides. Felipe IV peut cependant compter sur Gaspar de Guzman, qui a la stature d’un Richelieu en France. Jusqu’à sa disgrâce en 1643, Gaspar de Guzman vide les trésors de la Couronne pour essayer de maintenir son roi au faîte de sa puissance. Les généraux et les amiraux doués ne manquent pas, mais l’armée espagnole souffre d’un relâchement général des moeurs. Le héros du XVIIe siècle espagnol n’est plus le Conquistador, soldat hardi et courageux, mais le Picaro, voleur, bandit et tricheur.

Aux faiblesses du gouvernement, il faut ajouter la pauvreté et la violence grandissante au sein des populations hispaniques. De plus, à la fin de la Guerre de Trente Ans, le roi d’Espagne doit affronter des révoltes à Naples et en Catalogne, de même que la sécession du Portugal. À l’opposé, après la paix de Westphalie, il accueille les rebelles de France, comme le prince de Condé.

À la mort de Felipe IV, en 1665, l’Espagne est affaiblie mais demeure une puissance avec laquelle il faut compter. Son empire américain fait encore rêver toutes les nations européennes, qui cherchent à contrôler le commerce des Indes Occidentales.
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